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13/12/2011 | FRANCE | N°10-28787

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 13 décembre 2011, 10-28787


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Montpellier, 26 octobre 2010), qu'en 1999, M. X... a cédé la totalité des parts composant le capital de la Société audoise de constructions métalliques appliqués (la Sacma) à M. Y... pour un prix de 642 000 francs, payable en 120 mensualités de 5 354 francs ; qu'il était stipulé qu'en cas de dépôt de bilan de la Sacma, le solde du prix ne serait plus dû ; que concomitamment, la société civile immobilière 6 T, ayant pour associés M. X... et ses enfants, p

ropriétaire des locaux d'exploitation du fonds, a consenti une réduction d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Montpellier, 26 octobre 2010), qu'en 1999, M. X... a cédé la totalité des parts composant le capital de la Société audoise de constructions métalliques appliqués (la Sacma) à M. Y... pour un prix de 642 000 francs, payable en 120 mensualités de 5 354 francs ; qu'il était stipulé qu'en cas de dépôt de bilan de la Sacma, le solde du prix ne serait plus dû ; que concomitamment, la société civile immobilière 6 T, ayant pour associés M. X... et ses enfants, propriétaire des locaux d'exploitation du fonds, a consenti une réduction du loyer ; que par acte du 21 août 2001, M. X... a assigné M. et Mme Y... et la Sacma en nullité de la vente des parts sociales pour absence de prix sérieux et recherché la responsabilité de la société Katar, expert-comptable qui l'assistait lors de cette cession, pour manquement à son obligation de conseil en le laissant vendre à un tel prix ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en nullité de la cession des parts pour absence de prix sérieux, alors, selon le moyen, qu'une vente à vil prix est nulle ; que le caractère dérisoire ou vil du prix de vente doit être apprécié en considération de l'économie générale du contrat, telle qu'elle résulte de l'ensemble des engagements souscrits par les parties ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si, outre la vileté du prix par rapport à la valeur nette du fonds et au chiffre d'affaires, constatée par quatre experts-comptables, les stipulations de l'acte de cession suivant lesquelles le prix de vente serait réglé par l'acquéreur en 120 mensualités de 5 354 francs sans le moindre intérêt ni garantie et celles de la convention du même jour suivant lesquelles en cas de cessation des paiements de la société Sacma le solde du prix de vente des parts restant à payer ne serait pas dû, étaient de nature à rendre dérisoire le prix de cession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1591 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que les quatre estimations faites par des experts-comptables mandatés par M. X... permettaient de considérer le prix payé comme non dérisoire, la cour d'appel a, par ce seul motif et sans avoir à faire d'autres recherches, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en dommages-intérêts dirigée contre la société Katar, alors, selon le moyen, que l'expert-comptable est tenu d'une obligation de conseil et de mise en garde envers son client, qui lui impose d'attirer l'attention de ce dernier en l'alertant sur toute opération désavantageuse pour lui ; qu'en se bornant à affirmer que M. X... avait été informé de la valeur des parts sociales et qu'il avait accepté de traiter à un prix inférieur, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la société Katar avait attiré l'attention de son client sur le fait que le prix stipulé était particulièrement désavantageux pour lui et sur le déséquilibre des conditions contractuelles tenant à la stipulation d'un crédit gratuit sur dix ans consenti à l'acquéreur par M. X..., à l'absence d'une quelconque garantie de paiement du prix, à la stipulation d'une clause dispensant l'acquéreur de payer la totalité du solde du prix en cas de procédure collective de la Sacma au cours de ces dix ans et sur la réduction non causée du loyer que la SCI familiale de M. X... devait percevoir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu que le prix était sérieux, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société Katar la somme de 1 500 euros et à M. et Mme Y... et à la Société audoise de constructions métalliques appliquées (Sacma) la somme globale de 1 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de monsieur X... en nullité de la cession des parts sociales de la société Sacma consentie à Monsieur Y... le 1er septembre 1999 et d'avoir dit que cette cession n'avait pas été réalisée à vil prix ;
AUX MOTIFS QU'une vente consentie à un prix vil est nulle, de nullité absolue car l'obligation de l'acheteur se trouve sans objet faute de prix et celle du vendeur, sans cause ; que le prix vil s'entend d'un prix dérisoire par rapport à la valeur effective du bien vendu ; qu'il convient de vérifier si le prix des parts sociales payé par monsieur Y... est ou non dérisoire ; que la vente des 500 parts représentant le capital de la Sacma est intervenue le 1er septembre 1999 pour la somme de 642.000 francs ; qu'afin de disposer des éléments chiffrés démontrant la vileté alléguée du prix de vente, monsieur X... a mandaté quatre experts-comptables qui ont investigué non contradictoirement ; que le premier, monsieur Z..., estime que la transaction aurait dû s'opérer dans la fourchette comprise entre 900.000 et 1.000.000 francs ; que le second, monsieur A..., fixe la valeur intrinsèque des parts à 866.606 francs ; que le troisième, monsieur B..., chiffre cette valeur à 1.100.000 francs ; que le quatrième, monsieur C..., considère que c'est à la valeur de base de 1.482.462 francs que la cession aurait dû être négociée ; qu'eu égard à ces quatre estimations effectuées par des professionnels du chiffre mandatés par monsieur X... lui-même, le prix de 642.000 francs n'est pas un prix dérisoire ; qu'en conséquence la demande en nullité de la cession pour vileté du prix sera rejetée ;
ALORS QU'une vente à vil prix est nulle ; que le caractère dérisoire ou vil du prix de vente doit être apprécié en considération de l'économie générale du contrat, telle qu'elle résulte de l'ensemble des engagements souscrits par les parties ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée (concl., p. 10 § 9 à 14), si, outre la vileté du prix par rapport à la valeur nette du fonds et au chiffre d'affaires, constatée par quatre experts-comptables, les stipulations de l'acte de cession suivant lesquelles le prix de vente serait réglé par l'acquéreur en 120 mensualités de 5.354 francs sans le moindre intérêt ni garantie et celles de la convention du même jour suivant lesquelles en cas de cessation des paiements de la société Sacma le solde du prix de vente des parts restant à payer ne serait pas dû, étaient de nature à rendre dérisoire le prix de cession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1591 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir jugé que la société d'expertise-comptable Katar n'avait pas manqué à son obligation de conseil et de loyauté envers monsieur X... et de l'avoir débouté de sa demande en réparation de ses préjudices moral et financier ;
AUX MOTIFS QUE monsieur X... reproche à la société Katar d'avoir manqué à son obligation de conseil en lui laissant vendre les parts sociales à un prix vil ; qu'il a été ci-dessus démontré que le prix de cession des parts sociales n'était pas vil ; que monsieur D... de la société Katar a remis à monsieur X... une note manuscrite où il écrivait : « … si on estime la valeur du fonds (clientèle plus matériel) à 1.000.000 francs, les parts de la société au 31 décembre 1998 peuvent être évaluées à 1.200.000 francs… » ; que le 13 juillet 1999, monsieur D... écrivait à monsieur Y... « suite à notre entrevue du 10 juillet 1999, en présence de monsieur X... et de deux de ses enfants (Claire et Christophe) nous vous confirmons que la reprise de la SARL Sacma pourrait être négociée sur les bases suivantes : 1) cession des parts : achat de 100 % des parts à effet du 1er septembre 1999 pour un prix global et forfaitaire de 750.000 francs. Votre apport consisterait au seul paiement des impôts et frais juridiques liés à cette cession (60.000 à 65.000 francs), monsieur X... vous consentirait un crédit personnel d'une durée de 7 à 10 ans, sans intérêts pendant les 5 premières années, et, ensuite un intérêt basé sur le taux de base bancaire + 1 %. Monsieur X... dispose dans sa société, d'un compte courant d'associé, qui devra être débloqué au plus tard en septembre 2000, afin de lui permettre de faire face au paiement de la plus-value qui lui incombe… Cette proposition est faite avec l'agrément de monsieur X... et de sa famille et sera réalisée sur la base des comptes arrêtés au 30 juin et au 31 juillet sur lesquels nous engageons notre responsabilité… » ; qu'il ressort de cette note manuscrite et de cette correspondance que monsieur X..., dûment informé de la valeur sociale et entouré de deux membres de sa famille, a accepté de traiter à un prix inférieur ; qu'il ne saurait donc reprocher à la société Katar un quelconque manquement à son obligation de conseil ; que ses demandes en condamnation de la société Katar à lui verser la somme de 30.000 euros au titre du préjudice moral et la somme de 67.880 euros au titre du préjudice financier seront rejetées ;
ALORS QUE l'expert-comptable est tenu d'une obligation de conseil et de mise en garde envers son client, qui lui impose d'attirer l'attention de ce dernier en l'alertant sur toute opération désavantageuse pour lui ; qu'en se bornant à affirmer que monsieur X... avait été informé de la valeur des parts sociales et qu'il avait accepté de traiter à un prix inférieur, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée (concl., p. 18 à 20), si la société Katar avait attiré l'attention de son client sur le fait que le prix stipulé était particulièrement désavantageux pour lui et sur le déséquilibre des conditions contractuelles tenant à la stipulation d'un crédit gratuit sur dix ans consenti à l'acquéreur par monsieur X..., à l'absence d'une quelconque garantie de paiement du prix, à la stipulation d'une clause dispensant l'acquéreur de payer la totalité du solde du prix en cas de procédure collective de la société Sacma au cours de ces dix ans et sur la réduction non causée du loyer que la SCI familiale de monsieur X... devait percevoir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-28787
Date de la décision : 13/12/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 26 octobre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 13 déc. 2011, pourvoi n°10-28787


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.28787
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