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29/11/2011 | FRANCE | N°11-14460

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 novembre 2011, 11-14460


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 7 décembre 2010), que le juge des libertés et de la détention d'un tribunal de grande instance a autorisé des agents de l'administration des impôts à effectuer des visites et saisies de documents, notamment dans les locaux et dépendances sis... à Paris, susceptibles d'être occupés par M. Alain X... et le syndicat libéral des cliniques spécialisées en chirurgie plastique et esthétique

et M. Richard X..., et Mme C... épouse X... et M. Bernard X... et Mme ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 7 décembre 2010), que le juge des libertés et de la détention d'un tribunal de grande instance a autorisé des agents de l'administration des impôts à effectuer des visites et saisies de documents, notamment dans les locaux et dépendances sis... à Paris, susceptibles d'être occupés par M. Alain X... et le syndicat libéral des cliniques spécialisées en chirurgie plastique et esthétique et M. Richard X..., et Mme C... épouse X... et M. Bernard X... et Mme Y... épouse X... et Mme Z..., en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de la Clinique Matignon et de M. Alain X... au titre de l'impôt sur les sociétés, de l'impôt sur le revenu et de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Attendu que la société Clinique Matignon, Mme A... et M. Alain X..., font grief à l'ordonnance d'avoir rejeté leurs demandes tendant à voir annuler les opérations de saisie du 27 mai 2010 au... à Paris, alors selon le moyen :
1°/ qu'interdiction est faite au juge de dénaturer les écrits ; que le document manuscrit de quelques feuillets saisi par les agents de l'Administration fiscale le 27 mai 2010 au... à Paris, émanant de M. Alain X... est adressé à son fils Olivier, et contient mention de dispositions patrimoniales à son attention, dont la donation qui lui a été faite avec réserve d'usufruit des parts détenues par son père M. Alain X... dans la société Fontaine invest, ainsi que d'instructions relatives à la vente d'un terrain et une société civile immobilière ; qu'en jugeant qu'un tel document n'était pas personnel, lorsqu'il contenait des instructions et dispositions patrimoniales d'un père à son fils, la cour d'appel a dénaturé ledit document en violation du principe susvisé ;
2°/ que chacun a droit au respect de sa vie privée et de ses correspondances auquel ne peuvent être apportées que des atteintes strictement nécessaires et proportionnées au but légitime poursuivi ; qu'il résulte de l'ordonnance rendue par le premier président du tribunal de grande instance de Paris le 26 mai 2010 et des propres constatations de l'ordonnance attaquée, que la visite domiciliaire au... à Paris 16 ème où résidait M. Alain X... avait été autorisée en raison de la présomption de fraude pesant sur ce dernier de ne pas déclarer les revenus d'une activité libérale de médecin et/ ou chirurgien dans le domaine de la médecine esthétique, ainsi que de la présomption de fraude pesant sur la Clinique Matignon de minorer le chiffre d'affaires lié à son activité en s'abstenant de déclarer toutes les opérations liées à l'achat et/ ou à la revente de marchandises et de produits pharmaceutiques ; que seuls des documents susceptibles d'éclairer l'administration fiscale sur de tels agissements étaient par conséquent susceptibles d'être saisis ; qu'en jugeant qu'une correspondance émanant de M. Alain X... à l'attention de son fils Olivier, lequel n'était en rien concerné par les présomptions de fraude susvisées, l'informant de la donation avec réserve d'usufruit qui lui était faite des parts sociales détenues par Alain X... dans la société Fontaine invest, et des instructions relatives à la vente d'un terrain, étaient en lien avec les agissements susvisés, au seul motif que la société Fontaine invest détenait 25 % des parts de la Clinique Matignon et qu'il était fait état de la vente d'un terrain et de l'ouverture d'un compte en Suisse, la cour d'appel qui n'a pas caractérisé le lien existant entre ce document personnel et les présomptions de fraude susvisées, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales et de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu, d'une part, que le premier président n'a pas dit que le document saisi ne présentait pas un caractère personnel ;
Et attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que ce document concernait pour partie la société Fontaine invest, qui est associée de la clinique Matignon, et qu'il faisait état de la vente d'un terrain et de l'ouverture d'un compte en Suisse, le premier président a ainsi caractérisé le lien existant entre la pièce saisie, relative à l'étendue du patrimoine de son auteur, et la présomption de fraude fondée sur une absence de déclaration de certains revenus ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé en sa seconde branche ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Clinique Matignon, Mme A... et M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer au directeur général des finances publiques la somme globale de 2 500 euros et rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Clinique Matignon, Mme A... et M. X....

IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'AVOIR rejeté les demandes des exposants tendant à voir annuler les opérations de saisie du 27 mai 2010 au ... à Paris

AUX MOTIFS QUE « La SARL CLINIQUE MATIGNON immatriculée en juin 1997 sous le numéro SIRET 412 352 866, ayant son siège au 5 avenue Matignon 75008 PARIS a pour activité : création, gestion de cliniques d'esthétique, de centre anti-âge et de lutte contre le vieillissement ; achat, vente, location de cliniques.
Elle est gérée depuis le 4 Août 2006 par Mme Arlette A... qui a pris la suite de Mr Alain X....
Elle a pour associés Mme Arlette A... à hauteur de 75 % et la SARL FONTAINE INVESTISSEMENT ou LA FONTAINE INVEST à hauteur de 25 %, société sise 87 boulevard de la République 78400 CHATOU gérée par Mr Alain X....
La SARL CLINIQUE MATIGNON a déclaré pour les exercices clos les 31 décembre 2007 et 31 décembre 2008, des chiffres d'affaires nets et correspondant à une production vendue de Services s'élevant respectivement à 2455568 euros et 2648633 euros et pour l'exercice clos le 31 décembre 2008 un résultat fiscal déficitaire de 283608 euros.
La SARL CLINIQUE MATIGNON du fait de son activité de clinique chirurgicale n'est pas soumise à la TVA et a souscrit pour les années 2008 et 2009 des déclarations de taxe sur les salaires faisant état de bases s'élevant respectivement à 190670 euros et 195 280 euros.
La SARL CLINIQUE MATIGNON dispose en France de trois établissements sis pour l'un à l'adresse de son siège social et spécialisé en chirurgie esthétique et pour les deux autres au 8 rue Royale PARIS 75008 spécialisé en médecine esthétique et au16 et/ ou 18 avenue Georges V PARIS 75008 spécialisé en médecine esthétique et médecine anti-âge.
Elle dispose d'équipes médicales composées de 20 praticiens répartis sur les trois sites de la société et qui ne sont pas salariés, à l'exception du Docteur Alain X... référencé sur le site " MATIGNON " et du Docteur James B... référencé sur le site " GEORGE V " déclarés respectivement en qualité de " chirurgien " et de " médecin ".
La DRASS d'Ile de France service de l'Inspection de la Pharmacie a conduit une procédure de contrôle au sein de la Clinique MATIGNON au 5 avenue Matignon 75008 PARIS du 26 mars 2009 au 3 juillet 2009, date à laquelle il a été établi un rapport d'enquête.
La SARL CLINIQUE MATIGNON avait déjà au cours de l'année 2003 fait l'objet d'une précédente inspection menée par la DRASS d'Ile de France service de l'inspection régionale de la pharmacie, relative aux conditions d'approvisionnement de délivrance et de cession de la toxine botulique.
Les conclusions de cette première enquête avaient mis en évidence, d'une part l'utilisation de quantités importantes d'une toxine botulique dénommée BOTOX sans qu'il puisse être justifié que leur commande et leur administration étaient faites conformément à la réglementation, d'autre part l'absence de justification des conditions d'acquisition et de cession des médicaments utilisés dans l'établissement, en contradiction avec les dispositions du Code de la santé publique.
La nouvelle enquête diligentée en 2009 a été restreinte aux conditions d'approvisionnement, de délivrance et de cession de médicaments à base de toxine botulique, dénommés BOTOX, DYSPORT et VISTABEL.
Les inspecteurs pharmaciens ont procédé à une étude des achats et du chiffre d'affaires généré par les trois spécialités botuliques sus visées à partir des factures fournisseurs et clients du 1 er janvier au 26 mars 2009 et des factures fournisseurs pour l'année 2008.
La clinique MATIGNON a produit les factures d'achat de toxine botulique pour la période 2009, a déclaré que les documents relatifs à 2008 avaient été archivés et n'a pas présenté ces derniers malgré la requête des pharmaciens inspecteurs.
Les quantités commandées en toxine botulique pour l'année 2008 par la clinique MATIGNON ont été dès lors communiquées par les laboratoires pharmaceutiques fournisseurs, les factures d'achats faisant état d'un montant global d'acquisitions pour ces trois spécialités de 1 395 225 euros représentant 475 flacons de VIST ABEL (dont 205 gratuits), 2 215 flacons de BOTOX (dont 15 gratuits) et 4 576 flacons de DYSPORT (dont 216 gratuits).
Pour la période du 1er janvier au 26 mars 2009, la clinique MATIGNON a déclaré que la toxine botulique acquise était délivrée soit au Docteur X... soit à des médecins ou chirurgiens au nombre de 92 lesquels, à l'exception de Docteur X..., établissaient des ordonnances mentionnant le nombre et/ ou le nom des patients auxquels sera injectée la toxine botulique.
Sur cette même période, le pharmacien de la clinique MATIGNON a indiqué ne pas détenir d'ordonnance établie par Mr X..., seuls des classeurs regroupant les dossiers médicaux des patients traités par lui avec de la toxine botulique et comportant les vignettes des médicaments ainsi utilisés ayant été présentés au service de la DRASS.
Pour la revente de la toxine aux autres praticiens, des factures à l'entête de la clinique MATIGNON établies au nom du praticien, ont été présentées aux inspecteurs, aucune d'entre elles n'étant établies au nom du Docteur X....
Il a par ailleurs été constaté que le prix de revente par la clinique MATIGNON des produits aux praticiens variait selon les ordonnances et factures présentées aux inspecteurs de la DRASS, de 155 euros l'unité pour le VISTABEL, à 220 euros pour le BOTOX et à 300 euros pour le DYSPORT, que le total des ventes reconstituées par les inspecteurs de la pharmacie de la DRASS à partir des prix de revente pratiqués s'élevait pour l'année 2008 à 1 933 725 euros et que la marge ainsi dégagée entre ces reventes et les achats effectués au prix de 1 395225 euros s'élevait à 538500 euros pour l'année 2008 pour ces trois spécialités.
Par ailleurs, il a également été constaté que le chiffre d'affaires net de la clinique MATIGNON était constitué pour les exercices clos les 31 décembre 2007 et 2008 exclusivement de " production vendue de services " et non de " production de biens " et que le rapprochement du total des ventes des trois spécialités pharmaceutiques de toxines botuliques pour 1 933725 euros, rapporté au chiffre d'affaires de la société pour l'exercice clos au décembre 2008 soit 2 648 633 euros ne pouvait correspondre à une proportion de ce chiffre d'affaires de 73 % alors même que l'activité principale de la clinique est la location de plateaux préparatoires.
Il en a été conclu que ces constatations permettaient de présumer que le chiffre d'affaires occasionné par la revente de la toxine botulique ne pouvait être inclus en totalité dans chiffre d'affaires déclaré par la clinique MATIGNON ;
Ces éléments ainsi que le rapprochement entre d'une part le site Internet de la clinique MATIGNON qui fait ressortir que celle-ci propose à ses clients diverses chirurgies ou traitements de médecine esthétique qui nécessite l'utilisation de marchandises ou spécialités pharmaceutiques (anesthésiques, dispositifs médicaux stériles, prothèses mammaires, produits de comblement, acides) et d'autre part l'absence d'inscription au compte de résultats de la liasse fiscale pour l'année 2008 souscrite par la clinique, d'achats de marchandises comme d'achat de matières premières et autres approvisionnements, ainsi que de toute variation de stock, ont fait craindre à l'administration fiscale, que les opérations liées à l'achat comme à la revente de produits pharmaceutiques ne soient pas correctement inscrites dans les comptes des déclarations fiscales souscrites et dès lors que la société MATIGNON ne déclarerait pas tout le chiffre d'affaires correspondant à son activité.
Par ailleurs, Mr X... né le 12 mai 1930, gérant de la clinique MATIGNON avant 2006, a selon les déclarations qu'il a souscrites au titre de l'impôt sur le revenu des années 2007 et 2008, des revenus d'activité qui sont constitués de salaires versés par la clinique MATIGNON et qui s'élèvent à 2952 euros pour 2007 et 2428 euros pour 2008.
Selon le rapport de la DRASS, il a été établi que sur la période étudiée du 1 er janvier 2009 au 26 mars 2009 sur un total de 1092 flacons de toxine botulique de type DYSPORT rentrés à la clinique MATIGNON, 624 flacons étaient utilisés par le Docteur X... (le surplus étant cédé à d'autres médecins), ce dernier ayant d'ailleurs déclaré aux inspecteurs le 27 avri12009 que sa consommation avoisinait près de 200 flacons par mois et qu'il traitait de l'ordre d'une centaine de personnes par mois.
Selon le site de la clinique MATIGNON, il est présenté comme étant spécialiste chirurgien du cheveu et spécialiste en micro-greffe et technique FUE, consultant à la clinique Matignon et recevant tous les jours.
Enfin, il est apparu que Mr X... n'était pas recensé à la CPAM de PARIS comme professionnel de santé en activité libérale, qu'il ne déclare aucun revenu non commercial qui serait issu de ladite activité et qu'il n'était pas connu ni répertorié auprès des services des impôts des entreprises compétents pour les trois adresses correspondant aux lieux d'implantation des établissements de la clinique MATIGNON, où il pourrait exercer son activité, 5 avenue Matignon 75008 Paris, 8 rue Royale 75008 Paris et 16 avenue Georges V 75008 Paris.
Toutes ces constatations ont permis à l'administration fiscale de supposer que Mr Alain X... exercerait une activité libérale de médecin et/ ou chirurgien dans le domaine de la médecine esthétique et qu'il ne déclarerait pas les revenus de ladite activité non commerciale.
Par ordonnance en date du 26 mai 2010, des agents de l'administration des impôts ont été autorisés, à leur demande, à procéder à des opérations de visite domiciliaires à l'encontre de la SARL CLINIQUE MATIGNON et de Mr Alain X..., présumés :
- la première, minorer le chiffre d'affaires lié à son activité en s'abstenant de déclarer toutes les opérations liées à l'achat et ou à la revente de marchandises et de produits pharmaceutiques et ainsi omettre de passer les écritures comptables correspondantes,- le second, ne pas déclarer les revenus d'une activité libérale de médecin et/ ou chirurgien dans le domaine de la médecine esthétique, et ainsi omettre également de passer les écritures comptables correspondantes, ceux-ci s'étant ainsi probablement soustraits à l'établissement et au paiement de l'impôt sur les sociétés, de la TVA et de l'impôt sur le revenu.

Cette ordonnance a autorisé la visite des locaux et dépendances sis à Paris :
-... (75008), susceptibles d'être occupés par la SARL CLINIQUE MATIGNON et/ ou Mr Alain X...,-... (75008), susceptibles d'être occupés par la SARL CLINIQUE MATIGNON et/ ou Mr Alain X...,-... (75008), susceptibles d'être occupés par la SARL CLINIQUE MATIGNON et/ ou Mr Alain X...,-... (75116), susceptibles d'être occupés par Mme Arlette A... et/ ou Mr Alain X... et/ ou la SCI ll bis square de l'avenue Foch,-... (75016), susceptibles d'être occupés par Mr Alain X... et ou le Syndicat Libéral des Cliniques spécialisées en Chirurgie Plastique et Esthétiques et/ ou Mr Richard X... et/ ou Mme C... Liliane épouse X... et/ ou Mr Bernard X... et/ ou Mme Laurette Y... épouse X... et/ ou Mme Z... »

ET QUE « Sur le déroulement de la procédure de perquisition au ... à Paris : Considérant qu'il convient de noter en préalable, que le recours ne concerne que les opérations menées au ... à Paris ;
Considérant concernant celles-ci que les appelants exposent d'une part que la réalité du déroulement des opérations est imparfaitement retranscrite dans le procès-verbal et contestent d'autre part le caractère saisissable d'un document manuscrit de cinq pages qui serait selon eux, un testament qu'aurait rédigé Mr X... et qui contenait des instructions post mortem à son fils ;
l) Sur le déroulement des opérations de saisies :
Considérant que les appelants après avoir rappelé que Mr X... avait 80 ans au moment des faits soutiennent qu'il s'est produit un incident très grave au cours de la perquisition qui est insuffisamment rappelé dans le procès-verbal de visite et de saisie qui indique en page 3 :
" A 10h50 minutes, Mr Alain X... se représente dans son appartement sis au ... 75016 Paris, nous l'invitons à prendre connaissance des documents saisis relatifs à la fraude présumé.
A 10h55 minutes, Mr Alain X... commence à prendre connaissance des documents saisis, rapidement il découvre un papier manuscrit de quelques feuillets adressé à son fils Olivier X.... Mr Alain X... nous indique que ce document est un testament destiné à son fils. Il nous indique que ce document était sous enveloppe, qu'il est personnel et ne concerne pas la fraude présumée.
A 1lh05 minutes nous lui indiquons que ces documents font référence à la Clinique MA TIGNON. Immédiatement, il déchire ces documents.
A 11h10 minutes, Mr Alain X... quitte l'appartement. Nous Patrick H..., Aurélien I... inspecteurs des Impôts assistés de Pierre-Jean J..., Contrôleur principal des Impôts n'avons pu récupérer qu'une partie de ces documents, Mr Alain X... ayant quitté les lieux en apportant (emportant ?) une partie des documents déchirés. "
Qu'ils indiquent que la réalité, qui n'est pas retranscrite dans le procès-verbal et qui leur a été rapportée par le témoin Mme Z..., est " qu'il y a eu bagarre et que les fonctionnaires ont empoigné Mr X... pour lui arracher les documents " et que celle-ci a dû s'interposer en rappelant à tous que Mr X... avait 80 ans et que toute violence à son égard pouvait être grave.
Qu'ils indiquent que Mr X... a quitté les lieux précipitamment et que dans les heures qui ont suivi, il a fait l'objet d'une crise cardiaque qu'il a été hospitalisé en catastrophe à l'hôpital Lariboisière à Paris et qu'il est actuellement en séjour longue durée à l'hôpital Fernand Vidal à Paris.
Qu'ils ajoutent également qu'en dernière page du procès verbal il est mentionné " Mme Z... nous ayant indiqué qu'elle ne savait pas lire le français, mais qu'elle le comprenait, le présent procès-verbal lui a été lu dans sa totalité " et qu " il y a sans doute là l'explication pour laquelle les faits graves exposés plus haut sont aussi imparfaitement retranscrits dans le procès-verbal. "
Mais considérant que les appelants ne reprennent que la page 3 du procès-verbal alors qu'en page 2, il est indiqué que :
- les trois agents se sont présentés à 7 heures 20 au 39-41 rue Reynouard, et qu'ils ont été reçus par Mr Alain X... qui a déclaré occuper seul l'intégralité des locaux avec Mme Z... ;
- ils étaient accompagnés de Mr K... représentant le Conseil de l'ordre médecins de Paris et de Mr L..., OPJ et qu'il a été exposé les motifs de la venue ;
- à 7h50, il a été procédé à la visite des locaux ;
- à 8h 45 Mr Alain X... les informe de son départ suite à des rendez-vous liés à son activité professionnelle, leur indique alors désigner Mme Z... pour le représenter durant leurs opérations, et qu'invité à leur faire connaître ses observations éventuelles quant aux modalités de l'intervention et au déroulement de la procédure jusqu'alors, Mr Alain X... a déclaré n'avoir aucune remarque à formuler et a signé la dite page 2 après lecture ;
Que de plus, en fin de page 3, il est indiqué qu'à 11h20 soit dix minutes après le départ de Mr X..., les trois agents toujours accompagnés du représentant de l'Ordre des médecins et de l'officier de police judiciaire et en présence constante de Mme Z... ont suspendu leurs opérations de visite et de saisie pour informer le magistrat Mr M... de l'incident et que celui-ci leur a demandé de le mentionner dans le procèsverbal, ce qui a été fait ;
Qu'enfin, il est ajouté en pages 6 et 7 du procès-verbal après exposé des documents saisis, que le représentant du conseil de l'ordre des médecins n'a pas formulé d'observation, ni Mme Z... qui a reconnu que les lieux visités avaient été laissés dans un état identique à celui constaté en début d'intervention, étant précisé que la concernant dans la mesure où elle a indiqué qu'elle ne savait pas lire le français mais qu'elle le comprenait, le procès verbal lui a été lu dans sa totalité ainsi qu'il est mentionné ;
Qu'il résulte de ces éléments que :
- Mme Z... n'est pas intervenue comme témoin ainsi que l'indiquent les appelants mais comme occupante des lieux et qu'elle a été désignée par Mr X... pour le représenter après son départ parce qu'il devait estimer que sa connaissance du français était suffisante,
- le juge a immédiatement été informé de l'incident qui à sa demande a été mentionné au procès-verbal,
- aucun élément ne vient corroborer l'allégation des appelants selon lesquels il y a eu bagarre alors que le procès-verbal a été signé par le représentant du conseil de l'ordre des médecins et de Mme Z... qui n'ont pas fait d'observation et contresigné par l'officier de police judiciaire qui l'a ainsi authentifié (Cass. com 4 mai 2010 pourvoi n° 09-15537) ; Qu'il ne saurait donc être soutenu que le procès-verbal ne retranscrirait pas la réalité du déroulement des opérations ;
2) Sur le caractère saisissable de la pièce compostée sous les numéros 045001 à 045005 :
Considérant que les appelants exposent qu'il s'agissait d'un testament rédigé par Mr Alain X... et d'instructions post mortem à son fils ;
Mais considérant :
- qu'il n'est pas établi qu'il s'agisse d'un testament puisque les pièces 045002 et 045004 font référence au dossier FONTAINE INVEST,
- et qu'en tout état de cause ces documents à supposer qu'ils soient personnels, ne sont pas sans rapport avec la présomption de fraude relevée puisque d'une part la Société FONTAINE INVEST est associée de la clinique MATIGNON et que d'autre part la pièce 045003 fait état de la vente d'un terrain et de l'ouverture d'un compte en Suisse.
Que l'autorisation de saisie concernait tous documents pouvant être en rapport avec les présomptions qui concernaient la Sarl Clinique MATIGNON et Mr X... ;
Que la demande de nullité de l'ordonnance du 26 mai 2010 du Juge des libertés et de la détention du Tribunal de Grande Instance de Paris ainsi que de la perquisition opérée au ... à PARIS doit être rejetée »
1. ALORS QU'interdiction est faite au juge de dénaturer les écrits ; que le document manuscrit de quelques feuillets saisi par les agents de l'Administration fiscale le 27 mai 2010 au... à Paris, émanant de Monsieur Alain X... est adressé à son fils Olivier, et contient mention de dispositions patrimoniales à son attention, dont la donation qui lui a été faite avec réserve d'usufruit des parts détenues par son père Monsieur Alain X... dans la société FONTAINE INVEST, ainsi que d'instructions relatives à la vente d'un terrain et une société civile immobilière ; qu'en jugeant qu'un tel document n'était pas personnel, lorsqu'il contenait des instructions et dispositions patrimoniales d'un père à son fils, la Cour d'appel a dénaturé ledit document en violation du principe susvisé ;
2. ALORS QUE chacun a droit au respect de sa vie privée et de ses correspondances auquel ne peuvent être apportées que des atteintes strictement nécessaires et proportionnées au but légitime poursuivi ; qu'il résulte de l'ordonnance rendue par le Premier Président du Tribunal de grande instance de Paris le 26 mai 2010 et des propres constatations de l'ordonnance attaquée, que la visite domiciliaire au... à Paris 16 ème où résidait Monsieur Alain X... avait été autorisée en raison de la présomption de fraude pesant sur ce dernier de ne pas déclarer les revenus d'une activité libérale de médecin et/ ou chirurgien dans le domaine de la médecine esthétique, ainsi que de la présomption de fraude pesant sur la Clinique MATIGNON de minorer le chiffre d'affaires lié à son activité en s'abstenant de déclarer toutes les opérations liées à l'achat et/ ou à la revente de marchandises et de produits pharmaceutiques ; que seuls des documents susceptibles d'éclairer l'administration fiscale sur de tels agissements étaient par conséquent susceptibles d'être saisis ; qu'en jugeant qu'une correspondance émanant de Monsieur Alain X... à l'attention de son fils Olivier, lequel n'était en rien concerné par les présomptions de fraude susvisées, l'informant de la donation avec réserve d'usufruit qui lui était faite des parts sociales détenues par Alain X... dans la société FONTAINE INVEST, et des instructions relatives à la vente d'un terrain, étaient en lien avec les agissements susvisés, au seul motif que la société FONTAINE INVEST détenait 25 % des parts de la clinique Matignon et qu'il était fait état de la vente d'un terrain et de l'ouverture d'un compte en Suisse, la Cour d'appel qui n'a pas caractérisé le lien existant entre ce document personnel et les présomptions de fraude susvisées, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 16 B du Livre des Procédures Fiscales et de l'article 8 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-14460
Date de la décision : 29/11/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 07 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 nov. 2011, pourvoi n°11-14460


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:11.14460
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