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22/11/2011 | FRANCE | N°10-26758

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 22 novembre 2011, 10-26758


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1719 du code civil ;
Attendu que le bailleur est obligé par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;
Attendu selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 22 septembre 2010) qu'à la suite d'un incendie survenu dans les locaux donnés à bail à la société Couleur Terre par la commune de Montazels, la société Chapeaux de France, locataire de locaux voisins qui lui

avaient été donnés à bail par la même commune et que l'incendie avait partie...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Vu l'article 1719 du code civil ;
Attendu que le bailleur est obligé par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;
Attendu selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 22 septembre 2010) qu'à la suite d'un incendie survenu dans les locaux donnés à bail à la société Couleur Terre par la commune de Montazels, la société Chapeaux de France, locataire de locaux voisins qui lui avaient été donnés à bail par la même commune et que l'incendie avait partiellement détruits ainsi que le stock qui lui avait été confié par la société La Chausseria, a assigné la commune de Montazels et son assureur la société Allianz venant aux droits de la compagnie AGF, en réparation de son préjudice ;
Attendu que pour débouter la société Chapeaux de France de ses demandes, l'arrêt retient que l'incendie trouve son origine, selon les conclusions non discutées de l'expert, dans la manipulation imprudente par le gérant de la société Couleur Terre de produits inflammables, qu'en application de l'article 1733 du code civil cette société est présumée responsable des dommages survenus dans les locaux voisins, et qu'à défaut de preuve de l'une des causes exonératoires prévues par ce texte, la responsabilité de l'incendie ne peut peser que sur le preneur du local dans lequel l'incendie a pris naissance ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le bailleur est responsable envers le preneur des troubles de jouissance causés par les autres locataires et n'est exonéré de cette responsabilité qu'en cas de force majeure, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté la société Chapeaux de France de l'intégralité de ses prétentions, l'arrêt rendu le 22 septembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la commune de Montazels et la société Allianz IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la commune de Montazels et la société Allianz IARD à payer à la société Chapeaux de France la somme globale de 2 500 euros, rejette les demandes de la commune de Montazels et de la société Allianz IARD ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils pour la société Chapeaux de France
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la SA CHAPEAUX DE FRANCE de l'intégralité de ses prétentions, soit tant ses demandes tendant à voir condamner in solidum la Mairie de MONTAZELS et ses assureurs à la relever et garantir de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre que des demandes tendant à voir condamner la mairie de MONTAZELS des sommes de 150.102 euros pour le préjudice non indemnisé par l'assurance et 300.000 euros en réparation de la perte partielle de son fonds de commerce (préjudice économique);
AUX MOTIFS QU'il est avéré que l'incendie trouve son origine dans la manipulation par le gérant de la SARL COULEUR TERRE de produits inflammables (précisément un chauffage au-dessus d'un appareil à flammes nues d'un liquide inflammable, essence de térébenthine, dégageant à basse température des vapeurs lourdes formant avec l'air, en très faible pourcentage un mélange inflammable), selon les conclusions non discutées de l'expert, lequel ajoute qu'il s'agit, de la part d'un professionnel (le gérant de la SARL COULEUR TERRE) d'une imprudence caractérisée ; qu'il apparaît donc que l'incendie est imputable à la seule responsabilité du locataire de la Commune de MONTAZELS, la SARL COULEUR TERRE ; que l'article 1733 du Code civil dispose qu'à l'égard du bailleur, le locataire est présumé responsable en cas d'incendie à moins qu'il ne prouve que l'incendie est arrivé par cas fortuit ou force majeure, ou vice de construction, ou que le feu a été communiqué par une maison voisine ; que le locataire responsable doit réparation non seulement des dommages survenus dans les locaux qui lui ont été donnés à bail mais également dans ceux, voisins, donnés à bail par le même propriétaire à un autre locataire ; que le preneur ne pourrait être exonéré de la responsabilité pesant sur lui qu'à la condition de rapporter la preuve directe et positive que l'incendie provient de l'une des causes énumérées dans l'article 1733 susvisé ; que d'éventuelles fautes du bailleur ne peuvent fonder une exonération du preneur que s'il est constaté qu'elles sont à l'origine de l'incendie ; qu'or comme rappelé ci-dessus, le seul fait générateur de l'incendie réside dans l'imprudence caractérisée du gérant de la société locataire ; que de surcroît aucune faute ne peut être reprochée au bailleur ; que c'est en effet vainement que la SA CHAPEAUX DE FRANCE soutient que la commune aurait commis une faute en laissant coexister une activité à risque et une chapellerie ; qu'il sera rappelé que l'activité de la SARL COULEUR TERRE consistait en la fabrication, application et vente d'enduits à la chaux décoratifs, activité qui n'est pas particulièrement dangereuse, pas plus notamment que celle de la SA CHAPEAUX DE FRANCE, laquelle procède au formage de chapeaux à la flamme nue avec arrivées de gaz ; qu'à défaut de cause exonératoire, la responsabilité de l'incendie ne peut peser que sur le preneur du local dans lequel l'incendie a pris naissance, la SARL COULEUR TERRE ; que les prétentions de la SA CHAPEAUX DE FRANCE en ce qu'elles visent la Commune de MONTAZELS et l'assureur de cette dernière ne peuvent en conséquence qu'être rejetées ;
1°) ALORS QUE le bailleur est obligé, par la nature du contrat et sans qu'il soit besoin d'aucune stipulation particulière, de faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ; qu'étant responsable des troubles causés par les autres locataires, il doit répondre des conséquences dommageables pour ses preneurs d'un incendie survenu chez un de ses locataires et ne peut s'exonérer de cette responsabilité qu'en cas de force majeure ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui avait relevé que l'incendie, qui avait pris naissance dans les locaux loués à la SARL Couleur Terre, s'était propagé dans les lieux loués par la SARL CHAPEAUX DE France et avait détruit le stock de chaussures confiés par la SA CHAUSSERIA, ne pouvait exonérer la commune bailleresse de sa responsabilité motif pris que celle-ci n'avait pas commis de faute ; qu'en statuant pourtant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 1147 et 1719 du code civil ;
2°) ALORS QUE le bailleur doit assurer la jouissance paisible des lieux au locataire ; que dans ses conclusions d'appel (signifiées le 10 février 2010), la société CHAPEAUX DE FRANCE avait expressément fait valoir que la commune de MONTAZELS, qui avait été indemnisée par son assureur, n'avait pas procédé aux travaux de remise en état lui incombant et avait ainsi mis la société locataire – à jour du paiement des loyers - dans l'impossibilité d'exploiter à nouveau son fonds de commerce ; que cette carence avait été à l'origine d'une perte de chiffre d'affaires sur cinq ans (300.000 euros) et d'un préjudice d'exploitation ; qu'en se bornant à relever l'absence de cause exonératoire tirée de la faute du bailleur sur le fondement de l'article 1733 du code civil sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si la bailleresse n'avait pas manqué à son obligation de jouissance paisible envers la société locataire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1719 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-26758
Date de la décision : 22/11/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 22 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 22 nov. 2011, pourvoi n°10-26758


Composition du Tribunal
Président : M. Terrier (président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Gadiou et Chevallier, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.26758
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