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15/11/2011 | FRANCE | N°11-80570

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 15 novembre 2011, 11-80570


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- La Fédération française d'athlétisme, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 8e chambre, en date du 7 décembre 2010, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de M. Silviu X...et de Mme Carmen Y..., épouse X...du chef, notamment, d'incitation à l'usage de substance ou procédé interdit aux sportifs ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris en ses deuxième

et troisième branches, tiré de la violation des articles 27- II et 27- III de la loi n° 99-223...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- La Fédération française d'athlétisme, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 8e chambre, en date du 7 décembre 2010, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de M. Silviu X...et de Mme Carmen Y..., épouse X...du chef, notamment, d'incitation à l'usage de substance ou procédé interdit aux sportifs ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris en ses deuxième et troisième branches, tiré de la violation des articles 27- II et 27- III de la loi n° 99-223 du 23 mars 1999 en vigueur à la date des faits devenus les articles L. 3631-1, L. 3631-2, L. 3631-3 du code de la santé publique, 121-3, 121-4 et 121-5 du code pénal, 1382 du code civil, 2, 3, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé M. et Mme X...des chefs d'incitation à l'usage d'une substance ou procédés interdits aux sportifs dans le cadre d'une compétition ou manifestation sportive, d'aide à l'utilisation de substance ou procédé interdit aux sportifs dans le cadre d'une compétition ou manifestation sportive, d'infraction aux règlements sur le commerce ou l'emploi de substances vénéneuses et débouté la partie civile de ses demandes ;

" aux motifs que, l'enquête a révélé de nombreux éléments suspects : des produits considérés comme dopants ont été découverts à divers endroits au domicile des intéressés, tels que un vieux réfrigérateur dans un débarras et dans les tiroirs d'un meuble ; que des écoutes téléphoniques établissent que Mme X...avait de réelles connaissances dans le domaine des substances dopantes, tant en ce qui concerne la manière de se les procurer que l'établissement des protocoles personnalisés à l'attention des sportifs ; que la découverte d'ordonnanciers appartenant à une amie médecin, Mme Z...dont les explications sont pour le moins peu convaincantes ; qu'elle aurait oublié ces documents, une cinquantaine, lors d'une visite chez Mme X...; que des fiches de bristol sur lesquelles sont reportés des prénoms et des protocoles médicamenteux des renseignements obtenus d'entraîneurs étrangers sont pour moins défavorables à leur égard ; sur tous ces points les explications des époux X...sont peu convaincantes ; que, cependant ils doivent être examinés en regard avec les moyens de droit soulevés par la défense ; que, tout d'abord en ce qui concerne les éléments constitutifs de l'infraction ; que l'article 27- II de la loi du 23 mars 1999, prohibe le fait " de céder, d'offrir, d'administrer ou d'appliquer à un sportif mentionné à l'article 17 une substance ou un procédé mentionné audit article, de faciliter son utilisation ou d'inciter de quelle que manière que ce soit, ce sportif à son usage " ; qu'il se déduit de ce texte que le sportif dont il est question est celui qui est visé par l'article 17 de la loi, c'est-à-dire une personne qui participe à des compétitions et manifestations sportives organisées ou agréées par des fédérations sportives, ou qui s'entraîne " en vue d'y participer " ; or, il apparaît que les seules compétitions auxquelles il est fait allusion dans la procédure, et qui seraient organisées ou agréées par les fédérations sportives françaises sont : les Olympiades et le Meeting de Saint-Denis ; qu'il n'est pas précisé les dates de celles-ci, ni les sportifs concernés, et encore moins quels produits auraient été pris ou incités à l'être en vue de participer à telles manifestations ou compétitions ; que si au cours de l'enquête plusieurs sportifs de haut niveau ont été entendus, tels que Mihaela B..., championne du monde de lancer de marteau et son entraîneur Teodoru A..., Ana Mirela C..., lanceuse de javelot et Ludmila D...coureuse de demi-fond, aucun n'a reconnu avoir eu recours aux produits dopants, et les résultats des prélèvements sanguins, urinaires et capillaires les concernant n'ont révélé la présence d'aucun produit ni aucune substance prohibés ; que seul un athlète, Christian E..., décathlonien, faisait des déclarations selon lesquelles Mme X...encourageait le recours aux substances dopantes, conseils dont il s'était privé ; qu'en outre les écoutes téléphoniques, si elles peuvent attirer l'attention sur les agissements éventuellement délictueux des époux X..., et surtout de Mme X..., restent imprécises et ne sont pas corroborées par des preuves matérielles suffisamment certaines pour entraîner une déclaration de culpabilité ; que la Fédération francaise d'athlétisme, partie civile, tant dans ses conclusions que lors de l'audition de son représentant, reste très évasive quant aux sportifs mis en cause et les épreuves, manifestations et compétitions concernées, déclarant que c'est postérieurement au déclenchement de cette affaire qu'est apparu un doute sur les agissements du couple X...; qu'il est rappelé encore que le ministère public avait requis, dans son réquisitoire définitif, un non-lieu de ce chef et l'a renouvelé à l'audience de première instance ; que la cour infirmera le jugement sur ce point en raison de l'existence d'un doute sur les éléments essentiels de l'infraction, sans qu'il soit nécessaire de se prononcer sur les autres moyens soulevés par la défense ; qu'en conséquence, la cour infirmera le jugement sur ce point en raison de l'existence d'un doute sur les éléments essentiels de l'infraction " ;

" 1) alors que, le juge correctionnel, qui n'est pas lié par la qualification donnée à la prévention, ne peut prononcer une décision de relaxe qu'autant qu'il a vérifié que les faits dont il est saisi ne sont constitutifs d'aucune infraction ; qu'il a le droit et le devoir de leur restituer leur véritable qualification à la condition de n'y rien ajouter ; que le délit d'incitation au dopage prévu par l'article 27- II de la loi n° 99-223 du 23 mars 1999 réprime l'infraction consommée mais également l'infraction tentée d'après l'article 27- III de la même loi ; que, pour relaxer les prévenus du chef d'incitation au dopage au bénéfice du doute, la cour d'appel a relevé que la perquisition au domicile des époux X...avait permis la découverte de très nombreux produits classés comme substances vénéneuses dopantes ainsi que la présence d'une cinquantaine d'ordonnanciers appartenant à une amie médecin et celle de fiches de bristol sur lesquelles étaient rapportés des prénoms et des protocoles médicamenteux à partir de renseignements obtenus d'entraîneurs étrangers ; que d'après les enregistrements téléphoniques, Mme X...avait de réelles connaissances sur les substances dopantes, la manière de se les procurer et la façon d'établir des protocoles personnalisés à l'attention des sportifs ; que l'un des athlètes décathloniens, M. E...avait déclaré que cet entraîneur encourageait le recours aux substances dopantes, d'où son refus de se faire entraîner par Mme X...et que lors de sa déposition Mme F...avait indiqué que Mme X...lui avait remis en dépannage une boîte présentée comme contenant des vitamines et des acides aminés mais qui, après analyse, s'était avérée contenir du Primobolan, stéroïde anabolisant, la cour d'appel qui n'a pas recherché si ces faits ne caractérisaient pas un commencement d'exécution des délits reprochés, n'a pas justifié légalement sa décision ;

" 2) alors que l'article 27- II de la loi n° 99-223 du 23 mars 1999 applicable au moment des faits réprimait notamment le fait de céder, d'offrir, d'administrer ou d'appliquer à un sportif mentionné à l'article 17 une substance ou un procédé mentionné audit article, de faciliter son utilisation ou d'inciter, de quelque manière que ce soit, ce sportif à leur usage ; que l'infraction est instantanée et se trouve caractérisée lorsque l'incitation vise même un seul sportif ; qu'en relaxant M. et Mme X...aux motifs que seul un athlète M. E...décathlonien faisait des déclarations selon lesquelles ces derniers l'avaient encouragé à avoir recours aux substances dopantes mais qu'il s'était privé de ces conseils, cependant que l'incitation au dopage d'un seul sportif suffisait à caractériser l'infraction, la cour d'appel a violé les dispositions précitées ;

" 3) alors encore que la contradiction équivaut à un défaut de motifs ; qu'en énonçant que les écoutes téléphoniques si elles pouvaient attirer l'attention sur les agissements éventuellement délictueux des époux X...et surtout de Mme X...restaient imprécis quant aux compétions et sportifs concernés, cependant que les écoutes téléphoniques relatées dans le jugement correctionnel et dont la teneur n'a pas été démentie en appel faisaient état notamment, pour la période 2000, d'incitations directes de la part de Mme X...à une sportive dénommée H...et à une autre dénommée I... à la prise de médicaments pouvant améliorer leur performances lors des épreuves sportives du meeting de Saint-Denis et de l'Olympiade, la cour d'appel qui a statué aux termes de motifs contradictoires a entaché sa décision d'un défaut de motifs ;

" 4) alors que la preuve est libre en matière pénale et que le juge doit examiner les éléments de preuve qui lui sont soumis ; qu'en rejetant, à titre d'offre de preuve de la culpabilité des prévenus les écoutes téléphoniques, aux motifs que si elles pouvaient attirer l'attention sur les agissements éventuellement délictueux des époux X...et surtout de Mme X...elles n'étaient pas corroborées par des preuves matérielles suffisamment certaines pour entrainer une déclaration de culpabilité, cependant que s'agissant d'un fait juridique la preuve étant libre ces écoutes se suffisaient à elles-mêmes et n'avaient pas à être corroborées par une preuve matérielle et qu'il appartenait seulement au juge correctionnel d'en examiner la portée, la cour d'appel a violé l'article 427 du code de procédure pénale " ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, et en répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, exposé les motifs pour lesquels elle a estimé que la preuve des infractions reprochées n'était pas rapportée à la charge du prévenu, en l'état des éléments soumis à son examen, et a ainsi justifié sa décision déboutant la partie civile de ses prétentions ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 5132-1, L. 5132-6, L. 5132-8 et L. 5432-1 du code de la santé publique, 121. 3, 121-4 et 121-5 du code, pénal, 1382 du code civil, 2, 3, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;

" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a relaxé M. et Mme X...du chef d'infraction aux règlements sur le commerce ou l'emploi de substances vénéneuses et débouté la partie civile de ses demandes ;

" aux motifs qu'il est établi par le docteur G...que les produits saisis au domicile des époux X...appartiennent à la liste I et II des substances vénéneuses visées par l'article L. 5132-1 et définie à l'article 5132-6 du code de la santé publique ; que les explications des prévenus à ce sujet sont toujours aussi peu convaincantes, affirmant principalement qu'ils en ignoraient la présence et qu'il s'agissait de produits oubliés par des sportifs ayant séjourné chez eux ; cependant, contrairement au régime applicable aux substances vénéneuses classées comme stupéfiants ou psychotropes, la simple détention n'est pas prohibée ; que c'est en fait la détention non conforme aux conditions posées par les décrets qui est sanctionnée ; or ces derniers textes s'appliquent aux professionnels de la santé, médecins, pharmaciens, établissements médicaux et laboratoires ; qu'ils ne trouvent pas à s'appliquer à de simples particuliers ; que cette lacune a été comblée, d'ailleurs, par l'article L. 232-10 de la loi du 3 juillet 2008 qui interdit à toute personne de détenir ou acquérir, aux fions d'usage par un sportif sans raison médicale dûment justifiée, une ou des substances ou procédés figurant sur la liste mentionnée au dernier alinéa de l'article L. 232-9 ; que c'est donc à tort que les premiers juges ont retenu la culpabilité des prévenus en motivant leur décision par le fait que si le texte règlementaire visait, effectivement les professionnels de santé, celui-ci n'autorisait pas pour autant le simple particulier à disposer de ces substances sans pouvoir en justifier ; que le jugement sera réformé sur ce second point et la relaxe des prévenus prononcée ;

" 1) alors que l'imputabilité des actes que réprime l'article L. 5432-1 du code de la santé publique n'est pas limitée aux pharmaciens diplômés ; qu'en énonçant, pour prononcer la relaxe de M. et Mme X...que les textes relatifs au substances vénéneuses du code de la santé publique s'appliquent aux professionnels de la santé, médecins, pharmaciens, établissements médicaux et laboratoires et non à de simples particuliers, cependant qu'elle relevait que des ordonnanciers avaient été retrouvés chez les époux X...et qu'il était question de prescription de produits dopants à des sportifs et que les consorts X...se comportaient comme des professionnels de santé sans pour autant en avoir la qualité, la cour d'appel a violé les articles visés au moyen ;

" 2) alors que la détention de plantes vénéneuses dans des conditions contraires aux dispositions réglementaires relatives aux conditions de détention et d'acquisition des plantes ou substances classées comme vénéneuses caractérise le délit de l'article L. 5132-8 du code de la santé publique ; qu'en estimant que la simple détention des produits saisis au domicile des époux X...en l'occurrence des substances vénéneuses appartenant à la liste I et II visée par l'article L. 5132-1 du code de la santé publique n'était pas prohibée, cependant que si les dispositions règlementaires auxquelles renvoie cet article visent les conditions dans lesquelles les professionnels peuvent être en possession de ces substances, la seule détention en grande quantité de telles substances par des personnes n'ayant pas qualité pour les détenir contrevient aux dispositions de l'article L. 5132-8 du code de la santé publique, ce d'autant plus que comme constaté dans l'arrêt la provenance de ces substances retrouvées en grande quantité chez les époux X...est demeurée inexpliquée, la cour d'appel a violé fausse application ledit article ;

" 3) alors qu'il appartient aux juges correctionnels d'examiner les faits dont ils sont saisis sous toutes les qualifications possibles ; qu'en relaxant les prévenus du chef d'infraction aux règlements sur le commerce ou l'emploi de substances vénéneuses tout en relevant qu'il était établi par le docteur G...que les produits saisis au domicile des époux X...appartiennent à la liste I et II des substances vénéneuses visées par l'article L. 5132-1 et définie à l'article 5132-6 du code de la santé publique et que les explications des prévenus à ce sujet sont toujours aussi peu convaincantes, affirmant principalement qu'ils en ignoraient la présence et qu'il s'agissait de produits oubliés par des sportifs ayant séjourné chez eux sans rechercher, comme elle y était pourtant tenue, si les faits ne pouvaient être autrement qualifiés, la cour d'appel a violé l'article 388 du code de procédure pénale " ;

Attendu qu'en relaxant les prévenus du chef d'infraction aux règlements sur le commerce ou l'emploi de substances vénéneuses, la cour d'appel a fait une exacte application de l'article L. 626 du code de la santé publique alors applicable, dès lors que ce délit, aujourd'hui réprimé par l'article L. 5432-1 nouveau de ce code, n'est imputable qu'aux professionnels de santé ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa seconde branche, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Roth conseiller rapporteur, M. Arnould conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Leprey ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 11-80570
Date de la décision : 15/11/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 07 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 15 nov. 2011, pourvoi n°11-80570


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Peignot, Garreau et Bauer-Violas, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:11.80570
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