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02/11/2011 | FRANCE | N°10-25518

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 novembre 2011, 10-25518


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société d'agences et de diffusion (la SAD), dépositaire de presse, a assuré la diffusion de la revue Ové magazine éditée par la société Mad éditions (la MAD), éditeur de presse, par l'intermédiaire d'une messagerie de presse, puis en rapports directs, selon un accord verbal de distribution ; qu'un litige étant apparu entre les parties, la SAD a rompu son contrat à réception du numéro 12 du magazine, dont elle n'a pas assuré la diffusion ; que s'estimant créan

cière d'impayés, la MAD a demandé sa condamnation à paiement ;
Sur le seco...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société d'agences et de diffusion (la SAD), dépositaire de presse, a assuré la diffusion de la revue Ové magazine éditée par la société Mad éditions (la MAD), éditeur de presse, par l'intermédiaire d'une messagerie de presse, puis en rapports directs, selon un accord verbal de distribution ; qu'un litige étant apparu entre les parties, la SAD a rompu son contrat à réception du numéro 12 du magazine, dont elle n'a pas assuré la diffusion ; que s'estimant créancière d'impayés, la MAD a demandé sa condamnation à paiement ;
Sur le second moyen :
Attendu que la SAD fait grief à l'arrêt d'avoir dit qu'elle avait résilié le contrat de manière abusive et fautive, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en l'absence de disposition légale particulière, toute partie à un contrat à durée indéterminée peut, sans avoir à motiver sa décision, mettre fin unilatéralement à celui-ci, sauf à engager sa responsabilité en cas d'abus ; qu'en affirmant que la SAD aurait dû justifier d'un motif valable de rupture des relations contractuelles, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que le jugement de première instance ayant retenu que la SAD ne prouvait pas que le délai de préavis d'usage était de 48 heures, celle-ci a produit, devant la cour d'appel, le contrat-type liant la société de messagerie de presse NMPP aux dépositaires qui stipulait un tel préavis à son article 3 et elle a soutenu que même si le contrat n'était pas, en tant que tel, applicable en l'espèce, la MAD n'ayant pas adhéré à une société coopérative de messagerie de presse, ce délai était d'usage en matière de distribution de la presse ; qu'en bornant à adopter le motif précité du jugement confirmé sans répondre à l'argumentation tirée du contrat-type produit devant elle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la SAD faisait valoir qu'il était convenu que la prise en charge provisoire du titre ne constituait qu'un test de sorte qu'il existait un accord tacite des parties sur une possible résiliation ;qu'en ne répondant pas à ce moyen de nature à influer sur l'appréciation de la durée du délai de préavis, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu qu'ayant relevé que les parties étaient liées par un accord direct de distribution ne relevant pas de la loi du 2 avril 1947 et retenu, par motifs adoptés, qu'en l'absence de contrat écrit, un préavis de trois mois, correspondant au caractère trimestriel du magazine, constituait un préavis raisonnable, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de répondre à une argumentation relative au caractère provisoire de la diffusion, qui n'était assortie d'aucune offre de preuves, a répondu, en les écartant, aux conclusions invoquant une durée de préavis définie par un contrat régi par la loi de 1947 ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant, par motifs adoptés, relevé que la SAD avait rompu le contrat cinq jours après avoir reçu le numéro 12 du magazine qui n'avait jamais été mis en vente et estimé qu'un préavis de trois mois aurait dû être respecté , la cour d'appel, qui a ainsi fait ressortir le caractère brutal de la rupture, a retenu à bon droit, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, que celle-ci était intervenue dans des conditions abusives ;
D'où il suit que le moyen, qui ne peut être accueilli en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le premier moyen, pris en ses première, troisième et sixième branches :
Attendu que ces branches ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 1134 du code civil ;
Attendu que pour condamner la SAD à payer à la MAD une certaine somme correspondant pour partie au règlement de sa part du prix des exemplaires du numéro 11 du magazine, invendus et non restitués à l'éditeur, l'arrêt relève que la SAD invoque leur destruction suivant une pratique habituelle en la matière dans les relations entre éditeur et coopérative de distribution, que tel n'est pas le cas en l'espèce et que la SAD devait donc, en raison de l'accord direct de distribution ne relevant pas de la loi de 1947, soit restituer les invendus contre remboursement, soit en payer le prix ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la destruction des exemplaires invendus n'était pas légitime au regard des usages régissant les relations directes de distribution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et sur le même moyen, pris en sa cinquième branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la SAD à payer à la MAD une certaine somme correspondant pour partie au règlement de sa part du prix des exemplaires du numéro 12 du magazine, dont il a constaté l'absence de diffusion à la suite de la rupture des relations contractuelles, l'arrêt relève que la SAD invoque leur destruction selon une pratique habituelle en la matière que la loi consacre lorsque les relations sont nouées entre un éditeur et une coopérative de distribution, que tel n'est pas le cas en l'espèce et que la SAD devait donc, en raison de l'accord direct de distribution ne relevant pas de la loi de 1947, soit restituer les invendus contre remboursement, soit en payer le prix ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, par référence aux règles de restitution des invendus, alors que celles-ci étaient sans application dès lors que le numéro 12 de la revue n'avait pas été proposé à la vente, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société d'agences et de diffusion à payer à la société Mad éditions la somme de 6 132,08 euros en solde de tout compte entre parties, l'arrêt rendu entre les parties le 3 août 2010 par la cour d'appel de Toulouse ; remet en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt , les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse autrement composée ;
Condamne la société Mad éditions aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société d'agences et de diffusion la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux novembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils, pour la Société d'agences et de diffusion
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir, par infirmation du jugement déféré, condamné la SAD à payer à la société MAD Editions, au titre de la distribution du titre OVE MAGAZINE, une somme de 6.132,08 € correspondant à trois factures des 27 décembre 2004 (ventes du n° 11 : 25,20 €) et 11 octobre 2006 (ventes du n° 11 : 4.142,76 € et ventes du n° 12 : 1.964,12 €) ;
AUX MOTIFS QUE s'il est vrai qu'au soutien de sa réclamation en paiement d'impayés du fait d'invendus, la société MAD Editions ne produit que des états statistiques virtuels relatifs aux éditions 6 à 10 de la revue OVE MAGAZINE, et n'apporte que de simples affirmations quant au non-paiement des invendus du n 11, il n'en est pas moins constant que dans un courrier du 27 décembre 2004 suivi d'un échange de courriels de janvier et février 2005, la SAD a sans ambiguïté reconnu sa dette relativement à l'exactitude comptable des états statistiques expliquant d'ailleurs mais ultérieurement dans ses écritures judiciaires n'avoir pu procéder aux restitutions des invendus en raison de leur destruction selon la pratique habituelle en la matière que la loi consacre lorsque les relations sont nouées entre éditeur et coopérative de distribution (ce qui n'est pas le cas en l'espèce) ; que la SAD devait donc en raison de l'accord direct de distribution ne relevant pas de la loi de 1947, soit restituer les invendus contre remboursement, soit en payer le prix, parfaitement définis dans les états produits par la société MAD Editions et dont la justesse a été admise par la SAD ;
ALORS, D'UNE PREMIERE PART, QUE la société MAD Editions soutenait seulement que, dans sa télécopie du 27 décembre 2004, la SAD avait ellemême présenté le document intitulé « Stats pour un titre au 28/12/04 » comme faisant état des « résultats de vente » (concl. récap. p. 8 in fine et p. 9 § 1 à 4) ; qu'en se fondant sur la circonstance que la SAD aurait, notamment par ce courrier du 27 décembre 2004, reconnu « sa dette », la cour d'appel s'est fondée sur un moyen relevé d'office ; qu'en s'abstenant néanmoins d'inviter les parties à s'expliquer contradictoirement sur ce moyen, elle a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, D'UNE DEUXIEME PART, QUE les « courriels de janvier et février 2005 » dont fait état l'arrêt attaqué n'étaient pas évoqués par les conclusions de la société MAD Editions et ne figuraient sur le bordereau de communication de pièces d'aucune des parties ; qu'en se fondant sur ces documents sans les soumettre à une discussion contradictoire, la cour d'appel a encore violé l'article 16 du code de procédure civile ;
ALORS, D'UNE TROISIEME PART, QUE la société MAD Editions sollicitait, au titre de la facture n° 204116 du 27 décembre 2004 (25,20 €, pièce A5bis), le règlement de sa part du prix de la vente de 12 exemplaires du n° 11 de la revue qui, selon elle, étaient mentionnés dans le document intitulé « Stats pour un titre au 28/12/04 » (pièce A10bis) faisant état de 66 ventes réalisées mais qui n'étaient pas inclus dans le compte rendu du 16 décembre 2004 (pièce A9) faisant état de 54 ventes (concl. récap. p. 8 § 8) ; qu'en accueillant cette demande cependant que les mentions claires du document intitulé « Stats pour un titre au 28/12/04 » ne font état que de la vente de 55 exemplaires du n° 11 du magazine, la cour d'appel a dénaturé ce document, en violation de l'article 1134 du code civil ;
ALORS, D'UNE QUATRIEME PART, QUE la société MAD Editions sollicitait, au titre de la facture n° 2061117 du 11 octobre 2006 (4.142,76 €, pièce 19), le règlement de sa part du prix de 1.524 exemplaires du n° 11 de la revue qui, selon elle, ne lui auraient pas été restitués par la SAD (concl. récap. p. 8 § 9) ; qu'en faisant droit à cette demande sans constater ni la réalité ni l'absence de légitimité de ce défaut de restitution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
ALORS, D'UNE CINQUIEME PART, QUE la société MAD Editions sollicitait, au titre de la facture n° 2051216 du 11 octobre 2006 (1.964,12 €, pièce 20), le règlement de sa part du prix de 750 exemplaires du n° 12 de la revue qui, selon elle, ne lui auraient pas été restitués par la SAD (concl. récap. p. 8 § 9) ; que la SAD faisait valoir que si les exemplaires du n° 12 n'avaient pas été restitués, c'est parce qu'ayant décidé de mettre fin aux relations contractuelles par sa lettre du 7 décembre 2004, elle n'avait pas procédé à la distribution de ces exemplaires qu'elle avait mis à la disposition de la société MAD Editions en l'invitant à les récupérer (concl. p. 21 in fine, p. 22 § 6 à 9 et p. 23 § 1) ; qu'en se référant, de manière inopérante, aux règles de restitution des invendus qui étaient sans objet dès lors que le n° 12 de la revue n'avait pas été distribué et qu'elle admettait que la société SAD n'était pas tenue à une obligation légale de distribution du titre, et en s'abstenant d'examiner la légitimité de la raison opposée par la SAD, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, D'UNE DERNIERE PART, QU'en condamnant la SAD à verser à la société MAD Editions sa part du prix de vente des exemplaires du n° 12 de la revue dont elle a constaté la non-distribution du fait de la rupture des relations contractuelles de parties sans déduire de cette part le montant des dommagesintérêts qu'elle allouait à la société MAD Editions (78 €) au titre de la perte de la chance de vendre ces mêmes exemplaires, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit abusive et fautive de la part de la SAD la rupture des relations passées avec la société MAD Editions pour assurer la diffusion de la revue OVE MAGAZINE dans la région toulousaine ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la SAD a pris l'initiative de rompre les accords de distribution passés avec la société MAD Editions pour la vente de la revue trimestrielle OVE MAGAZINE dans la région toulousaine sans pouvoir se prévaloir d'un motif valable quelconque et sans respecter le délai de préavis que les premiers juges ont fort bien défini ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE la faculté de résiliation unilatérale ne constitue pas une prérogative discrétionnaire ; que l'auteur de la rupture doit motiver sa décision et respecter un délai de préavis raisonnable tel que prévu au contrat ou, à défaut, par les usages ; que les relations entre la SAD et la société MAD Editions étaient définitivement établies ; que la rupture est intervenue après l'expédition du n° 12 ; que la SAD n'a respecté aucun délai de préavis ; qu'elle a rompu les relations contractuelles cinq jours après avoir reçu le n° 12 qui n'a jamais été mis en vente ; qu'aucune pièce ne démontre qu'elle a averti antérieurement la société MAD Editions de la rupture à venir ; qu'aucun contrat écrit ne permet de déterminer un délai de préavis ; que selon la SAD, l'usage dans le domaine de la presse impose un délai de préavis de 48 heures, aucune preuve n'étayant cette affirmation ; que la société MAD Editions avant un préavis minimum de trois mois correspondant au caractère trimestriel d'OVE MAGAZINE ; que ce délai sera pris en compte en tant que délai raisonnable ;
ALORS, D'UNE PART, QUE qu'en l'absence de disposition légale particulière, toute partie à un contrat à durée indéterminée peut, sans avoir à motiver sa décision, mettre fin unilatéralement à celui-ci, sauf à engager sa responsabilité en cas d'abus ; qu'en affirmant que la SAD aurait dû justifier d'un motif valable de rupture des relations contractuelles, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le jugement de première instance ayant retenu que la SAD ne prouvait pas que le délai de préavis d'usage était de 48 heures, celle-ci a produit, devant la cour d'appel, le contrat-type liant la société de messagerie de presse NMPP aux dépositaires (pièce 34) qui stipulait un tel préavis à son article 3 et elle a soutenu que même si le contrat n'était pas, en tant que tel, applicable en l'espèce, la société MAD Editions n'ayant pas adhéré à une société coopérative de messagerie de presse, ce délai était d'usage en matière de distribution de la presse (concl. p. 27) ; qu'en bornant à adopter le motif précité du jugement confirmé sans répondre à l'argumentation tirée du contrat-type produit devant elle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QUE la SAD faisait valoir qu'il était convenu que la prise en charge provisoire du titre ne constituait qu'un test de sorte qu'il existait un accord tacite des parties sur une possible résiliation (concl. p. 25 § 1et 2) ;qu'en ne répondant pas à ce moyen de nature à influer sur l'appréciation de la durée du délai de préavis, la cour d'appel a encore violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-25518
Date de la décision : 02/11/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Toulouse, 03 août 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 nov. 2011, pourvoi n°10-25518


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Monod et Colin, SCP Yves et Blaise Capron

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.25518
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