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18/10/2011 | FRANCE | N°10-25644

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 octobre 2011, 10-25644


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 1er septembre 2010), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 23 septembre 2008, n° 07-17.210), que la société Olivier Thévenon sélection (la société Thévenon) a acquis de M. X... et Mme Y..., le 31 octobre 2001, les droits de reproduction sur un dessin pour ameublement ; qu'elle a procédé, le 22 janvier 2002, au dépôt de ce dessin à l'INPI lequel a été rendu public le 25 juin 2004 ; qu'ayant

constaté la commercialisation, dans des magasins Gifi, de produits réalisés ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 1er septembre 2010), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 23 septembre 2008, n° 07-17.210), que la société Olivier Thévenon sélection (la société Thévenon) a acquis de M. X... et Mme Y..., le 31 octobre 2001, les droits de reproduction sur un dessin pour ameublement ; qu'elle a procédé, le 22 janvier 2002, au dépôt de ce dessin à l'INPI lequel a été rendu public le 25 juin 2004 ; qu'ayant constaté la commercialisation, dans des magasins Gifi, de produits réalisés dans un tissu reproduisant selon elle les caractéristiques de son dessin, la société Thévenon a fait procéder à des saisies-contrefaçon, puis a assigné le 19 janvier 2004 les sociétés Duo, Gifi, Distri Villeneuve et Distri Louvres en contrefaçon ;
Attendu que la société Thévenon fait grief à l'arrêt de la débouter de toutes ses demandes tendant à voir déclarer les sociétés Duo, Gifi, Distri Villeneuve et Distri Louvres coupables de contrefaçon du modèle "Manon" lui appartenant, et à voir ces sociétés condamnées à réparer le préjudice subi, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que dans ses conclusions d'appel, la SA Gifi ne mettait nullement en cause la recevabilité des preuves fournies par la société Thévenon au soutien de son action en contrefaçon, se bornant à invoquer la prétendue différence entre le modèle déposé et celui exploité par la société Thévenon ; que la cour d'appel a cependant débouté la société Thévenon de ses demandes au motif qu'elle n'aurait versé aux débats que des échantillons et des photographies dès lors « qu'en dehors du dépôt à l'Inpi du modèle « Manon » en couleur reproduisant un type de dessin à rayures alternées (la société Thévenon) ne produit comme pièces à examiner que des échantillons et des photographies de ses tissus en cinq dispositions de couleurs mais surtout, s'agissant des modèles présumés contrefaisants, des photographies en format 10 x 15 d'une nappe et d'un rideau pliés ainsi que d'un coussin » ; qu'en statuant ainsi par un moyen relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à s'expliquer sur ce point, la cour d'appel a méconnu les dispositions de l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ qu'il ressortait des propres considérations de la cour d'appel qu'en qualité de cessionnaire des droits de reproduction et en l'absence de toute revendication de la part des auteurs, la société Thévenon bénéficiait de la protection qui s'applique à tout modèle se différenciant de ses similaires en tout ou partie par une apparence distincte (lignes, contours, couleurs, formes, texture, matériaux) lui conférant un caractère de nouveauté et un caractère propre ; que le caractère propre résulte d'une impression visuelle d'ensemble différant des modèles divulgués antérieurement ; que pour débouter la société Thévenon de ses demandes tendant à voir notamment déclarer la SA Gifi coupable de contrefaçon, la cour d'appel a refusé de rechercher si les articles commercialisés par cette dernière société reproduisaient les caractéristiques essentielles du modèle déposé et engendraient la même impression d'ensemble que le tissu « Manon » édité par la société Thévenon consistant en une juxtaposition de lignes et de bandes verticales de différentes largeurs, reproduites de manière régulière avec une association de différents coloris comportant une ou deux couleurs dominantes, aux motifs « qu'en dehors du dépôt à l'Inpi du modèle « Manon » en couleur reproduisant un type de dessin à rayures alternées (la société Thévenon) ne produit comme pièces à examiner que des échantillons et des photographies de ses tissus en cinq dispositions de couleurs mais surtout, s'agissant des modèles présumés contrefaisants, des photographies en format 10 x 15 d'une nappe et d'un rideau pliés ainsi que d'un coussin » ; qu'en refusant ainsi de prendre en considération l'ensemble des éléments de preuve fournis par la société Thévenon cependant que la contrefaçon constitue un fait juridique susceptible d'être prouvé par tout moyen, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 1341 et suivants du code civil, ensemble celles des articles L. 511-1 et suivants, L. 521-2 et L. 513-5 et suivants du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve régulièrement produits aux débats, que la cour d'appel a retenu, sans relever d'office aucun moyen, qu'elle n'était pas à même d'apprécier dans des conditions satisfaisantes l'impression visuelle d'ensemble que doivent dégager tant le modèle déposé que les modèles présumés contrefaisants sous leurs différentes variantes de couleur ; que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Olivier Thévenon sélection aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer aux sociétés Gifi, Distri Villeneuve-sur-Lot et Gifi mag et à M. B..., ès qualités, la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour la société Olivier Thevenon sélection.
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la Société THEVENON de toutes ses demandes tendant à voir déclarer les SARL DUO, SA GIFI et les SAS DISTRI VILLENEUVE et DISTRI LOUVRES coupables de contrefaçon du modèle « MANON» lui appartenant, et à voir ces sociétés condamnées à la réparer.
AUX MOTIFS QUE : « (…) la SAS OLIVIER THEVENON SELECTION peut se prévaloir du dépôt de modèle effectué par elle à l'Inpi le 22 janvier 2002 sous le numéro 020460 dont elle a acquis le droit de reproduction le 31 octobre 2001;
qu'il a été jugé que bien que cessionnaire des droits de reproduction et n'ayant pas la qualité de créateur et en l'absence de toute revendication de la part des auteurs elle bénéficiait a l'égard des tiers poursuivis et en sa qualité de titulaire de la demande d'enregistrement de la présomption de titularité tirée des articles L 511 9 et L 113-5 du Code de la propriété intellectuelle du droit de propriété incorporelle de l'auteur que celui ci serait seul recevable a combattre,
que par suite elle bénéficie de la protection qui s'applique à tout dessin ou modèle qui se différencie de ses similaires en tout ou en partie par une apparence distincte (lignes, contours, couleurs, formes, texture, matériaux) qui lui confère un caractère de nouveauté et un caractère propre (articles L 511 -1 et L 511 -2 du Code de la propriété intellectuelle) ;
« (…) que les intimées opposent les dispositions de l'article L 521 2 du Code de la propriété intellectuelle aux termes duquel l'action en contrefaçon est recevable au titre des dessins et modèles sous réserve de la publication du dépôt, observant que la publicité n'est intervenue que le 25 juin 2004 soit postérieurement à l'assignation ,
qu'il est répondu que la publicité du dépôt n'est qu'un des moyens de rendre le dépôt public et qu'elle peut être entendue par la mise à disposition du public des reproductions des dessins et modèles déposes et il est précisé que le modèle « Manon » a été largement diffuse courant 2002, ce qui est établi par les factures produites ;
mais (…) qu'en toute hypothèse il est constant qu'au jour ou le tribunal a statué la publicité avait été effectuée, l'irrecevabilité de l'action devant être écartée sur le fondement de l'article 126 du code de procédure civile,
(…) qu'entendant contester le caractère de nouveauté du modèle « Manon » les intimées font état d'antériorités de rayures alternées sur des tissus d'ameublement et d'habillement mais les exemples cités, dont certains remontent a l'antiquité, ne sont pas directement comparables au modèle « Manon »,
(…) que la contrefaçon est constituée par des actes de fabrication, de commercialisation ou d'importation d'objets reproduisant en totalité ou en partie une création protégée réalisée par une reproduction à l'identique ou par une imitation plus ou moins servile du modèle,
qu'aux termes de l'article L 511-3 du Code de la propriété intellectuelle les dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne différent que par des détails insignifiants , qu'un dessin ou modèle a un caractère propre lorsque l'impression visuelle d'ensemble qu'il suscite chez l'observateur averti diffère de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué avant la date de dépôt de la demande d'enregistrement ou avant la priorité revendiquée,
(…) que l'appelante estime que le modèle « Manon », qui consiste en une juxtaposition de lignes et de bandes verticales de différentes largeurs qui sont reproduites de manière régulière en associant de façon originale différents coloris avec une ou deux couleurs dominantes, à savoir :
- Bleu jaune (ref 626201)- Rouge jaune (ref 626203)- Vert jaune parme (ref 626204)- Beige vert (ref 626205)- Prune vert (ref 626221)- Rouge vert (réf. 626222)- Jaune (réf. 626223)- Bleu (réf. 626224 et 626243)
présente une originalité et une physionomie propres justifiant sa protection et que par rapport aux articles (coussins, rideaux, nappes) commercialisés par les magasins à l'enseigne GIFI et réalisés à partir d'un dessin ou d'un tissu identique à son modèle l'impression visuelle d'ensemble est identique ;
qu'elle souligne la similitude du rythme des rayures avec alternance de rayures fines et plus larges et des coloris utilisés ;
(…) que les saisies-contrefaçon pratiquées en janvier 2004 ont permis d'appréhender au seul siège de la SARL Distri Louvres à Bobigny les articles suivants :
- 14 paires de rideaux
- 5 nappes rondes et 5 rectangulaires - 4 housses de chaise les autres articles cités par l'appelante (classeur, boîtes) ne provenant pas de saisies régulières ;
or (…) qu'en dehors du dépôt à l'Inpi du modèle « Manon » en couleur reproduisant un type de dessin à rayures alternées l'appelante ne produit comme pièces à examiner que des échantillons et des photographies de ses tissus en cinq dispositions de couleurs mais surtout, s'agissant des modèles présumés contrefaisants, des photographies en format 10 x 15 d'une nappe et d'un rideau pliés ainsi que d'un coussin ;
qu'à partir de ces éléments la cour n'est pas à même d'apprécier dans des conditions satisfaisantes l'impression visuelle d'ensemble que doivent dégager tant le modèle déposé que les modèles présumés contrefaisants sous leurs différentes variantes de couleurs ;
(…) que les mêmes difficultés se retrouvent pour l'appréciation de l'originalité de l'oeuvre de l'esprit sur le fondement de l'article L 111-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
(…qu') en conséquence (…) l'appelante sera déboutée et le jugement confirmé, par substitution de motifs, en ce qu'il a débouté la SAS OLIVIER THEVENON SELECTION de toutes ses demandes »(arrêt attaqué p. 4 à 6) ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que dans ses conclusions d'appel (p. 8, § 1 à 3), la SA GIFI ne mettait nullement en cause la recevabilité des preuves fournies par la Société THEVENON au soutien de son action en contrefaçon, se bornant à invoquer la prétendue différence entre le modèle déposé et celui exploité par la Société THEVENON; que la Cour d'Appel a cependant débouté la Société THEVENON de ses demandes au motif qu'elle n'aurait versé aux débats que des échantillons et des photographies dès lors « qu'en dehors du dépôt à l'Inpi du modèle « Manon » en couleur reproduisant un type de dessin à rayures alternées (la SAS THEVENON) ne produit comme pièces à examiner que des échantillons et des photographies de ses tissus en cinq dispositions de couleurs mais surtout, s'agissant des modèles présumés contrefaisants, des photographies en format 10 x 15 d'une nappe et d'un rideau pliés ainsi que d'un coussin »(arrêt attaqué p. 6, § 5) ; qu'en statuant ainsi par un moyen relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à s'expliquer sur ce point, la Cour d'Appel a méconnu les dispositions de l'article 16 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART QU'il ressortait des propres considérations de la Cour d'Appel qu'en qualité de cessionnaire des droits de reproduction et en l'absence de toute revendication de la part des auteurs, la SAS THEVENON bénéficiait de la protection qui s'applique à tout modèle se différenciant de ses similaires en tout ou partie par une apparence distincte (lignes, contours, couleurs, formes, texture, matériaux) lui conférant un caractère de nouveauté et un caractère propre; que le caractère propre résulte d'une impression visuelle d'ensemble différant des modèles divulgués antérieurement ; que pour débouter la Société THEVENON de ses demandes tendant à voir notamment déclarer la SA GIFI coupable de contrefaçon, la Cour d'Appel a refusé de rechercher si les articles commercialisés par cette dernière société reproduisaient les caractéristiques essentielles du modèle déposé et engendraient la même impression d'ensemble que le tissu « MANON » édité par la Société THEVENON consistant en une juxtaposition de lignes et de bandes verticales de différentes largeurs, reproduites de manière régulière avec une association de différents coloris comportant une ou deux couleurs dominantes, aux motifs que « qu'en dehors du dépôt à l'Inpi du modèle « Manon » en couleur reproduisant un type de dessin à rayures alternées (la SAS THEVENON) ne produit comme pièces à examiner que des échantillons et des photographies de ses tissus en cinq dispositions de couleurs mais surtout, s'agissant des modèles présumés contrefaisants, des photographies en format 10 x 15 d'une nappe et d'un rideau pliés ainsi que d'un coussin » (arrêt attaqué p. 6, § 5); qu'en refusant ainsi de prendre en considération l'ensemble des éléments de preuve fournis par l'exposante cependant que la contrefaçon constitue un fait juridique susceptible d'être prouvé par tout moyen, la Cour d'Appel a violé les dispositions des articles 1341 et suivants du Code civil, ensemble celles des articles L. 511-1 et suivants, L. 521-2 et L. 513-5 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-25644
Date de la décision : 18/10/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 01 septembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 oct. 2011, pourvoi n°10-25644


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Blondel, Me Copper-Royer

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.25644
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