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21/09/2011 | FRANCE | N°10-13851

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 21 septembre 2011, 10-13851


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X... engagé à compter du 5 juin 2001 par la société SME Conseil devenue GFI consulting, promu directeur de missions le 1er mai 2005, a fait écrire par son conseil le 17 janvier 2007 qu'il était victime de harcèlement de la part de son supérieur hiérarchique direct nommé en février 2006, et se référant à un échange de courriels du 27 février, a pris acte le 26 mars 2007 de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur pour harcèlement moral et discrimin

ation, enfin a saisi la juridiction prudhomale le 10 avril 2007 ;
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué que M. X... engagé à compter du 5 juin 2001 par la société SME Conseil devenue GFI consulting, promu directeur de missions le 1er mai 2005, a fait écrire par son conseil le 17 janvier 2007 qu'il était victime de harcèlement de la part de son supérieur hiérarchique direct nommé en février 2006, et se référant à un échange de courriels du 27 février, a pris acte le 26 mars 2007 de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur pour harcèlement moral et discrimination, enfin a saisi la juridiction prudhomale le 10 avril 2007 ;
Sur les premier et second moyens du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié :
Vu l'article 1153 du code civil ;
Attendu que la cour d'appel a fait courir le point de départ des intérêts sur la somme allouée au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement à compter de la date de son arrêt ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le montant de cette indemnité n'étant pas laissée à l'appréciation des juges, les intérêts de la somme accordée au salarié couraient à compter du jour de leur demande, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu que la cour de cassation est en mesure en application de l'article 627du code de procédure civile de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fixé le point de départ des intérêts au taux légal à courir sur la somme allouée au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement à la date du prononcé, l'arrêt rendu le 6 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Dit que les intérêts sur la somme de 11 511, 50 euros ont couru du jour de la demande ;
Condamne la société GFI consulting aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société GFI consulting à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par Mme Mazars, conseiller doyen en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du vingt et un septembre deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour la société GFI consulting.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que de février 2006 au 26 mars 2007, M. X... avait été victime d'agissements répétés imputables à la société GFI Consulting constitutifs de harcèlement moral et que la prise d'acte par M. X... de la rupture de son contrat de travail, le 26 mars 2007, produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la société GFI Consulting à verser à M. X..., avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la société GFI Consulting de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, les sommes de 18. 000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, 18. 000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, et 1. 800 € au titre des congés payés afférents et, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt, les sommes de 11. 511, 50 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement et 42. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs qu'aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que selon l'article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l'application, notamment, de l'article L. 1152-1 susvisé, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que M. X... soutient que le poste et le titre de directeur des opérations auxquels il venait d'être promu le 1er février 2006 lui ont été unilatéralement retirés ; que l'intimée conteste cette allégation en faisant valoir que le salarié n'a jamais bénéficié d'une telle promotion ; qu'à partir de l'automne 2005, un processus de réorganisation interne a été mis en oeuvre au sein de la société GFI Consulting ; que M. Jean-Louis Y..., alors directeur de la branche « Business Consulting » (BC), au sein de laquelle M. X... se trouvait affecté, a élaboré un projet prévoyant la création d'une nouvelle entité, dite division « BC-IS » comprenant deux pôles distincts dédiés, le premier au développement, le second aux opérations avec à sa tête M. X... en qualité de « directeur des opérations » ; que ce projet a été envoyé par courriel du 24 novembre 2005 à plusieurs cadres de la branche BC, dont M. X..., puis transmis au président-directeur-général du groupe GFI, M. Z..., par courriel du 1er décembre 2005 ; qu'il a été présenté à l'ensemble des salariés de la branche BC au cours d'une réunion qui s'est tenue le 14 décembre 2005 ; que dans deux attestations des 26 septembre et 16 octobre 2008, MM. A... et B..., alors salariés du groupe GFI et présents à cette réunion, déclarent tous deux que « M. Jean-Louis Y... a présenté à l'ensemble des salariés l'organisation des nouvelles activités » et que « M. Jean X... a été présenté comme assurant la coordination des opérations de la division « BC-IS » ; que le 1er février 2006, une nouvelle réunion s'est tenue en présence de Mme Pascale C..., de M. Vincent D..., directeur des opérations France du groupe GFI, et de M. Jean-Louis Y..., avec l'ensemble du personnel concerné ; que MM. Franck A... et Pascal B..., dans leurs attestations susvisées, déclarent que le nouveau organigramme de la division BC-IS qui a été présenté à cette occasion confirmait M. X... dans sa fonction de « directeur des opérations » ; que M. X..., dans son courriel du 7 février 2006, s'est adressé en ces termes à M. D... : « Je reviens vers toi, suite à notre dernière entrevue du 26/ 01 avec Jean-Louis Y... ; nous avions convenu alors d'un prochain entretien afin de reconsidérer mon statut et le niveau de rémunération associé au regard de la fonction de directeur des opérations BC-IS que j'assure depuis la création de cette entité ; dans cette attente (etc …) » ; que M. D... a répondu à M. X... par un courriel du 8 février 2006 rédigé dans les termes suivants : « Pas de problème. J'ai demandé à Pascale de faire le point avec toi et d'organiser ensuite une réunion avec nous trois pour finaliser la discussion » ; qu'il apparaît ainsi que l'affirmation de M. X... selon laquelle il assurait la fonction de directeur des opérations depuis la création de cette entité n'a pas été contestée par M. D... qui, au contraire, lui a répondu « qu'il n'y avait pas de problème » ; que la réunion à trois que ce dernier projetait d'organiser avec Mme C... « pour finaliser le projet » portait sur la seule question du statut et du niveau de rémunération associés à la fonction de directeur des opérations ; que cet échange de correspondance fait donc ressortir que l'exercice de la fonction de directeur des opérations par M. X... était un point considéré comme acquis, que seuls restaient en suspens le statut et la rémunération attachés à cette nouvelle fonction et que ceux-ci devaient faire l'objet d'une réunion avec Mme C... ; qu'il y a donc lieu de considérer qu'à la date du 8 février 2006, M. X... occupait le poste de directeur des opérations auquel il avait été nommé ; qu'aucune suite n'a été donnée au courriel de M. D..., malgré les demandes insistantes du salarié restées sans réponse ; que la société GFI Consulting a toujours refusé d'admettre qu'il avait été nommé à ce poste ; qu'en septembre 2007, le curriculum vitæ de M. X... diffusé sur l'Intranet de l'entreprise a été modifié par l'employeur de sa seule autorité, en faisant disparaître la mention « directeur des opérations » qui y figurait ; que M. X... fait valoir que les avenants à son contrat de travail fixant ses objectifs pour les années 2006 et 2007 n'ont pu être conclus du fait de l'opposition de sa supérieure hiérarchique, ce qui l'a privé, selon lui du versement de la partie variable de sa rémunération pour chacune de ces années ; qu'il indique que la quasi-totalité des missions et des chantiers qu'il aurait dû traiter lui ont été retirés en 2006 ; que la société GFI Consulting soutient pour sa part que les parties étaient convenues de reconduire pour 2006 l'avenant conclu pour l'année 2005, avec les mêmes objectifs annuels ; que le salarié n'avait pas atteint ses objectifs en 2006 ; que si pour l'année 2007, il n'y a pas eu d'avenant, c'est parce que la rupture du contrat de travail est intervenue le 26 mars 2007 et que comme pour les années 2001 à 2005, l'avenant ne pouvait être établi pendant le premier trimestre ; que le salarié qui s'était plaint à plusieurs reprises d'être débordé, n'a pas été laissé sans activité ; qu'ainsi sa supérieure hiérarchique l'a sollicité en juillet et novembre 2006 et en janvier 2007, pour trois dossiers d'appel d'offre ; qu'elle lui a également confié d'autres tâches d'un niveau de responsabilité supérieur telles que l'établissement des plans de charges provisionnelles et du budget pour l'année 2007 ; que par ailleurs, la mission première d'un directeur de missions n'est pas de répondre aux appels d'offres mais consiste avant tout à diriger les missions ; que le salarié était convié, comme tous les autres directeurs de mission, aux réunions de travail qui étaient organisées ; que M. X... justifie par les pièces qu'il produit aux débats qu'en 2006, sur 53 appels d'offres seuls 5 lui ont été attribués, soit 8 % du total, alors qu'en 2005, sur 58 appels d'offres, il en avait traité 16, soit près de 30 % ; que les avenants relatifs aux exercices 2001 à 2005 font apparaître que la partie variable de la rémunération à laquelle il était susceptible de prétendre chaque année dépendait, entre autres facteurs, de sa performance individuelle appréciée en fonction de l'atteinte d'objectifs qui étaient fixés en termes de chiffres d'affaires qu'il devait réaliser personnellement par son activité commerciale auprès des clients de GFI Consulting ; que, dans ces conditions, la baisse significative en 2006 par rapport à 2005 du nombre de dossiers d'appels d'offres qui lui étaient confiés, alors que l'application pour 2006 de l'avenant relatif à l'année 2005 avait été décidée sans son accord par la société GFI Consulting, ne pouvait que rendre irréalisables pour l'année 2006 les objectifs fixés par cet avenant, amoindrissant par-là même de façon conséquente le montant de sa rémunération variable et mettant en cause, à terme, la pérennité de la relation de travail ; que M. X... se plaint d'avoir été exclu de la cession de formation de l'ensemble des cadres commerciaux du groupe à laquelle il avait jusque là toujours participé ; qu'il produit à cet égard un courriel du 19 mai 2006 de sa supérieure hiérarchique qui, en réponse à un message qu'il lui avait envoyé la veille lui demandant pourquoi il n'avait été ni informé ni convié à cette cession, lui a répondu en ces termes : « (…) mais je te rappelle que nous sommes dans l'attente de ta part d'une démarche proactive en terme de pilotage des collaborateurs qui te sont rattachés et de développement de Business, dans une relation de proximité avec GFI ; je souhaite voir dans les prochains jours des résultats concrets de tes actions, afin de conforter ton engagement » ; que la société GFI Consulting ne donne aucune indication sur la « démarche proactive en terme de pilotage des collaborateurs et de développement de Business, dans une relation de proximité avec GFI », qui était attendue de M. X... ; qu'elle n'explique pas pourquoi ce message laissait entendre au salarié que sa participation à la cession de formation des commerciaux de l'entreprise était conditionnée aux « résultats concrets de ses actions » ; que l'appelant produit la copie d'une lettre du médecin du travail à l'attention d'un service de consultation de souffrance au travail relatant à son confrère les plaintes exprimées par M. X... relatives à sa souffrance morale dans l'entreprise et lui indiquant qu'il avait constaté chez ce salarié un état anxio-dépressif avec retentissement sur son sommeil, qui avait rendu nécessaire la prescription d'un traitement médicamenteux ; qu'il résulte de tout ce qui précède qu'entre le mois de février 2006 et le 26 mars 2007, date de la rupture de son contrat de travail, M. X... a fait l'objet, de façon répétée, d'agissements caractérisés par :- le retrait injustifié de son poste et de son titre de directeur des opérations qui lui avaient été attribués et le refus réitéré de l'employeur de le rétablir dans ce poste ;- la modification injustifiée effectuée unilatéralement par l'employeur, en septembre 2007, de son curriculum vitæ diffusé sur l'Intranet de l'entreprise, en faisant disparaître la mention « directeur des opérations » ;- son exclusion sans aucune justification de la cession de formation des cadres commerciaux du groupe à laquelle il avait jusque-là toujours participé ;- l'absence de proposition d'avenant fixant les modalités de calcul de sa rémunération variable pour 2006 et la décision unilatérale de l'employeur d'appliquer l'avenant conclu pour 2005, conduisant ainsi à une baisse significative de la partie variable de sa rémunération et à la mise en cause à terme de la pérennité de la relation de travail ; que tous ces agissements ont eu pour effet une dégradation des conditions de travail de M. X... susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé et de compromettre son avenir professionnel ; qu'aucune des explications fournies par la société GFI Consulting, ni aucune des pièces qu'elle a produites aux débats ne permettent d'établir que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un harcèlement moral et que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'il apparaît, en conséquence, que M. X... a été victime dans son travail d'agissements répétés constitutifs de harcèlement moral ; que sur la demande de M. X... tendant à ce qu'il soit jugé que le harcèlement moral dont il a été victime dans l'entreprise est dû aux agissements de sa supérieure hiérarchique, Mme C... ; qu'il n'apparaît pas que les agissements répétés, constitutifs du harcèlement moral dont M. X... a été victime dans l'entreprise, soient imputables personnellement à Mme C... ; qu'il résulte des pièces produites aux débats et des explications respectives des parties que celle-ci a agi que dans le seul cadre des instructions reçues par la société GFI Consulting à qui seule est imputable le harcèlement moral subi par M. X... ; que la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour évaluer le préjudice subi par M. X... du fait du harcèlement moral dont il a été victime dans l'entreprise, à la somme de 18. 000 € au paiement desquels il convient, à titre de dommages et intérêts de condamner la société GFI Consulting ;

Alors, d'une part, que les juges ne peuvent dénaturer le sens clair et précis d'un écrit ; que dans son courriel du 8 février 2006, M. D... se bornait à accéder à la demande de M. X... de « faire le point avec lui » et d'organiser une réunion pour finaliser la discussion portant sur son statut et son niveau de rémunération sans considérer que la nommination de M. X... aux fonctions de directeur des opérations était un fait acquis ; qu'en considérant qu'il résultait de ce courriel qu'à la date du 8 février 2006, M. X... occupait le poste de directeur des opérations, la cour d'appel a dénaturé, par adjonction, les termes clairs et précis du courriel du 8 février 2006, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Alors, de deuxième part, que dans ses conclusions délaissées (cf. p. 29) reprises oralement, la société GFI Consulting faisait valoir que le courriel de M. X... du 28 avril 2006, rappelant à Mme C... les termes de ses attentes, à savoir : « Statut directeur des opérations, SAB 90 KE-PRV : 20 %, véhicule de fonction adapté au statut », établissait, de l'aveu même du salarié, que ce statut de directeur des opérations ne lui avait pas été conféré ; qu'en affirmant qu'à la date du 8 février 2006, M. X... occupait le poste de directeur des opérations auquel il avait été nommé, sans avoir répondu à ce chef des conclusions de l'exposante assorti d'une offre de preuve, qui démontrait le contraire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, de troisième part, qu'en cas de différend sur les fonctions exercées par un salarié, il appartient au juge de vérifier les conditions réelles d'exécution de la prestation de travail ; qu'en se fondant uniquement sur des échanges de courriels et des affirmations de salariés de l'entreprise pour juger que M. X... occupait le poste de directeur des opérations auquel il avait été nommé, sans apprécier les conditions réelles d'exercice de l'activité de M. X..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 et L. 1152-1 du code du travail ;

Alors, de quatrième part, que le harcèlement moral suppose des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du salarié susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en affirmant qu'en faisant disparaître, en septembre 2007, sur le curriculum vitæ de M. X... diffusé sur l'Intranet de l'entreprise, la mention « directeur des opérations », l'employeur avait commis un agissement ayant pour effet une dégradation des conditions de travail de M. X... susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, quand cette modification était justifiée par un élément étranger à tout harcèlement moral, tiré de la nécessité de mettre fin à l'auto-proclamation du salarié de sa qualité de directeur des opérations, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;

Alors, de cinquième part, que l'employeur peut, dans l'exercice de son pouvoir de direction, modifier les tâches de son salarié lorsqu'il ne s'agit que d'un simple changement de ses conditions de travail ; qu'un tel changement ne saurait s'analyser en un fait constitutif de harcèlement moral dès lors qu'il est justifié par un élément étranger à tout harcèlement ; que dans ses conclusions reprises oralement (cf. p. 40 et suiv.), la société GFI Consulting faisait valoir que la mission première d'un directeur de mission n'était pas de répondre aux appels d'offre mais consistait à diriger des missions et que si M. X... n'avait traité que 5 appels d'offre sur l'année 2006 au lieu de 16 sur l'année 2005, c'est parce que lui avaient été confiés d'autres dossiers et d'autres tâches ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée, si la baisse du nombre de dossiers d'appels d'offre confiés à M. X... ne s'expliquait pas simplement par le fait qu'il avait été en charge d'autres dossiers et qu'ainsi, ce changement de tâches était justifié par un élément étranger à tout harcèlement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;
Alors, de sixième part, que les juges du fond ne peuvent dénaturer le sens clair et précis d'un écrit ; qu'en affirmant que le courriel du 16 mai 2006 de l'employeur laissait entendre à M. X... que sa participation à la cession de formation des commerciaux de l'entreprise était conditionnée aux « résultats concrets de ses actions », quand ce courriel ne reconnaissait nullement que M. X... avait été exclu de la cession de formation de l'ensemble des cadres commerciaux du groupe et se bornait à lui rappeler que l'employeur était dans l'attente de sa part d'une démarche proactive en terme de pilotage des collaborateurs qui lui étaient rattachés et de développement de Business, la cour d'appel a dénaturé ce courriel du 19 mai 2006, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Alors, de septième part, que dans ses conclusions reprises oralement, la société GFI Consulting faisait valoir que M. X... et Mme C... avaient convenu de l'application de l'avenant 2005 pour l'année 2006 et produisait au débat le courriel de Mme E..., contrôleur de gestion, du 8 février 2007, rappelant que l'avenant 2005 avait été pris en compte pour calculer le bonus de M. X... 2006 ; qu'en affirmant que M. X... avait été victime d'agissements répétés constitutifs de harcèlement moral, du fait notamment, de l'absence de proposition d'avenant fixant les modalités de calcul de sa rémunération variable pour 2006 et de la décision unilatérale de l'employeur d'appliquer l'avenant conclu pour 2005, sans avoir recherché, comme il lui était demandé, si les parties n'avaient pas convenu de reconduire pour l'année 2006, l'avenant conclu pour l'année 2005, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;
Alors, de huitième part, que nul ne peut se constituer de titre à lui-même ; qu'en affirmant, pour retenir le harcèlement moral, que le salarié produisait la copie d'une lettre du médecin du travail à l'attention d'un service de consultation de souffrance au travail relatant à son confrère les plaintes exprimées par M. X... relatives à sa souffrance morale dans l'entreprise et lui indiquant qu'il avait constaté chez ce salarié un état anxio-dépressif avec retentissement sur son sommeil qui avait rendu nécessaire la prescription d'un traitement médicamenteux, quand ce document ne faisait que se fonder sur les propos du salarié lui-même, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, ensemble les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la prise d'acte par M. X... de rupture de son contrat de travail, le 26 mars 2007, produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamné la société GFI Consulting à verser à M. X..., avec intérêts au taux légal à compter de la réception par le défendeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, les sommes de 18. 000 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1. 800 € au titre des congés payés y afférents, 5. 023 € à titre de rémunération variable pour l'année 2006 et 167, 43 € à titre de congés payés afférents, et, avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt, les sommes de 11. 511, 50 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et 42. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Aux motifs que la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, si les faits qu'il invoque et dont il lui appartient d'établir l'existence constituent des manquements suffisamment graves de l'employeur pour justifier la rupture, soit, dans le cas contraire d'une démission ; que la lettre de prise d'acte ne fixe pas les limites du litige ; qu'il convient dès lors de rechercher si les griefs formulés par M. X... à l'encontre de son employeur, tant dans sa lettre du 26 mars 2007 qu'au cours des débats, sont établis, la charge de la preuve incombant à cet égard à l'intéressé, et, dans l'affirmative, s'ils constituent des manquements suffisamment graves de la société GFI Consulting à ses obligations ; que contrairement à ce qui était expressément stipulé à l'article 3 du contrat de travail, les modalités d'attribution de la partie variable de la rémunération et son montant n'ont fait l'objet pour l'année 2006 d'aucun avenant ; qu'en décidant unilatéralement de reconduire l'avenant conclu pour l'année 2005 alors que le nombre de dossiers d'appels d'offres confiés à M. X... avait été réduit de façon significative, ce qui ne pouvait que rendre irréalisables les objectifs fixés par cet avenant, amoindrir par-là même le montant de la rémunération variable du salarié et mettre en cause, à terme, la pérennité de la relation de travail, la société GFI Consulting a manqué à ses obligations contractuelles ; que ce manquement est suffisamment grave pour justifier la prise d'acte par M. X... de la rupture de son contrat de travail aux torts de son employeur ; qu'en conséquence, la rupture du contrat de travail, intervenue le 26 mars 2007, a produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que selon l'article 15 de la convention collective des bureaux d'études, la durée du préavis est de trois mois pour les cadres ; que la rupture de son contrat de travail ayant produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. X... est dès lors en droit de prétendre à une indemnité compensatrice de préavis de 18. 000 € ainsi qu'à la somme de 1. 800 € au titre des congés payés afférents, au paiement desquelles il convient de condamner la société GFI Consulting ; que lorsque le droit à une rémunération variable résulte du contrat de travail à défaut d'un accord entre l'employeur et le salarié sur le montant de cette rémunération, il incombe au juge de la déterminer en fonction des critères visés au contrat et, à défaut, des données de la cause ; qu'en l'absence d'avenant conclu par les parties pour l'année 2006, il appartient à la cour de déterminer, selon les principes susvisés, le montant de la rémunération variable susceptible d'être allouée à M. X... ; que chaque année, entre 2001 et 2005, les parties ont conclu un avenant relatif à la partie variable de la rémunération prévoyant que celle-ci devait être calculée sur la base du chiffre d'affaires réalisé personnellement par M. X... ; qu'il apparaît que son activité commerciale auprès des clients de la société GFI Consulting, dans le cadre notamment des appels d'offre qui lui étaient confiés, était un élément déterminant dans la fixation des objectifs qui lui étaient fixés annuellement par avenant à son contrat de travail ; que c'est sur cette base que la société GFI Consulting s'est fondée pour décider de ne rien lui verser au titre de la partie variable de sa rémunération pour 2006 ; qu'ainsi, Mme E..., contrôleuse de gestion, dans un courriel du 8 février 2007 produit aux débats par l'intimée, entend justifier cette absence de versement par le fait que le chiffre d'affaires propre de M. X... était inférieur aux objectifs mentionnés dans l'avenant pour l'année 2005 ; que, par ailleurs, il était expressément stipulé aux avenants conclus pour les années 2004 et 2005, que la partie variable devait être versée en février et mars de l'année suivante ; qu'il s'ensuit, et compte tenu des explications des parties et des pièces produites aux débats, que M. X... qui était présent dans l'entreprise en février et mars 2007, est en droit, compte tenu du chiffre d'affaires individuel qu'il a réalisé en 2006 à partir des appels d'offres qui lui ont été confiés, de prétendre, au titre de cette année 2006, à une rémunération variable de 5. 023 € au paiement de laquelle il y a lieu de condamner la société GFI Consulting, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par le défendeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes ; que sur la demande de M. X... tendant au paiement d'une indemnité de congés payés afférents à la partie variable de sa rémunération pour l'année 2006, que M. X... sollicite le paiement d'une somme de 502, 30 € au titre des congés payés afférents au rappel de salaire qui lui est alloué au titre de sa rémunération variable pour 2006 ; que cependant, depuis 2002, la partie variable de la rémunération de M. X... se composait d'un bonus lié à sa performance individuelle, d'un bonus lié à la performance de sa division d'affectation et d'un bonus lié à la performance de la société GFI Consulting ; que seul parmi ces trois bonus, celui lié à sa performance individuelle était affecté par la prise de ses congés et pouvait donner lieu, de ce fait, à une indemnité de congés payés afférents ; qu'en conséquence, et compte tenu des éléments d'appréciation fournis à la cour, il convient de fixer l'indemnité de congés payés afférant à la rémunération variable de M. X... pour l'année 2006 à la somme de 502, 30 € : 3 = 107, 43 €, au paiement de laquelle il convient de condamner la société GFI Consulting, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par le défendeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes que selon les dispositions combinées des articles 18 et 19 de la convention collective des bureaux d'études, le cadre justifiant d'une ancienneté d'au moins deux années dans l'entreprise, a droit, en cas de licenciement, sauf faute grave ou faute lourde, à une indemnité distincte du préavis ; que cette indemnité est d'un tiers de mois de rémunération par année de présence dans l'entreprise, sans pouvoir excéder un plafond de douze mois ; que le mois de rémunération s'entend comme le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant la notification de la rupture du contrat de travail ; que cette rémunération inclut les primes prévues au contrat de travail ; que pour les années incomplètes, l'indemnité de licenciement est calculée proportionnellement au nombre de mois de présence ; que la rémunération de M. X... pour les douze derniers précédant la rupture se compose, d'une part, d'une partie fixe de 6. 000 € x 12 = 72. 000 €, d'autre part, de la partie variable qui lui est allouée par le présent arrêt au titre de l'année 2006, de 5. 023 € et de l'indemnité de congés payés afférents de 67, 43 €, soit un total de 77. 190, 43 € ; que dès lors, en application des dispositions conventionnelles susvisées, M. X... est en droit de prétendre, dans les limites de sa demande, à une indemnité conventionnelle de licenciement de 11. 511, 50 € au paiement de laquelle il convient de condamner la société GFI Consulting ; que sur la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la société GFI Consulting employant habituellement au moins onze salariés et M. X... ayant une ancienneté d'au moins deux ans, sont applicables les dispositions de l'article L. 1235-3, alinéa 2, du code du travail selon lesquelles le juge octroie au salarié ayant fait l'objet d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ; que la cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour évaluer le préjudice subi par M. X... du fait de la rupture de son contrat de travail à la somme de 42. 000 € au paiement de laquelle il convient de condamner la société GFI Consulting à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Alors, de première part, que le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation ; qu'en affirmant que le nombre de dossiers d'appels d'offre confiés à M. X... avait été réduit de façon significative, ce qui ne pouvait que rendre irréalisables les objectifs fixés par l'avenant conclu pour l'année 2005 et amoindrir par-là même le montant de la rémunération variable du salarié et mettre en cause, à terme, la pérennité de la relation de travail, sans préciser sur quels éléments elle se fondait pour affirmer un tel fait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors, de deuxième part, que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que la société GFI Consulting soutenait dans ses conclusions d'appel que M. X... et Mme C... avaient convenu d'appliquer, pour calculer le bonus pour l'année 2006, l'avenant définissant les modalités d'attribution de la partie variable de la rémunération conclu en 2005, et produisait au débat un courriel du contrôleur de gestion du 8 février 2007 attestant de cet accord ; qu'en affirmant que la société GFI Consulting avait décidé unilatéralement de reconduire pour l'année 2006, l'avenant conclu pour l'année 2005, sans examiner cet élément de preuve, qui lui était proposé par la société exposante, la cour d'appel a violé l'article du code de procédure civile ;
Alors, de troisième part et subsidiairement, que seul un manquement sérieux de l'employeur à ses obligations contractuelles permet au juge de qualifier la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le fait pour un employeur de reconduire l'avenant annuel définissant les modalités d'attribution de la partie variable de la rémunération au lieu d'en négocier un nouveau avec son salarié ne constitue pas un manquement aux obligations contractuelles suffisamment grave pour justifier la prise d'acte par le salarié de la rupture de son contrat de travail ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles L. 1235-1, L. 1235-3 du code du travail et 1134 du code civil.
Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. X....
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR fait courir les intérêts au taux légal sur la somme de 11 511, 50 euros allouée au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement à la date de l'arrêt ;
ALORS QUE la fixation de l'indemnité conventionnelle de licenciement n'étant pas laissée à l'appréciation des juges, les intérêts de la somme accordée à ce titre à Monsieur X... devaient courir du jour de la demande et non de la date de la décision ayant déterminé son montant ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a violé l'article 1153 du Code civil ; que la cassation interviendra sans renvoi après fixation du point de départ des intérêts.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-13851
Date de la décision : 21/09/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 06 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 21 sep. 2011, pourvoi n°10-13851


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.13851
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