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07/09/2011 | FRANCE | N°10-19725

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 07 septembre 2011, 10-19725


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis, qui sont est recevables :

Vu l'article 1792-6 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 30 mars 2010), que la société CJP bâtiment, promoteur-constructeur, assurée en police dommages-ouvrage auprès de la société Mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) et en police responsabilité décennale auprès de la société Abeille, aux droits de laquelle se trouve la

société Aviva, a édifié un immeuble qu'elle a vendu par lots ; que des difficultés...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, réunis, qui sont est recevables :

Vu l'article 1792-6 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 30 mars 2010), que la société CJP bâtiment, promoteur-constructeur, assurée en police dommages-ouvrage auprès de la société Mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP) et en police responsabilité décennale auprès de la société Abeille, aux droits de laquelle se trouve la société Aviva, a édifié un immeuble qu'elle a vendu par lots ; que des difficultés d'accès au parking de l'immeuble étant apparues, une expertise a été ordonnée ; qu'après dépôt du rapport de l'expert, des copropriétaires ont assigné la société CJP bâtiment, la société SMABTP, la société Abeille, M. X..., maître d'oeuvre, et son assureur la société Axa et que ce dernier a appelé en intervention forcée la société Mutuelle des architectes français (MAF) ;

Attendu que pour débouter les copropriétaires de leurs demandes d'indemnisation, l'arrêt retient que la prise de possession des lieux par le maître de l'ouvrage et le règlement du prix des travaux valaient réception tacite de l'immeuble sans réserves ;

Qu'en statuant ainsi, tout en relevant que la société CJP bâtiment s'était réservée la maîtrise d'oeuvre et la réalisation des travaux et qu'elle était le concepteur des plans d'exécution et de détail de l'ouvrage et responsable de son implantation, sans rechercher si ces circonstances ne rendaient pas équivoque sa volonté d'accepter les travaux, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 30 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens, remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens, autrement composée ;

Condamne la société Axa France IARD et la société MAF aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Axa France IARD et la société MAF à payer à M. Y..., à Mme Z... et aux époux A..., la somme globale de 2 500 euros ; rejette les demandes de la société Axa France IARD et de la société MAF ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept septembre deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen identique produit aux pourvois principal et incident par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour M. Y..., Mme Z... et les époux A....

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté les demandes formées par des copropriétaires en réparation des préjudices résultant du défaut d'accessibilité aux emplacements de parking attachés à leurs appartements, et de la perte de valeur en résultant,

AUX MOTIFS QUE les premiers juges ont considéré que d'après les éléments techniques recueillis par Monsieur B..., l'erreur de conception était visible à la lecture des plans et coupes du dossier de permis de construire, que dès le début des travaux, l'architecte, le maître de l'ouvrage agissant comme maître d'oeuvre et entrepreneur avaient connaissance des difficultés d'accès au parking, compte tenu de l'emprise du terrain et des hauteurs de toitures imposées par le permis de construire, et qu'ils avaient conscience de l'impossibilité de construire un parc de stationnement respectant la norme applicable ; que cependant, les conditions de la mise en oeuvre de la responsabilité décennale ne sont pas réunies en l'espèce ; qu'en effet, elle suppose l'existence d'un vice caché, au moment de la réception des travaux, entre le maître de l'ouvrage, le maître d'oeuvre et les constructeurs ; qu'en l'espèce, aucune réception des travaux n'a été établie, de sorte que les premiers juges ont considéré à juste titre que la prise de possession des lieux par le maître de l'ouvrage promoteur et le règlement du prix des travaux valaient réception tacite sans réserves ; que la Sté CJP BATIMENT maître de l'ouvrage, s'était en outre réservé la maîtrise d'oeuvre en ce qu'elle a assuré l'élaboration des plans d'exécution ainsi que la réalisation des travaux de construction de l'immeuble ; que le rapport d'expertise a clairement établi que la Sté CJP BATIMENT concepteur des plans d'exécution et de détail de l'ouvrage et responsable de l'implantation de l'immeuble connaissait le défaut de conception de la rampe d'accès aux parkings, et qu'en sa qualité de constructeur, elle a méconnu les études techniques des structures réalisées par le bureau d'études BET ROMPTEAU qui avait préconisé une rampe de 17 % conforme à la norme en vigueur, en construisant une rampe présentant une pente de 20% totalement impraticable ; que la réalisation en cours de chantier le 19 février 1997 d'une nouvelle étude technique destinée à remédier à ce défaut confirme que la Sté CJP BATIMENT en avait parfaitement connaissance, qu'elle a poursuivi le chantier et qu'en sa qualité de maître de l'ouvrage, elle a pris possession des lieux sans émettre de réserves sur ce vice apparent ; que la Cie AXA apparaît donc bien fondée à soutenir que dans ces circonstances, les lots rampe d'accès et parkings présentant des vices apparents pour le maître de l'ouvrage, dès sa livraison, en février 1998, les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité décennale contre l'architecte et l'entreprise ayant assuré la maîtrise d'oeuvre et de réalisation des travaux de construction ne peut être engagée par le SDC et les copropriétaires lesquels s'ils disposent de l'action en responsabilité de l'article 1792 du code civil, peuvent se voir opposer un défaut de réserves sur ce vice apparent dès la livraison de l'immeuble, et sa prise de possession par les copropriétaires ; que la Sté CJP BATIMENT en sa qualité de promoteur, lotisseur et vendeur de l'immeuble était tenue en application de l'article L.261-5 du code de la construction et de l'habitation de délivrer aux acquéreurs un immeuble conforme aux documents contractuels de la vente, notamment des places de parkings accessibles, et permettant des conditions d'usage normales ; que cependant, dans leurs écritures, le SDC et les copropriétaires maintiennent leurs demandes sur le seul fondement juridique de la garantie décennale, sans répondre aux moyens de droit mis en aux débats par la Cie AXA, assureur de garantie décennale de Monsieur X..., et dirigent leur demande en condamnation au coût de la mise en conformité du parking contre Monsieur X... architecte ayant conçu le projet architectural et les plans dans le cadre du permis de construire ;

1) ALORS QUE conformément à l'article 1792-6 du code civil, la réception est l'acte contradictoire par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage, avec ou sans réserves ; que la réception peut être tacite mais à la condition que les éléments de fait qui la réalisent ne lui confèrent pas un caractère équivoque quant à la volonté d'accepter l'ouvrage par le maître ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la réception de l'ouvrage par la Sté CJP BATIMENT, maître de l'ouvrage, s'était opérée tacitement par l'entrée dans les lieux et le paiement des travaux ; que néanmoins, en présence d'un maître de l'ouvrage qui cumulait, en sus, les qualités de promoteur / vendeur / maître d'oeuvre, l'entrée dans les lieux et le paiement du prix des travaux ne manifestaient pas une volonté non équivoque d'accepter l'ouvrage qui soit opposable aux acquéreurs des appartements composant l'ouvrage ; que ces qualités cumulées entrent en conflit, au regard de la purge des vices apparents par le défaut de réserves, ceux-ci résultant d'une faute de la conception de la rampe d'accès dont la Sté CJP BATIMENT, maître d'oeuvre, avait la charge, et qu'il connaissait ; qu'en décidant que l'action, fondée sur l'article 1792 du code civil et exercée par des copropriétaires ayant constaté, lors de leur entrée dans les lieux, que les emplacements de parkings étaient inaccessibles, devait être rejetée, la cour d'appel qui a retenu l'existence d'une réception tacite sans réserves de l'ouvrage dont la Sté CJP BATIMENT savait qu'il était affecté de ce vice apparent mais qui n'a pas retenu que, du fait du cumul de qualités en la personne de la Sté CJP BATIMENT, la réception tacite, équivoque, ne pouvait pas, en conséquence, être opposée aux acquéreurs a, en statuant ainsi, violé la disposition susvisée ;

2) ALORS QUE conformément à l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit envers l'acquéreur de l'ouvrage des dommages qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs, le rendent impropre à sa destination ; qu'en l'espèce, le litige oppose à la Sté CJP BATIMENT constructeur et vendeur et à Monsieur X..., architecte, certains copropriétaires de l'immeuble 11 / ... qui, après avoir tenté d'utiliser les emplacements de parking attachés à leurs appartements, se sont rendu compte que l'accès comme la sortie du parking en sous sol de l'immeuble étaient quasiment impossibles, sans dommage pour les véhicules ; qu'en retenant, pour débouter les copropriétaires de leur action en réparation du préjudice résultant de l'impropriété à leur destination des parkings, exercée contre la Sté CJP BATIMENT, Monsieur X..., architecte, et leurs assureurs, que le vice était apparent pour le maître de l'ouvrage, également constructeur et vendeur, et pour l'architecte et que la réception, tacite, avait été faite sans réserves, la cour d'appel qui n'a pas retenu qu'à défaut de réception expresse ou judiciaire à l'initiative de la partie diligente, les acquéreurs n'avaient, pour leur part, découvert le vice affectant les parkings qu'après en avoir usé et disposaient en conséquence, à compter de cette date, de la faculté d'agir sur le fondement de la garantie décennale, la cour d'appel a, en statuant ainsi, violé la disposition susvisée ;

3) ALORS QUE, l'architecte, ayant la qualité de constructeur, dont le rôle s'exerce lors de la conception d'un ouvrage et lors de sa réception, avec ou sans réserves, est responsable à l'égard des acquéreurs sur le fondement de la garantie légale ; qu'en décidant que Monsieur X..., architecte, dont elle a relevé qu'il avait conçu le projet architectural et les plans dans le cadre de la demande de permis de construire, qui a relevé aussi que la rampe d'accès au parking n'était pas conforme aux normes et qu'aucune réception expresse n'avait été établie, mais qui a néanmoins retenu que les acquéreurs n'étaient pas fondés dans leur action en garantie légale, a, en statuant à nouveau violé l'article 1792 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 10-19725
Date de la décision : 07/09/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens, 30 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 07 sep. 2011, pourvoi n°10-19725


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Boulloche, SCP Boutet, SCP Piwnica et Molinié, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.19725
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