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20/07/2011 | FRANCE | N°10-85572

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 juillet 2011, 10-85572


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Johan X...,
- M. Didier Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 25 juin 2010, qui, dans l'information suivie contre eux des chefs de loterie illicite, prise de paris clandestins sur les courses de chevaux, complicité de loterie illicite, a prononcé sur leur requête en annulation de pièces de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 25 octobre

2010, joignant les pourvois et en prescrivant l'examen immédiat ;

Vu les mémoires...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur les pourvois formés par :

- M. Johan X...,
- M. Didier Y...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 25 juin 2010, qui, dans l'information suivie contre eux des chefs de loterie illicite, prise de paris clandestins sur les courses de chevaux, complicité de loterie illicite, a prononcé sur leur requête en annulation de pièces de la procédure ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 25 octobre 2010, joignant les pourvois et en prescrivant l'examen immédiat ;

Vu les mémoires et les observations produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé par Me Spinosi pour M. Y..., pris de la violation des articles 49 du Traité CE (56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne), 1er, 4 et 5 de la loi du 21 mai 1836, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a rejeté la requête en nullité présentée par M. Y... et dit qu'il a lieu de retenir que l'élément légal des infractions qui lui sont reprochées n'est pas contraire au droit communautaire ;

"aux motifs que, par arrêt du 18 janvier 2008, la cour a constaté qu'il se dégageait de la jurisprudence de la CJCE, résultant notamment des arrêts Schindler, Lââra, Zenatti et en dernier lieu des arrêts Gambelli et Placanica, que des restrictions à la libre prestation de services, découlant d'une autorisation limitée des jeux d'argent dans le cadre de droits spéciaux ou exclusifs accordés ou concédés à certains organismes pouvaient être justifiées, si elles étaient fondées sur des raisons impérieuses d'intérêt général, si elles garantissaient l'objectif poursuivi, si elles étaient proportionnées et nécessaires ; que la cour, s'estimant insuffisamment informée, a ordonné un supplément d'information pour déterminer si ces conditions étaient réunies ; que la cour a encore demandé au juge d'instruction chargé d'exécuter le supplément d'information de vérifier si les contrôles et vérifications déjà effectués tant à Malte, qu'au Royaume-Uni, n'avaient pas sauvegardé les raisons impérieuses d'intérêt général pouvant justifier les limitations à la libre prestation de services, cette demande de vérification étant faite par référence à un critère dégagé non par la CJCE mais par la chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt Zeturf du 10 juillet 2007 ; que depuis l'intervention de l'arrêt rendu par cette chambre le 18 janvier 2008, le droit positif applicable a connu des évolutions significatives ; que, sans se référer à la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 qui n'a pas d'effet sur la situation soumise à la cour, il convient de relever que, par arrêt du septembre 2009, la CJCE a apporté des précisions utiles à l'appréciation de la conformité du droit français au droit communautaire ; que cette juridiction a dit pour droit que l'article 49 CE relatif à la libre prestation de services, ne s'oppose pas à une réglementation d'un Etat membre, telle que celle du Portugal, qui interdit à des opérateurs établis dans d'autres Etats membres, où ils fournissent des services analogues, de proposer des jeux de hasard par l'internet sur le territoire dudit Etat membre ; que la CJCE, pour aboutir à cette conclusion, a relevé notamment qu'était seule en cause l'application de l'article 49 CE relatif à la libre prestation de service et non l'article 43 CE relatif à la liberté d'établissement, l'opérateur de jeux en ligne n'exerçant son activité au Portugal que par le biais d'Internet et sans intermédiaires établis dans ce pays ; qu'elle a considéré que la réglementation portugaise donnait lieu à une restriction à la libre prestation des services garantie par l'article 49 CE ;
qu'elle a relevé que des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique ou des raisons impérieuses d'intérêt général telles que les objectifs de protection des consommateurs, de prévention de la fraude et de l'incitation des citoyens à une dépense excessive liée au jeu ainsi que de prévention de troubles à l'ordre social pouvaient justifier ces restrictions ; qu'elle a relevé qu'il appartenait à chaque Etat membre d'apprécier, dans ces domaines, selon sa propre échelle de valeurs, les exigences que comporte la protection des intérêts concernés ; que la seule circonstance qu'un Etat membre a choisi un système de protection différent de celui adopté par les autres ne saurait avoir d'incidence sur l'appréciation de la nécessité et de la proportionnalité des dispositions prises en la matière, celles-ci devant seulement être appréciés au regard des objectifs poursuivis par les autorités compétentes de l'Etat membre concerné et du niveau de protection qu'elles entendent assurer ; qu'elle a retenu que les Etats membres étaient libres de fixer les objectifs de leur politique en matière de jeux de hasard et, le cas échéant, de définir avec précision le niveau de protection recherché, ces restrictions devant toutefois être proportionnées au but à atteindre et ne pas être discriminatoires ; qu'elle a ajouté (§ 60) que la réalisation d'un seul objectif invoqué par l'Etat membre pouvait justifier les restrictions, la législation nationale devant répondre au souci d'atteindre cet objectif de manière cohérente et systématique (§ 61) ;qu'examinant ensuite spécifiquement la réglementation portugaise elle a retenu que l'organisation et le fonctionnement de Santa Casa étaient régis par des considérations et des exigences visant la poursuite d'intérêt public, que cet organisme était soumis à un contrôle étroit des pouvoirs publics de sorte que cela pouvait permettre de canaliser l'exploitation des jeux dans un circuit contrôlé et être considéré comme apte à protéger les consommateurs contre des fraudes commises par des opérateurs ; que la CJCE a rejeté le principe de reconnaissance mutuelle (§ 69) ; que cet arrêt a été considéré par une partie de la doctrine, contrairement à certains responsables politiques cités par les demandeurs, comme rendant sans doute caduque la procédure en constatation de manquement entamée par la Commission à l'encontre de la France dès lors que la FDJ détenue à 72% par l'Etat et le PMU, groupement d'intérêt économique, étaient seuls habilités à offrir des jeux en ligne sous un contrôle étatique comparable à celui que l'Etat portugais exerçait sur Santa Casa (Paul B..., professeur de droit public à l'Ecole de droit de la Sorbonne, un monopole des jeux d'argent sur internet est compatible avec la libre prestation des services, JCP, G, n° 46, 9 novembre 2009, 440), cet universitaire relevant en outre que la CJCE avait, de la manière la plus claire, rejeté le principe de reconnaissance mutuelle sur lequel, elle ne s'était pas prononcée jusque là et que seul un avocat général avait appelé de ses voeux ; qu'il a été noté (Anne C..., professeur à Paris XII, La CJCE valide le monopole d'exploitation des paris sportifs sur internet attribué à un organisme d'utilité publique par l'Etat portugais, Communication Commerce électronique n° 12, décembre 2009, comm. 14) que, dans l'arrêt Santa Casa, la liberté d'établissement n'était pas en question comme dans les arrêts Gambelli et Placanica ; qu'il s'agissait d'une différence importante ; que la situation française, avant le vote de la loi nouvelle, correspondait davantage à la situation portugaise qu'à la situation italienne examinée par les arrêts Gambelli et Placanica puisque les opérateurs poursuivis en France n'étaient pas désireux d'y ouvrir des établissements, ce professeur estimant que la législation française n'aurait pas forcément été remise en cause par la juridiction luxembourgeoise ; que la chambre criminelle de la Cour de cassation a également été conduite à se prononcer le 3 juin 2009 (B. 110) sur la conformité du droit français des jeux à la réglementation européenne ; qu'elle a jugé que les dispositions de droit interne réservant l'organisation et l'exploitation des loteries à une société contrôlée par l'Etat, en l'espèce la FDJ, étaient commandées par une raison impérieuse d'intérêt général tenant à la protection de l'ordre public par la limitation des jeux et leur contrôle de sorte que la restriction apportée à la liberté de prestation de service garantie par l'article 49 CE qui en résultait était proportionnée à l'objectif poursuivi ; qu'en l'espèce, la situation française, qui réserve le monopole des jeux à la FDJ et au PMU et restreint la libre prestation de services, s'apparente à la situation portugaise sur laquelle la CJCE s'est prononcée le 8 septembre 2009 ; que n'est en cause, comme dans l'affaire Santa Casa, que l'application de l'article 49 CE, Unibet entendant intervenir en France par internet et ne revendiquant pas de s'y installer ; qu'à l'instar de Santa Casa, la FDJ est soumise à un contrôle étroit des pouvoirs publics ; qu'il s'agit d'une société contrôlée par l'Etat qui détient 72% de son capital, que son président est nommé par le président de la République, que cette société est soumise à la tutelle du ministère de l'intérieur pour les jeux d'argent, du ministère du budget pour son budget et son programme commercial, qu'elle est soumise au contrôle financier de l'Etat exercé par un contrôleur économique et financier nommé par le ministre des finances, que des représentants du ministère de l'économie siègent au conseil d'administration de même que des représentants du ministère de l'intérieur, de ministère de l'économie, des membres de la cour des comptes et de l'inspection des finances, que les services de l'inspection des finances et la Cour des comptes exercent des contrôles périodiques sur la société ; que les jeux proposés par la FDJ sont autorisés par les pouvoirs publics et leur réglementation publiée au journal Officiel ; que le PMU, est lui aussi sous la tutelle étroite de l'Etat ; que son organisation en groupement d'intérêt économique est régie par un texte réglementaire, en l'espèce le décret n° 97-456 du 5 mai 1997, que ses statuts sont approuvés par le ministre de l'agriculture et par le ministre du budget, que le rapport n° 223 fait par François D... au Sénat en 2002 relève que la tutelle de l'Etat s'exerce par le truchement des ministères de l'agriculture et du budget, que si le PDG est nommé par l'assemblée générale, en réalité, l'Etat s'efforce de peser sur cette désignation, qu'au conseil d'administration l'Etat a placé sept personnes sur les treize membres ; qu'ainsi, même si le Conseil d'Etat a dénié aux activités de ces deux organismes le caractère de mission de service public, ils n'en sont pas moins sous une tutelle certaine de l'Etat ; que la différence des domaines d'intervention entre Santa Casa, d'une part, et la FDJ et le PMU, d'autre part, n'a aucune incidence sur l'existence de cette tutelle, critère retenu par la CJCE ; qu'ainsi que la CJCE l'estime possible, la France a fixé les objectifs de sa politique en matière de jeux de hasard et défini avec précision le niveau de protection recherché en autorisant seulement la FDJ et le PMU à organiser les loteries et les paris ; qu'ainsi que l'a retenu la chambre criminelle de la Cour de cassation, approuvant la cour d'appel de Paris, les dispositions de la réglementation française sont destinées à protéger l'ordre public par la limitation des jeux et leur contrôle et qu'elles sont, à l'instar des dispositions de la législation portugaise, destinées à protéger les consommateurs contre la criminalité, plus spécifiquement la protection des consommateurs contre les risques de fraude commises par les opérateurs ; que, s'agissant des paris sur les courses de chevaux, la nécessité de maintenir l'équilibre financier de la filière hippique et de soutenir le développement rural peut caractériser une raison impérieuse d'intérêt général supplémentaire justifiant les restrictions apportées à l'article 49 CE ; que le constat, fait par la CJCE, de ce que l'importance des sommes que les jeux en ligne permettent de collecter et celle des gains qu'ils peuvent offrir aux joueurs entraînent des risques élevés de délits et de fraudes vaut tout autant pour la France que pour le Portugal ; que l'hypothèse qu'un opérateur parrainant des compétitions sur lesquelles il prend des paris et des équipes participant à ces compétitions se trouve dans une situation qui lui permette d'influencer le résultat et augmente ses profits est tout aussi réalisable en France qu'au Portugal ; que la situation française permet, comme la situation portugaise, de canaliser l'exploitation des jeux dans un circuit contrôlé et de prévenir les risques d'une telle exploitation à des fins frauduleuses ou criminelles, comme l'a retenu la CJCE ; que les demandeurs soutiennent que les restrictions résultant de la mise en oeuvre de la réglementation française ne seraient pas proportionnées, nécessaires, non discriminatoires, cohérentes et systématiques ; que la CJCE ayant, dans l'arrêt Santa Casa, expressément rejeté le principe de reconnaissance mutuelle alors qu'auparavant le doute était permis, la Commission et un avocat général de la CJCE s'étant prononcés en faveur de ce principe ce que la chambre commerciale de la Cour de cassation avait retenu dans l'arrêt Zeturf , il ne saurait être reproché à la législation française de ne pas être proportionnée (mémoire Y... p. 7) ou discriminatoire en refusant de prendre en compte les contrôles effectués dans un autre Etat membre ; que la comparaison faite par les demandeurs avec l'arrêt de la CJCE du 6 octobre 2009, en manquement contre l'Espagne, est inopérant dès lors que retenir qu'Etat ne peut présumer de manière générale et sans distinction que des organismes établis dans un autre Etat membre se livre à des activités criminelles ne signifie nullement que le principe de reconnaissance mutuelle est consacré ; que le fait que le PMU et la FDJ présentent une offre diversifiée n'est pas la preuve que les restrictions ne répondent pas véritablement au souci d'atteindre l'objectif, invoqué, de limitation des jeux ; qu'en effet la CJCE admet qu'une politique d'expansion contrôlée dans le secteur des jeux de hasard peut être tout à fait cohérente avec l'objectif visant à attirer des joueurs exerçant des activités de jeux et de paris clandestins interdites en tant que telles vers des activités autorisées et réglementées (arrêt Placanica) ; que la cour d'appel de Paris, approuvée par la chambre criminelle de la Cour de cassation a, analysant le système français, fait le constat que le système français répondait à ces conditions ; que dans le cadre de la prévention du blanchiment, les opérateurs autorisés à proposer leur offre en France sont astreints à émettre des déclarations de soupçons à Tracfin, à vérifier l'identité des gagnants de sommes supérieures à 5 000 euros, à conserver pendant cinq ans la trace des montants gagnés et des gagnants, que la FDJ a mis en place des règles de fonctionnement destinés à éviter les risques de blanchiment comme l'ont fait valoir les autorités françaises dans leur réponse à la Commission européenne ; que le taux de retour aux joueurs, inférieur à celui offert par les opérateurs non autorisés, est également un facteur de prévention du blanchiment ; s'agissant de la prévention des occasions de fraude, que la FDJ n'offre pas de paris sur les compétitions dans lesquelles elle parraine une des équipes alors que tel n'est pas le cas de tous les opérateurs non autorisés ; que sur la limitation des jeux, que l'octroi d'un taux de retour aux joueurs, inférieur à celui offert par les opérateurs non autorisés, est de nature à limiter le nombre de parieurs et à restreindre les risques d'addiction des joueurs pris individuellement ; que des mesures sont prises pour responsabiliser les joueurs de la FDJ (décrites notamment dans le second rapport D... de novembre 2006, charte éthique, précautions prises pour interdire l'accès aux mineurs à qui les jeux de loterie sont interdits depuis le décret 2007-729 du 7 mai 2007 et reconnu comme performant dans le rapport du 25 février 2010 de la Commission des finances de l'Assemblée nationale, plafonnement des enjeux en montant et par période, préférence donnée au réseau "en dur", faible part donnée aux paris sportifs, etc...) et celles prises par le PMU (pas de course virtuelle, limitation du montant des enjeux, taux de retour aux joueurs encadré, offre majoritairement proposée dans le réseau physique, plan d'action jeu responsable) qui, nonobstant les critiques des concurrents non autorisés, ne sont pas moins efficaces que celles prises par ces mêmes concurrents ; que la FDJ limite ses dépenses de publicité à 0,64% de son chiffre d'affaires, ce pourcentage étant en baisse entre 2005 et 2009 ; qu'ainsi la France est classée 14e des nations européennes pour la part que les ménages consacrent au jeu et au 33e rang mondial en ce qui concerne les loteries ; que la part relative du pari hippique dans le budget des ménages français a diminué de façon sensible depuis 35 ans ; que la politique du PMU, en l'absence de maximisation des profits, ne conduit pas à retenir que le financement d'activités sociales ou d'intérêt général au moyen de prélèvements sur les recettes provenant des jeux autorisés se limite à constituer une conséquence bénéfique accessoire de la restriction en cause, et non sa justification réelle ; qu'il ne saurait, dans ces conditions, être retenu que les restrictions instaurées par le système français ne seraient pas cohérentes, systématiques, proportionnées, nécessaires et non discriminatoires ; qu'il sera enfin noté que le vote et la promulgation de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 ne constituent nullement la démonstration de ce que le système français antérieur n'était pas conforme au droit communautaire ; qu'en effet la nouvelle loi maintient un système de prohibition qui connaissait déjà des dérogations, ouvrant plus largement le nombre d'opérateurs autorisés (cf considérants 5 à 7 décision Cons.12 mai 2010) ; qu'il y a donc lieu de retenir que l'élément légal des infractions reprochées à MM. Y... et X... n'est pas contraire au droit communautaire ; qu'ainsi, il n'y a pas lieu d'annuler les actes ayant pour fondement l'existence des infractions prévues par le droit interne ; que, par conséquent, il convient de rejeter les requêtes en annulation présentées ;

1°) "alors qu'il résulte de la jurisprudence communautaire qu'une restriction à la libre prestation de services découlant d'une autorisation limitée des jeux d'argent accordée à certains organismes n'est pas justifiée par l'ordre public social lorsque "les autorités de l'Etat incitent et encouragent les consommateurs à participer aux loteries, aux jeux de hasard ou aux jeux de paris, afin que le Trésor public en retire des bénéfices sur le plan financier" (CJUE, grande chambre, Carmen Media Group Ltd, 8 septembre 2010) ; qu'en jugeant que l'offre diversifiée présentée par le PMU et la FDJ n'est pas la preuve que les restrictions ne répondent pas au souci d'atteindre l'objectif invoqué de limitation des jeux, lorsque, au sens du droit communautaire, une offre commerciale diversifiée est susceptible de caractériser un encouragement à la participation aux jeux de hasard incompatible avec une restriction à la libre prestation de services, la chambre de l'instruction a méconnu l'article 49 du Traité CE ;

2°) "alors que toute restriction à la libre prestation de services découlant d'une autorisation limitée des jeux d'argent accordée à certains organismes n'est justifiée que si elle est nécessaire et proportionnée aux objectifs qu'elle recherche et doit répondre, au vu de ses modalités concrètes d'application, au souci d'atteindre cet objectif d'une manière cohérente et systématique, ce qui exclut l'adoption d'une politique expansive dans le secteur des jeux aux fins d'augmenter les recettes de l'Etat ; qu'en affirmant de façon péremptoire, et sans s'en expliquer autrement, que l'offre diversifiée présentée par le PMU et la FDJ n'est pas la preuve que les restrictions ne répondent pas au souci d'atteindre l'objectif invoqué de limitation des jeux, lorsque la démonstration de la nécessité de la restriction et de la cohérence du système est une condition de la conformité du droit national avec le droit communautaire, la chambre de l'instruction a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 49 du Traité CE ;

3°) "alors, nonobstant le rejet du principe de la reconnaissance mutuelle, il appartient aux juges nationaux de tenir compte des garanties offertes par l'Etat d'origine de l'entreprise ressortissante communautaire, la Cour de justice des communautés européennes ayant expressément jugé que "les autorités d'un Etat membre ne sauraient valablement présumer, de manière générale et sans distinction, que les organismes et entités établis dans un autre Etat membre se livrent à des activités criminelles" (6 octobre 2009, Commission c/ Royaume d'Espagne, § 39) ; qu'en refusant de procéder à ce contrôle, requis par le droit communautaire et auquel elle était invitée, la chambre de l'instruction a de plus fort privé sa décision de base légale au regard de l'article 49 du Traité CE" ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé par la société civile professionnelle Tiffreau, Corlay et Marlange pour M. X..., pris de la violation des articles 49 du Traité instituant la Communauté européenne (Traité CE), devenu l'article 56 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (Traité FUE), 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 1er, 3 et 4 de la loi du 21 mai 1836, 1er et 3 de la loi du 12 juillet 1983, 4 de la loi du 2 juin 1891, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la requête en annulation présentée par M. X... ;

"aux motifs que sur la conformité de la législation française au droit européen : que, par arrêt du 18 janvier 2008, la cour a constaté qu'il se dégageait de la jurisprudence de la CJCE, résultant notamment des arrêts Schindler, Lââra, Zenatti et en dernier lieu des arrêts Gambelli et Placanica, que des restrictions à la libre prestation de services, découlant d'une autorisation limitée des jeux d'argent dans le cadre de droits spéciaux ou exclusifs accordés ou concédés à certains organismes pouvaient être justifiées, si elles étaient fondées sur des raisons impérieuses d'intérêt général, si elles garantissaient l'objectif poursuivi, si elles étaient proportionnées et nécessaires ; que la cour, s'estimant insuffisamment informée, a ordonné un supplément d'information pour déterminer si ces conditions étaient réunies ; que la cour a encore demandé au juge d'instruction chargé d'exécuter le supplément d'information de vérifier si les contrôles et vérifications déjà effectués tant à Malte, qu'au Royaume-Uni, n'avaient pas sauvegardé les raisons impérieuses d'intérêt générai pouvant justifier les limitations à la libre prestation de services, cette demande de vérification étant faite par référence à un critère dégagé non par la CJCE mais par la chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt Zeturf du 10 juillet 2007 ; que depuis l'intervention de l'arrêt rendu par cette chambre le 18 janvier 2008, le droit positif applicable a connu des évolutions significatives ; que, sans se référer à la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 qui n'a pas d'effet sur la situation soumise à la cour, il convient de relever que, par arrêt du 8 septembre 2009, la CJCE a apporté des précisions utiles à l'appréciation de la conformité du droit français au droit communautaire ; que cette juridiction a dit pour droit que l'article 49 CE relatif à la libre prestation de services, ne s'oppose pas à une réglementation d'un Etat membre, telle que celle du Portugal, qui interdit à des opérateurs établis dans d'autres Etats membres, où ils fournissent des services analogues, de proposer des jeux de hasard par l'Internet sur le territoire dudit Etat membre ; que la CJCE, pour aboutir à cette conclusion, a relevé notamment qu'était seule en cause l'application de l'article 49 CE relatif à la libre prestation de service et non l'article 43 CE relatif à la liberté d'établissement, l'opérateur de jeux en ligne n'exerçant son activité au Portugal que par le biais d'Internet et sans intermédiaires établis dans ce pays ; qu'elle a considéré que la réglementation portugaise donnait lieu à une restriction à la libre prestation des services garantie par l'article 49 CE ;
qu'elle a relevé que des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique ou des raisons impérieuses d'intérêt général telles que les objectifs de protection des consommateurs, de prévention de la fraude et de l'incitation des citoyens à une dépense excessive liée au jeu ainsi que de prévention de troubles à l'ordre social pouvaient justifier ces restrictions ; qu'elle a relevé qu'il appartenait à chaque Etat membre d'apprécier, dans ces domaines, selon sa propre échelle de valeurs, les exigences que comporte la protection des intérêts concernés ; que la seule circonstance qu'un Etat membre a choisi un système de protection différent de celui adopté par les autres ne saurait avoir d'incidence sur l'appréciation de la nécessité et de la proportionnalité des dispositions prises en la matière, celles-ci devant seulement être appréciés au regard des objectifs poursuivis par les autorités compétentes de l'Etat membre concerné et du niveau de protection qu'elles entendent assurer ; qu'elle a retenu que les Etats membres étaient libres de fixer les objectifs de leur politique en matière de jeux de hasard et, le cas échéant, de définir avec précision le niveau de protection recherché, ces restrictions devant toutefois être proportionnées au but à atteindre et ne pas être discriminatoires ; qu'elle a ajouté (§ 60) que la réalisation d'un seul objectif invoqué par l'Etat membre pouvait justifier les restrictions, la législation nationale devant répondre au souci d'atteindre cet objectif de manière cohérente et systématique (§ 61) ; qu'examinant ensuite spécifiquement la réglementation portugaise elle a retenu que l'organisation et le fonctionnement de Santa Casa étaient régis par des considérations et des exigences visant la poursuite d'intérêt public, que cet organisme était soumis à un contrôle étroit des pouvoirs publics de sorte que cela pouvait permettre de canaliser l'exploitation des jeux dans un circuit contrôlé et être considéré comme apte à protéger les consommateurs contre des fraudes commises par des opérateurs ; que la CJCE a rejeté le principe de reconnaissance mutuelle (§ 69) ; que cet arrêt a été considéré par une partie de la doctrine, contrairement à certains responsables politiques cités par les demandeurs, comme rendant sans doute caduque la procédure en constatation de manquement entamée par la Commission à rencontre de la France dès lors que la FDJ détenue à 72% par l'Etat et le PMU, groupement d'intérêt économique, étaient seuls habilités à offrir des jeux en ligne sous un contrôle étatique comparable à celui que l'Etat portugais exerçait sur Santa Casa (Paul B..., professeur de droit public à l'Ecole de droit de la Sorbonne, Un monopole des jeux d'argent sur Internet est compatible avec la libre prestation des services, JCP, G, n° 46, 9 novembre 2009, 440), cet universitaire relevant en outre que la CJCE avait, de la manière la plus claire, rejeté le principe de reconnaissance mutuelle sur lequel, elle ne s'était pas prononcée jusque là et que seul un avocat général avait appelé de ses voeux ; qu'il a été noté (Anne C..., professeur à Paris XII, La CJCE valide le monopole d'exploitation des parís sportifs sur Internet attribué à un organisme d'utilité publique par l'Etat portugais, Communication Commerce électronique /1° 12, décembre 2009, comm. 14) que, dans l'arrêt Santa Casa, la liberté d'établissement n'était pas en question comme dans les arrêts Gambelli et Placanica ; qu'il s'agissait d'une différence importante ; que la situation française, avant le vote de la loi nouvelle, correspondait davantage à la situation portugaise qu'à la situation italienne examinée par les arrêts Gambelli et Placanica puisque les opérateurs poursuivis en France n'étaient pas désireux d'y ouvrir des établissements, ce professeur estimant que la législation française n'aurait pas forcément été remise en cause par la juridiction luxembourgeoise ; que la chambre criminelle de la Cour de cassation a également été conduite à se prononcer le 3 juin 2009 (B. 110) sur la conformité du droit français des jeux à la réglementation européenne ; qu'elle a jugé que les dispositions de droit interne réservant l'organisation et l'exploitation des loteries à une société contrôlée par l'Etat, en l'espèce la FDJ, étaient commandées par une raison impérieuse d'intérêt général tenant à la protection de l'ordre public par la limitation des jeux et leur contrôle de sorte que la restriction apportée à la liberté de prestation de service garantie par l'article 49 CE qui en résultait était proportionnée à l'objectif poursuivi ; qu'en l'espèce, la situation française, qui réserve le monopole des jeux à la FDJ et au PMU et restreint la libre prestation de services, s'apparente à la situation portugaise sur laquelle la CJCE s'est prononcée le 8 septembre 2009 ; que n'est en cause, comme dans l'affaire Santa Casa, que l'application de l'article 49 CE, Unibet entendant intervenir en France par Internet et ne revendiquant pas de s'y installer ; qu'à l'instar de Santa Casa, la FDJ est soumise à un contrôle étroit des pouvoirs publics ; qu'il s'agit d'une société contrôlée par l'Etat qui détient 72% de son capital, que son président est nommé par le président de la République, que cette société est soumise à la tutelle du ministère de l'intérieur pour les jeux d'argent, du ministère du budget pour son budget et son programme commercial, qu'elle est soumise au contrôle financier de l'Etat exercé par un contrôleur économique et financier nommé par le ministre des finances, que des représentants du ministère de l'économie siègent au conseil d'administration de même que des représentants du ministère de l'intérieur, de ministère de l'économie, des membres de la cour des comptes et de l'inspection des finances, que les services de l'inspection des finances et la Cour des comptes exercent des contrôles périodiques sur la société ; que les jeux proposés par la FDJ sont autorisés par les pouvoirs publics et leur réglementation publiée au Journal officiel ; que le PMU, est lui aussi sous la tutelle étroite de l'Etat ; que son organisation en groupement d'intérêt économique est régie par un texte réglementaire, en l'espèce le décret n° 97-456 du 5 mai 1997, que ses statuts sont approuvés par le ministre de l'agriculture et par le ministre du budget, que le rapport n° 223 fait par François D... au Sénat en 2002 relève que la tutelle de l'Etat s'exerce par le truchement des ministères de l'agriculture et du budget, que si le PDG est nommé par l'assemblée générale, en réalité, l'Etat s'efforce de peser sur cette désignation, qu'au conseil d'administration l'Etat a placé sept personnes sur les treize membres ; qu'ainsi, même si le Conseil d'Etat a dénié aux activités de ces deux organismes le caractère de mission de service public, Ils n'en sont pas moins sous une tutelle certaine de l'Etat ; que la différence des domaines d'intervention entre Santa Casa, d'une part, et la FDJ et le PMU, d'autre part, n'a aucune incidence sur l'existence de cette tutelle, critère retenu par la CJCE ; qu'ainsi que la CJCE l'estime possible, la France a fixé les objectifs de sa politique en matière de jeux de hasard et défini avec précision le niveau de protection recherché en autorisant seulement la FDJ et le PMU a organiser les loteries et les paris ; qu'ainsi que l'a retenu la chambre criminelle de la Cour de cassation, approuvant la cour d'appel de Paris, les dispositions de la réglementation française sont destinées à protéger l'ordre public par la limitation des jeux et leur contrôle et qu'elles sont, à l'instar des dispositions de la législation portugaise, destinées à protéger les consommateurs contre la criminalité, plus spécifiquement la protection des consommateurs contre les risques de fraude commises par les opérateurs ; que, s'agissant des paris sur les courses de chevaux, la nécessité de maintenir l'équilibre financier de la filière hippique et de soutenir le développement rural peut caractériser une raison impérieuse d'intérêt général supplémentaire justifiant les restrictions apportées à l'article 49 CE ; que le constat, fait par la CJCE, de ce que l'importance des sommes que les jeux en ligne permettent de collecter et celle des gains qu'ils peuvent offrir aux joueurs entraînent des risques élevés de délits et de fraudes vaut tout autant pour la France que pour le Portugal ; que l'hypothèse qu'un opérateur parrainant des compétitions sur lesquelles il prend des paris et des équipes participant à ces compétitions se trouve dans une situation qui lui permette d'influencer le résultat et augmente ses profits est tout aussi réalisable en France qu'au Portugal ; que la situation française permet, comme la situation portugaise, de canaliser l'exploitation des jeux dans un circuit contrôlé et de prévenir les risques d'une telle exploitation à des fins frauduleuses ou criminelles, comme l'a retenu la CJCE ; considérant que les demandeurs soutiennent que les restrictions résultant de la mise en oeuvre de la réglementation française ne seraient pas proportionnées, nécessaires, non discriminatoires, cohérentes et systématiques ; que la CJCE ayant, dans l'arrêt Santa Casa, expressément rejeté le principe de reconnaissance mutuelle alors qu'auparavant le doute était permis, la Commission et un avocat général de la CJCE s'étant prononcés en faveur de ce principe ce que la chambre commerciale de la Cour de cassation avait retenu dans l'arrêt Zeturf, il ne saurait être reproché à la législation française de ne pas être proportionnée (mémoire DEWYN p. 7) ou discriminatoire en refusant de prendre en compte les contrôles effectués dans un autre Etat membre ; que la comparaison faite par les demandeurs avec l'arrêt de la CJCE du 6 octobre 2009, en manquement contre l'Espagne, est inopérant dès lors que retenir qu'un Etat membre ne peut présumer de manière générale et sans distinction que des organismes établis dans un autre Etat membre se livre à des activités criminelles ne signifie nullement que le principe de reconnaissance mutuelle est consacré ;
que le fait que le PMU et la FDJ présentent une offre diversifiée n'est pas la preuve que les restrictions ne répondent pas véritablement au souci d'atteindre l'objectif, invoqué, de limitation des jeux ; qu'en effet la CJCE admet qu' une politique d'expansion contrôlée dans le secteur des jeux de hasard peut être tout à fait cohérente avec l'objectif visant à attirer des joueurs exerçant des activités de jeux et de paris clandestins interdites en tant que telles vers des activités autorisées et réglementées (arrêt Placanica) ; que la cour d'appel de Paris, approuvée par la chambre criminelle de la Cour de cassation a, analysant le système français, fait le constat que le système français répondait à ces conditions ; que dans le cadre de la prévention du blanchiment, les opérateurs autorisés à proposer leur offre en France sont astreints à émettre des déclarations de soupçons à Tracfin, à vérifier l'identité des gagnants de sommes supérieures à 5 000 euros, à conserver pendant 5 ans la trace des montants gagnés et des gagnants, que la FDJ a mis en place des règles de fonctionnement destinés à éviter les risques de blanchiment comme l'ont fait valoir les autorités françaises dans leur réponse à la Commission européenne ; que le taux de retour aux joueurs, inférieur à celui offert par les opérateurs non autorisés, est également un facteur de prévention du blanchiment ; que s'agissant de la prévention des occasions de fraude, que la FDJ n'offre pas de paris sur les compétitions dans lesquelles elle parraine une des équipes alors que tel n'est pas le cas de tous les opérateurs non autorisés ; que sur la limitation des jeux, que l'octroi d'un taux de retour aux joueurs, inférieur à celui offert par les opérateurs non autorisés, est de nature à limiter le nombre de parieurs et à restreindre les risques d'addiction des joueurs pris individuellement ; que des mesures sont prises pour responsabiliser les joueurs de la FDJ (décrites notamment dans le second rapport D... de novembre 2006, charte éthique, précautions prises pour interdire l'accès aux mineurs à qui les jeux de loterie sont interdits depuis le décret 2007-729 du 7 mai 2007 et reconnu comme performant dans le rapport du 25 février 2010 de la commission des finances de l'Assemblée Nationale, plafonnement des enjeux en montant et par période, préférence donnée au réseau "en dur", faible part donnée aux paris sportifs, etc.) et celles prises par le P.M.U. (pas de course virtuelle, limitation du montant des enjeux, taux de retour aux joueurs encadré, offre majoritairement proposée dans le réseau physique, plan d'action jeu responsable) qui, nonobstant les critiques des concurrents non autorisés, ne sont pas moins efficaces que celles prises par ces mêmes concurrents ; que la FDJ limite ses dépenses de publicité à 0,64% de son chiffre d'affaires, ce pourcentage étant en baisse entre 2005 et 2009 ; qu'ainsi la France est classée 14e des nations européennes pour la part que les ménages consacrent au jeu et au 33e du rang mondial en ce qui concerne les loteries ; que la part relative du pari hippique dans le budget des ménages français a diminué de façon sensible depuis 35 ans ; que la politique du PMU, en l'absence de maximisation des profits, ne conduit pas à retenir que le financement d'activités sociales ou d'intérêt général au moyen de prélèvements sur les recettes provenant des jeux autorisés se limite à constituer une conséquence bénéfique accessoire de la restriction en cause, et non sa justification réelle ; considérant qu'il ne saurait, dans ces conditions, être retenu que les restrictions instaurées par le système français ne seraient pas cohérentes, systématiques, proportionnées, nécessaires et non discriminatoires ; considérant qu'il sera enfin noté que le vote et la promulgation de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 ne constituent nullement la démonstration de ce que le système français antérieur n'était pas conforme au droit communautaire ; qu'en effet la nouvelle loi maintient un système de prohibition qui connaissait déjà des dérogations, ouvrant plus largement le nombre d'opérateurs autorisés (Cf Considérants 5 à 7 décision Cons. 12 mai 2010) ; qu'il y a donc lieu de retenir que l'élément légal des infractions reprochées à MM. Y... et X... n'est pas contraire au droit communautaire ; qu'ainsi, il n'y a pas lieu d'annuler les actes ayant pour fondement l'existence des infractions prévues par le droit interne ; que, par conséquent, il convient de rejeter les requêtes en annulation présentées ;

1°) alors que les articles 4 et 5 de la loi du 2 juin 1891, dans leur rédaction antérieure à la loi du 12 mai 2010, sont contraires aux droits fondamentaux garantis par la Constitution, en particulier aux principes constitutionnels de liberté d'entreprendre, de liberté du commerce et de l'industrie et de libre concurrence, en ce qu'ils limitent le droit d'organiser et de promouvoir des paris sur les courses de chevaux ; qu'il y a lieu de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; que la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, privera l'arrêt attaqué de fondement juridique ;

2°) alors que les articles 1er et 3 de la loi du 21 mai 1836, dans leur rédaction antérieure à la loi du 12 mai 2010, et 136 de la loi du 31 mai 1933, sont contraires aux droits fondamentaux garantis par la Constitution, en particulier aux principes constitutionnels de liberté d'entreprendre, de liberté du commerce et de l'industrie et de libre concurrence, en ce qu'ils limitent le droit d'organiser et de promouvoir des jeux de loterie ; qu'il y a lieu de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; que la déclaration d'inconstitutionnalité qui interviendra, privera l'arrêt attaqué de fondement juridique ;

3°) alors qu'il résulte de la jurisprudence communautaire qu'une restriction à la libre prestation de services, découlant d'une autorisation limitée des jeux d'argent dans le cadre de droits spéciaux ou exclusifs accordés ou concédés à certains organismes, ne peut être justifiée que par des raisons impérieuses d'intérêt général (CJCE 6 novembre 2003, Gambelli, C-243/01, § 65) ; que le financement d'activités sociales ou d'intérêt général au moyen de prélèvements sur les recettes provenant des jeux autorisés ne constitue pas une raison impérieuse d'intérêt général de nature à justifier une restriction à la libre prestation de services (CJCE Gambelli, § 61) ; qu'en jugeant que "la nécessité de maintenir l'équilibre financier de la filière hippique et de soutenir le développement rural" pouvait caractériser une "raison impérieuse d'intérêt général" de nature à justifier les restrictions apportées à l'article 49 du Traité CE (devenu l'article 56 du Traité FUE), concernant les paris sur les courses de chevaux, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

4°) "alors qu' il résulte de la jurisprudence communautaire qu'une restriction à la libre prestation de services, découlant d'une autorisation limitée des jeux d'argent dans le cadre de droits spéciaux ou exclusifs accordés ou concédés à certains organismes, ne peut être justifiée que si elle est propre à garantir la réalisation des objectifs qu'elle vise ; que si les objectifs visés sont à la fois la prévention de l'exploitation des jeux à des fins criminelles ou frauduleuses, et la limitation des occasions de jeux afin notamment de lutter contre les risques d'addiction, la restriction en cause doit répondre au souci d'atteindre véritablement ces objectifs de manière cohérente et systématique ; que tel n'est pas le cas si le cadre normatif permet aux organismes susvisés de mener une politique d'expansion des jeux autorisés inconciliable avec l'objectif de limitation des jeux, en recourant notamment à des campagnes publicitaires actives d'incitation au jeu (CJCE 6 novembre 2003, Gambelli, C-243/01, § 69 ; CJCE 8 septembre 2010, Markus E..., C-316/07, § 83 et 103) ; qu'en se bornant à affirmer que "le fait que le PMU et la FDJ présentent une offre diversifiée n'est pas la preuve que les restrictions ne répondent pas véritablement au souci d'atteindre l'objectif, invoqué, de limitation des jeux", sans se prononcer, comme elle y était invitée (mémoire X..., p. 12 et s.), sur la forte augmentation du chiffre d'affaires de la FDJ et du PMU, ni sur l'offre démesurée de leurs jeux et paris résultant notamment de la densification extrême de leurs réseaux de points de vente et du développement de leurs sites internet commerciaux, ni sur la diversification de leurs publicités et la conclusion de nombreux partenariats visant à promouvoir et développer leurs jeux et paris, et sans rechercher si, au regard de ces éléments essentiels, la FDJ et le PMU menaient une politique d'expansion de leurs jeux inconciliable avec l'objectif de limitation des jeux, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard de l'article 49 du Traité CE (devenu l'article 56 du Traité FUE) ;

5°) alors qu'il résulte de la jurisprudence communautaire qu'une restriction à la libre prestation de services, découlant d'une autorisation limitée des jeux d'argent dans le cadre de droits spéciaux ou exclusifs accordés ou concédés à certains organismes, ne peut être justifiée que si elle est propre à garantir la réalisation des objectifs qu'elle vise, et si elle répond au souci d'atteindre véritablement ces objectifs, de manière cohérente et systématique ; que l'appréciation de cette cohérence doit se faire de manière globale, en prenant en considération l'ensemble du secteur des jeux d'argent ; qu'ainsi, l'instauration d'un monopole sur des jeux de loterie ou des paris hippiques ne peut être regardée comme propre à garantir la réalisation de l'objectif de limitation des jeux si, à l'égard d'autres types de jeux de hasard ne relevant pas dudit monopole et présentant en outre un potentiel de risque d'assuétude supérieur aux jeux soumis à ce monopole, les autorités compétentes mènent ou tolèrent des politiques d'expansion de l'offre de nature à développer et à stimuler les activités de jeu (CJCE 8 septembre 2010, Markus E..., C-316/07) ; qu'en se bornant à affirmer que "le fait que le PMU et la FDJ présentent une offre diversifiée n'est pas la preuve que les restrictions ne répondent pas véritablement au souci d'atteindre l'objectif, invoqué, de limitation des jeux", sans rechercher, de façon globale, comme elle y était invitée (mémoire X..., p. 14 et s.), si les autorités françaises encourageaient par ailleurs le développement de l'activité des casinos et l'expansion de "machines à sous" favorisant le plus les comportements de dépendance, de sorte que l'objectif de limitation des jeux ne pouvait être regardé comme poursuivi de manière cohérente et systématique, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard de l'article 49 du Traité CE (devenu l'article 56 du Traité FUE) ;

6°) "alors qu' il résulte de la jurisprudence communautaire qu'une restriction à la liberté d'organiser et de promouvoir des jeux n'est compatible avec l'article 49 du Traité CE (devenu l'article 56 du Traité FUE) que si elle proportionnée et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs visés ; que, pour apprécier cette proportionnalité, le juge doit notamment tenir compte des garanties offertes par l'Etat membre de l'Union européenne dans lequel est établi le prestataire de services de jeux (CJCE 6 novembre 2003, Gambelli, C-243/01, § 73), quand bien même il n'existe pas de principe de reconnaissance mutuelle en matière de jeux et paris ; qu'en refusant de rechercher si, compte tenu des garanties offertes par l'Etat d'établissement de l'opérateur de jeux, les monopoles litigieux de la FDJ et du PMU constituaient des restrictions disproportionnées et allant au-delà de ce qui était nécessaire pour atteindre les objectifs d'intérêt général prétendument visés, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard de l'article du Traité CE (devenu l'article 56 du Traité FUE) ;

7° )alors qu'une restriction à la liberté d'organiser et de promouvoir des jeux n'est compatible avec l'article 49 du Traité CE (devenu l'article 56 du Traité FUE) que si elle proportionnée et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs visés ; que la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 a ouvert le marché des jeux et paris, en substituant aux monopoles litigieux de la FDJ et du PMU, un régime d'agrément de plusieurs opérateurs de jeux concurrents ; qu'en affirmant que cette loi "ne constitue nullement la démonstration de ce que le système français antérieur n'était pas conforme au droit communautaire", sans rechercher si, au moment des faits litigieux, un régime d'agrément de plusieurs opérateurs de jeux concurrents, tel que celui mis en place en 2010, aurait permis d'atteindre les objectifs de lutte contre la fraude et de limitation des jeux, et si les restrictions plus graves à la liberté de prestation de services résultant des monopoles litigieux, n'allaient donc pas au-delà de ce qui était nécessaire pour atteindre ces objectifs, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard de l'article 49 du Traité CE (devenu l'article 56 du Traité FUE) ;

Les moyens étant réunis ;

Sur le moyen proposé pour M. Y... :

Sur le moyen proposé pour M. X..., pris en ses 3e à 7e branches :

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que M. Johan X..., directeur général de la société Unibet, titulaire de licences de jeux dans différents Etats européens, appartenant à un groupe coté à la bourse de Stockholm, et M. Didier Y..., vice-directeur général de ladite société, sont poursuivis des chefs de chefs de loterie illicite, prise de paris clandestins sur les courses de chevaux, complicité, publicité de loterie illicite, pour avoir proposé, via le site internet "www.Mrbookmaker.com", des paris sur différentes compétitions sportives et courses hippiques se déroulant en France ;

Attendu que, pour rejeter l'exception de nullité de leur mise en examen prise de la non-conformité au droit communautaire, d'une part, de la loi du 2 juin 1891 qui réserve au groupement d'intérêt économique sans but lucratif Pari mutuel urbain (PMU) un droit exclusif pour organiser hors des hippodromes des paris sur les courses hippiques ayant lieu en France, d'autre part, des dispositions combinées de la loi du 21 mai 1836 et du décret du 9 novembre 1978 qui réservent l'organisation et l'exploitation des loteries à la société Française des jeux (FDJ) contrôlée par l'Etat, l'arrêt relève que ces réglementations ont pour objet de protéger l'ordre public par le contrôle et la limitation des jeux du hasard ainsi que les consommateurs contre les risques de fraude commises par les opérateurs ; que le juges ajoutent que l'importance des sommes que les jeux en ligne permettent de collecter et celle des gains qu'ils peuvent offrir aux joueurs entraînent des risques élevés de délits et de fraudes ; qu'ils énoncent que la situation française permet de canaliser l'exploitation des jeux dans un circuit contrôlé et de prévenir les risques d'une telle exploitation à des fins frauduleuses ou criminelles ; qu'ils ajoutent que le fait que le PMU et la FDJ présent une offre diversifiée n'est pas la preuve que les restrictions ne répondent pas véritablement au souci d'atteindre l'objectif invoqué de limitation des jeux ; qu'ils en déduisent, après avoir énuméré différents éléments caractérisant la mise en oeuvre d'une publicité de nature à limiter les jeux, qu'il ne saurait, dans ces conditions, être retenu que les restrictions instaurées par le système français ne sont pas cohérentes, systématiques, proportionnées, nécessaires et non discriminatoires ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que, d'une part, une politique d'expansion contrôlée dans le secteur des jeux de hasard peut être tout à fait cohérente avec l'objectif visant à attirer des joueurs exerçant des activités de jeux et de paris clandestins interdites en tant que telles vers des activités autorisées et réglementées (Placanica, 6 mars 2007, C-338/04), d'autre part, la nécessité et la proportionnalité des mesures restrictives adoptées par un Etat doivent seulement être appréciées au regard des objectifs poursuivis et du niveau de protection qu'entendent assurer les autorités nationales concernées (Carmen Media Group Ltd, 8 septembre 2010, C-46/08), enfin, la seule circonstance que l'Etat poursuive l'objectif supplémentaire de maintenir l'équilibre financier de la filière hippique et de soutenir le développement rural ne prive pas de justification réelle la politique restrictive mise en place au regard de l'objectif de prévention de la fraude, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens inopérants, en ce qu'ils invoquent l'objectif de lutter contre l'assuétude au jeu, qui n'a pas été retenu par la chambre de l'instruction, et qui, pour le surplus, se bornent à remettre en cause l'appréciation souveraine par cette dernière de l'existence d'une politique d'expansion contrôlée, ne peuvent être admis :

Et attendu que les première et deuxième branches du moyen proposé pour M. X... ne sont pas de nature à permettre l'admission de son pourvoi ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, Mme Labrousse conseiller rapporteur, Mme Koering-Joulin conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-85572
Date de la décision : 20/07/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, 25 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 20 jui. 2011, pourvoi n°10-85572


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Baraduc et Duhamel, SCP Piwnica et Molinié, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.85572
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