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12/07/2011 | FRANCE | N°10-19297

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 12 juillet 2011, 10-19297


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par actes du 9 janvier 2007, M. et Mme Jean-Marc Y... et M. et Mme Jean Y... ont cédé à M. et Mme A..., d'une part, la totalité des parts sociales qu'ils détenaient dans la société Galliane presse pour le prix d'un euro, d'autre part leurs créances en compte courant d'associé dans cette société pour un montant de 70 000 euros ; que le prix devait être payé en plusieurs échéances semestrielles à M. et Mme Jean Y... et mensuelles à M. et Mme Jean-Marc Y... (les consort

s Y...) ; que les consorts Y..., reprochant à M. et Mme A...de s'être ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par actes du 9 janvier 2007, M. et Mme Jean-Marc Y... et M. et Mme Jean Y... ont cédé à M. et Mme A..., d'une part, la totalité des parts sociales qu'ils détenaient dans la société Galliane presse pour le prix d'un euro, d'autre part leurs créances en compte courant d'associé dans cette société pour un montant de 70 000 euros ; que le prix devait être payé en plusieurs échéances semestrielles à M. et Mme Jean Y... et mensuelles à M. et Mme Jean-Marc Y... (les consorts Y...) ; que les consorts Y..., reprochant à M. et Mme A...de s'être abstenus, à compter de décembre 2007, de régler les échéances, les ont assignés en paiement ; que ces derniers ont reconventionnellement sollicité l'annulation pour dol des actes signés le 9 janvier 2007, le remboursement de la somme versée outre un euro ainsi que le versement de dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les consorts Y... font grief à l'arrêt d'avoir dit que les actes de cession du 9 janvier 2007 étaient intervenus dans des conditions dolosives au préjudice de M. et Mme A..., d'avoir annulé ces actes et de les avoir condamnés solidairement à leur rembourser les sommes de 7 346, 68 euros et d'un euro, alors, selon le moyen, que dans leurs écritures d'appel, les consorts Y... faisaient valoir que la situation financière du fonds de commerce et notamment le bilan prévisionnel et la valeur des comptes courants d'associés avaient été certifiés par un cabinet d'expertise comptable, ce dont ils déduisaient que les époux A...ne pouvaient prétendre que la situation financière réelle de la société leur aurait été dissimulée ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève que l'expert-comptable de la société Galliane presse n'a clôturé ses travaux comptables pour la période du 1er juillet 2005 au 31 décembre 2006 qu'à la date du 16 avril 2007, que ces comptes qui révèlent de graves anomalies n'ont été adressés que le 26 avril 2007 à M. et Mme A...et que les consorts Y... n'ont pu justifier durant la période de négociations que de la seule communication d'un bilan prévisionnel établi sur la base de l'exercice 2004-2005 sans produire aucune autre pièce ; que sous le couvert d'un défaut de réponse à conclusions, le moyen qui ne tend qu'à remettre en cause les constatations et appréciations par lesquelles les juges du fond ont estimé, dans l'exercice de leur pouvoir souverain, que l'intention dolosive du gérant de la société Galliane presse était établie et avait eu pour résultat de tromper les époux A...et de les amener à contracter, ne peut être accueilli ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que pour condamner solidairement les consorts Y... à payer à M. et Mme A...la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que le dol dont ils ont été victimes leur a causé un préjudice ;
Attendu qu'en se déterminant par un tel motif, impropre à caractériser l'existence d'un préjudice distinct de celui réparé par l'annulation des cessions et la restitution du prix, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné solidairement les consorts Y... à payer à M. et Mme A...la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 31 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne M. et Mme A...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat aux Conseils pour les consorts Y...

Premier moyen de cassation
Le premier moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les actes de cession du 9 janvier 2007 étaient intervenus dans des conditions dolosives au préjudice des époux A..., de les avoir annulés et condamné solidairement les consorts Y... à rembourser aux époux A...la somme de 7. 346, 68 euros et celle de 1 euro ;
Aux motifs qu'il n'est pas contesté que la date de clôture du dernier bilan aurait dû intervenir au 30 juin 2006, qu'elle a été repoussée au 31 décembre 2006 par Monsieur Y... alors que des négociations étaient entamées dès avant la date de clôture initiale avec les époux A...en vue de la probable acquisition du fonds de commerce.
En effet, l'expert comptable de la Société GALLIANE PRESSE n'a clôturé ses travaux de comptes poux la période du 1er juillet 2005 au 31 décembre 2006,- soit dix huit mois-qu'à la date plus tardive du 16 avril 2007 et les époux A...n'ont reçu communication de l'ensemble des documents comptables que le 26 avril 2007 (pièces i et il des consorts Y...).
Les consorts Y... ne peuvent justifier durant la période de négociations que de la seule communication aux époux A...d'un bilan prévisionnel, sans aucune autre pièce, malgré leurs affirmations en ce sens.
Il est acquis que ledit bilan prévisionnel a été établi, ainsi que les vendeurs le reconnaissent en page 5 de leurs conclusions, " en retenant les chiffres d'affaires approchant la réalisation de l'exercice 2004-2005 " (pièce 10).

Il est constant que par actes signés le 9 janvier 2007 la vente du fonds de commerce a été réalisée par deux actes distincts du même jour à savoir, la cession par les consorts Y... de la totalité des parts sociales qu'ils détenaient dans la Société GALLIANE PRESSE pour le prix et un euro et la cession des créances en compte courant qu'ils détenaient à l'égard de la Société GALLLANE PRESSE, à savoir :
* Monsieur et Madame Jean Y... : pour 11 939, 00 €
* Monsieur Jean-Marc Y... : pour 58 061, 00 €
soit un montant total de 70 000 €, dont les modalités de paiement en différentes échéances successives étaient arrêtées.
Il n'est pas contesté que les acquéreurs n'ont pris connaissance du dernier bilan pour un exercice prolongé du 30 juin 2005 au 31 décembre 2006 que le 27 avril 2007 soit bien après la passation des deux actes de cession du 9 janvier 2007.
Il résulte de l'examen desdits comptes que plusieurs graves anomalies sont apparues concernant tout d'abord l'absence de rémunération du gérant à compter mois de novembre 2005 jusqu'à décembre 2006, soit pendant 14 mois (page 81 du Grand Livre annexe 3) et ensuite l'existence de détournements sur loterie qui ont été commis au cours de la gestion de Monsieur Jean-Marc Y... (figurant dans l'annexe 5 rubrique journaux pour un total de 11 605, 85 € et dans la rubrique charges sur exercice antérieur, à la page 2 de la balance).
Sur l'annexe 4 du Grand Livre (page 25) figurent les comptes courants d'associés s'élevant :
* pour Monsieur Jean-Marc Y... à la somme de 59 100 € et faisant apparaître que sur la période de 18 mois celui-ci n'a fait que trois prélèvements, en tant que gérant, que pour les modiques sommes de deux fois 700 € et de 800 € ;
* pour Madame Lucie Y... s'élevant à la somme de 10 900 € correspondant, pour les écritures les plus récentes, à des apports en capital de 4 000 € au 8 juin 2006 et de 9 000 € au 19 juillet 2006 aux fins de renflouer la Trésorerie.
Ces différentes pièces comptables ci-dessous mentionnées révèlent l'origine d'une partie des créances en compte courant des consorts Y..., en ce qui concerne Monsieur Jean-Marc Y... et également Madame Lucie Y... épouse de Jean Y....
En page 7 de leurs conclusions les consorts Y... soulignent que ces derniers apports ont permis à Monsieur Jean-Marc Y... de prélever la somme de 2 900 € sur son compte courant d'associé au cours du dernier trimestre 2006, précision qui confirme la gravité des difficultés de la Société GALLIANE PRESSE
La situation de la Société GALLIANE PRESSE était tellement compromise que le 11 décembre 2007 la cessation de paiement a été déclarée et que par jugement du 14 décembre 2007, le tribunal de commerce de MONT DE MARSAN a prononcé la liquidation judiciaire de la Société en fixant au 14 juin 2006 la date probable de la cessation des paiements, soit antérieurement aux actes de cession litigieux.
Sur le dol :
Les époux A...n'ont eu connaissance qu'après la signature des actes de ces éléments qui révèlent une situation financière lourdement compromise.
Aux termes de l'article 1116 du code Civil " le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les manoeuvres pratiquées par l'une des parties sont telles qu'il est évident que, sans ces manoeuvres, l'autre partie n'aurait pas contracté. Il ne se présume pas et doit être prouvé ».
Il est incontestable que la perspective, pour le futur gérant, de ne pas percevoir de rémunération étaient de nature à l'amener à renoncer à l'acquisition envisagée.
La prolongation de l'exercice comptable en cours pour six mois supplémentaires, en dépit de toutes les règles comptables usuelles, n'a eu comme seule justification annoncée que la volonté de Monsieur Y... de ne pas faire deux comptes au cours de l'année 2006.
Cependant le non-établissement des comptes annuels à la date régulière du 30 juin 2006, alors que des négociations étaient en cours démontre, de la part de Monsieur Y..., gérant de la Société GALLIANE PRESSE, la volonté de ne pas communiquer aux futurs acquéreurs tous les éléments d'information actuels dont ils auraient dû pouvoir disposer.
Une telle manoeuvre constitue, au-delà d'une simple réticence à informer les futurs cessionnaires, une opération délibérée de dissimulation de la situation obérée du fonds de Commerce,
Les consorts Y... n'ont communiqué aux époux A...qu'un bilan prévisionnel établi sur la base d'un exercice trop ancien, de 2004-2005, dont ces derniers, n'étant pas commerçants et totalement inexpérimentés en la matière, ne pouvaient mesurer le caractère obsolète et dépassé.
L'intention dolosive du gérant de la Société GALLIANE PRESSE, qui a profité de la naïveté des futurs acquéreurs, est établie et a eu pour résultat de les tromper et de les amener à contacter.
Dès lors, les deux actes de cession indissociables en date du 9 janvier 2007 sont intervenus dans des conditions dolosives au préjudice des époux A...;
Alors que dans leurs écritures d'appel, les consorts Y... faisaient valoir que la situation financière du fonds de commerce et notamment le bilan prévisionnel et la valeur des comptes courants d'associés avaient été certifiés par un cabinet d'expertise comptable, ce dont ils déduisaient que les époux A...ne pouvaient prétendre que la situation financière réelle de la société leur aurait été dissimulée ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Second moyen de cassation
Le second moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné les consorts Y... à verser aux époux A...des dommages et intérêts de 3. 000 euros ;
Aux motifs que les consorts Y... seront condamnés à verser aux époux A...des dommages et intérêts en réparation du préjudice qu'ils ont subis du fait du dol dont ils ont été victimes, mais pour une somme réduite à celle de 3. 000 euros, compte tenu de l'imprudence qu'ils ont commise en ne s'entourant pas de davantage de précautions ;
Alors qu'en cas d'annulation du contrat vicié par le dol, une réparation supplémentaire peut seulement être accordée si l'annulation laisse subsister un préjudice ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater l'existence et la consistance pour les cessionnaires d'un préjudice supplémentaire et distinct de celui réparé par l'annulation du contrat et la restitution du prix, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-19297
Date de la décision : 12/07/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, 31 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 12 jui. 2011, pourvoi n°10-19297


Composition du Tribunal
Président : M. Petit (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.19297
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