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29/06/2011 | FRANCE | N°09-72281

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 29 juin 2011, 09-72281


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 octobre 2010), que le capital de la société hôtelière Paris Eiffel Suffren a été détenu, de 1986 à 1999, indirectement et majoritairement par la SNCF avant d'être cédé, en 1999, au groupe ACCOR ; que par acte du 3 octobre 2006, le comité d'entreprise de la société hôtelière Paris Eiffel Suffren, l'Union locale CGT du 15ème arrondissement de Paris et 14 salariés de la société ont fait assigner cette dernière devant le tribunal de grande

instance aux fins de voir notamment juger qu'elle était assujettie à la part...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 octobre 2010), que le capital de la société hôtelière Paris Eiffel Suffren a été détenu, de 1986 à 1999, indirectement et majoritairement par la SNCF avant d'être cédé, en 1999, au groupe ACCOR ; que par acte du 3 octobre 2006, le comité d'entreprise de la société hôtelière Paris Eiffel Suffren, l'Union locale CGT du 15ème arrondissement de Paris et 14 salariés de la société ont fait assigner cette dernière devant le tribunal de grande instance aux fins de voir notamment juger qu'elle était assujettie à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise au titre des années 1986 à 1999 ;
Attendu que la société hôtelière Paris Eiffel Suffren fait grief à l'arrêt de la condamner à mettre en place un régime de participation pour les années 1986 à 1999, alors, selon le moyen :
1°/ qu'est une entreprise publique au sens de l'article L. 442-9 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 décembre 2004 et au sens du décret n° 87-948 du 26 novembre 1987 la société, quels que soient son statut juridique et son activité industrielle et commerciale, dont plus de la moitié du capital est détenue, directement ou indirectement, ensemble ou séparément, par l'Etat et ses établissements publics ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que la société hôtelière Paris Eiffel Suffren est une société du secteur hôtelier dont la majorité du capital était, de 1986 à 1999, indirectement détenue par la SNCF, établissement public à caractère industriel et commercial ; qu'en jugeant néanmoins que cette société n'était pas une entreprise publique au sens de l'article L. 442-9 du code du travail et du décret du 26 novembre 1987 de sorte qu'elle était obligatoirement assujettie à la participation des salariés au prétexte inopérant qu'elle était une société de droit privé constituée sous la forme d'une SAS ayant pour objet une activité purement commerciale relevant du secteur concurrentiel, la cour d'appel a violé les articles L. 442-1 et L. 442-9 du code du travail dans leur rédaction alors applicable, devenus les articles L. 3321-1 et L. 3321-2, ensemble le décret n° 87-948 du 26 novembre 1987 et l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 ;
2°/ qu'il résulte tant de l'article 85 I de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 devenu l'article L. 442-9, alinéa 1, du code du travail, que des travaux parlementaires que le législateur a entendu préciser et expliquer les notions « d'entreprise publique » et de « société nationale » visées par l'ancien article L. 442-9 du code du travail afin de lever les ambiguïtés qui avaient pu naître sur la définition d'entreprise publique à la suite d'une jurisprudence controversée ; que cette loi du 30 décembre 2004 précisant que les entreprises publiques sont notamment les « sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique dont plus de la moitié du capital est détenue, directement ou indirectement, ensemble ou séparément, par l'Etat et ses établissement publics » avait ainsi un caractère interprétatif et rétroactif ; qu'en considérant qu'il ne résultait ni de cette loi ni des débats parlementaires que le législateur aurait voulu faire rétroagir ses dispositions ou donner un sens interprétatif à son texte, de sorte que cette loi n'avait pas vocation à régir les situations de fait antérieures à sa promulgation, la cour d'appel a violé les textes précités, ensemble l'article 2 du code civil ;
3°/ qu'il résulte de l'article 85 II de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 devenu l'article L. 442-9, alinéa 2, du code du travail, que les dispositions relatives à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise ne sont pas applicables aux exercices antérieurs à l'exercice suivant l'entrée en vigueur du présent alinéa pour les sociétés, groupements ou personnes morales quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, ensemble ou séparément, indirectement par l'Etat et directement ou indirectement par ses établissements publics ; que le législateur a clairement donc entendu régir les situations de fait antérieures à sa promulgation en interdisant rétroactivement aux salariés des filiales détenues majoritairement par l'Etat ou ses établissements publics de revendiquer un droit à la participation pour la période antérieure à 2005 ; qu'en décidant du contraire pour dire que l'article L. 442-9 alinéa 2 n'avait pas vocation à régir les situations de fait antérieures à sa promulgation, la cour d'appel a violé les textes précités ;
4°/ que les demandeurs ayant engagé leur action judiciaire postérieurement à la date d'entrée en vigueur de la loi nouvelle critiquée ne sont pas fondés à invoquer l'incompatibilité de ses dispositions rétroactives avec le principe de prééminence du droit et la notion de procès équitable consacrés par l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales lequel ne s'oppose, sauf pour d'impérieux motifs d'intérêt général, qu'à l'ingérence du pouvoir législatif dans l'administration de la justice dans le but d'influer sur le dénouement judiciaire d'un litige en cours au moment de l'entrée en vigueur de la loi ; qu'en l'espèce, il résulte des éléments de la procédure que les salariés, le comité d'entreprise et l'Union locale CGT n'ont engagé leur instance que le 3 octobre 2006, donc postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 30 décembre 2004 de sorte qu'ils n'étaient pas fondés à invoquer l'incompatibilité de ses dispositions rétroactives avec l'exigence de l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en écartent néanmoins l'application rétroactive des dispositions de cette loi comme non-conformes aux exigences de ce texte faute pour le législateur d'avoir obéi à un impérieux motif d'intérêt général, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 2 du code civil ;
5°/ qu'obéit à d'impérieux motifs d'intérêt général la loi du 30 décembre 2004 destinée à mettre fin à une controverse de nature à nuire à la sécurité juridique des entreprises publiques en précisant quelles sont celles qui sont assujetties à la participation obligatoire aux résultats de l'entreprise et à partir de quelle date s'appliqueront leurs obligations ; qu'en l'espèce, la société hôtelière Paris Eiffel Suffren soutenait qu'il résultait tant des travaux parlementaires que du texte adopté que la loi du 30 décembre 2004 répondait à ce souci de sécurité juridique s'agissant des entreprises publiques ; qu'en retenant que ce texte n'obéissait pas à un impérieux motif d'intérêt général au prétexte inopérant que seules certaines entreprises en nombre limité étaient concernées par celui-ci sans s'expliquer sur l'exigence de sécurité juridique invoquée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article L. 442-9 du code du travail dans sa rédaction alors applicable et l'article 85 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a retenu, à juste titre, qu'il ne résultait ni de la loi ni des débats parlementaires que le législateur ait entendu conférer à l'article 85 de la loi n° 2004-1484 du 30 novembre 2004 un caractère interprétatif et rétroactif ;
Attendu, ensuite, que l'article 7 de l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 énonce un principe d'assujettissement général à la participation obligatoire aux résultats de l'entreprise ; que les dispositions du décret du 26 novembre 1987 ne posent de conditions particulières à l'assujettissement obligatoire que pour les entreprises publiques et les sociétés nationales, et distinguent celles qui figurent sur la liste de l'article 4 ou dont plus de la moitié du capital est détenu par l'une de celles-ci et celles qui ne remplissent pas ces conditions, les premières étant assujetties de plein droit, les dernières pouvant l'être sur autorisation ministérielle ; qu'il en résulte qu'une personne de droit privé, ayant pour objet une activité purement commerciale qui n'est ni une entreprise publique ni une société nationale, peu important l'origine du capital, n'entre pas dans le champ d'application du décret et doit être soumise aux dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 21 octobre 1986 ;
Et attendu qu'ayant constaté que la société hôtelière Paris Eiffel Suffren, personne de droit privé, exerçait une activité purement commerciale, la cour d'appel en a exactement déduit qu'elle ne constituait pas une entreprise publique, au sens du décret du 26 novembre 1987, et que les dispositions de l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 lui étaient dès lors applicables ;
Qu'il s'ensuit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société hôtelière Paris Eiffel Suffren aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société hôtelière Paris Eiffel Suffren à payer au comité d'entreprise de la société hôtelière Paris Eiffel Suffren, à l'Union locale CGT du 15e arrondissement, à MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., F..., G..., I..., B..., J...et à Mmes K...et M...la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux conseils pour la société hôtelière Paris Eiffel Suffren
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la SOCIETE HOTELIERE PARIS EIFFEL SUFFREN était tenue de mettre en.. uvre un régime de participation des salariés aux résultats de l'entreprise en application des articles L. 442-1 et suivants du Code du travail à compter de l'année 1986 et jusqu'à l'année 1999, d'AVOIR, en conséquence, désigné un expert avec mission d'établir le calcul des droits au titre des années 1986 à 1999, d'AVOIR dit que le délai de déblocage de 8 ans devait être compté à partir de l'expiration de l'année au titre de laquelle les droits sont nés (…), d'AVOIR fait injonction à la SOCIETE HOTELIERE PARIS EIFFEL SUFFREN de communiquer sous astreinte de 10. 000 euros par jour à compter d'un délai d'un mois à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, la liste des salariés bénéficiaires de la participation (..), d'AVOIR dit que les sommes dues au titre de la participation telles qu'elles seront actualisées par l'Expert désigné par la Cour porteront intérêts de droit à compter de la demande en justice avec anatocisme, d'AVOIR dit que la SOCIETE HOTELIERE PARIS EIFFEL SUFFREN devra consigner au greffe de la Cour la somme de 3. 000 euros à titre de provision à valoir sur la rémunération de l'expert avant le 15 novembre 2009 et que cette somme devra être versée au régisseur des avances et des recettes de la Cour d'appel de paris, d'AVOIR dit que l'expert devra remettre son rapport dans le délai de six mois à compter de la notification de la consignation et désigné le Président de la formation collégiale pour contrôler les opérations d'expertise, d'AVOIR dit que les parties feront leur affaires des comptes établis sauf à ressaisir la Cour en cas de difficulté et d'AVOIR condamné la SOCIETE HOTELIERE PARIS EIFFEL SUFFREN à verser à chacun des concluants, respectivement, la somme de 200 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
AUX MOTIFS QUE l'article L. 442-1 du Code du travail, dans sa rédaction alors applicable, disposait en son alinéa 1er « Toute entreprise employant habituellement au moins cinquante salariés, quelles que soient la nature de son activité et sa forme juridique, est soumise aux obligations de la présente section, destinées à garantir le droit de ses salariés à participer aux résultats de l'entreprise » ; que l'ancien article L. 442-9 alinéa 1 disposait, dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 décembre 2004 « Un décret en Conseil d'Etat détermine les entreprises publiques et les sociétés nationales qui sont soumises aux dispositions du présent chapitre. Il fixe les conditions dans lesquelles ces dispositions leur sont applicables » ; que le décret n° 87-948 du 26 novembre 1987 « déterminant les établissements publics et entreprises publiques soumis aux dispositions concernant la participation de l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 relative à l'intéressement et à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et à l'actionnariat des salariés, ainsi que les conditions dans lesquelles les dispositions de cette ordonnance leur sont applicables » était ainsi rédigé : « (…) 1er – Sont soumises aux dispositions de la Section I du Chapitre II de l'ordonnance du 21 octobre 1986 susvisée, (…) ; a) Les entreprises publiques et sociétés nationales inscrites sur la liste figurant à l'article 4 du présent décret ; b) Les entreprises publiques et sociétés nationales dont une ou plusieurs des entreprises publiques ou sociétés nationales inscrites sur la liste de l'article 4 du présent décret détiennent plus de la moitié du capital social. Les entreprises et sociétés nationales dont une ou plusieurs entreprises publiques non inscrites sur la liste de l'article 4 du présent décret détiennent seule ou avec une entreprise publique figurant sur la même liste, de manière directe ou indirecte, plus de la moitié du capital social peuvent être autorisées à appliquer les dispositions de la section I du Chapitre II de l'ordonnance du 21 octobre 1986 susvisée dans les conditions prévues par le présent texte (…) » ; que la loi du 30 décembre 2004 a modifié l'article L. 442-9 du Code du travail qui dispose désormais « Un décret en Conseil d'Etat détermine les établissements publics de l'Etat à caractère industriel et commercial et les sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, directement ou indirectement, ensemble ou séparément, par l'Etat et ses établissements publics qui sont soumises aux dispositions du présent chapitre. Il fixe les conditions dans lesquelles ces dispositions leur sont applicables. Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux sociétés, groupements ou personnes morales quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, ensemble ou séparément, indirectement par l'Etat et directement ou indirectement par ses établissements publics, à l'exception de celles et ceux qui bénéficient de subventions d'exploitation, sont en situation de monopole ou soumis à des prix réglementés. Toutefois, ces dispositions ne sont pas applicables aux exercices antérieurs à l'exercice suivant l'entrée en vigueur du présent alinéa pour les sociétés, groupements ou personnes morales quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, ensemble ou séparément, indirectement par l'Etat et directement ou indirectement par ses établissements publics, à l'exception de celles et ceux pour lesquels ces dispositions s'appliquaient en vertu du décret n° 87-948 du 26 novembre 1987 dans sa rédaction antérieure à l'entrée en vigueur du présent alinéa.. » Sur l'obligation d'instaurer un système de participation des salariés aux résultats de l'entreprise ; que les appelants font valoir que l'intimée n'était pas une entreprise publique au sens des articles L. 442-9 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du décembre 2004 et 1er du décret du 26 novembre 1987, cette société étant une société anonyme, soumise au droit privé et dont l'activité était commerciale, peu important que son actionnaire majoritaire soit un établissement public à caractère industriel et commercial ; qu'ils en déduisent qu'elle était, dès lors, soumise aux articles L. 442-1 et suivant du Code du travail et qu'elle aurait dû, en conséquence, instaurer un mécanisme de participation dès la mise en.. uvre de la loi du 21 octobre 1986, date à laquelle les conditions de seuil pour la mise en place de la participation étaient remplies ; qu'ils font valoir que le législateur, en prévoyant que la loi nouvelle du 30 décembre 2004 ne s'appliquait que pour les exercices futurs, ne saurait revenir sur les droits acquis antérieurement dont le droit à la participation ; qu'ils invoquent l'article 2 du Code civil qui consacre le principe de non-rétroactivité des lois et l'absence de caractère interprétatif de la loi de 2004 ainsi que l'article 6-1 et l'article 14 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme ; que l'intimée soutient que jusqu'à l'exercice 1999, date à laquelle elle a été cédée au groupe ACCOR elle était une filiale de la SNCF, établissement public à caractère industriel et commercial, et était une entreprise publique au sens des dispositions de l'article L. 442-9 du Code du travail, dans sa rédaction alors applicable, et du décret n° 87-948 du 26 novembre 1987 « déterminant les établissements publics et entreprises publiques soumis aux dispositions concernant la participation de l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986 relative à l'intéressement et à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et à l'actionnariat des salariés, ainsi que les conditions dans lesquelles les dispositions de cette ordonnance leur sont applicables » ; qu'elle en déduit que, ne remplissant pas les conditions posées par ce décret, elle n'était pas tenue à l'instauration obligatoire d'un système de participation des salariés à ses résultats ; qu'en outre, elle affirme qu'en tout état de cause, la modification opérée par la loi du décembre 2004 démontre qu'avant son intervention, les entreprises publiques n'étaient pas soumises de façon générale à l'obligation de mise en place d'un régime de participation et que les précisions apportées dans ce texte, notamment en ce qui concerne la définition des « entreprises publiques et les sociétés nationales » en font un texte interprétatif et donc rétroactif ; qu'elle soutient que l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme n'a pas vocation à trouver application dans ce litige puisqu'il n'y a pas, en l'espèce, ingérence du pouvoir législatif dans l'exercice du pouvoir judiciaire et qu'en tout état de cause, les dispositions de la loi du 30 décembre 2004 étaient dictées par un motif impérieux d'intérêt général ; qu'enfin elle conteste toute discrimination entre les salariés du groupe FRANTOUR ; qu'aux termes de l'article 2 du Code civil « la loi ne dispose que pour l'avenir : elle n'a point d'effet rétroactif » ; que si ce principe a valeur constitutionnelle en matière répressive, en matière civile, il ne s'impose pas au législateur qui doit néanmoins, lorsqu'il entend donner à un texte une application rétroactive, faire apparaître son intention de façon claire et non-équivoque ; que par ailleurs, en conformité avec l'article 6 de la Convention Européenne des Droits de l'Hommes, le législateur peut, en matière civile, lorsqu'il est justifié d'un impérieux motif d'intérêt général, adopter des dispositions rétroactives ; qu'en l'espèce, force est de constater que le texte litigieux ne comporte aucune disposition précise indiquant la volonté du législateur de faire rétroagir les dispositions qu'il adopte ; que d'autre part, il ne saurait être valablement soutenu que le texte en cause obéissait à un motif impérieux d'intérêt général, seules certaines entreprise en nombre limité étant concernées par celui-ci ; que de même, s'il résulte des débats parlementaires que le législateur a entendu modifier les règles applicables en matière de participation au sein de certains établissement public ou sociétés dont le capital est pour partie détenu directement ou indirectement par l'Etat, il ne résulte nullement des termes de l'article L. 442-9 du code du travail que l'intention du législateur était de donner un sens interprétatif à son texte et ce, d'autant plus, que le texte définitif adopté ne reprend pas les termes de l'amendement proposé par le rapporteur du texte qui, lui précisait l'aspect interprétatif de celui-ci ; qu'il convient, dès lors, de juger que l'article L. 442-9 2ème alinéa, tel qu'il découle de la loi du 30 décembre 2004 n'a pas vocation à régir les situations de fait antérieures à sa promulgation et qu'il y a lieu, en conséquence, de rechercher, si sous l'empire du droit antérieur, l'intimée était soumise à l'obligation de mise en place d'un régime de participation ; que considérant que l'article L. 442-1 du Code du travail énonce un principe d'assujettissement général à la participation obligatoire aux résultats de l'entreprise ; que l'article L. 442-9 du Code du travail, renvoyant au décret du 26 novembre 1987, ne posait de conditions particulières à l'assujettissement obligatoire, que pour les entreprises publiques et les sociétés nationales, et distinguaient celles qui figuraient sur la liste de l'article 4 ou dont plus de la moitié du capital était détenue par l'une de celles-ci, et celles qui ne remplissaient pas ces conditions, les premières étant assujetties de plein droit, les dernières pouvant l'être sur autorisation ministérielle ; qu'il en résultait qu'une personne de droit privé, ayant pour objet une activité purement commerciale qui n'était ni une entreprise publique ni une société nationale peu important l'origine du capital, n'entrait pas dans le champ d'application du décret et devait être soumise aux dispositions des articles L. 442-1 et suivants du Code du travail ; qu'il n'est pas contesté que la société intimée employait plus de cinquante salariés ; qu'elle est constituée sous la forme d'une SAS ; qu'elle exploite une activité concurrentielle d'hôtellerie ; qu'en conséquence, elle n'était pas une entreprise publique en sens de l'article L. 442-9 du Code du travail et du décret du 26 novembre 1987 et était ainsi soumise aux dispositions des articles L. 442-1 et suivants ; qu'il convient, dès lors, d'infirmer le jugement déféré de ce chef, de faire droit aux demandes des appelants, de nommer Monsieur N...en qualité d'expert avec la mission telle que définie ci-dessous et de dire que les parties feront l'affaire des comptes établis, sauf à ressaisir la Cour en cas de difficulté ; que les circonstances de l'espèce conduisent à faire application de l'article 700 du Code de procédure civile au profit de chacun des appelants à hauteur de la somme de 200 euros.
1°- ALORS QU'est une entreprise publique au sens de l'article L. 442-9 du Code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du 30 décembre 2004 et au sens du décret n° 87-948 du 26 novembre 1987 la société, quels que soient son statut juridique et son activité industrielle et commerciale, dont plus de la moitié du capital est détenue, directement ou indirectement, ensemble ou séparément, par l'Etat et ses établissements publics ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que la SAS HOTELIERE PARIS EIFFEL SUFFREN est une société du secteur hôtelier dont la majorité du capital était, de 1986 à 1999, indirectement détenue par la SNCF, établissement public à caractère industriel et commercial ; qu'en jugeant néanmoins que cette société n'était pas une entreprise publique au sens de l'article L. 442-9 du Code du travail et du décret du 26 novembre 1987 de sorte qu'elle était obligatoirement assujettie à la participation des salariés au prétexte inopérant qu'elle était une société de droit privé constituée sous la forme d'une SAS ayant pour objet une activité purement commerciale relevant du secteur concurrentiel, la Cour d'appel a violé les articles L. 442-1 et L. 442-9 du Code du travail dans leur rédaction alors applicable, devenus les articles L. 3321-1 et L. 3321-2, ensemble le décret n° 87-948 du 26 novembre 1987 et l'ordonnance n° 86-1134 du 21 octobre 1986.
2°- ALORS QU'il résulte tant de l'article 85 I de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 devenu l'article L. 442-9 alinéa 1 du Code du travail, que des travaux parlementaires que le législateur a entendu préciser et expliquer les notions « d'entreprise publique » et de « société nationale » visées par l'ancien article L. 442-9 du Code du travail afin de lever les ambiguïtés qui avaient pu naître sur la définition d'entreprise publique à la suite d'une jurisprudence controversée ; que cette loi du 30 décembre 2004 précisant que les entreprises publiques sont notamment les « sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique dont plus de la moitié du capital est détenue, directement ou indirectement, ensemble ou séparément, par l'Etat et ses établissement publics » avait ainsi un caractère interprétatif et rétroactif ; qu'en considérant qu'il ne résultait ni de cette loi ni des débats parlementaires que le législateur aurait voulu faire rétroagir ses dispositions ou donner un sens interprétatif à son texte, de sorte que cette loi n'avait pas vocation à régir les situations de fait antérieures à sa promulgation, la Cour d'appel a violé les textes précités, ensemble l'article 2 du Code civil.
3°- ALORS en tout état de cause QU'il résulte de l'article 85 II de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 devenu l'article L. 442-9 alinéa 2 du Code du travail, que les dispositions relatives à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise ne sont pas applicables aux exercices antérieurs à l'exercice suivant l'entrée en vigueur du présent alinéa pour les sociétés, groupements ou personnes morales quel que soit leur statut juridique, dont plus de la moitié du capital est détenue, ensemble ou séparément, indirectement par l'Etat et directement ou indirectement par ses établissements publics ; que le législateur a clairement donc entendu régir les situation de fait antérieures à sa promulgation en interdisant rétroactivement aux salariés des filiales détenues majoritairement par l'Etat ou ses établissements publics de revendiquer un droit à la participation pour la période antérieure à 2005 ; qu'en décidant du contraire pour dire que l'article L. 442-9 alinéa 2 n'avait pas vocation à régir les situations de fait antérieures à sa promulgation, la Cour d'appel a violé les textes précités.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72281
Date de la décision : 29/06/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 15 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 29 jui. 2011, pourvoi n°09-72281


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.72281
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