La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/06/2011 | FRANCE | N°10-17456

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 28 juin 2011, 10-17456


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 2 mars 2010), que, le 9 décembre 2008, la société Entreprise de Benedittis (la société EB), qui se fournissait en matériels et matériaux auprès de la société Pagot et Savoie (la société PS), a été mise en redressement judiciaire, MM. X... et Y... étant respectivement désignés administrateur judiciaire et mandataire judiciaire ; qu'il résulte des relations d'affaires existant avant l'ouverture de la procédure que la société EB bén

éficiait de la part de son fournisseur de délais de paiement depuis de nombreuses...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 2 mars 2010), que, le 9 décembre 2008, la société Entreprise de Benedittis (la société EB), qui se fournissait en matériels et matériaux auprès de la société Pagot et Savoie (la société PS), a été mise en redressement judiciaire, MM. X... et Y... étant respectivement désignés administrateur judiciaire et mandataire judiciaire ; qu'il résulte des relations d'affaires existant avant l'ouverture de la procédure que la société EB bénéficiait de la part de son fournisseur de délais de paiement depuis de nombreuses années, l'administrateur judiciaire demandant en vain à l'amiable leur maintien après le jugement d'ouverture par courrier du 23 décembre 2008 ; que, par ordonnance du 4 mai 2009, le juge-commissaire a ordonné à la société PS la poursuite des contrats de fournitures conformément au devis proposé pour les chantiers en cours à la date du redressement judiciaire et de rétablir la facilité de paiement à 60 jours de la société EB ; que, par jugement du 21 juillet 2009, le tribunal a confirmé l'ordonnance entreprise ;
Attendu que la société PS fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement du 21 juillet 2009 qui avait lui-même confirmé l'ordonnance du juge-commissaire ordonnant le rétablissement de la facilité de paiement à 60 jours le 10 du mois au profit de la société EB et de l'avoir condamnée à lui verser 1 500 euros au titre des frais irrépétibles et, y ajoutant, fixé une astreinte à 1 000 euros par infraction constatée, alors, selon, le moyen :
1°/ que l'octroi, même répété, par un fournisseur de délais de paiement à 60 jours des fournitures acquises ne constitue pas une ouverture de crédit sous forme de compte courant constitutif d'un contrat en cours au sens de l'article L. 622-13 du code de commerce ; d'où il suit qu'en décidant le contraire, la cour d'appel viole ledit article, ensemble les articles 12 du code de procédure civile et 1134 du code civil ;
2°/ qu'en toute hypothèse, lorsque la prestation porte sur le paiement d'une somme d'argent, celui-ci doit se faire au comptant, sauf pour l'administrateur à obtenir l'acceptation, par le cocontractant du débiteur, de délais de paiement ; qu'ainsi, l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire entraîne de plein droit la caducité de toute convention ou facilité consentie par un fournisseur emportant délai de paiement accordé au débiteur pour le règlement des fournitures postérieures au jugement déclaratif, sauf acceptation du contractant, de sorte qu'en statuant comme elle le fait, la cour d'appel viole l'article L. 622-13 du code de commerce ;
3°/ qu'en ne constatant pas l'accord de la société PS pour accorder au débiteur en redressement des délais de paiement pour des fournitures commandées après le jugement déclaratif, quand la société PS faisait valoir dans ses conclusions d'appel qu'elle n'entendait accorder aucun délai de paiement, la cour d'appel prive son arrêt de base légale au regard de l'article L. 622-13 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la société PS ne conteste pas être en relation d'affaires depuis de nombreuses années avec la société EB et lui accorder à titre habituel un paiement à 60 jours des fournitures acquises, tandis qu'il ressort des pièces produites par la société EB que chaque mois un relevé arrêté au dernier jour du mois lui était adressé par la société PS récapitulant des factures et avoirs ; qu'il relève qu'au bas de chacun de ces relevés, une lettre de change pré-remplie est établie pour le montant correspondant au solde dû avec, comme date de création, celle du relevé et comme date d'échéance, le 10 du mois suivant 60 jours de délai, tandis que ce mode de fonctionnement est confirmé par l'offre de prix produite par la société EB concernant diverses fournitures de sanitaire et chauffage pour le chantier Urgo Bouygues sur laquelle est mentionnée la mention " paiement-acompte : 60 jours le 10 FM LCR sans acceptation " ; qu'ayant relevé que pour l'ensemble de ses achats, la société EB bénéficiait d'un délai de paiement à 60 jours le 10 du mois suivant, sans qu'il soit procédé à un examen au cas par cas de sa situation, cet accord tenant manifestement compte de l'importance et de l'ancienneté des relations contractuelles entre les parties, l'arrêt retient qu'il est ainsi suffisamment établi que la société EB bénéficiait dans les comptes de la société PS, sous le n° de compte ... d'une ouverture de crédit sous forme de compte courant ; que de ces constatations et appréciations faisant ressortir que le compte qui fonctionnait d'une façon permanente entre les deux sociétés prévoyait la possibilité de remises réciproques, la cour d'appel a déduit à bon droit que, les éléments spécifiques du compte courant étant réunis, un tel contrat ne pouvait être résilié de plein droit du seul fait de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Pagot et Savoie aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit juin deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.
Moyen produit par Me Blondel, avocat aux Conseils, pour la société Pagot et Savoie.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement du tribunal de commerce de Dijon du 21 juillet 2009 qui avait lui-même confirmé l'ordonnance du juge-commissaire ordonnant le rétablissement de la facilité de paiement à 60 jours le 10 du mois au profit de la société DE BENEDITTIS et condamné la SAS PAGOT et SAVOIE à lui verser 1. 500 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et, y ajoutant, fixé une astreinte à 1. 000 € par infraction constatée ;
AUX MOTIFS QUE la SAS PAGOT ET SAVOIE ne conteste pas qu'elle est en relation d'affaires depuis de nombreuses années avec la société DE BENEDITTIS et que, de manière habituelle, elle lui a accordé un paiement à 60 jours des fournitures acquises ; qu'elle soutient toutefois que chaque vente était indépendante et que le principe pour chacune était le paiement comptant, un paiement à terme étant accordé au cas par cas ; qu'il ressort des pièces produites par la société DE BENEDITTIS que chaque mois un relevé arrêté au dernier jour du mois lui était adressé par la SAS PAGOT et SAVOIE récapitulant des factures et avoirs ; qu'au bas de chacun de ses relevés, une lettre de change pré-remplie est établie pour le montant correspondant au solde dû avec, comme date de création, celle du relevé, et comme date d'échéance, le 10 du mois suivant 60 jours de délai (par exemple, le 10 février 2009 pour le relevé du 30 novembre 2008) ; que ce mode de fonctionnement est confirmé par l'offre de prix produite par la société DE BENEITTIS concernant diverses fournitures de sanitaire et chauffage pour le chantier URGO BOUYGUES sur laquelle sont mentionnées des offres de prix, mais également la mention " paiement-acompte : 60 jrs le 10 FM LCR SANS ACCEPTATION " ; qu'il apparaît ainsi que, pour l'ensemble de ses achats, la société DE BENEDITTIS bénéficiait d'un délai de paiement à 60 jours le 10 du mois suivant, sans qu'il soit procédé à un examen au cas par cas de sa situation, cet accord tenant manifestement compte de l'importance et de l'ancienneté des relations contractuelles entre les parties ; qu'il est ainsi suffisamment établi que la société DE BENEDITTIS bénéficiait dans les comptes de la société PAGOT ET SAVOIR, sous le n° de compte ... d'une ouverture de crédit sous forme de compte-courant ; qu'un tel contrat ne peut être résilié de plein droit du seul fait de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, les dispositions de l'article L. 622-13 du Code de commerce étant d'ordre public ; que la SAS PAGOT ET SAVOIE ne peut pas valablement opposer ses conditions générales de vente qui sont contraires à ces dispositions ;
ALORS, d'une part, QUE l'octroi, même répété, par un fournisseur de délais de paiement à 60 jours des fournitures acquises ne constitue pas une ouverture de crédit sous forme de compte courant constitutif d'un contrat en cours au sens de l'article L. 622-13 du Code de commerce ; d'où il suit qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel viole ledit article, ensemble les articles 12 du Code de procédure civile et 1134 du Code civil ;
ALORS, d'autre part, QUE, en toute hypothèse, lorsque la prestation porte sur le paiement d'une somme d'argent, celui-ci doit se faire au comptant, sauf pour l'administrateur à obtenir l'acceptation, par le cocontractant du débiteur, de délais de paiement ; qu'ainsi, l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire entraîne de plein droit la caducité de toute convention ou facilité consentie par un fournisseur emportant délai de paiement accordé au débiteur pour le règlement des fournitures postérieures au jugement déclaratif, sauf acceptation du contractant, de sorte qu'en statuant comme elle le fait, la Cour d'appel viole l'article L. 622-13 du Code de commerce ;
ET ALORS, de dernière part, QU'en ne constatant pas l'accord de la société PAGOT ET SAVOIE pour accorder au débiteur en redressement des délais de paiement pour des fournitures commandées après le jugement déclaratif, quand la société PAGOT ET SAVOIE faisait valoir dans ses conclusions d'appel (p. 8) qu'elle n'entendait accorder aucun délai de paiement, la Cour d'appel prive son arrêt de base légale au regard de l'article L. 622-13 du Code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-17456
Date de la décision : 28/06/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 02 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 28 jui. 2011, pourvoi n°10-17456


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Blondel

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17456
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award