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22/06/2011 | FRANCE | N°10-18403

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 juin 2011, 10-18403


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 31 mars 2010), que Mme X... a été engagée le 1er janvier 1998 par la société Pharmacie du Château d'Eau en qualité de pharmacien assistante ; qu'à la suite d'un arrêt de travail pour maladie du 16 janvier au 18 mars 2007, le médecin du travail l'a déclarée, après deux examens médicaux des 19 mars et 2 avril 2007, inapte à tous postes de travail dans l'entreprise ; qu'après avoir refusé une offre de reclassement, l'employeur l'a licenciée le 23 avril 2007 pour inap

titude médicale et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 31 mars 2010), que Mme X... a été engagée le 1er janvier 1998 par la société Pharmacie du Château d'Eau en qualité de pharmacien assistante ; qu'à la suite d'un arrêt de travail pour maladie du 16 janvier au 18 mars 2007, le médecin du travail l'a déclarée, après deux examens médicaux des 19 mars et 2 avril 2007, inapte à tous postes de travail dans l'entreprise ; qu'après avoir refusé une offre de reclassement, l'employeur l'a licenciée le 23 avril 2007 pour inaptitude médicale et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement de Mme X... sans cause réelle et sérieuse et de le condamner à lui payer diverses sommes, alors, selon le moyen :
1°/ que l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur est une obligation de moyens dont l'exécution s'apprécie au regard des capacités de l'entreprise ou du groupe auquel elle appartient et des possibilités d'emploi qui y sont offertes ; que, par ailleurs, le groupe au sein duquel doivent être recherchées les possibilités de reclassement d'un salarié est constitué par les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en l'espèce, M. Y..., propriétaire de la société Pharmacie du Château d'Eau faisait valoir que s'il détenait une partie du capital de la Grande Pharmacie des Minguettes il n'en était ni gérant, ni propriétaire, ni même copropriétaire, de sorte qu'il n'avait aucun pouvoir décisionnel l'autorisant à imposer le reclassement de l'une de ses salariées au sein de cette entreprise ; qu'en s'abstenant de toute recherche relative à la réalité et l'effectivité du pouvoir d'intervention de M. Y... dans la Grande Pharmacie des Minguettes et en retenant simplement que l'employeur avait manqué à son obligation de reclassement parce qu'il existait une permutabilité entre les deux entreprises qui exerçaient la même activité de pharmacie de détail, se trouvaient sur le territoire de la même ville et appartenaient à la même personne physique, M. Y..., la cour d'appel qui a en outre constaté que les deux officines étaient juridiquement distinctes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;
2°/ que quand bien même il aurait pu être considéré que l'obligation de reclassement pesant sur la société Pharmacie du Château d'Eau pesait également sur la Grande Pharmacie des Minguettes, la première des deux sociétés avait suffisamment démontré, registre du personnel à l'appui, que la seconde avait aussi bien qu'elle rempli cette obligation ; qu'en jugeant néanmoins, sans rechercher quelle était la portée dans le débat des documents ainsi produits, que la société Pharmacie du Château d'Eau ne prouvait pas avoir tenté ou s'être trouvée dans l'impossibilité de reclasser Mme X... à la Grande Pharmacie des Minguettes et que l'employeur ayant ainsi manqué à son obligation de reclassement, le licenciement se trouvait dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du code du travail ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé que les possibilités de reclassement du salarié déclaré inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment en raison d'une maladie doivent être recherchées dans l'entreprise et à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent d'effectuer la mutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel a constaté que M. Y... qui dirigeait la pharmacie du Château d'Eau détenait 80 % des actions de la grande pharmacie des Minguettes à Vénissieux, que les deux officines exerçaient la même activité de pharmacie de détail et se trouvaient sur le territoire de la même ville ; qu'ayant ainsi fait ressortir la possibilité de permutation du personnel au sein d'un groupe, elle a, sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, légalement justifié sa décision ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Pharmacie du Château d'Eau aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Pharmacie du Château d'Eau à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Bénabent, avocat aux conseils pour la société Pharmacie du Château d'Eau
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait dit que le licenciement de Madame Sophie X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence condamné la SNC Pharmacie du Château d'Eau à lui verser diverses indemnités dont notamment une indemnité de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE : « Sur le licenciement Que selon l'article L. 1226-2 du Code du travail lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ;
Que les possibilités de reclassement d'un salarié doivent être recherchées dans l'entreprise et à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent la permutation de tout ou partie du personnel ;
Que selon l'article L. 5125-17 du Code de la santé publique le pharmacien doit être propriétaire de l'officine dont il est titulaire ; que les pharmaciens sont autorisés à constituer entre eux une société en nom collectif en vue de l'exploitation d'une officine ; que les pharmaciens sont également autorisés à constituer individuellement ou entre eux une société à responsabilité limitée en vue de l'exploitation d'une officine, à la condition que cette société ne soit propriétaire que d'une seule officine, quel que soit le nombre de pharmaciens associés, et que la gérance de l'officine soit assurée par un ou plusieurs des pharmaciens associés ; qu'un pharmacien ne peut être propriétaire ou copropriétaire que d'une seule officine ; que tout pharmacien associé dans une société exploitant une officine et qui y exerce son activité doit détenir au moins 5% du capital social et des droits de vote qui y sont attachés ; que dans une société en nom collectif ou à responsabilité limitée, ou une société d'exercice libéral à responsabilité limitée, il peut, en outre, si les statuts le prévoient, se voir attribuer des parts d'industrie ;
Que les dispositions de cet article s'appliquent sous réserve de celles de la loi du 31 décembre 1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des professions libérales soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé ;
Que Sophie X... était pharmacienne assistante avec le statut de cadre ; que lors du licenciement elle occupait cette fonction depuis neuf ans ;
Que le médecin du travail l'a les 19 mars et 2 avril 2007 déclarée inapte à tout poste de travail à la pharmacie du Château d'Eau ;
Que par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 avril 2007, la SNC PHARMACIE DU CHATEAU d'EAU a proposé à Sophie X... un poste de pharmacienne collaboratrice responsable des patients sous oxygène et de la mise en application des principes de qualité ; que ce poste non sédentaire était compatible avec les prescriptions du médecin du travail ;
Que Sophie X... a refusé cette proposition lors de l'entretien du 18 avril 2007 ;
Que son employeur fut la SNC PHARMACIE DU CHATEAU D'EAU dirigée par Bernard Y... ;
Que lors du licenciement ce dernier détenait 80% des actions de la Grande Pharmacie des Minguettes à Vénissieux, entreprise constituée sous la forme d'une société d'exercice libéral par actions simplifiée au capital de 37 000 € ;
Que ces deux officines étaient certes juridiquement distinctes ; que toutefois elles exerçaient la même activité de pharmacie de détail, se trouvaient sur le territoire de la même ville et appartenaient à la même personne physique, Bernard Y... ; qu'il existait ainsi une permutabilité entre les deux entreprises ;
Que la SNC PHARMACIE DU Château D'EAU ne prouve pas avoir tenté ou s'être trouvée dans l'impossibilité de reclasser Sophie X... à la Grande Pharmacie des Minguettes ;
Que l'employeur a ainsi manqué à son obligation de reclassement, ce qui rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Que la décision des premiers juges doit être confirmée » ;
1°) ALORS QUE l'obligation de reclassement qui pèse sur l'employeur est une obligation de moyens dont l'exécution s'apprécie au regard des capacités de l'entreprise ou du groupe auquel elle appartient et des possibilités d'emploi qui y sont offertes ; que, par ailleurs, le groupe au sein duquel doivent être recherchées les possibilités de reclassement d'un salarié est constitué par les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent la permutation de tout ou partie du personnel ; qu'en l'espèce, Monsieur Y..., propriétaire de la société Pharmacie du Château d'Eau faisait valoir que s'il détenait une partie du capital de la Grande Pharmacie des Minguettes il n'en était ni gérant, ni propriétaire, ni même copropriétaire, de sorte qu'il n'avait aucun pouvoir décisionnel l'autorisant à imposer le reclassement de l'une de ses salariées au sein de cette entreprise ; qu'en s'abstenant de toute recherche relative à la réalité et l'effectivité du pouvoir d'intervention de Monsieur Y... dans la Grande Pharmacie des Minguettes et en retenant simplement que l'employeur avait manqué à son obligation de reclassement parce qu'il existait une permutabilité entre les deux entreprises qui exerçaient la même activité de pharmacie de détail, se trouvaient sur le territoire de la même ville et appartenaient à la même personne physique, Monsieur Y..., la Cour d'appel qui a en outre constaté que les deux officines étaient juridiquement distinctes a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du Code du travail ;
2°) ALORS QUE et en tout état de cause quand bien même il aurait pu être considéré que l'obligation de reclassement pesant sur la société Pharmacie du Château d'Eau pesait également sur la Grande Pharmacie des Minguettes, la première des deux sociétés avait suffisamment démontré, registre du personnel à l'appui, que la seconde avait aussi bien qu'elle rempli cette obligation ; qu'en jugeant néanmoins, sans rechercher quelle était la portée dans le débat des documents ainsi produits, que la société Pharmacie du Château d'Eau ne prouvait pas avoir tenté ou s'être trouvée dans l'impossibilité de reclasser Mademoiselle X... à la Grande Pharmacie des Minguettes et que l'employeur ayant ainsi manqué à son obligation de reclassement, le licenciement se trouvait dépourvu de cause réelle et sérieuse, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-2 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné la SNC Pharmacie du Château d'Eau à verser à Mademoiselle X... une indemnité de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE : «Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse Que selon l'article L. 1235-3 du Code du travail si le licenciement d'une salariée ayant au moins deux ans d'ancienneté et travaillant dans une entreprise employant au moins onze salariés survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge octroie à la personne licenciée une indemnité à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois ;
Que lors du licenciement Sophie X... était âgée de 36 ans, présentait une ancienneté de neuf ans et percevait un salaire brut mensuel de 3 768,92 € ;
Que Sophie X... a été licenciée le 23 avril 2007 et embauchée en tant que pharmacienne par le laboratoire AGUETTANT le 28 janvier 2008, neuf mois plus tard, pour un salaire brut initial de 3 085 €, soit une perte mensuelle de 683,92 € ;
Qu'elle invoque une dépression postérieure au licenciement ; que toutefois celle-ci était présente avant la rupture, puisqu'elle fut la cause de son arrêt de travail ayant mené à la déclaration d'inaptitude ;
Qu'au vu de ces éléments les premiers juges ont justement évalué le préjudice à 30 000 € ; que le jugement sera confirmé » ;
1°) ALORS QU' en condamnant la société Pharmacie du Château d'Eau à régler la somme de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à Mademoiselle X... parce que cette dernière aurait souffert d'une dépression « présente avant la rupture puisqu'elle (aurait été) la cause de son arrêt de travail ayant mené à la déclaration d'inaptitude » cependant que l'ex-salariée elle-même n'avait pas soutenu une telle affirmation, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU' en s'abstenant de provoquer les observations des parties sur ce point, en particulier sur l'existence d'un lien entre la dépression nerveuse de l'exsalariée et l'inaptitude ayant conduit à son licenciement, la Cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire en violation de l'article 16 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-18403
Date de la décision : 22/06/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 31 mars 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 jui. 2011, pourvoi n°10-18403


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bénabent, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.18403
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