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22/06/2011 | FRANCE | N°09-68302

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 22 juin 2011, 09-68302


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er octobre 1987 en qualité de VRP multicartes par la société l'Ebonoid qui commercialise des appareils et accessoires électriques ; qu'il a été licencié le 17 mai 2006 pour insuffisance professionnelle et insubordination avec dispense d'exécution de son préavis ; que contestant le bien-fondé de son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi

que d'une demande de commissions de retour sur échantillonnages ;
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er octobre 1987 en qualité de VRP multicartes par la société l'Ebonoid qui commercialise des appareils et accessoires électriques ; qu'il a été licencié le 17 mai 2006 pour insuffisance professionnelle et insubordination avec dispense d'exécution de son préavis ; que contestant le bien-fondé de son licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que d'une demande de commissions de retour sur échantillonnages ;
Sur le premier moyen :
Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 7313-11 du code du travail ;
Attendu, selon ce texte, que quelles que soient la cause et la date de la rupture du contrat de travail, le voyageur, représentant ou placier a droit, à titre de salaire, aux commissions et remises sur les ordres non encore transmis à la date de son départ, mais qui sont la suite directe des remises d'échantillon et des prix faits antérieurement ;
Attendu que pour faire droit à la demande de rappel de salaire formulée par le salarié à titre de commissions de retour sur échantillonnage, la cour d'appel retient que la position de l'employeur, qui se borne à affirmer que le salarié ne prouve pas l'existence d'un retour sur échantillonnage, est indéfendable au regard de l'activité de ce VRP qui, après presque vingt ans de service, a travaillé jusqu'au jour de son licenciement et qu'en limitant à trois mois seulement le temps à prendre en compte pour le calcul de cette indemnité légale, M. X... reste on ne peut plus raisonnable ;
Qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, sans caractériser en quoi les commandes passées après la rupture du contrat de travail de M. X... auraient été la suite directe de son activité antérieure et alors que l'employeur faisait valoir que le salarié avait été dispensé de l'accomplissement de son préavis durant lequel ses commissions lui ont été réglées sur la base des ordres qu'il avait passés, la cour d'appel, qui n'a pas répondu à ce moyen pertinent, a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a fait droit à la demande du salarié de 16 857 euros à titre de commissions de retour sur échantillonnage, l'arrêt rendu le 28 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux juin deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société l'Ebenoid
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement de Monsieur Eric X... dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'AVOIR condamné, en conséquence, la Société L'EBENOID à lui verser la somme de 151. 857, 00 €,
AUX MOTIFS QUE « Monsieur X... a été embauché en qualité de VRP multicartes le 1er octobre 1987 par la société L'EBENOID, qui commercialise des appareils et accessoires électriques, et licencié par une lettre recommandée en date du 17 mai 2006 dont une photocopie est annexée au présent arrêt ; l'insuffisance professionnelle reprochée au salarié est immédiatement sujette à caution en l'état de sa très grande ancienneté ; la lettre de licenciement admettant que le chiffre d'affaires du salarié – qui n'avait pas d'objectifs à réaliser – fut constant, en 2004 et 2005, ce motif n'est pas réel ; sur son insubordination, l'employeur fait grief à Monsieur X... de ne point appliquer ses directives écrites à lui adressées par une lettre recommandée en date du 12 janvier 2006 dont le contenu était en substance de lui demander de prospecter non plus seulement comme auparavant les agences des grossistes, mais les plates-formes commerciales de distribution nouvellement crées dans le secteur qui nous occupe ; ce courrier mettait le salarié en demeure d'avoir à suivre cette nouvelle politique commerciale ; par courrier en réponse, en date du 20 février 2006, Monsieur X... informait son employeur de sa volonté de mettre en pratique les nouvelles directives ; à compter de ce dernier courrier, aucun document-strictement aucun – n'est versé aux débats permettant de caractériser un refus du salarié à se plier aux visites des plates formes commerciales comme il s'y était engagé ; ce second motif n'est donc pas plus réel que le premier ; la carte des produits l'EBENOID constituait le principal de l'activité du VRP X... ; elle lui ménageait un revenu brut annuel d'environ 70. 000 € ; Monsieur X..., qui a succédé à son père au sein de l'entreprise – ce qui explique qu'il ne perdait jamais un occasion de témoigner de son attachement à la société qui l'employait – comptait près de 20 ans de bons et de loyaux services ; la lecture de son long courrier du 20 février 2006, dont la teneur n'est pas contestée, permet de se convaincre de l'entière disponibilité du salarié à cette entreprise, de ses très nombreuses initiatives et de son entier dévouement professionnel ; il suffit pour s'en convaincre de noter que, quinze jours avant l'introduction de la procédure de licenciement, son employeur lui adressait une lettre recommandée en date du 23 mars 2006 dans les termes suivants : « nous vous confirmons que nous ne remettons pas en cause le travail que vous avez pu effectuer pour la société depuis votre embauche ; la Cour dispose des éléments d'appréciation suffisants pour arrêter à la somme réclamée l'exacte et entière réparation du préjudice pécuniaire né de ce licenciement sans cause réelle et sérieuse »,
1) ALORS QUE tenus de motiver leur décision, les juges ne peuvent se borner à statuer par un motif d'ordre général sans procéder à des constatations de faits concrètes ; qu'en affirmant qu'un grief d'insuffisance professionnelle est sujet à caution à l'égard d'un salarié ayant une grande ancienneté et un passé professionnel louable, la Cour d'appel a statué par un motif d'ordre général et a violé l'article 5 du Code civil ;
2) ALORS QUE l'employeur reprochait au salarié d'avoir réalisé un chiffre d'affaire constant sur 2004 et 2005 alors que les autres commerciaux, qui démarchaient tant les grossistes que les installateurs, avaient connu une progression sensible de leurs chiffres d'affaire ; qu'en relevant que le grief d'insuffisance professionnelle n'était pas réel dès lors que la lettre de licenciement admettait que le chiffre d'affaires du salarié, qui n'avait pas d'objectifs à réaliser, avait été constant en 2004 et 2005, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée par l'employeur, tant dans la lettre de licenciement que dans ses écritures soutenues à l'audience, si l'insuffisance professionnelle ne s'était pas traduite par un décalage entre la stagnation du chiffre d'affaire réalisé par le salarié et la progression sensible de celui réalisé par ses collègues, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1235-1 du Code du travail ;
3) ALORS QUE pour établir la persistance du comportement reproché au salarié après le 20 février 2006, l'employeur produisait un courrier adressé au salarié le 23 mars 2006, les rapports de visites établis par le salarié au mois de mars et avril 2006, ainsi que des courriels en date des 13 et 16 décembre 2007 rédigés par le successeur du salarié et son promoteur ; qu'en affirmant que « strictement aucun » document permettant de caractériser un refus du salarié de se plier à ses nouvelles directives n'était versé aux débats à compter du 20 février 2006, la Cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4) ALORS QUE nul ne peut se constituer de preuve à lui-même ; qu'en déduisant la disponibilité du salarié à son entreprise, ses initiatives et son dévouement professionnel du seul courrier que ce dernier avait adressé à son employeur le 20 février 2006, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
5) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; que dans sa lettre en date du 23 mars 2006, l'employeur indiquait que « s'il est vrai que vos méthodes de travail ont pu se révéler efficaces, elles ne sont aujourd'hui plus adaptées aux nouvelles réalités économiques du marché sur lequel vous intervenez et méritent d'être modifiées » ; que dès lors en affirmant que quinze jours avant l'introduction de la procédure de licenciement, l'employeur avait adressé au salarié une lettre recommandée en date du 23 mars 2006 lui confirmant que son travail n'était pas remis en cause depuis son embauche, la Cour d'appel a dénaturé la lettre du 23 mars 2006 et a violé l'article 1134 du Code civil ;
6) ALORS QUE le juge est tenu d'examiner l'ensemble des motifs qui sont énoncés dans la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement faisait état, outre du refus du salarié de respecter les nouvelles directives de prospection, de son refus de collaborer avec le promoteur qui avait été embauché en avril 2005 pour assurer la promotion des produits sur le secteur confié au salarié ; qu'en s'abstenant d'examiner ce grief, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-6, L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1235-3 et L. 1235-4 du Code du travail ;
7) ALORS QU'en s'abstenant également d'examiner le refus du salarié d'adresser ses rapports de visites selon une forme pré-établie permettant à l'employeur d'alimenter une base de données et de cibler des opérations de marketing direct venant en support de son action commerciale, grief qui était également expressément visé dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a, de nouveau, violé les articles L. 1232-6, L. 1232-1, L. 1235-1, L. 1235-3 et L. 1235-4 du Code du travail ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fait droit à la demande de rappel de salaire formulée par le salarié à titre de commissions de retour sur échantillonnage, et d'AVOIR condamné la SAS L'EBENOID à lui verser une somme de 151 857 euros.
AUX MOTIFS QUE « Sur l'indemnité de retour sur échantillonnages, quelles que soient la cause et la date de rupture du contrat de travail, le VRP a droit, à titre de salaire, aux commissions et remises sur les ordres non encore transmis à la date de son départ, mais qui sont la suite directe des remises d'échantillons et des prix faits antérieurs à l'expiration du contrat ; le conseil de l'employeur se borne à affirmer que Monsieur X... ne prouve pas l'existence d'un retour sur échantillonnages ; cette position est indéfendable au regard de l'activité de ce VRP qui, après 20 ans de services, a travaillé jusqu'au jour de son licenciement ; en limitant à trois mois seulement le temps à prendre en compte pour le calcul de cette indemnité légale, Monsieur X... reste on ne peut plus raisonnable, en sorte que la Cour dispose encore des éléments d'appréciation suffisants pour lui accorder, en son entier, l'indemnité qu'il réclame »,
1) ALORS QUE les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir, preuve à l'appui (cf. courrier du 2 octobre 2006 et bulletin de paie d'octobre 2006), que le salarié avait été dispensé de l'accomplissement de son préavis et qu'il avait été payé de l'ensemble des ordres effectivement passés par lui ; qu'en condamnant la société L'EBENOID à payer à Monsieur X... une indemnité de retour sur échantillonnages, sans répondre à ce moyen déterminant de l'employeur pris de ce que le salarié avait été intégralement rempli de ses droits, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
2) ALORS QU'un VRP a droit à une indemnité de retour sur échantillonnage seulement sur les ordres transmis à l'entreprise postérieurement à la rupture du contrat de travail et qui sont la suite directe de son activité ; qu'en l'espèce, pour condamner la société L'EBENOID, qui contestait devoir quoique que ce soit à ce titre, à verser au salarié une indemnité de retour sur échantillonnage, la Cour d'appel s'est bornée à relever que la thèse de l'absence de retour sur échantillonnage est « indéfendable » à l'égard d'un salarié ayant, après 20 ans de service, travaillé jusqu'au jour du licenciement ; qu'en statuant ainsi, sans nullement caractériser en quoi les commandes passées à la société après la rupture du contrat de travail du salarié aurait été la conséquence de ses diligences antérieures, et sans constater le montant des ordres transmis du fait du salarié après son départ de la société, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 7313-11 du Code du travail ;
3) ALORS QUE le droit du VRP à commissions de retour sur échantillonnage est déterminé en fonction de la durée normale consacrée par les usages, sauf si des sujétions administratives, techniques, commerciales ou financières propres à la clientèle permettent de retenir une durée plus longue, laquelle ne peut excéder trois ans ; qu'en l'espèce, pour condamner la société L'EBENOID, qui contestait devoir quoique que ce soit à ce titre, à verser au salarié une indemnité de retour sur échantillonnage calculée sur la base de trois mois de commissions, la Cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'en limitant à seulement trois mois le temps à prendre en compte pour le calcul de cette indemnité légale, le salarié était resté on ne peut plus raisonnable ; qu'en déterminant ainsi de façon arbitraire le montant de cette indemnité, sans constater l'existence d'un usage professionnel permettant d'allouer au VRP trois mois de commissions de retour sur échantillonnage, la Cour d'appel a, de nouveau, privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 7313-12 du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-68302
Date de la décision : 22/06/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 28 mai 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 22 jui. 2011, pourvoi n°09-68302


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.68302
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