LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses première et troisième branches, tel que reproduit en annexe :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 8 juin 2010), qu'une fuite survenue en juin 2006 sur le réseau d'eau potable desservant le lotissement ..., situé à Carqueiranne, a causé par infiltration des dommages à la propriété de M. X..., propriétaire du lot n° 27 du lotissement ; que la société Compagnie des eaux et de l'ozone (la société CEO), concessionnaire du service communal de distribution de l'eau, a été mandatée afin d'effectuer une recherche de fuite ; que M. X... a fait assigner par acte en date du 12 mars 2007 l'association syndicale libre ...(l'ASL) et la société CEO en réparation de ses préjudices ; que la société CEO a soulevé une exception d'incompétence au profit du juge administratif ;
Attendu que l'ASL fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... la somme de 7 500 euros à titre de dommages-intérêts ;
Mais attendu que l'arrêt relève que les frais de réparation et d'entretien de la partie privative de la canalisation à l'intérieur des limites de la propriété incombaient en application du règlement du service de l'eau de la commune au syndicat des copropriétaires et qu'en conséquence, les dommages survenus en domaine privé ressortaient de la responsabilité de l'ASL jusqu'au compteur en application de l'article 4-4 de ce règlement et, après ce compteur, en application de son article 6-2 ; que la fuite à l'origine du dommage s'était produite à l'extérieur du compteur individuel du lot n° 19, en amont, et qu'elle avait nécessité la pose d'un nouveau robinet avant et après compteur, sans que l'origine de la fuite puisse être rapportée à l'usure, à la vétusté ou à tout autre phénomène tel que la rupture pour gel ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire, sans avoir à examiner le contrat de concession conclu entre la société CEO et la commune, que les dommages étaient survenus sur le domaine privé de l'ASL, sur une canalisation dont celle-ci avait l'usage, la direction et le contrôle, ce dont il résultait qu'elle ne pouvait être exonérée de sa responsabilité vis-à-vis de M. Y..., coloti victime des dommages ;
D'où il suit que le moyen, qui est inopérant en sa première branche, n'est pas fondé en sa troisième branche ;
Et attendu que la deuxième branche du moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'ASL ...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'ASL ...; la condamne à payer à M. X... et à la société Compagnie des eaux et de l'ozone la somme de 2 500 euros chacun ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize juin deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par de la SCP Defrenois et Levis, avocat de l'association syndicale libre ...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné l'ASL ...à payer à Monsieur X...la somme de 7. 500 euros à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « c'est à bon droit que la CEO soutient que tous les frais de réparation et d'entretien de la partie privative de la canalisation à l'intérieur des limites de la propriété incombent au syndicat des copropriétaires ; que d'après la facture d'intervention de la CEO, le sinistre s'est produit à l'extérieur du compteur individuel du lot n° 19, et qu'il a nécessité la pose d'un nouveau robinet avant et après compteur, sans que l'origine de la fuite puisse être rapportée à l'usure, à la vétusté ou à tout autre phénomène tel que la rupture pour gel ; que, quoi qu'il en soit, la surveillance de l'installation impliquait la détection par l'ASL de tout suintement extérieur, l'huissier requis le 27 juillet 2006 par Aristide X... ayant constaté que l'eau s'écoulait de manière régulière et abondante, avec de nombreuses traces de moisissures visibles depuis les parties communes ; que la garde de la canalisation impliquait pour l'ASL, l'usage la direction et le contrôle de la canalisation, et que la distinction sémantique entre la ‘ ‘ surveillance''et la ‘ ‘ maintenance''qui appartiendrait à la société fermière n'a pas de fondement légal ou contractuel de nature à exonérer l'ASL de sa responsabilité vis-à-vis d'un coloti ; »
ALORS QUE, d'une part, le contrat de concession de service public des eaux détermine les droits et obligations du concessionnaire ; que la méconnaissance de ses obligations peut être invoquée devant le juge judiciaire par l'usager, lorsqu'elle lui a causé un préjudice ; qu'en écartant la responsabilité de la CEO, sans avoir répondu à la demande de l'ASL ...dans ses conclusions récapitulatives qui tendait à ce que la CEO verse au débat le contrat de concession du service communal de distribution de l'eau qui la liait à la commune de Carqueiranne, alors que ce contrat détermine ses obligations à l'égard des usagers, dont l'ASL ...et tous les colotis, notamment Monsieur X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, d'autre part, le propriétaire est présumé gardien de sa chose ; qu'il peut s'exonérer en rapportant la preuve qu'il n'avait plus sur la chose, au moment du dommage, les pouvoirs d'usage, de contrôle et de direction, particulièrement lorsque ces pouvoirs ont été transférés à autrui par contrat ; que le Règlement des Services de l'Eau applicable prévoit que le distributeur d'eau n'est pas responsable des dommages résultant d'un sinistre survenant en domaine privé liés à un défaut de garde ou de surveillance ; qu'en retenant que l'ASL ...avait la garde des canalisations et engageait à ce titre sa responsabilité à l'égard de Monsieur X..., sans préciser si le dommage dont celui-ci demandait réparation était survenu dans le domaine public ou dans le domaine privé du réseau collectif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéa 1er du code civil ;
ALORS QUE, enfin, le propriétaire est présumé gardien de sa chose ; qu'il peut s'exonérer en rapportant la preuve qu'il n'avait plus sur la chose, au moment du dommage, les pouvoirs d'usage, de contrôle et de direction, particulièrement lorsque ces pouvoirs ont été transférés à autrui par contrat ; qu'en relevant que l'ASL ...avait la garde de la canalisation, à savoir l'usage, la direction et le contrôle de la canalisation, et que « la distinction sémantique entre la ‘ ‘ surveillance''et la ‘ ‘ maintenance''qui appartiendrait à la société fermière n'a pas de fondement légal ou contractuel de nature à exonérer l'ASL de sa responsabilité », sans avoir pu prendre connaissance des dispositions du contrat de concession de service public liant la CEO à la commune de Carqueiranne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384, alinéa 1er, du code civil.