LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Jacques Emmanuelle dont M. X... était le gérant puis le liquidateur amiable a cédé son fonds de commerce de salon de coiffure à M. et Mme Y...
Z... ; que ces derniers reprochant à M. X... des actes de détournement de clientèle et de personnel, ont demandé qu'il soit condamné à leur payer des dommages-intérêts ; que M. X... a, reconventionnellement, demandé le paiement d'une somme restant due au titre du prix de cession du stock ;
Sur le premier moyen, le deuxième moyen et le troisième moyen, pris en sa seconde branche :
Attendu que ces griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour confirmer le jugement et condamner les époux Y...
Z... à payer 420, 83 euros à M. X..., l'arrêt retient qu'ils ont signé l'inventaire, ce qui présume qu'ils ont vérifié l'état du stock, et qu'ils ont, sans protester, effectué trois règlements représentant un total de 1 294, 66 euros, sur la somme qui avait été évaluée à 1 715, 49 euros ;
Attendu qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions soutenant que M. X... ne pouvait, à titre personnel, demander le paiement de sommes dues à la société Jacques Emmanuel, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné les époux Y...
Z... à payer à M. X... la somme de 420, 83 euros, l'arrêt rendu le 2 juillet 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du sept juin deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour M. et Mme Y...
Z....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a débouté les époux Y...
Z... de leur demande formulée du chef de concurrence déloyale à leur égard de la part de Monsieur Jacques X... ;
AUX MOTIFS QUE la société JACQUES EMMANUELLE dont le gérant était Monsieur Jacques X..., devenu son liquidateur à la suite de la liquidation amiable et de sa dissolution, était, propriétaire d'un fonds de commerce de salon de coiffure exploité à Paris 7me,... et... ; que par acte sous seing privé du 24 octobre 2002, la société JACQUES EMMANUELLE a cédé aux époux Y...
Z... son fonds de commerce, comprenant la clientèle, l'achalandage, l'enseigne, le nom commercial, le matériel, le mobilier commercial, les agencements, les marchandises neuves et le droit au bail, pour le prix principal de 109. 700 €, s'appliquant pour 109. 200 € aux éléments incorporels, et pour 500 € aux éléments corporels ; que dans l'acte, la société venderesse s'interdisait de se rétablir, dans un délai de cinq ans, de faire valoir un fonds de commerce de la nature de celui vendu ainsi que d'engager, après la vente et pendant la même durée de cinq années, le personnel employé ; que les époux Y...
Z..., soutenant que Monsieur X... s'était livré à des actes de détournement de personnel et de clientèle, ont, par acte du 27 juillet 2004, assigné celui-ci devant le Tribunal de commerce de Paris afin de l'entendre condamner au paiement de 20. 000 € de dommages et intérêts ; que Monsieur X... a conclu au débouté des demandes des époux Y...
Z..., faisant valoir qu'il n'avait commis aucune manoeuvre de nature à détourner le personnel ou la clientèle du salon exploité par les époux Y...
Z... au profit de la société ALAIN COIFFURE ; qu'il a demandé, à titre reconventionnel, la condamnation des époux Y...
Z... à lui régler la somme de 420, 83 € restant due au titre d'un inventaire dressé contradictoirement, 10. 000 euros à titre reconventionnel ; que les époux Y...
Z... poursuivent la réformation du jugement en faisant valoir que la concurrence déloyale résulte à la fois du détournement de personnel et du détournement de clientèle, qui ont eu d'importantes conséquences sur le chiffre d'affaires du salon ; qu'ils ne développent toutefois aucun argument, et ne versent aux débats aucune pièce susceptible de remettre en cause la décision des premières juges ; qu'il n'est pas discuté que Monsieur X... n'a pas créé de fonds de commerce de salon de coiffure postérieurement à la vente litigieuse et qu'il n'a donc réembauché aucune de ses anciennes employées, ni détourné son ancienne clientèle ; que Monsieur X... n'a pas non plus commis de manoeuvres de débauchage de son ancien personnel au bénéfice d'un concurrent ; que si Madame A... a démissionné le 6 décembre 2002 et après avoir effectué son préavis, a été réembauchée par un concurrent, il ne peut en être fait grief à Monsieur X... ; qu'il ne saurait non plus lui être reproché d'avoir informé ses employées, comme l'indique Madame B... dans son attestation datée du 14/ 04/ 2003, que leur contrat ne comportant aucune clause de non-concurrence, elles étaient libres, si elles le désiraient, de ne pas travailler avec le nouveau propriétaire du fonds, et d'aller chez un concurrent, tout en incitant ces mêmes employées à faire l'essai de poursuivre leur activité dans le salon avant de prendre une autre décision ; que le fait que Monsieur X... ait indiqué à une cliente que Madame A..., son ancienne coiffeuse, travaillait « un peu plus loin » », chez un concurrent, ne constitue pas un acte de détournement, cette situation étant sue de la clientèle en général, comme cela résulte d'autres attestations, notamment celle de Madame C... ; qu'il n'est pas établi que Monsieur X... aurait remis à Madame A... « le carnet de téléphone des clientes » afin d'organiser le détournement de la clientèle du salon ; que s'il résulte des attestations versées aux débats que la présentation du nouveau propriétaire du fonds à la clientèle ne s'est pas faite dans les meilleures conditions, du fait du comportement des deux parties, Madame Y...
Z... n'ayant pas, notamment, la même conception de son activité de coiffure que le vendeur du fonds ; que la baisse du chiffre d'affaires du salon dans l'année qui a suivi la cession n'est ni significative ni anormale à la suite d'un changement de propriétaire ;
1./ ALORS, D'UNE PART, OUE tout acte de concurrence déloyale générateur d'un préjudice engage la responsabilité de son auteur ; qu'en considérant que Monsieur X... n'avait pas créé de fonds de commerce de salon de coiffure postérieurement à la vente litigieuse, qu'il n'avait donc pas réembauché ses anciennes employées ni détourné son ancienne clientèle et qu'il n'avait pas commis de manoeuvres de débauchage de son ancien personnel au bénéfice d'un concurrent, tout en constatant que Monsieur X... s'était obligé à respecter une clause de non concurrence, laquelle prévoyait que « De son côté, le vendeur s'interdit expressément, à l'avenir et dans un délai de cinq années, le droit de créer ou faire valoir un fonds de commerce de la nature de celui vendu, comme aussi de s'intéresser directement ou indirectement dans l'exploitation d'un fonds similaire, même à titre de simple employé, d'associé ou de commanditaire, de locataire gérant ou de directeur, ou de toute autre manière rétribuée ou non, et ce dans un rayon de mille mètres (1. 000 m) à vol d'oiseau du fonds vendu », ce dont il s'évinçait que Monsieur X... ne pouvait, de bonne foi, inciter ses anciennes employées à quitter le salon de coiffure ni même les informer qu'en l'absence de clause de non concurrence, elles étaient libres d'aller travailler pour un concurrent situé à proximité, et d'inciter également ses anciennes clientes à aller dans le salon de coiffure concurrent où son ancienne coiffeuse était partie travailler sans violer l'interdiction qui lui avait été faite de faire valoir un fonds de commerce de la nature de celui vendu ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles 1382 et 1383 du code civil ;
2./ ALORS, D'AUTRE PART, OUE les conventions légalement formées doivent s'exécuter de bonne foi ; que les époux Y...
Z... faisaient valoir que Monsieur X... avait gravement manqué à son obligation de bonne foi et à la loyauté contractuelle, d'une part, en refusant de présenter la clientèle à Madame Y...
Z..., d'autre part, en incitant sa principale coiffeuse à aller travailler dans un salon de coiffure voisin, enfin, en incitant ses anciennes clientes à aller dans un salon de coiffure concurrent où son ancienne coiffeuse, Madame A..., était partie travailler ; qu'en se bornant, pour débouter les exposants de leurs demandes, à relever que Monsieur X..., vendeur du fonds de commerce, n'avait pas créé de fonds de commerce de salon de coiffure postérieurement à la vente litigeuse, qu'il n'avait pas réembauché ses anciennes employées ni détourné son ancienne clientèle et qu'il n'avait pas commis de manoeuvres de débauchage de son ancien personnel au bénéfice d'un concurrent, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si Monsieur X... n'avait pas gravement manqué à son obligation de loyauté à l'égard de Madame Y...
Z..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134, 1135 et 1147 du code civil ;
3./ ALORS, ENCORE, QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que les époux Y...
Z... avaient fait valoir et justifié (conclusions, p. 3 et 6 et bordereau de pièces) le détournement de clientèle en produisant une attestation de Madame B..., en date du 3 janvier 2005, d'où il ressortait que Madame A..., coiffeuse de Monsieur X... depuis 23 ans, qui était allée travailler chez le concurrent voisin, s'était fait remettre le carnet de téléphone des clientes ; qu'en affirmant qu'il n'est pas établi que Monsieur X... aurait remis à Madame A... " le carnet de téléphone des clientes " afin d'organiser le détournement de la clientèle du salon sans se prononcer sur l'attestation de Madame B..., en date du 3 janvier 2005, faisant ressortir que Madame A..., ancienne coiffeuse de Monsieur X..., était partie chez le concurrent voisin avec le carnet de téléphone des clientes de Monsieur X..., ce qui constituait manifestement un détournement de clientèle, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4./ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en affirmant qu'il n'est pas établi que Monsieur X... aurait remis à Madame A... le carnet de téléphone des clientes, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et le bordereau de pièces communiquées (conclusions p. 6 et pièce 30 du bordereau) en méconnaissant le moyen et les pièces versées aux débats démontrant le contraire, violant ainsi l'article 4 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR, confirmé le jugement en ce qu'il a débouté les époux Y...
Z... de leur demande formulée du chef de concurrence déloyale à leur égard de la part de Monsieur Jacques X... ;
AUX MOTIFS QUE la baisse du chiffre d'affaires du salon dans l'année qui a suivi la cession n'est ni significative ni anormale à la suite d'un changement de propriétaire ;
ALORS QUE les époux Y...
Z... se plaignaient du préjudice subi tiré de l'importante conséquence des actes de détournement invoqué, à savoir la diminution du chiffre d'affaires, en insistant sur le fait que le salon avait dû être ouvert un jour de plus par semaine, ce qu'avait totalement occulté le tribunal (conclusions d'appel p. 9 in fine et p. 10) ; qu'en ne répondant pas à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a condamné les époux Y...
Z... à payer à Monsieur X... la somme de 420, 83 euros au titre du solde du stock de marchandises et D'AVOIR dit que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 4 avril 2003 ;
AUX MOTIFS QUE les époux Y...
Z... soutiennent qu'ils ne devraient rien à ce titre parce qu'une partie des produits est périmée ; que toutefois, ils ont signé l'inventaire, ce qui présume qu'ils ont vérifié l'état du stock et qu'ils ont, sans protester, effectué trois règlements représentant un total de 1. 294, 66 €, sur la somme qui avait été évaluée de 1. 715, 49 € ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a condamné les époux Y...
Z... au paiement de 420, 83 € ; que cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 4 avril 2003, date de la première mise en demeure dont il est justifié ;
1./ ALORS, D'UNE PART, QUE les époux Y...
Z... faisaient valoir que Monsieur X... ne pouvait pas, à titre personnel, demander le paiement de sommes dues à la société JACQUES EMMANUELLE car cette société avait été liquidée et que les opérations de liquidation avaient été clôturées ; qu'en ne répondant pas à ce moyen dirimant de nature à écarter la qualité de créancier de Monsieur X... à l'encontre des époux Y...
Z..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2./ ALORS, D'AUTRE PART, QUE les époux Y...
Z... soutenaient que Monsieur Y...
Z... avait signé très rapidement l'état des stocks sans pouvoir vérifier l'intégralité des dates de péremption des produits et que, s'étant aperçu qu'une partie était périmée, il s'était vu contraint de les restituer ; qu'en se bornant à retenir que la signature de l'inventaire présumait que les époux Y...
Z... avaient vérifié l'état du stock sans rechercher si effectivement et matériellement ils avaient pu prendre connaissance de la totalité du stock, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil.