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18/05/2011 | FRANCE | N°10-18302

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mai 2011, 10-18302


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 6 avril 2010), que M. X..., engagé le 1er septembre 2003 en qualité de directeur commercial par la société Icelandic France, a été licencié le 5 octobre 2006 pour faute grave, notamment pour avoir décidé en mars 2006 de vendre des lots de poisson surgelés reconnus comme impropres à la consommation ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen : >
1°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, sans caractériser, ainsi qu'elle y était cepe...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 6 avril 2010), que M. X..., engagé le 1er septembre 2003 en qualité de directeur commercial par la société Icelandic France, a été licencié le 5 octobre 2006 pour faute grave, notamment pour avoir décidé en mars 2006 de vendre des lots de poisson surgelés reconnus comme impropres à la consommation ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, sans caractériser, ainsi qu'elle y était cependant invitée, en quoi la décision de commercialiser des produits impropres à la vente pouvait être imputée à M. X... personnellement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et L. 1331 et suivants du code du travail ;

2°/ que, dans ses conclusions d'appel (p. 7 in fine), M. X... soutenait que le témoignage de Mme Y... était irrecevable dans la mesure où il émanait d'un témoin indirect des faits qui se bornait à rapporter des propos tenus par le chef d'entreprise, mais également inopérant s'agissant d'une salariée faisant partie de l'équipe de direction avec laquelle elle entretenait une communauté d'intérêts ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre au moyen ainsi élevé par M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que nul ne peut se constituer de preuve à soi même ; qu'en permettant à la société employeur de prouver la date à laquelle elle avait eu connaissance des faits reprochés au salarié par une attestation d'un de ses représentants légaux, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu que le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve par la cour d'appel, laquelle, sans se fonder sur la seule attestation établie par le représentant légal de l'employeur, a retenu que les faits fautifs reprochés au salarié étaient établis et que l'employeur n'en avait eu connaissance que dans le délai de deux mois précédant l'engagement de la procédure de licenciement ; que le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une cause réelle et sérieuse et de l'avoir, en conséquence, débouté de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (187. 560 €) et d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile (5. 000 €) ;

AUX MOTIFS QUE : « Sur la décision de commercialisation des lots de filets de lotte ; que deux lots LT021330 et LT021332 ont fait l'objet d'un contrôle organo cuit le 2 mars 2006 ; que la conclusion est pour le lot LT021330 : non satisfaisant ; qu'au deuxième examen, il est indiqué odeur et saveur amoniacales ; que, pour le lot LT021332 : non satisfaisant ; qu'au deuxième examen, il est indiqué, odeur amoniacale, saveur spécifique atténuée ; que Monsieur Z..., responsable technique et qualité, ex-employé de la société ICELANDIC FRANCE atteste de ce que, le 10 mars 2006, a eu lieu, au siège à EVRY, une séance d'évaluation organoleptique au sujet de la qualité d'un lot de queues de lotte (stocké sur le frigo A25 au Havre) et qu'au terme de cet examen, le service qualité a émis des réserves « quant à la loyauté d'une partie de ces marchandises » ; que Monsieur Z... ne précise pas les numéros de lot, mais il résulte de son attestation que ce n'est pas le service qualité qui prenait la décision : « les conclusions de cette séance ont été remises aux responsables achats et ventes, afin qu'une décision concertée puisse être prise » ; qu'il est, par ailleurs, établi que les deux lots litigieux ont été envoyés en chronopost au siège à EVRY avec trois autres filets de lotte ; que Madame A..., directeur qualité, a attesté que « début mars 2006 a eu lieu une décision dans le bureau d'EVRY ayant pour but de statuer sur le devenir commercial d'un achat de lottes. La décision a été prise par le directeur commercial, Alain X..., de livrer les marchandises malgré un avis défavorable » de sa part ; que Monsieur X... est directeur commercial ; qu'il prétend qu'une autre personne aurait été chargée de prendre la décision ; qu'or, il ne désigne pas cette personne sinon comme étant Madame A... ; que Monsieur Z... précise que le service qualité ne prend pas la décision commerciale ; qu'un ordre de conditionnement pour le client G... a été donné pour une livraison souhaitée au 20 mars 2006 pour le lot LT0211330 qui a été reconditionné sous le N° LT 021421 ; que, dès le 7 avril 2006, la société G... a envoyé un courriel à l'adresse..., Madame A... dont l'objet est « défaut organo lotte N° 2 » ; le lot LT021421, qui contient le lot litigieux LT0211330, est visé : « très forte odeur de poisson se dégage des cartons après ouverture, et les colis de commandes préparées G... prennent l'odeur forte de la lotte. Nous avons bloqué une partie de la palette … » ; que, le 10 avril 2006, Madame A... a écrit notamment à Stéphan (B...)/ Harold (D...) et non Monsieur C..., directeur général, en visant ce lot et en précisant : «.. autres retours à prévoir j'ai peur. Il nous faut nous mettre d'accord sur la marche à suivre pour sauver le produit.. » ; que le même jour, Monsieur Harold D..., qui est acheteur de la société ICELANDIC FRANCE, répondra « j'ai eu le fournisseur à qui j'avais précédemment fait part des problèmes de calibrage. Je lui ai fait part des problèmes d'odeur. Nous devrions régler ce problème de façon « smoth » avec le fournisseur » ; que le 14 avril 2006, Madame A... a envoyé un courriel à Monsieur Harold D..., mais aussi à Monsieur Alain X... et Monsieur B... : « Harold/ Alain, il nous faut décider d'un plan d'action mardi pour répondre à G... et éteindre le feu » ; que c'est Madame A..., avec copie à Monsieur X... et D... notamment et non à Monsieur C..., qui répondra le 18 avril à la société G... sur le plan d'action « en accord avec notre acheteur et notre commercial », pour le retour des lots et la livraison au plus vite de produits correspondant à l'attente du client ; que la société G... se plaindra encore à Madame A... en sa qualité de responsable du service qualité, le 18 mai 2006, de réclamations sur des filets de lotte 84223 I, avec la photo de vers dans les filets de lotte : « les motifs sont identiques aux réclamations précédentes : immangeables, goût avarié, odeur nauséabonde » ; que Madame A... donnera l'autorisation de destruction des lots pour un volume de 2000 UVC : le lot LT021421 est visé parmi 5 lots : aucune copie n'est adressée au directeur général, mais à « Harold » et « Stéphan » notamment ; que Monsieur D... a attesté en faveur de la thèse de Monsieur X..., mais il est taisant sur toute la première phase du déroulement des faits, soit sur la détection de deux lots impropres à la consommation par les analyses du 2 mars 2006 et la réunion du 10 mars 2006 ; qu'il n'évoque que la seconde phase, soit la réclamation de la société G... après la livraison alors que le reproche qui est fait est l'ordre de livraison donné en toute connaissance de cause pour des produits impropres ; qu'il évoque cependant des nouvelles inspections qui ont effectivement démontré des anomalies, ce qui atteste, si besoin était, des inspections précédentes ; que ces éléments emportent la conviction que Monsieur X... a bien pris la décision, en toute connaissance de cause, de laisser commercialiser de la marchandise impropre à la vente ; que les trois personnes particulièrement informées étant l'acheteur, Monsieur D..., le responsable du service qualité, Madame A..., et le directeur commercial, Monsieur X..., destinataire du courriel aux fins de décider d'un plan d'action devant les réclamations du client G... ; que la lettre de licenciement vise expressément le lot LT0211330, lot qui a été autorisé à la vente et qui a été reconditionné ensuite pour le client G... sous le numéro LT 021421 ; qu'au niveau des responsabilités de Monsieur X..., et de son information des faits, la décision de poursuivre la vente des produits constitue une faute et non pas seulement une erreur entrant dans le cadre d'une simple insuffisance professionnelle ; Sur la prescription de la faute constituée par la décision de mise en vente du lot LT0211330 ; qu'aucun courriel produit aux débats traitant de cette affaire de filets de lotte avariés à la société G... n'a été envoyé en copie à Monsieur Jean-Max C..., le directeur général ; que Monsieur D... a écrit que l'affaire devait être traitée en douceur de façon « smoth » avec le fournisseur ; que c'est dans ce contexte que doivent être appréciées les deux attestations qui témoignent de ce que Monsieur C... a dit à Madame Y..., et au président du groupe, Monsieur E..., le 25 septembre 2006, que Monsieur F..., de la société G..., l'avait appelé, le jour même, au sujet des filets de lotte avariés ; que Monsieur E... certifie que la direction de la société n'a pas été informée des évènements avant car les salariés impliqués dans le dossier les avait cachés ; que la société ICELANDIC FRANCE rapporte ainsi la preuve de ce qu'elle n'a pas été informée par Monsieur X... des réclamations de la société G... avant que cette société n'en fasse directement part à Monsieur C... le 25 septembre 2006 ; que les faits ne sont pas prescrits ; »

ALORS, D'UNE PART, QU'en statuant comme elle l'a fait, sans caractériser, ainsi qu'elle y était cependant invitée, en quoi la décision de commercialiser des produits impropres à la vente pouvait être imputée à Monsieur X... personnellement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1235-1 et L. 1331 et suivants du code du travail ;

ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE dans ses conclusions d'appel (p. 7 in fine), Monsieur X... soutenait que le témoignage de Madame Y... était irrecevable dans la mesure où il émanait d'un témoin indirect des faits qui se bornait à rapporter des propos tenus par le chef d'entreprise, mais également inopérant s'agissant d'une salariée faisant partie de l'équipe de direction avec laquelle elle entretenait une communauté d'intérêts ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre au moyen ainsi élevé par Monsieur X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

ALORS, ENFIN ET EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE nul ne peut se constituer de preuve à soi même ; qu'en permettant à la société employeur de prouver la date à laquelle elle avait eu connaissance des faits reprochés au salarié par une attestation d'un de ses représentants légaux, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-18302
Date de la décision : 18/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 06 avril 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mai. 2011, pourvoi n°10-18302


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.18302
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