LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Met hors de cause, sur leur demande, l'Agent judiciaire du trésor et le Recteur de l'académie de Metz-Nancy ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 23 novembre 2009), que M. X..., enseignant au sein de l'association familiale de gestion de Saint-Pierre Chanel, liée à l'Etat par un contrat d'association, élu délégué du personnel, a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande en paiement d'heures de délégation accomplies entre avril 2001 et juin 2006 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que l'association fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une somme au titre des heures de délégation, outre les congés payés y afférents alors, selon le moyen, que les heures de délégation ont, de par la loi, la nature de salaire devant être payé par l'employeur qui, selon les termes de l'article L. 442-5 du code de l'éducation, est l'Etat ; que ledit article dispose qu'il n'existe pas de contrat de travail liant les maîtres à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié et ne déroge pas au principe selon lequel le paiement des heures de délégation est assis sur l'existence d'un contrat de travail ; qu'il en résulte que l'exercice des mandats prévus par le code du travail dans l'intérêt de la communauté constituée par l'ensemble du personnel de l'établissement ne peut emporter obligation pour l'établissement privé sous contrat de payer des sommes ayant une nature salariale si bien qu'en condamnant l'association familiale de gestion Saint-Pierre Chanel à payer à M. X..., malgré l'absence de contrat de travail liant ces deux parties et de dispositions explicites à cet égard, des sommes ayant de par la loi la nature de salaire, les juges du fond ont ajouté à la loi et partant violé les articles L. 442-5 du code de l'éducation, L. 2326-3, L. 2315-3 et L. 2325-7 et suivants du code du travail ;
Mais attendu que le paiement des heures de délégation des maîtres des établissements d'enseignement privé sous contrat prises en dehors de leur temps de travail incombe à l'établissement au sein duquel ils exercent les mandats prévus par le code du travail dans l'intérêt de la communauté constituée par l'ensemble du personnel de l'établissement ;
Et attendu qu'ayant relevé que M. X... avait pris les heures de délégation en dehors de son temps de travail et que l'association n'avait pas contesté l'usage qu'il en avait fait, la cour d'appel en a exactement déduit que ces heures, effectuées en sus du temps de service et qui constituent du temps de travail effectif ouvrant droit au paiement du salaire correspondant, devaient être payées par l'établissement d'enseignement privé ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi :
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'association Familiale de gestion de Saint-Pierre Chanel aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mai deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Peignot et Garreau, avocat aux Conseils pour l'association Familiale de gestion de Saint-Pierre Chanel.
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué partiellement confirmatif d'avoir condamné l'Association familiale de gestion SAINT PIERRE CHANEL à payer à Monsieur X... les sommes de 32. 626, 80 € brut au titre des heures de délégation, 3. 262, 68 € brut au titre des congés payés y attachés, 2. 216, 16 € au titre des heures de réunions mensuelles et 221, 61 € au titre des congés payés afférents,
AUX MOTIFS PROPRES QUE " Il est constant que Monsieur Jean Lucien X... Maître enseignant contractuel est un agent de l'Etat, et est à ce titre rémunéré par ce dernier ;
Par ailleurs le seul exercice du mandat de délégué du personnel n'est pas de nature de lui conférer la qualité de salarié de l'association familiale de gestion SAINT PIERRE CHANEL ;
Mais néanmoins le paiement des heures de délégation des Maîtres des établissements d'enseignement privés sous contrat prises en dehors de leur temps de travail incombe à l'établissement au sein duquel ils exercent les mandats prévus par le Code du travail dans l'intérêt de la communauté constituée par l'ensemble des personnel de l'établissement ;
Par conséquent, après substitution de motifs, la décision du Conseil des prud'hommes ayant mis hors de cause Monsieur l'agent judiciaire du TRESOR et Monsieur le Recteur d'Académie est confirmée ",
ET QUE
" Il a ci-dessus été jugé que le paiement des heures de délégation de Monsieur X... prises en dehors de ses temps de travail incombe à l'association familiale de gestion SAINT PIERRE CHANEL puisque ces heures sont exécutées dans l'intérêt de la communauté constituée par l'ensemble du personnel de rétablissement ;
l'Association accepte cet état de fait puisqu'elle renonce à la mise en cause du Recteur de l'Académie et de l'Agent Judiciaire du Trésor ;
Qu'elle ne saurait par conséquent arguer du fait qu'il ne lui appartient pas d'établir les feuilles de salaire pour se soustraire au payement des dites heures de délégation, cette difficulté matérielle n'étant certainement pas de nature à l'exonérer de son obligation à payement ;
les deux parties conviennent que compte tenu du nombre de salariés employés par l'établissement, Monsieur X... dispose en sa qualité de délégué du personnel de 20 heures de délégation par mois ;
l'article L 2315-3 du code du travail dispose que le temps passé en délégation est de plein droit considéré comme de temps de travail et payé à l'échéance normale ;
le texte précise que l'employeur qui entend contester l'utilisation faites des heures de délégation saisit le juge judiciaire ;
le délégué bénéficie par conséquent d'une présomption légale d'un usage conforme du temps de délégation s'agissant des heures prises dans le contingent ;
Que tel est le cas en l'espèce, Monsieur X... ne réclamant paiement d'aucune heure au-delà du quantum des 20 heures par mois ;
il eut appartenu à l'association familiale de gestion SAINT PIERRE CHANEL, si elle entendait renverser cette présomption, de saisir le juge judiciaire, et ce de surcroit uniquement après avoir payé les heures de délégation ;
force est de constater qu'elle n'a jamais émis une telle contestation, affirmant simplement ne pas être débitrice de l'obligation à paiement puisqu'elle n'était pas employeur ;
l'appelante procède aujourd'hui, en violation des disposition de l'article L 2315-3 du code du travail, à un renversement de la charge de la preuve en exigeant du délégué du personnel la preuve d'une utilisation conforme du temps de délégation, et ce alors même que cet usage n'avait jamais été contesté auparavant ;
le temps de délégation est légalement considéré comme temps de travail ; en l'espèce le temps de travail est s'agissant de l'enseignant qu'est Monsieur X... constitué non seulement des heures de cours mais également du temps de préparation et de correction qui en est le complément nécessaire ;
Monsieur X... n'a pris aucune heure de délégation durant ses heures de cours qu'il a toujours assurées y compris deux heures supplémentaires par semaine ;
il ne peut d'avantage être soutenu que les heures de délégation ont été prises durant les heures de préparation sauf à considérer que ces heures ne seraient pas justifiées et ce pour l'ensemble des enseignants, ce qui n'est évidemment pas soutenu par l'appelante ;
par conséquent il est constant que les heures de délégation se situent en dehors du temps de travail ;
Or les heures de délégation doivent être rémunérées en supplément si elles se situent eu dehors du temps de travail ;
contrairement aux affirmations de l'association familiale de gestion SAINT PIERRE CHANEL, Monsieur X... produit en annexe ses bulletins de salaire de 2001 à 2007 ;
le calcul du coût de l'heure supplémentaire avec majoration de 15 % résulte de la pièce n° 7 de Monsieur X... ;
par conséquent l'appelante qui dispose de tous les éléments nécessaires pour formuler une contestation circonstanciée du taux horaire de 30, 78 € retenu par le Conseil de Prud'hommes s'en abstient, se contentant d'énoncer des généralités ;
par conséquent compte tenu de l'absence de contestation circonstanciée de l'appelante, et des calculs résultant de la pièce n° 7 du salarié il apparaît que c'est à juste titre que le Conseil de Prud'hommes a retenu un taux horaire majoré de 30, 78 €, et ce sur 53 mois (compte tenu de la prescription) d'avril 2001 à juin 2006 ;
le jugement est donc confirmé en ce qu'il alloué a Monsieur Jean-Lucien X... une somme de 32. 626, 80 € au titre des heures de délégation, outre 3. 262, 68 € au titre des congés payés afférents ;
Sur les heures de réunion
après application du délai de prescription le Conseil des Prud'hommes a alloué à Monsieur X... une somme de 2. 447, 01 € (outre les congés payés afférent) en retenant 53 réunions mensuelles d'une heure 30 chacune ;
l'appelante conteste la décision en faisant valoir que Monsieur X... ne justifie ni de la durée des réunions ni de sa présence et ce d'autant plus qu'il a été absent à 14 reprises sur 72 réunions entre avril 2001 et septembre 2007 conformément aux relevés qu'elle produit
l'intimé réplique qu'il ne réclame pas payement des réunions postérieures à juin 2006, de sorte que le relevé produit par l'association et totalisant 14 absences sur 72 réunions est sans emport ;
il ajoute que toutes les réunions mensuelles font l'objet de procès verbaux rédigés par l'appelante ;
le principe même des réunions mensuelles n'est contesté par aucune, des parties ;
l'appelante produit en pièce 8 un relevé des présences de Monsieur X... pour les réunions dites " de la DUP " du 27 avril 2001 au 28 septembre 2007 ;
Monsieur X... ne conteste l'exactitude d'aucune mention de présence ou d'absence aux différentes réunions de sorte que la Cour retiendra comme exact ce relevé ;
Monsieur X... limite sa demande d'indemnisation aux réunions qui se sont déroulées jusqu'en juin 2006 ;
aux termes du relevé ci-dessus visé il a donc assisté à 48 réunions et non 53 comme mentionné par erreur par le Conseil de Prud'hommes ;
en revanche la détermination de la durée de ces réunions pose problème puisqu'aucune des deux parties n'en établit la durée ni ne fournit d'élément permettant de le faire avec précision ;
certes Monsieur X... produit trois comptes rendus ;
cependant que si deux de ces documents précisent l'horaire de fin de séance respectivement à 18 heures 05 et 18 heures 50, aucun des trois documents ne mentionne l'horaire de début des réunions ;
pour sa part l'appelante qui détient tous les procès verbaux, et les copies des convocations ne produit aucune pièce à cet égard ;
en application de l'article 1315 du Code Civil celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; réciproquement celui qui se prétend libéré doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ;
il est constant que Monsieur X... a participé à 48 réunions en dehors de ses heures de travail de sorte que la rémunération se fait au taux horaire majoré de 30, 78 € retenu précédemment ;
faute de tout élément permettant de déterminer une durée exacte des différentes réunions il est forfaitairement retenu une durée moyenne qui apparait raisonnable de une heure 30 par réunion ;
par conséquent il est alloué à Monsieur Jean-Lucien X... une somme de 2. 216, 16 € (48 x 1h 30 x 30, 78) outre 221, 61 € au titre des congés payés afférents ;
le jugement est donc infirmé s'agissant du montant alloué ",
AUX MOTIFS ADOPTES QUE
" en application des dispositions de l'article L. 431-1-1 du Code du Travail chaque Délégué du Personnel dispose de 20 heures par mois de délégation,
ces temps de délégations sont de plein droit considérés comme temps de travail et payés à l'échéance normale ; il appartient à l'employeur qui conteste de l'usage fait des temps alloués de saisir la juridiction compétente et de démontrer que l'usage des heures n'est pas conforme au mandat,
en l'espèce, l'Association n'a pas saisi le Conseil des Prud'hommes afin de contester l'usage du temps de délégation,
le défaut de paiement constitue un trouble illicite que la juridiction doit faire cesser,
en l'espèce, l'Association relève à l'encontre de M. X... Jean-Lucien deux absences au conseil de classe et aucune lors des cours depuis 1999 ; en conséquence, les heures de délégation ont nécessairement été prises en dehors du service et doivent être rémunérées comme des heures supplémentaires
le salarié ne peut produire aux débats l'annexe au bulletin de salaire concernant les heures de délégation que, l'employeur qui lui-même les demande, ne lui a pas remis,
la feuille annexe au bulletin de salaire concernant les heures de délégation n'est pas un usage de la fonction publique qui pratique une décharge d'enseignement et non la prise d'heures de délégation,
l'Association a fait preuve d'une légèreté coupable en refusant l'application de l'une des deux méthodes pour compenser le temps pris en délégation l'égard des délégués du Personnel,
la prescription relative au paiement des salaires est de cinq ans à compter de la date de la saisine,
la saisine date du 20 avril 2006, le Conseil fait droit aux demandes limitées aux soixante mois précédents soit depuis avril 2001 constatant que des cours sont dispensés tous les mois de l'année à l'exception des mois de juillet et août, et jusqu'en juin 2006 conformément à la demande,
sont retenus 7 mois en 2001, 10 mois par an pour les années 2002 à 2005 et 6 mois au titre de 2006 soit 53 mois,
le salaire horaire de référence des heures supplémentaires doit être payé 30, 78 € brut,
la durée des réunions mensuelles de la Délégation Unique du Personnel en dehors du temps de travail organisées à l'initiative de l'employeur est fixée à une moyenne de 1 h 30,
les heures de délégation de réunion de la Délégation Unique du Personnel ne sont pas imputables au quota des heures de délégation en application des dispositions de l'article L. 412-20 du Code du Travail,
Le Conseil accorde à M X... :
53 mois x 20 h x 30, 78 € = 32. 626, 80 € brut au titre des heures de délégation,
3. 262, 36 € brut au titre des congés payés sur les heures de délégation ",
ALORS, D'UNE PART, QUE les heures de délégation ont, de par la loi, la nature de salaire devant être payé par l'employeur qui, selon les termes de l'article L 442-5 du Code de l'éducation, est l'Etat ; que ledit article dispose qu'il n'existe pas de contrat de travail liant les Maîtres à l'établissement au sein duquel l'enseignement leur est confié et ne déroge pas au principe selon lequel le paiement des heures de délégation est assis sur l'existence d'un contrat de travail ; qu'il en résulte que l'exercice des mandats prévus par le Code du travail dans l'intérêt de la communauté constituée par l'ensemble du personnel de l'établissement ne peut emporter obligation pour l'Etablissement privé sous contrat de payer des sommes ayant une nature salariale si bien qu'en condamnant l'association familiale de gestion SAINT PIERRE CHANEL à payer à Monsieur X..., malgré l'absence de contrat de travail liant ces deux parties et de dispositions explicites à cet égard,, des sommes ayant de par la loi la nature de salaire, les juges du fond ont ajouté à la loi et partant violé les articles L 442-5 du Code de l'éducation, L 2326-3, L 2315-3 et L 2325-7 et suivants du Code du travail,
ALORS, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, QU'en faisant droit à la demande de Monsieur X... tendant à voir fixer la rémunération des heures de délégation et de réunion au taux horaire majoré de 30, 78 € pour les années ayant courues entre 2001 et 2006 en ce que l'Association familiale de gestion des collèges et lycée privé SAINT PIERRE CHANEL qui aurait disposé de tous les éléments nécessaires pour formuler une contestation circonstanciée du taux horaire retenu par le Conseil de Prud'hommes s'en serait abstenue, se contentant d'énoncer des généralités, quand ladite association faisait valoir dans ses conclusions (p. 20 § 7 et s.) que le traitement versé à Monsieur X... par le Rectorat évoluait tous les ans, que le taux de la première heure déterminé par le Rectorat était différent de celui des heures supplémentaires suivantes et que l'intéressé ne pouvait appliquer un seul et unique taux pour l'ensemble de ses heures de délégations pour la période considérée, la Cour d'appel a privé sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du Code de procédure civile.