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17/05/2011 | FRANCE | N°10-11676

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 17 mai 2011, 10-11676


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 2 décembre 2009), que M. X... a été engagé à compter du 1er décembre 1973 en qualité de chef de groupe par la société Uhl Bonaventure informatique (la société) et exerçait en dernier lieu les fonctions de chef de projet ; que le tribunal de grande instance de Strasbourg a prononcé par jugement du 27 novembre 2006 le redressement judiciaire de la société ; que le salarié a été licencié pour motif économique le 29 décembre 2006 ;
Atte

ndu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une somme...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 2 décembre 2009), que M. X... a été engagé à compter du 1er décembre 1973 en qualité de chef de groupe par la société Uhl Bonaventure informatique (la société) et exerçait en dernier lieu les fonctions de chef de projet ; que le tribunal de grande instance de Strasbourg a prononcé par jugement du 27 novembre 2006 le redressement judiciaire de la société ; que le salarié a été licencié pour motif économique le 29 décembre 2006 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts pour inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements, alors, selon le moyen :
1°/ que la condamnation de l'employeur pour inobservation des dispositions relatives à l'ordre des licenciements implique que le salarié ait demandé de connaître les critères retenus ayant abouti au choix de le licencier, lui plutôt qu'un autre ; que, dès lors, en l'espèce, en ayant condamné la société Uhl Bonaventure informatique au paiement d'une indemnité pour méconnaissance des obligations qui pesaient sur elle au titre des critères retenus pour prononcer le licenciement de M. X... sans rechercher si ce dernier avait demandé de connaître lesdits critères, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-5 du code du travail ;
2°/ qu'en tout état de cause, le principe de «prévisibilité de la loi», corollaire du principe général de «sécurité juridique», implique que la règle de droit soit suffisamment accessible, de façon à ce que le justiciable puisse disposer de renseignements suffisants, dans les circonstances de la cause, sur les normes juridiques applicables à un cas donné ; qu'en l'espèce, ni le texte de l'article L. 1233-5 du code du travail, relatif aux critères d'ordre des licenciements, ni la jurisprudence qui en fait application ne précisent sa portée exacte, ainsi que la nature, le fondement et l'étendue de sa sanction en cas de méconnaissance par l'employeur ; que, dès lors, en ayant fait application de ce texte pour condamner la société Uhl Bonaventure informatique à verser à M. X... 30 000 euros de dommages-intérêts pour méconnaissance des critères d'ordre des licenciements, la cour d'appel s'est prononcée en référence à des règles de droit que ni les textes, ni la jurisprudence ni elle-même ne précisait, de sorte qu'elle a condamné l'employeur sur le fondement d'une règle de droit imprécise, portant ainsi atteinte au principe de «prévisibilité de la loi», ensemble le principe de « sécurité juridique», en violation de l'article 6, § 1er de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article L. 1233-5 précité ;
Mais attendu qu'en sa première branche, le moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Et attendu qu'il ne ressort ni de l'arrêt, ni des productions, que l'employeur se soit prévalu devant la cour d'appel des principes de prévisibilité de la loi et de sécurité juridique s'opposant à l'indemnisation du préjudice résultant du défaut de respect des critères d'ordre des licenciements ; que le moyen, mélangé de fait et de droit, est irrecevable en sa seconde branche ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Uhl Bonaventure informatique aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la scoiété Uhl Bonaventure informatique à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Uhl Bonaventure informatique, M. A..., et Mme B..., ès qualités

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société UHL BONAVENTURE INFORMATIQUE à verser à son ancien salarié, M. Jean-Michel X..., 30.000,00 € de dommages-intérêts pour inobservation des règles relatives à l'ordre des licenciements, outre les dépens et 1.000,00 € en application de l'article 700 du Code de Procédure civile ;
Aux motifs que «il résulte des dispositions des articles L. 1233-5 et suivants du code du travail que l'employeur doit, lorsqu'un licenciement pour motif individuel ou collectif est décidé, définir, après consultation du comité d'entreprise, ou à défaut des délégués du personnel, les critères retenus pour fixer l'ordre des licenciements. La mise en oeuvre de l'ordre des licenciements se traduit par le choix des salariés qui vont être congédiés ; il doit être objectif et conforme aux critères définis.
Monsieur X... fait valoir que si l'ordre des licenciements établi dans le plan de sauvegarde de l'emploi avait été scrupuleusement suivi, il aurait dû être le dernier concerné par une procédure de licenciement.
Maître A... réplique que pour arriver à cette conclusion, le salarié se fonde sur le tableau qu'il a lui-même confectionné et sur lequel il apparaît qu'il s'est attribué arbitrairement les meilleures notes.
Sur ce point, la note explicative relative au projet de licenciement révèle que sur un effectif de cinquante-huit salariés, parmi lesquels vingt cadres, catégories à laquelle appartenait Monsieur X..., il était envisagé de supprimer vingt postes, dont cinq postes de cadres ; d'autre part le plan de sauvegarde de l'emploi prévoyait précisément les critères qui seraient mis en oeuvre pour déterminer dans chaque catégorie de salariés l'ordre des licenciements.
Toutefois Maître A... ne fournit aucun élément établissant que ces critères ont été mis en oeuvre pour aboutir au choix de Monsieur X... parmi les cinq salariés cadres qui devaient être licenciés, et notamment les notes qui lui auraient été attribuées dans les divers domaines suivants énumérés dans le plan de sauvegarde de l'emploi : charges de famille, âge, ancienneté dans l'entreprise, polyvalence, compétence, qualités relationnelles.
En conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement en ce qu'il a dit que l'ordre des licenciements avait été respecté à l'égard de Monsieur X....
En l'absence de mise en oeuvre de la procédure d'ordre des licenciements à son égard, l'appelant a perdu une chance de conserver son emploi ; il lui sera alloué, en réparation de son préjudice, des dommages-intérêts qui, eu égard à son âge et à son ancienneté dans l'entreprise, seront évalués à la somme de 30.000 €.
Cette créance de dommages-intérêts étant née postérieurement à l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, et Maître A... ayant été désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement, la société UHL Bonaventure Informatique sera condamnée à en payer le montant à Monsieur X...» ;
1. Alors que, d'une part, la condamnation de l'employeur pour inobservation des dispositions relatives à l'ordre des licenciements implique que le salarié ait demandé de connaître les critères retenus ayant abouti au choix de le licencier, lui plutôt qu'un autre ; que, dès lors, en l'espèce, en ayant condamné la société UHL BONAVENTURE INFORMATIQUE au paiement d'une indemnité pour méconnaissance des obligations qui pesaient sur elle au titre des critères retenus pour prononcer le licenciement de M. X... sans rechercher si ce dernier avait demandé de connaître lesdits critères, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-5 du Code du Travail ;
2. Alors que, d'autre part et en tout état de cause, le principe de «prévisibilité de la loi», corollaire du principe général de «sécurité juridique», implique que la règle de droit soit suffisamment accessible, de façon à ce que le justiciable puisse disposer de renseignements suffisants, dans les circonstances de la cause, sur les normes juridiques applicables à un cas donné ; qu'en l'espèce, ni le texte de l'article L. 1233-5 du Code du Travail, relatif aux critères d'ordre des licenciements, ni la jurisprudence qui en fait application ne précisent sa portée exacte, ainsi que la nature, le fondement et l'étendue de sa sanction en cas de méconnaissance par l'employeur ; que, dès lors, en ayant fait application de ce texte pour condamner la société UHL BONAVENTURE INFORMATIQUE à verser à M. X... 30.000,00 € de dommages-intérêts pour méconnaissance des critères d'ordre des licenciements, la Cour d'appel s'est prononcée en référence à des règles de droit que ni les textes, ni la jurisprudence ni elle-même ne précisait, de sorte qu'elle a condamné l'employeur sur le fondement d'une règle de droit imprécise, portant ainsi atteinte au principe de «prévisibilité de la loi», ensemble le principe de «sécurité juridique», en violation de l'article 6, § 1er de la Convention européenne des Droits de l'Homme, ensemble l'article L. 1233-5 précité.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 10-11676
Date de la décision : 17/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 02 décembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 17 mai. 2011, pourvoi n°10-11676


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.11676
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