LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Marcel X..., salarié de la société Eternit du 13 octobre 1954 au 26 octobre 1959, et de la société Usinor du 14 octobre 1939 au 12 octobre 1954, puis du 28 octobre 1959 au 17 septembre 1981, a déclaré une maladie professionnelle, en produisant un certificat médical établi le 14 février 2003, faisant état d'une maladie relevant du tableau n° 30, paragraphe B ; que la caisse primaire d'assurance maladie de Valenciennes, aux droits de laquelle vient la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut (la caisse), ayant décidé de prendre en charge cette affection au titre de la législation professionnelle, il a saisi la juridiction de sécurité sociale d'une demande d'indemnisation complémentaire en raison de la faute inexcusable de ses anciens employeurs, qu'après son décès, survenu le 16 novembre 2007, ses ayants droit ont repris l'instance ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la société Eternit fait grief à l'arrêt de dire que la maladie dont était atteint Marcel X... est due à sa faute inexcusable, de fixer au maximum la majoration de la rente, fixer les préjudices à la somme de 15 000 euros et de dire que la caisse pourrait récupérer les sommes avancées auprès d'elle, alors, selon le moyen, qu'il résulte de l'article 2, 4 de l'arrêté du 16 octobre 1995 pris pour l'application de l'article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale que sont inscrites au compte spécial, les dépenses afférentes à une maladie professionnelle lorsque la victime a été exposée dans plusieurs établissements d'entreprises différentes, sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie ; que l'incertitude sur le lien de causalité entre l'exposition du salarié à l'amiante au sein d'une des entreprises dans lesquelles il a travaillé et la maladie prise en charge interdit d'imputer les conséquences de la maladie à la faute d'un employeur particulier, de sorte que, dans une telle hypothèse, l'imputation des dépenses au compte spécial s'applique aux réparations prévues par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale en cas de reconnaissance de faute inexcusable ; qu'en estimant que la caisse pourrait récupérer les sommes avancées aux consorts X... en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale auprès de la société Eternit au motif que la mutualisation du risque ne concernerait pas ces dépenses, la cour d'appel a violé ce texte, l'article 2, 4 de l'arrêté du 16 octobre 1995 pris pour l'application de l'article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale, ensemble l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que dans le cas où les dépenses afférentes à la maladie ont été inscrites au compte spécial en raison de ce que le salarié a été exposé au risque chez plusieurs employeurs, la caisse primaire d'assurance maladie, tenue de faire l'avance des sommes allouées aux ayants droit en réparation de leur préjudice personnel, conserve contre l'employeur dont la faute inexcusable a été reconnue, le recours prévu à l'article L. 452-3, alinéa 3, du code de la sécurité sociale ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu les articles L. 461-1, L. 461-2 et L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;
Attendu que pour dire que Marcel X... était atteint d'une maladie professionnelle due à la faute inexcusable de la société Eternit, l'arrêt retient que le délai de prise en charge de quarante années prévu par le tableau n° 30 B n'était pas dépassé, puisque ce salarié avait continué à être exposé à l'amiante chez Usinor jusqu'en 1981, de sorte que le caractère professionnel de son affection était établi à l'encontre de son premier employeur ;
Qu'en se déterminant par ces seuls motifs, alors que l'intéressé avait cessé d'être au service de la société Eternit à compter du 26 octobre 1959, ce dont il résultait que le délai de prise en charge relatif à cette période d'exposition au risque étant expiré, la présomption instituée par l'article L. 461-1, alinéa 2, du code de la sécurité sociale ne pouvait être opposée à cette société, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
DIT n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Sogepass, venant aux droits de la société Usinor ;
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 janvier 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette l'ensemble des demandes présentées de ce chef ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la société Eternit.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la maladie dont était atteint Marcel X... était due à la faute inexcusable de la société ETERNIT, fixé au maximum la majoration de rente, fixé la réparation des préjudices à la somme totale de 15. 000 € et d'avoir dit que la CPAM de VALENCIENNES pourrait recouvrer les sommes avancées auprès de la société ETERNIT ;
AUX MOTIFS QUE : « Sur la faute inexcusable et son opposabilité : le jugement déféré sera confirmé par motifs adoptés, en ce qu'il a déclaré Marcel X... recevable en sa demande, en ce qu'il a reconnu l'existence d'une multi exposition de Marcel X... au risque (au sein de la société ETERNIT comme de la société USINOR) et en ce qu'il a reconnu l'existence d'une faute inexcusable et l'opposabilité à cette société de la déclaration de la maladie professionnelle ; qu'il sera seulement précisé que :
- conformément à l'article R 441-11 alinéa 1 du Code de la Sécurité sociale, l'enquête menée par la Caisse primaire d'assurance maladie l'a été au contradictoire de la société ETERNIT qui a été avisée de la demande, a été interrogée sur les postes occupés par le salarié, a été avisée de la possibilité de prendre connaissance du dossier qui contenait : l'avis du médecin conseil, le questionnaire de la victime et de l'employeur, l'avis du médecin du travail, l'avis de l'inspecteur conseil régional,- l'avis de l'inspecteur du travail, et a été avisée de la fin de l'enquête et de la possibilité de prendre connaissance des pièces du dossier par lettre recommandée avec accusé de réception du 3. 10. 2003, dans un délai de 8 jours, la décision ayant été prise le 14. 10. 2003 ; que ce délai apparaît suffisant pour permettre à la société de faire valoir ses observations ;
- une confrontation des témoins et un transfert sur les lieux n'apparaissaient pas nécessaires, notamment compte tenu de l'ancienneté des conditions de travail et du fait que le site est censé avoir été désamianté
-l'avis du médecin conseil est confirmé par celui établi le 14. 2. 2003 par le Docteur J. Pierre Y..., médecin pneumo-phtisiologue, de sorte que la réalité de la pathologie ne peut être remise en question ;
- le délai de prise en charge de 40 ans de la maladie professionnelle n'était pas expiré puisque Marcel X... a continué à être exposé à l'amiante en travaillant chez USINOR jusqu'en 1981 ;
- le fait que la maladie professionnelle soit imputable à divers employeurs n'interdit pas à la victime de démontrer que l'un d'eux a commis une faute inexcusable ;
- la mutualisation du risque en cas de multi exposition prévue par l'article 2 de l'arrêté du 16. 10. 1995 ne concerne que les " dépenses afférentes à des maladies professionnelles " à l'exclusion des indemnités versées par la victime en cas de reconnaissance de faute inexcusable prévues par l'article L 442-3 du code de la sécurité sociale ;
B-Sur l'indemnisation due à la victime
a/ sur la majoration de la rente et son évolution : que la Cour confirme par motifs adoptés la décision entreprise sur ce point.
b/ Sur la réparation des préjudices extra patrimoniaux : que c'est à juste titre que le Tribunal des Affaires de Sécurité sociale a estimé qu'une expertise avant dire droit n'était pas nécessaire.
- sur les souffrances physiques ; qu'il résulte de la lecture du rapport établi le 23. 03. 2005 par le Dr Y..., spécialiste des voies respiratoires, le fait que Marcel X... présentait un déficit respiratoire significatif ; que cette limitation lui causait nécessairement des douleurs physiques justifiant qu'il lui soit alloué à ce titre la somme de 3. 000 € ;
- sur les souffrances morales : que la Cour reprend à son compte la motivation du Tribunal des Affaires de Sécurité sociale et fixe à 12. 000 € la réparation de ce chef de préjudice ;
- sur le préjudice d'agrément : qu'à défaut pour les consorts X... de verser le moindre élément justificatif à cet égard, c'est à juste titre que le Tribunal a débouté Marcel X... de ce chef de demande ;
C-Sur la demande fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile : que l'équité commande de condamner la société ETERNIT à régler à chacun des consorts X... la somme de 900 € » (arrêt p. 3 à 5) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la multi-position du demandeur au risque : Marcel X... a été salarié de la société ETERNIT, en qualité d'ouvrier spécialisé, de 1954 à 1959 et de la société USINOR en qualité notamment de machiniste de 1939 à 1954 puis de1959 à 1981 ; que par courrier du 2 juillet 2003 adressé à la caisse en réponse au questionnaire employeur, la société ETERNIT, spécialisée dans la transformation de l'amiante, reconnaît l'exposition au risque du demandeur ; que concernant la période travaillée au sein de la société USINOR, le dossier versé aux débats par la caisse (20 pièces numérotées selon bordereau) comprend le certificat de travail ainsi qu'une attestation non contestée d'Alphonse Z... faisant état de fonctions à la " maintenance, branche mécanique, comportant tuyautage, chaudronnerie où l'amiante était utilisée en tant que calorifugeage, isolant sous forme pulvérulente, plaques et boudins " ; que la Caisse Primaire d'assurance Maladie de VALENCIENNES ne conclut qu'à l'égard de la société ETERNIT et ne produit aucune pièce de nature à démontrer les diligences qu'elle a effectuées à l'égard de la société SOGEPASS, celle-ci produit un courrier de la caisse adressé à son médecin du travail en date du 6 juin 2003 lui transmettant la déclaration de maladie professionnelle du demandeur pour avis ainsi qu'un courrier daté du 21 juillet 2003 de la société SOGEPASS faisant référence à un précédent courrier de la caisse en date du 6 juin 2003 et aux termes duquel elle mentionne les postes successivement occupés par Marcel X... jusqu'à sa dispense d'activité à compter du 1er février 1979, précise qu'au regard de l'ancienneté des faits elle ne peut renseigner une éventuelle exposition du salarié au risque et invoque la mutualisation des dépenses compte tenu de la multi-exposition et de l'exposition du salarié avant loi ; que ces éléments associés au fait notoire que la société USINOR, entreprise sidérurgique, utilisait l'amiante de manière massive notamment pour la protection thermique des hommes et du matériel établissent la réalité de l'exposition au risque au sein de cette entreprise ;- Sur l'existence d'une faute inexcusable de la société ETERNIT : qu'en cas de multi-exposition au sein de plusieurs employeurs, le salarié est recevable à démontrer la faute inexcusable de l'un d'eux ; qu'en l'espèce, Marcel X... dirige ses demandes à titre principal uniquement à l'égard de la société ETERNIT ; que seule la faute inexcusable de celle-ci sera, en conséquence, préalablement débattue ; qu'il est constant que l'employeur est tenu envers son salarié d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les maladies professionnelles contractées par ce salarié du fait dés produits fabriqués ou utilisés par l'entreprise ; que le manquement à cette obligation a le caractère de faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir connaissance du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en protéger ; qu'il existait déjà depuis 1893 une réglementation générale dont la finalité était d'assurer la salubrité de l'air respiré par les salariés ; que spécialisée dans l'utilisation de l'amiante, la société ETERNIT ne pouvait ignorer la toxicité de l'amiante qui, depuis le début du siècle, avait fait l'objet de nombreuses discussions scientifiques à l'origine de dispositions spécifiques qui s'imposaient à la société ETERNIT, tenue en sa qualité d'employeur, à une obligation de sécurité ; or, qu'il ressort des différentes pièces versées aux débats que les investissements réalisés en 1952 en vue d'une meilleure salubrité de l'air dans l'entreprise n'ont donné lieu qu'à des améliorations ponctuelles, très éloignées dans le temps et insuffisantes compte tenu du risque couru par les salariés au contact quotidien des fibres d'amiante ; que l'examen des conditions de travail des salariés confirme la présence permanente de poussières d'amiante en suspension dans l'air, visibles à l'oeil nu et diffusées par le système de chauffage à air pulsé dans tous les ateliers sans port de masque approprié ; que ces manquements ont été relevés par l'inspection du travail à l'occasion de multiples interventions en 1995 ; que l'ensemble de ces éléments établit incontestablement la conscience du danger que devait avoir l'employeur et le défaut de mise en oeuvre de mesures de prévention, pourtant techniquement réalisables ; qu'en manquant ainsi à l'obligation de sécurité qui lui incombait, la société ETERNIT a commis une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale ; que la demande principale du demandeur tendant à la reconnaissance de la faute inexcusable de la société ETERNIT ayant été jugée bien fondée, il n'y a pas lieu d'examiner ses demandes subsidiaires tendant également à, la reconnaissance de la faute inexcusable de la société SOGEPASS venant aux droits de la société USINOR ;- Sur les conséquences de la faute inexcusable à l'égard de la victime : sur la majoration de la rente : que la faute inexcusable de l'employeur étant reconnue, il y a lieu de fixer la majoration de la rente servie à Marcel X... au taux maximum légal en application de article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale ; que cette majoration, qui est calculée en fonction de la réduction de capacité dont la victime reste atteinte, suivra le taux d'incapacité de celle-ci ; sur la réparation des préjudices extra-patrimoniaux : outre la majoration de la rente, la. victime d'une faute inexcusable a droit, en application de l'article L. 452-3 du Code de la Sécurité sociale à la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétique et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle ; qu'il appartient au demandeur de justifier de la réalité et l'importance de chaque chef de préjudice extra-patrimonial et de son imputabilité à la maladie professionnelle dont il est atteint ; qu'au vu des pièces médicales produites qui établissent la réalité de la pathologie, de l'âge de la victime, de l'ancienneté de sa pathologie et du taux d'IPP, le Tribunal dispose d'éléments suffisants lui permettant de liquider les préjudices allégués ; qu'il n'y a pas lieu, en conséquence, à expertise ; qu'en l'espèce, Marcel X..., né le 18 janvier 1925, présente des plaques pleurales diagnostiquées en 2003 alors qu'il était âgé de 78 ans ; qu'un taux d'incapacité permanente de 10 % lui est reconnu ; sur les souffrances physiques : qu'il résulte des publications et avis scientifiques produits aux débats que le caractère symptomatique et le retentissement fonctionnel des plaques pleurales sont scientifiquement discutés ; que les souffrances physiques variant selon les victimes pour être inexistantes chez certaines, l'évaluation de ce poste de préjudice ne peut résulter de considérations générales sur les plaques pleurales ; que la réparation du préjudice de souffrances physiques suppose la démonstration des douleurs ressenties par la victime par distinction avec le trouble fonctionnel constitutif d'une incapacité d'ores et déjà réparée par l'attribution par la caisse d'une rente ; que les douleurs peuvent résulter directement de la réduction de la capacité respiratoire médicalement constatée ou indirectement compte tenu des postures que la victime est contrainte d'adopter en raison de cette réduction ; qu'il convient enfin, compte tenu du caractère irréversible de la maladie, de retenir que, même de faible intensité, les douleurs ressenties par la victime s'inscrivent dans la durée ; qu'en l'espèce, qu'en l'espèce, le compte-rendu de consultation du Docteur Y...en date du 23 mars 2005 confirme la présence de plaques pleurales ; qu'il est indiqué que sur le plan respiratoire, il n'y a pas de symptôme majeur ; que la fonction respiratoire montre un déficit mixte à prédominance obstructive et périphérique ; que le praticien écarte l'aggravation de la pathologie et préconise un bilan annuel ; qu'aucune autre pièce n'est produite ; que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il convient d'allouer la somme de 1. 500 € au titre du préjudice de souffrances physiques ; sur les souffrances morales : que les plaques pleurales sont désignées au tableau numéro 30 des maladies professionnelles comme étant des lésions pleurales bénignes ; qu'au vu des documentations produites, aucun lien scientifique ne serait établi entre la présence de plaques pleurales et la survenance d'un cancer du poumon ou d'un mésothéliome dont elles ne constitueraient pas un facteur de risque supplémentaire ; que cela étant, les plaques pleurales sont un marqueur d'exposition qui révèle à la victime la certitude d'avoir été exposée à un risque communément présenté comme dangereux ; que la connaissance de l'atteinte même bénigne à son intégrité physique a nécessairement un retentissement psychologique sur la victime dont le sentiment d'injustice est accru par l'origine professionnelle de la maladie ; que l'objectivité de la victime quant à l'exacte appréciation de la gravité de sa pathologie et son évolutivité, est amoindrie par le discours légitimement tenu sur les dangers de l'amiante et les terribles pathologies qu'elle peut entraîner (mésothéliome, cancer broncho-pulmonaire) ; que dans ce contexte, les victimes développent, de manière variable en fonction de leur tempérament, de la qualité de l'information qui leur est donnée, de leur proximité avec d'autres malades plus gravement atteints, de leur âge et de la difficulté à se projeter dans l'avenir, des craintes et des appréhensions qui doivent être réparées ; que compte tenu de ces éléments, mais en l'absence de pièce particulière, il convient d'allouer à Marcel X... au titre des souffrances morales endurées la somme de 10. 000 euros ; sur le préjudice d'agrément : que le préjudice d'agrément résulte des troubles ressentis dans les conditions d'existence et est lié aux deux chefs de préjudices précédents, les souffrances physiques et la gêne respiratoire pouvant d'évidence contraindre les gestes de la vie courante, tandis que le retentissement psychologique de la maladie peut limiter l'entrain aux activités et la qualité de la vie ; qu'il n'y a pas lieu, en conséquence, de rechercher si le demandeur, du fait de sa pathologie professionnelle a dû limiter ou mettre fin à ses activités de loisirs ou à des pratiques sportives ; qu'aucune pièce n'est produite par le demandeur relative à un éventuel changement des habitudes de vie, il convient, en conséquence, de débouter Marcel X... de sa demande au titre du préjudice d'agrément ; que la caisse primaire d'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés de VALENCIENNES assurera, en application de l'article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, l'avance des sommes allouées ; sur l'action récursoire de la Caisse :- sur l'opposabilité aux employeurs de la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle : qu'il résulte de l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale que la caisse, avant de se prononcer sur le caractère professionnel d'une maladie, doit informer l'employeur de la fin de la procédure d'instruction, des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief de la possibilité de consulter le dossier et de la date à laquelle elle prévoit de prendre sa décision ; que le principe du contradictoire lors de la prise en charge d'une pathologie au titre de la législation professionnelle, impose à la caisse de porter à la connaissance de l'employeur les éléments en considération desquels elle a pris sa décision ; que l'article R. 411-13 du Code de la sécurité sociale dispose que le dossier constitué par la Caisse doit notamment comprendre les divers certificats médicaux et peut, à sa demande, être communiqué à l'employeur ; qu'en l'espèce, la société ETERNIT figure sur la liste reprise à l'arrêté du 29 mars 1999 ouvrant droit à tous les salariés de cette entreprise à l'allocation de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante ; que l'exposition au risque reconnue par l'employeur par courrier reçu par la caisse le 2 juillet 2003 est amplement acquise, le moyen tiré de l'insuffisance de l'enquête administrative exigée par l'article D. 461-9 du Code de la sécurité sociale est, en conséquence inopérant ; que par ce même courrier la société ETERNIT a formulé des réserves et sollicité la communication du dossier constitué par la caisse ; que par lettre recommandée avec avis de réception signé le 3 octobre 2003, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie de VALENCIENNES a transmis à la société ETERNIT les pièces constitutives de son dossier en ce compris l'avis du service médical et l'a invitée à en prendre connaissance dans le délai de huit jours à compter de la réception de l'avis de clôture ; que ce faisant, la caisse a respecté les obligations qui lui incombent, peu important l'absence de motivation de l'avis du médecin conseil ; qu'en effet, la caisse ne disposant que de l'avis du médecin conseil sous la forme communiquée à l'exclusion de tous antres documents, son obligation d'information ne peut excéder les éléments dont elle a elle-même connaissance ; que par ailleurs, au vu des pièces médicales produites par le demandeur dans le cadre de l'instance combinées avec l'avis du médecin conseil, la réalité de la pathologie déclarée ne peut être sérieusement contestée ; qu'il n'y a pas, en conséquence, de litige d'ordre médical de nature à remettre en cause la présomption d'imputabilité et à entraîner l'inopposabilité de la décision de prise en charge ; que la société ETERNIT fait, enfin, grief à la caisse de ne pas avoir saisi le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en dépit de l'ancienneté de l'exposition qui serait antérieure au délai de prise en charge de 40 ans prévu par le tableau 30B ; qu'en réalité, l'exposition au risque étant également caractérisée au sein de la société USINOR jusqu'en 1981, le délai de prise en charge n'était pas expiré à la date de la première constatation médicale ; que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il convient de déclarer la décision de prise en charge du 14 octobre 2003 opposable à la SA ETERNIT ; qu'en revanche, la caisse qui ne produit aucun avis de clôture à l'égard de la société SOGEPASS, ne démontre pas avoir respecté à l'égard de celle-ci les obligations que lui impose l'article R 441-11 du Code de la sécurité sociale ; que la décision de prise en charge doit, en conséquence, être déclarée inopposable à la société SOGEPASS venant aux droits de la société USINOR ;- Sur l'imputation des dépenses et le recouvrement des indemnités complémentaires : qu'en l'espèce, les dépenses afférentes à la maladie professionnelle seront inscrites au compte spécial par application de l'arrêté du 16 octobre 1995, au double motif de la multi-exposition et de l'exposition avant loi ; que cela étant, les sommes ci-dessus allouées résultent directement de la faute inexcusable de l'employeur et ne peuvent être assimilées aux dépenses strictement afférentes à la maladie professionnelle au sens de l'article D. 242-6-3 du Code de la sécurité sociale ; qu'en conséquence, même dans le cas où les dépenses afférentes à la maladie professionnelle sont inscrites au compte spécial, en raison d'une multi-exposition ou de ce que cette maladie n'a été inscrite au tableau que postérieurement à la période d'exposition au risque, la caisse qui ne fait que l'avance des sommes allouées au titre des indemnisations complémentaires résultant de la faute inexcusable, conserve contre la société ETERNIT, employeur dont la faute inexcusable a été reconnue, le recours prévu par l'article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale ; que dans ces conditions, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie des Travailleurs Salariés de VALENCIENNES pourra recouvrer sur la société ETERNIT les sommes dont elle aura fait l'avance » (Jugement p. 4-9) ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte de l'article 2, 4° de l'arrêté du 16 octobre 1995 pris pour l'application de l'article D. 242-6-3 du Code de la sécurité sociale que sont inscrites au compte spécial, les dépenses afférentes à une maladie professionnelle lorsque la victime a été exposé dans plusieurs établissements d'entreprises différentes, sans qu'il soit possible de déterminer celle dans laquelle l'exposition au risque a provoqué la maladie ; que l'incertitude sur le lien de causalité entre l'exposition du salariée à l'amiante au sein d'une des entreprises dans lesquelles il a travaillé et la maladie prise en charge interdit d'imputer les conséquences de la maladie à la faute d'un employeur particulier, de sorte que, dans une telle hypothèse, l'imputation des dépenses au compte spécial s'applique aux réparations prévues par l'article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale en cas de reconnaissance de faute inexcusable ; qu'en estimant que la CPAM de VALENCIENNES pourrait récupérer les sommes avancées aux consorts X... en application de l'article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale auprès de la société ETERNIT au motif que la mutualisation du risque ne concernerait pas ces dépenses, la Cour d'appel a violé ce texte, l'article 2, 4° de l'arrêté du 16 octobre 1995 pris pour l'application de l'article D. 242-6-3 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 1147 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT, QUE si la victime d'une maladie professionnelle peut agir en faute inexcusable à l'encontre d'un ancien employeur chez qui elle a été exposée au risque, elle doit au préalable établir le caractère professionnel de sa maladie à l'égard de cet employeur ; qu'il incombe dans cette hypothèse à la juridiction saisie de rechercher, après débat contradictoire, si la maladie a un caractère professionnel au regard des dispositions de l'article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale ; que le juge doit alors vérifier que, soit les conditions de prise en charge prévue au Tableau litigieux, soit, dans la négative, que la maladie est « directement causée par le travail habituel de la victime » ; que la société ETERNIT exposait, dans ses écritures, que la décision de la CPAM de VALENCIENNES de prendre en charge la maladie de Monsieur X... sur le fondement du Tableau n° 30 n'établissait pas le caractère professionnel de la maladie à son égard dans la mesure où Monsieur X... avait cessé d'être à son service à compter de 1959 et que le délai de prise en charge de quarante ans prévu par le Tableau n° 30 était donc expiré au moment de la constatation de la maladie en 2003 ; qu'au cas présent, la maladie de Monsieur X... ne pouvait être considérée comme imputable à la société ETERNIT, qui n'était pas le dernier employeur de la victime, qu'à condition d'établir le caractère professionnel de la maladie à l'égard de cet employeur conformément aux dispositions de l'article L. 461-1 alinéa 3 du Code de la sécurité sociale ; qu'en estimant que la maladie de Monsieur X... serait due à la faute inexcusable de la société ETERNIT, sans établir préalablement le caractère professionnel de la maladie à l'égard de celle-ci, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 461-1, L. 452-1 et L. 452-3 du Code de la sécurité sociale, ensemble l'article 1147 du Code civil.