LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 17 novembre 2009), que M. X... a été engagé par la société des transports Bondu le 15 avril 1980 et que son contrat de travail a été transféré à la société Nexia froid dans laquelle il occupait les fonctions de responsable régional d'exploitation ; que par jugement du 30 janvier 2007, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé le redressement judiciaire de la société Nexia froid, Mme Y... étant nommé administrateur judiciaire et M. Z... mandataire judiciaire ; que par jugement du 24 avril 2007, modifié le 15 mai 2007, le tribunal de commerce de Nanterre a ordonné la cession partielle des actifs de la société Nexia froid à la société Dktrans Soparfi, ainsi que le transfert des contrats de travail selon une liste annexée à la décision et a autorisé le licenciement pour motif économique des salariés occupant les postes et catégories indiquées dans l'annexe ; que par lettre du 21 mai 2007, Mme Y..., ès qualités, a procédé au licenciement pour motif économique de M. X... et, par lettre du même jour, l'a informé que ce licenciement était nul et de nul effet, son contrat de travail étant transféré à la société Ebrex France ; que le 23 mai 2007, M. X... a accepté la rétractation de son licenciement et que, par lettre du 29 mai 2007, Mme Y... a confirmé à M. X... son licenciement pour motif économique ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que le jugement du tribunal de commerce, visé aux articles L. 642-5, alinéa 5, et R. 631-36 du code de commerce, qui arrête un plan de cession et autorise les licenciements, n'a autorité de chose jugée qu'en ce qui concerne l'existence d'une cause économique, le nombre des licenciements autorisés ainsi que les catégories d'emplois concernés sans qu'une liste nominative des salariés licenciés ou repris par le cessionnaire n'ait à être dressée par le tribunal ; qu'il entre en conséquence dans les pouvoirs que l'administrateur judiciaire tient des articles précités d'opérer un choix entre les salariés d'une même catégorie d'emplois lorsque tous ne doivent pas être licenciés et de revenir éventuellement sur ce choix sans avoir à demander l'autorisation du tribunal ; qu'en procédant à un licenciement, l'administrateur ne se contente pas d'agir sur mandat du tribunal de commerce mais prend une décision qui l'engage ; que dès lors, la rétractation du licenciement notifiée par l'administrateur judiciaire à un salarié et la confirmation du transfert du contrat de ce salarié au repreneur autorise ledit salarié à prendre acte de cette rétractation qui annule à son égard la mesure de licenciement ; qu'en décidant néanmoins que Mme Y..., ès qualités, qui n'avait agi que sur mandat du tribunal de commerce, n'avait pu procéder d'office à la rétractation du licenciement de M. X... sans ressaisir ledit tribunal afin d'être autorisé à revenir sur la mesure, la cour d'appel a violé les articles L. 1233-3 du code du travail et L. 642-5, alinéa 5, et R. 631-36 du code de commerce ;
2°/ que si le jugement rectificatif du 15 mai 2007 précisait que le licenciement était également autorisé pour les salariés dont le poste était repris sous condition d'acceptation de leur mobilité géographique, il ne mentionnait que les salariés des sites qui n'étaient pas repris initialement par le cessionnaire et ne conditionnait pas la reprise du personnel hors agence à la mobilité desdits salariés ; que dès lors, la cour d'appel qui reconnaissait que les huit postes cités par le jugement rectificatif du 15 mai 2007 n'étaient pas ceux des responsables régionaux de production, poste occupé par M. X..., n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui en découlaient au regard des articles L. 1233-3 du code du travail et L. 642-5 du code de commerce en décidant que le licenciement économique de M. X..., autorisé par le plan de cession homologué par le jugement du 24 avril 2007, modifié le 15 mai 2007 avait une cause réelle et sérieuse ;
3°/ que la cour d'appel ne pouvait juger que Mme Y..., ès qualités, avait été autorisé à procéder au licenciement économique de M. X..., dès lors que ce dernier avait refusé la mobilité géographique qui conditionnait sa reprise sans répondre aux conclusions de ce salarié faisant valoir que, nonobstant sa réponse négative au questionnaire de mobilité géographique, le contrat de travail qui le liait à la société Nexia froid contenait une clause de mobilité géographique l'obligeant à effectuer tous les déplacements et séjours en France que nécessiterait le bon exercice de ses fonctions et qu'en outre son employeur se réservait de modifier son lieu d'affectation sans que cela constitue une modification de son contrat de travail, clause qu'il aurait suffit au repreneur d'appliquer ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, abstraction faite d'un motif erroné mais inopérant, critiqué par la première branche du moyen, a constaté que le licenciement prononcé après rétractation d'une décision de rupture antérieure, avait été notifié conformément au jugement arrêtant le plan, a retenu que l'emploi de M. X... faisait partie des catégories de salariés soumises à l'exigence de mobilité, et a répondu aux conclusions prétendument délaissées en énonçant que le salarié avait refusé toute mobilité ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement pour motif économique de Monsieur X..., salarié de la société NEXIA FROID en redressement judiciaire, par Maître Y..., ès qualité d'administrateur judiciaire de cette société, autorisé par le plan de cession partielle au profit de la société EBREX, homologué par le jugement du Tribunal de commerce de NANTERRE du 24 avril 2007, modifié le 15 mai 2007, avait une cause réelle et sérieuse et d'avoir, en conséquence, débouté ce salarié de ses demandes de prononcé de la nullité de son licenciement et de réintégration par la société EBREX, subsidiairement, de versement de dommages et intérêts par cette dernière société ou de leur fixation au passif de la société NEXIA FROID ;
AUX MOTIFS QUE la décision du 24 avril 2007 prise par le Tribunal de commerce de Nanterre, qui a ordonné la cession partielle des actifs de la société NEXIA FROID à la société DK TRANS SOPARFI pour le compte de la société EBREX FRANCE a "autorisé le licenciement pour motif économique des salariés occupant les catégories et postes indiqués dans l'annexe du présent jugement dont elle fait partie intégrante" ; que Monsieur X... était responsable régional d'exploitation pour la société NEXIA FROID ; que la structure comportait cinq postes de ce type ; que la société DK TRANS SOPARFI, pour le compte de la société EBREX ne s'était engagée qu'à en reprendre trois ; que Monsieur X... ne peut nier que la société DK TRANS SOPARFI, pour le compte de la société EBREX, a conditionné la reprise à la mobilité des salariés concernés, cet élément figurant en toute lettres dans leur offre, telle qu'ensuite homologuée par le Tribunal de commerce de NANTERRE ; que le Tribunal de commerce de NANTERRE a réaffirmé les choses dans sa décision du 15 mai 2007, rectificative de celle du 24 avril 2007, qu'avait sollicitée l'administrateur judiciaire ; que le Tribunal de commerce a conclu dans son dispositif «rectifions le jugement du 24 avril 2007 en précisant que le licenciement des salariés refusant la mobilité est autorisé sur le fondement de l'article L 642-5 du code de commerce, selon la liste…..» ; que certes les huit postes cités ne sont pas ceux des responsables régionaux de production, mais, a fortiori, si l'administrateur judiciaire a besoin d'être autorisé à licencier les salariés qui avaient accepté la mobilité, c'est bien qu'un accord préalable de ce chef avait été requis auprès de la totalité des salariés, les postes de ceux qui n'avaient pas acquiescé ne figurant d'ores et déjà pas au nombre de ceux repris ; que Monsieur X... est bien obligé de reconnaître qu'il a effectivement répondu par la négative, le 5 avril 2007, au questionnaire de mobilité géographique qui avait été envoyé à l'ensemble des salariés du groupe NEXIA-NEXIA FROID ; que Monsieur X... vienne dire qu'il ne savait pas qui était le cabinet Lacomblez, alors que le rôle dudit cabinet avait été défini dès le 1er février 2007, ne peut être un argument ; que Maître Y..., dans sa fonction d'administrateur judiciaire de la société NEXIA FROID, a licencié pour motif économique Monsieur X... comme le plan de cession l'y avait autorisé ; que, de fait son contrat de travail n'ayant pas été repris par la société DK TRANS SOPARFI pour le compte de la société EBREX, Monsieur X... ne peut invoquer à son profit les dispositions de l'article L 1224-1 du Code du travail ; sur la rétractation que par lettre recommandée du 21 mai 2007, Maître Y... ès qualité, a notifié son licenciement pour motif économique à Monsieur X... ; que courrier indiquait qu'il était habilité à le faire par jugement du 24 avril 2007, modifié le 15 mai 2007, du Tribunal de commerce de Nanterre ; que Maître Y... a rétracté cette mesure par lettre du même jour; que ce courrier indiquait qu'il était habilité à le faire par jugement du 24 avril 2007, modifié le 15 mai 2007 du Tribunal de commerce de NANTERRE ; que Maître Y... a rétracté cette mesure par lettre du même jour, parvenue à Monsieur X... le 23 mai 2007 ; que le licenciement soit pour un motif personnel ou économique importe peu ; que l'employeur peut effectivement revenir sur le licenciement qu'il a prononcé ; que toutefois, pour que ladite rétractation ait un pouvoir opérant, encore faut-il que le salarié donne son accord qui doit être clair et non équivoque ; que Monsieur X... ait accepté la rétractation de son licenciement pour motif économique, par courrier et par fax du 23 mai 2007, ne peut pourtant avoir aucune conséquence ; que Maître Y... n'est pas l'employeur de Monsieur X... et n'agit que sur mandat du Tribunal de commerce ; qu'il ne pouvait donc, d'initiative, procéder ainsi qu'il l'a fait et aurait dû ressaisir ledit Tribunal afin d'être autorisé à revenir sur la mesure ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DU JUGEMENT QUE Monsieur X... ne peut se prévaloir des dispositions de l'article L 1224-1 du Code du travail qui ne peut s'appliquer dès lors que son licenciement pour motif économique l'a été dans le cadre d'un plan de redressement arrêté par le Tribunal de commerce et sa demande en dommages et intérêts à l'encontre de la société EBREX ne pourra prospérer, cette dernière ayant rempli toutes ses obligations ; qu'il est à déplorer l'erreur commise par Maître Y... qui s'est rétractée du licenciement qu'elle avait effectué à l'encontre de Monsieur X... qui a pu espérer un temps que son contrat avec la société NEXIA FROID serait transféré à la société EBREX ;
ALORS D'UNE PART QUE le jugement du Tribunal de commerce, visé aux articles L 642-5 alinéa 5 et R 631-36 du Code de commerce, qui arrête un plan de cession et autorise les licenciements n'a autorité de chose jugée qu'en ce qui concerne l'existence d'une cause économique, le nombre des licenciements autorisés ainsi que les catégories d'emplois concernés sans qu'une liste nominative des salariés licenciés ou repris par le cessionnaire n'ait à être dressée par le Tribunal ; qu'il entre en conséquence dans les pouvoirs que l'administrateur judiciaire tient des articles précités d'opérer un choix entre les salariés d'une même catégorie d'emplois lorsque tous ne doivent pas être licenciés et de revenir éventuellement sur ce choix sans avoir à demander l'autorisation du Tribunal ; qu'en procédant à un licenciement, l'administrateur ne se contente pas d'agir sur mandat du Tribunal de commerce mais prend une décision qui l'engage ; que dès lors, la rétractation du licenciement notifiée par l'administrateur judiciaire à un salarié et la confirmation du transfert du contrat de ce salarié au repreneur autorise ledit salarié à prendre acte de cette rétractation qui annule à son égard la mesure de licenciement ; qu'en décidant néanmoins que Maître Y... ès qualité, qui n'avait agi que sur mandat du Tribunal de commerce, n'avait pu procéder d'office à la rétractation du licenciement de Monsieur X... sans ressaisir ledit Tribunal afin d'être autorisé à revenir sur la mesure, la Cour d'appel a violé les articles L 1233-3 du Code du travail et L 642-5 alinéa 5 et R 631-36 du Code de commerce ;
ALORS D'AUTRE PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE si le jugement rectificatif du 15 mai 2007 précisait que le licenciement était également autorisé pour les salariés dont le poste était repris sous condition d'acceptation de leur mobilité géographique il ne mentionnait que les salariés des sites qui n'étaient pas repris initialement par le cessionnaire et ne conditionnait pas la reprise du personnel hors agence à la mobilité desdits salariés ; que dès lors, la Cour d'appel qui reconnaissait que les huit postes cités par le jugement rectificatif du 15 mai 2007 n'étaient pas ceux des responsables régionaux de production, poste occupé par Monsieur X..., n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui en découlaient au regard des articles L 1233-3 du Code du travail et L 642-5 du code de commerce en décidant que le licenciement économique de Monsieur X..., autorisé par le plan de cession homologué par le jugement du 24 avril 2007, modifié le 15 mai 2007 avait une cause réelle et sérieuse ;
ALORS ENFIN QUE la Cour d'appel ne pouvait juger que Maître Y... ès qualité avait été autorisé à procéder au licenciement économique de Monsieur X... dès lors que ce dernier avait refusé la mobilité géographique qui conditionnait sa reprise sans répondre aux conclusions de ce salarié faisant valoir que, nonobstant sa réponse négative au questionnaire de mobilité géographique, le contrat de travail qui le liait à la société NEXIA FROID contenait une clause de mobilité géographique l'obligeant à effectuer tous les déplacements et séjours en France que nécessiterait le bon exercice de ses fonctions et qu'en outre son employeur se réservait de modifier son lieu d'affectation sans que cela constitue une modification de son contrat de travail, clause qu'il aurait suffit au repreneur d'appliquer ; qu'en statuant comme elle l'a fait la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.