La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/05/2011 | FRANCE | N°09-71003

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 mai 2011, 09-71003


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., après avoir cédé 75 % de ses parts de la société Inter express, en est devenu le salarié, le 30 avril 2002, en qualité de directeur d'exploitation, qu'ayant été licencié pour faute grave le 1er juin 2006, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pour

voi ;
Sur le second moyen :
Vu les articles L. 3121-45, dans sa version alor...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., après avoir cédé 75 % de ses parts de la société Inter express, en est devenu le salarié, le 30 avril 2002, en qualité de directeur d'exploitation, qu'ayant été licencié pour faute grave le 1er juin 2006, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes relatives à l'exécution et à la rupture du contrat de travail ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen :
Vu les articles L. 3121-45, dans sa version alors applicable, L. 3171-4 et D. 3171-10 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre de jours de travail effectués par le salarié dans le cadre d'une convention de forfait en jours, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des jours effectivement travaillés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'ainsi la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties, et le juge ne peut, pour rejeter une demande de paiement de jours travaillés, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié mais doit examiner les éléments de nature à justifier les jours effectivement travaillés par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ;
Attendu que pour rejeter la demande de paiement d'une somme au titre des jours travaillés au-delà du forfait de 217 jours, l'arrêt retient que le tableau récapitulatif versé aux débats par le salarié est dénué de toute force probante quant à démontrer la réalité du dépassement et que les règles de preuve partagée applicable en matière d'heures supplémentaires ne sont pas transposables au forfait en jours ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, en faisant reposer sur le seul salarié la charge de la preuve des jours travaillés en dépassement des 217 jours fixés par la convention de forfait en jours, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement qui a débouté M. X... de sa demande en paiement de salaire pour solde de jours travaillés non payés, l'arrêt rendu le 17 septembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne la société Inter express au dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Inter express à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, avocat aux Conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Monsieur X... reposait sur une faute grave et d'AVOIR, en conséquence, rejeté les demandes du salarié en paiement d'un rappel de salaire au titre de sa mise à pied conservatoire et des congés payés y afférents, d'une indemnité de licenciement, d'une indemnité de préavis et de congés payés y afférents, ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE la faute grave est une cause réelle et sérieuse d'une gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; que sur l'inexécution des consignes relatives à l'utilisation de la carte UTA, il est reproché à Gérard X... de n'avoir pas adressé aux conducteurs routiers une note leur demandant de supprimer les approvisionnements de carburant sur route, en exécution d'instructions que lui avait données son employeur, par mail, en février 2006, demande réitérée à deux reprises, le premier avril et le 4 mai 2006 ; que salarié qui ne justifie pas avoir appliqué les dites consignes soutient que les chauffeurs connaissaient cette règle, ce qui n'était manifestement pas le cas au regard de la liste récapitulative des factures UTA émises au cours de l'année qui montre une baisse significative des approvisionnements réglés avec cette carte à compter du mois de mai 2006, à la suite de l'envoi par Monsieur Y... lui-même d'une note à ce sujet ; que cet élément objectif contredit le témoignage de Philippe Z... qui affirme que l'ensemble des chauffeurs savaient devoir réserver la carte UTA aux compléments de carburant nécessaires pour pouvoir rentrer à l'entreprise ; qu'il en va de même des témoignages recueillis par sommation interpellative ; que Gérard X... ne démontre pas davantage que les cartes de paiement litigieuses étaient utilisées dans le cadre strict fixé par l'employeur à savoir pour le réapprovisionnement en route des camions ne disposant pas d'une autonomie suffisante par rapport aux trajets parcourus, notamment dans le cas des transports internationaux ; qu'au contraire, les synthèses d'activité montrent un nombre réduit de déplacements à l'étranger des chauffeurs routiers confirmant ainsi la légitimité des instructions que le salarié a refusé d'appliquer ; qu'il devait respecter, en tout état de cause, les consignes précises exigées par son employeur ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont tenu ce fait pour établi ; que sur la facturation à quinzaine, il est reproché au salarié de n'avoir pas effectué la facturation à la quinzaine et d'avoir communiqué à la direction un chiffre d'affaires arrêté au 18 avril 2006, ne correspondant pas à la réalité ; que le salarié répond que la facturation à quinzaine existait dans l'entreprise depuis 1994 et qu'il n'a pas attendu les instructions de Christian Y... pour le faire ; qu'il ne conteste pas être l'auteur du mail en date du 3 mai 2006 indiquant un montant de facturation de 78 120 € arrêté au 18 avril 2006 qui ne correspond pas au montant réel de la facturation à cette date, certifiée par le comptable ; qu'il ne désigne pas davantage la personne chargée de procéder à cette facturation en son absence, sachant que l'activité normale de la société s'est poursuivie nécessairement durant ces congés du 14 au 22 avril 2006 ; qu'aussi, le grief invoqué, à savoir que « la facturation n'a pas été faite au 18/04 et le chiffre d'affaires communiqué à la direction ne correspond pas à la réalité » est réel ; que sur la répercussion du prix du gasoil, Gérard X... a refusé, dans un premier temps, de répercuter l'augmentation du coût du gasoil sur le client DHL contrairement aux instructions qui lui avaient été données en ce sens par son employeur le 3 et 6 mai 2006 ; que dans un courriel du 10 mai suivant, il expliquait, au conditionnel, qu'il ne prendrait pas le risque de perdre ce client important pour l'activité de la société INTER EXPRESS ; que le lendemain, Christian Y... lui demandait de revoir le problème sans lui en laisser le temps toutefois, puisque le jour même il lui notifiait sa mise à pied conservatoire et sa convocation à un entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement ; que ce grief ne sera donc pas retenu ; que sur le trafic « été » avec semi-remorque isotherme, le 4 mai 2006, Christian Y... ordonnait à Gérard X... d'aller retirer deux remorques isothermes le 8 mai 2006 qui lui répondait le lendemain : « Nous avons évoqué courant mars ce sujet, il me semble avoir été très clair, et vous faire part de mon désaccord sur la location de véhicules frigorifiques par INTER EXPRESS, pour les besoins de LOGIMARK. Nous ne sommes pas spécialisés pour ce type de transport, je vous rappelle l'expérience de l'année passée : coût de location de 2 semi-remorques frigorifiques : 12 600 € + 800 € surcoût km. Cette charge n 'a nullement été compensée par un CA supérieur, par rapport aux véhicules semi-tautliner. De plus, les conditions de ce type de transport nous obligent constamment à enfreindre la législation sur les temps de conduite, de repos, et d'amplitude des chauffeurs. En tant que Directeur d'exploitation (si je le suis toujours), je refuse cette responsabilité. Comme vous le soulignez, LOGISMARK a besoin de ce genre de véhicule, pas INTER EXPRESS. Maintenant, la décision vous appartient » ; que si cette dernière phrase nuance le reste du propos, il n'en demeure pas moins que le ton comminatoire de ce courriel exprime une prise de position réfractaire injustifiée, l'appelant ne justifiant pas, par ailleurs, du bien-fondé de ses réticences y compris celles relatives à la législation du travail, les infractions commises en 2004, qui lui ont valu d'être condamné à des amendes étant manifestement sans rapport avec le transport frigorifique effectué en 2005 ; qu'au demeurant, en dépit de la réponse immédiate donnée par Christian Y... indiquant qu'il maintenait effectivement sa décision, Gérard X... n'avait toujours pas fait retirer les véhicules litigieux le 10 mai suivant ; qu'il prétexte aujourd'hui l'absence de confirmation des numéros, alors qu'il lui suffisait de les réclamer en temps utiles si son intention état de se soumettre aux ordres de son employeur ; que ce grief sera donc retenu ; que l'ensemble des faits établis à l'encontre du salarié qui stigmatisent une attitude de contestation systématique des ordres de l'employeur, voire un refus de les exécuter caractérisé s'agissant de l'utilisation de la carte UTA et la location de véhicules isotherme, ne permettait plus le maintien du contrat de travail y compris pendant la durée du préavis, compte tenu de son niveau de responsabilité dans l'entreprise qui en faisait une courroie de transmission essentielle des consignes de l'employeur ; que son licenciement pour faute grave est donc justifié sans qu'il soit besoin de rechercher d'autres raisons pour expliquer cette rupture, étant observé que le changement d'orientation ultérieur de la société peut tout aussi bien être une conséquence de ce licenciement, sans préméditation de la part du responsable du groupe ; que le jugement sera donc confirmé, étant précisé cependant que le conseil de prud'hommes ne pouvait retenir un cinquième grief que l'employeur n'invoquait pas dans la lettre de licenciement ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en retenant que Monsieur X... n'avait pas respecté la consigne de son supérieur hiérarchique lui demandant d'informer les conducteurs de l'arrêt des approvisionnements en carburant sur le réseau UTA, alors qu'elle avait constaté « une baisse significative des approvisionnements réglés avec cette carte à compter du mois de mai 2006» (arrêt p 4, al 7), ce dont il résultait que l'instruction litigieuse avait bel et bien été exécutée par le salarié avant la rédaction, par le supérieur hiérarchique Monsieur Y..., de la note du 30 mai 2006 (jugement p 5 al 8), la Cour d'appel d'Orléans, quia affirmé le contraire, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L 1232-1, L 1234-1, L 1234-5 et L 1234-9 du Code du travail.
ALORS, D'AUTRE PART, QU'un comportement fautif ne peut résulter que d'un fait imputable au salarié ; que Monsieur X... avait fait valoir dans ses conclusions d'appel, d'une part, qu'il « était absent le 18 avril 2006 et (il) n'a donc pas pu établir un faux chiffre d'affaires » (page 7), d'autre part, « qu'il n'était pas dans ses fonctions d'aller chercher physiquement ces deux remorques » (page 10) ; qu'en s'abstenant de répondre à ses chefs péremptoires des conclusions dont il ressortait que les manquements reprochés à Monsieur X... ne lui étaient pas imputables et ne pouvaient, dès lors, justifier son licenciement pour faute grave, la Cour d'appel d'Orléans a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
ALORS, ENFIN, QUE l'abus par le salarié de sa liberté d'expression, constitutif d'une faute grave de licenciement, est nécessairement caractérisé par des propos injurieux, diffamatoires ou excessifs ; qu'en se bornant à faire état du « ton comminatoire de ce courriel du 5 mai 2006 » et « d'une prise de position réfractaire injustifiée » de Monsieur X... pour juger que son « attitude de contestation systématique des ordres de l'employeur » justifiait son licenciement pour faute grave, sans cependant relever un quelconque propos injurieux, diffamatoire ou excessif tenu par le salarié, la Cour a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L 1121-1, L 1232-1, L 1234-1 et L 1234-5 du Code du travail ;
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande en paiement d'un rappel de salaires de 14 389 € au titre du dépassement de sa convention de forfait en jours ;
AUX MOTIFS QUE Gérard X... a été embauché sur la base d'un forfait de 217 jours par an moyennant une rémunération mensuelle de 3 500 € bruts, portée à 3 675 € en dernier état ; que l'article L 3121-49 du Code du travail prévoit que lorsque le nombre de jours travaillés dépasse le plafond annuel fixé par la convention ou l'accord, le salarié bénéficie, au cours des trois premiers mois de l'année suivante, d'un nombre de jours égal à ce dépassement ; que le salarié n'ayant pas fait valoir ses droits dans ce délai, la demande ne peut prospérer ; qu'il ne justifie pas avoir sollicité l'autorisation de ne pas prendre tous ses jours de repos ; que l'employeur n'étant pas sur place, il n'est pas présumé avoir donné une autorisation tacite ; qu'en tout état de cause, le tableau récapitulatif versé aux débats par le salarié, réalisé pour les besoins de la cause, est dénué de toute force probante quant à démontrer la réalité du dépassement, étant observé que les règles de preuve partagées applicables en matière d'heures supplémentaires ne sont pas transposables au forfait ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en rejetant la demande de Monsieur X... aux motifs que celui-ci «n'a vait pas fait valoir ses droits à repos supplémentaires dans ce délai» et «qu 'il ne justifie pas avoir sollicité l'autorisation de ne pas prendre tous ses jours de repos », quand les conclusions d'appel du salarié révèlent que celui-ci ne réclamait pas la récupération des jours de repos correspondant au dépassement de son forfait, mais le paiement majoré des jours supplémentaires de travail effectués, la Cour d'appel d'Orléans a méconnu les termes du litige, violant ainsi l'article 4 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART ,QU'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre de jours de travail effectués par le salarié dans le cadre d'une convention de forfait jours, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier des jours effectivement travaillés par le salarié; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'ainsi la preuve n'incombe spécialement à aucune des parties, et le juge ne peut, pour rejeter une demande de paiement de jours travaillés, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié mais doit examiner les éléments de nature à justifier les jours effectivement travaillés par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande en paiement d'un rappel de salaire au titre de ses jours supplémentaires de travail aux motifs que « le tableau récapitulatif versé aux débats par le salarié, réalisé pour les besoins de la cause, est dénué de toute force probante quant à démontrer la réalité du dépassement » et que « les règles de preuve partagées applicables en matière d'heures supplémentaires ne sont pas transposables au forfait », la Cour d'appel d'Orléans, qui a fait peser sur le seul salarié la charge de la preuve du dépassement de son forfait de 217 jours de travail sur l'année, a violé les articles L3121-45, L 3171-4 et D 3171-10 du Code du travail ;
ALORS, ENFIN, QU'en statuant comme elle l'a fait, sans analyser, même sommairement le tableau détaillé explicatif du salarié régulièrement versé aux débats par Monsieur X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-71003
Date de la décision : 04/05/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Orléans, 17 septembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 mai. 2011, pourvoi n°09-71003


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.71003
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award