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04/05/2011 | FRANCE | N°09-67972

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 mai 2011, 09-67972


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 16 mars 2009), que M. X... a été engagé le 15 décembre 1998 en qualité d'agent technico-commercial-monteur par la société Siplet ; qu'ayant démissionné de son emploi le 6 août 2004, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement d'heures supplémentaires relative aux déplacements professionnels effectués ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande alors selon le moyen, que : >1°/ le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécutio...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 16 mars 2009), que M. X... a été engagé le 15 décembre 1998 en qualité d'agent technico-commercial-monteur par la société Siplet ; qu'ayant démissionné de son emploi le 6 août 2004, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement d'heures supplémentaires relative aux déplacements professionnels effectués ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande alors selon le moyen, que :
1°/ le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif à partir du moment où il ne dépasse pas le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel a retenu que « le temps passé par celui-ci M. X... pour rejoindre l'établissement du premier client visité dans la journée puis pour se rendre de l'établissement d'un client à un autre et pour revenir à son domicile après être intervenu chez le dernier client de la journée constitue nécessairement un temps de travail effectif », dans la mesure où le salarié n'avait « pas de lieu habituel de travail, son activité consistant à intervenir auprès des clients de l'entreprise, lesquels étaient répartis sur vingt départements, et dont la plupart étaient distants de plusieurs centaines de kilomètres de son domicile » ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de rechercher si les temps de trajets effectués par M. X... pour se rendre de son domicile à chacun des différents lieux d'intervention pris séparément, dérogeaient au temps normal du trajet d'un travailleur se rendant de son domicile à son lieu de travail habituel, et qu'elle devait faire la distinction entre le trajet accompli entre le domicile et le lieu de travail, d'une part et celui effectué, le cas échéant entre deux lieux de travail différents, d'autre part, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 3121-4 du code du travail ;
2°/ la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en l'espèce, à supposer même, comme l'a retenu la cour d'appel, que les dispositions de l'article L. 3121-4 du code du travail ne soient pas applicables, faute pour le salarié d'avoir un lieu de travail habituel, la circonstance que « les interventions étant facturées, la société Siplet avait toute latitude pour vérifier la réalité, la localisation, la nature et la durée de chaque intervention » ne permet pas de considérer que le salarié devait rester à la disposition de son employeur pendant les temps de trajet entre son domicile et ses lieux de travail ; qu'en statuant comme elle a fait, par des motifs impropres à caractériser que le salarié se trouvait à la disposition de son employeur et devait se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que l'activité du salarié consistait à intervenir auprès des clients de l'entreprise, lesquels étaient répartis sur vingt départements, et dont la plupart étaient distants de plusieurs centaines de kilomètres de son domicile en a, implicitement, mais nécessairement, déduit que les temps de trajet du salarié pour se rendre de son domicile à ses lieux de travail dépassaient le temps normal de trajet d'un travailleur pour se rendre de son domicile à son lieu de travail habituel ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sprl Siplet aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Sprl Siplet
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société SIPLET à payer à Monsieur Hervé X... la somme de 25. 267, 98 € au titre des heures supplémentaires effectuées et des majorations légales, celle de 2. 526, 59 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés, celle de 4. 650, 38 € au titre du paiement de la compensation des repos compensateurs et celle de 465, 03 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés ;
AUX MOTIFS QUE pour s'opposer à la demande en paiement d'heures supplémentaires et de repos compensateurs, l'appelante soutient que le temps de trajet décrit par son salarié ne dépasse pas le temps normal de trajet entre son domicile et son lieu de travail habituel ; que le lieu habituel de travail au sens de l'article L. 3121-4 du Code du travail s'entend nécessairement d'un lieu fixe où est situé le poste de travail du salarié ; que Hervé X... n'avait donc pas de lieu habituel de travail puisque son activité consistait à intervenir auprès des clients de l'entreprise, lesquels étaient répartis sur vingt départements, et donc la plupart étaient distants de plusieurs centaines de kilomètres de son domicile ; que dans ces conditions le temps passé par celui-ci pour rejoindre l'établissement du premier client visité dans la journée puis pour se rendre de l'établissement d'un client à un autre et pour revenir à son domicile après être intervenu chez le dernier client de la journée constitue nécessairement un temps de travail ; que, s'il est exact que pour justifier du temps qu'il prétend avoir travaillé, Hervé X... se borne à produire des agendas sur lesquels il a porté des mentions manuscrites, il s'agit pour chaque journée de l'indication du nom des clients, de la localité où sont situés ces clients, des heures de rendez-vous et de l'estimation du nombre d'heures travaillées pour chaque journée ; que les interventions étant facturées, la société SIPLET avait toute latitude pour vérifier la réalité, la localisation, la nature et la durée de chaque intervention, ce qui ne lui permet pas de tirer argument de ce que Hervé X... ne lui aurait pas adressé les feuilles de journées comme prévu à son contrat de travail ; que la réalité des déplacements de Hervé X... pour son travail n'est d'ailleurs pas contestée par l'appelante puisqu'il résulte de ses propres pièces qu'elle lui a accordé 88. 703, 95 francs de frais de déplacement en 2000, 14. 044, 64 euros en 2001, 14. 663, 57 euros en 2002, 12. 787, 78 euros en 2003 et 7. 615, 02 euros pour les sept premiers mois de 2004 ; que la société SIPLET ne peut pas sérieusement faire valoir qu'elle n'a jamais demandé d'effectuer des heures supplémentaires à son salarié alors qu'en vertu de son contrat de travail il incombait à celui-ci d'effectuer des interventions chez des clients qui pouvaient être situés à plus de 300 voire 400 kilomètres de son domicile (départements de l'ALLIER, de la SAONE et LOIRE, des PYRENEES ATLANTIQUES, des HAUTES PYRENEES et de l'ARIEGE) ; que, de surplus, il apparaît au vu des agendas produits par Hervé X..., qu'il intervenait de façon habituelle dans des localités situées dans d'autres départements que ceux prévus à son contrat, souvent plus éloignés encore de son domicile, la Cour ayant notamment relevé les ALPES MARITIMES, l'AUDE, l'AVEYRON, les BOUCHES du RHONE, le GARD, l'HERAULT, la LOIRE, le PUY DE DOME, les PYRENEES ORIENTALES, la HAUTE-SAVOIE, le TARN et la VENDEE, les indications ainsi données n'ayant soulevé aucune objection de la part de l'appelante ; que la demande est donc bien fondée dans son principe ; que le décompte qu'a arrêté le conseil de prud'hommes au vu des pièces qui lui ont été fournies n'est pas subsidiairement critiqué par l'appelante et sera en conséquence entériné ;
1°) ALORS QUE le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif à partir du moment où il ne dépasse pas le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail ; qu'au cas d'espèce, la cour d'appel a retenu que « le temps passé par celui-ci Monsieur X... pour rejoindre l'établissement du premier client visité dans la journée puis pour se rendre de l'établissement d'un client à un autre et pour revenir à son domicile après être intervenu chez le dernier client de la journée constitue nécessairement un temps de travail effectif », dans la mesure où le salarié n'avait « pas de lieu habituel de travail, son activité consistant à intervenir auprès des clients de l'entreprise, lesquels étaient répartis sur vingt départements, et dont la plupart étaient distants de plusieurs centaines de kilomètres de son domicile » (arrêt attaqué, p. 4, § 3 et 4) ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de rechercher si les temps de trajets effectués par Monsieur X... pour se rendre de son domicile à chacun des différents lieux d'intervention pris séparément, dérogeaient au temps normal du trajet d'un travailleur se rendant de son domicile à son lieu de travail habituel, et qu'elle devait faire la distinction entre le trajet accompli entre le domicile et le lieu de travail, d'une part et celui effectué, le cas échéant entre deux lieux de travail différents, d'autre part, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 3121-4 du code du travail ;
2°) ALORS QUE la durée du travail effectif est le temps pendant lequel le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en l'espèce, à supposer même, comme l'a retenu la cour d'appel, que les dispositions de l'article L. 3121-4 du code du travail ne soient pas applicables, faute pour le salarié d'avoir un lieu de travail habituel, la circonstance que « les interventions étant facturées, la société SIPLET avait toute latitude pour vérifier la réalité, la localisation, la nature et la durée de chaque intervention » (arrêt attaqué, p. 4, § 6) ne permet pas de considérer que le salarié devait rester à la disposition de son employeur pendant les temps de trajet entre son domicile et ses lieux de travail ; qu'en statuant comme elle a fait, par des motifs impropres à caractériser que le salarié se trouvait à la disposition de son employeur et devait se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel a violé l'article L. 3121-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-67972
Date de la décision : 04/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Limoges, 16 mars 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 mai. 2011, pourvoi n°09-67972


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.67972
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