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03/05/2011 | FRANCE | N°09-72611

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 03 mai 2011, 09-72611


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 26 octobre 2009), que Mme X...et sept autres personnes étaient salariées de la société Stéphane G..., placée en redressement judiciaire le 23 novembre 2002 dont l'activité a été reprise le 1er janvier 2003, dans le cadre d'un plan de cession, par la société Kemos ; que cette activité s'est alors poursuivie dans le cadre d'une unité économique et sociale (UES) composée de dix sociétés filiales, le contrat de travail des intéressés

étant transféré à la société Stephan G...commercial devenue L. Commercial ; que ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 26 octobre 2009), que Mme X...et sept autres personnes étaient salariées de la société Stéphane G..., placée en redressement judiciaire le 23 novembre 2002 dont l'activité a été reprise le 1er janvier 2003, dans le cadre d'un plan de cession, par la société Kemos ; que cette activité s'est alors poursuivie dans le cadre d'une unité économique et sociale (UES) composée de dix sociétés filiales, le contrat de travail des intéressés étant transféré à la société Stephan G...commercial devenue L. Commercial ; que le comité d'entreprise de l'UES a été consulté en novembre 2006 sur un projet de licenciement collectif concernant la suppression de l'ensemble des quatre-vingt onze emplois répartis dans les différentes entités de l'UES, la procédure étant ensuite abandonnée ; qu'une nouvelle consultation du comité est intervenue le 9 juillet 2007 sur un autre projet de licenciement concernant huit salariés de la société L. Commercial, sept d'entre eux étant licenciés pour motif économique le 17 août 2007 ; qu'enfin, en novembre 2007, un troisième projet de licenciement a été soumis au comité d'entreprise de l'UES concernant les salariés restants de la société L. Commercial, huit d'entre eux étant licenciés le 6 février 2008 ; que Mme X...et les sept autres salariés ainsi licenciés ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en nullité de leur licenciement pour absence de plan de sauvegarde de l'emploi et en dommages-intérêts ;

Attendu que la société L. Commercial fait grief à l'arrêt attaqué de dire nuls les licenciements de Mmes X..., Y..., Z..., A..., B...et C..., ainsi que de MM. D...et E...et de la condamner au paiement de sommes à titre de dommages-intérêts alors selon le moyen :

1°/ que seules les entreprises comptant au moins cinquante salariés sont tenues, lorsqu'elles envisagent le licenciement de dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, d'établir et de mettre en oeuvre, sous peine de nullité des licenciements, un plan de sauvegarde de l'emploi ; que, pour apprécier l'existence de cette obligation, il n'y a lieu de ne tenir compte que des seuls effectifs de l'entreprise dans laquelle est revendiquée la mise en oeuvre du plan social ; qu'en prononçant la nullité des licenciements et en allouant aux salariés une indemnité au moins égale à leurs salaires des douze derniers mois, en considérant que la société L Commercial s'était soustraite à son obligation d'établir et de mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi cependant qu'il résultait de ses propres constations que la société L Commercial n'employait que 19 salariés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1233-6, L. 1235-10 et L. 1235-11 du code du travail ;

2°/ qu'en tout état de cause, à défaut de s'expliquer, comme pourtant elle y avait été invitée par la société L. commercial, sur le nombre d'employés de la société et partant, sur les conditions préalables à l'obligation faite à l'employeur d'établir et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-6, L. 1235-10 et L. 1235-11 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que, si les conditions d'effectifs et de nombre de licenciements dont dépend l'obligation d'établir un plan de sauvegarde de l'emploi s'apprécient au niveau de l'entreprise que dirige l'employeur, il en va autrement lorsque, dans le cadre d'une UES, la décision de licencier a été prise au niveau de cette UES ; que la cour d'appel, qui a constaté que les projets de licenciements économiques soumis au comité d'entreprise de l'UES avaient été décidés au niveau " de la direction commune " aux sociétés composant l'UES, en a exactement déduit que les conditions imposant l'établissement d'un plan de sauvegarde de l'emploi devaient être vérifiées dans l'ensemble de l'UES ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel a retenu que pour éviter l'obligation de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi la direction de l'UES avait commis une fraude en divisant artificiellement le nombre de licenciements envisagés en juillet 2007 ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société L Commercial aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils pour la société L Commercial

Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que les licenciements pour motif économique de Mlle Y..., de Mmes X..., Z..., A..., C...et B..., et de MM. D...et E...étaient nuls et, en conséquence, D'AVOIR condamné la société L Commercial à leur verser diverses sommes à titre de dommages-intérêts ;

AUX MOTIFS QUE la société Stéphane Kélian Commercial, devenue, le 3 octobre 2007, la société L Commercial, avait pour activité les fonctions de centrale d'achat pour toutes les structures du groupe Kélian devenu Kemos, à savoir la création de nouvelles collections, l'achat de produits, la sélection des fournisseurs, la négociation des prix, la gestion des approvisionnements, la logistique des autres sociétés, l'informatique et le soutien comptable administratif et financier ; que, le 22 août 2005, la société Stéphane Kélian Production, faisant aussi partie de la même unité économique et sociale, a été placée en liquidation judiciaire et tous ses salariés licenciés pour motif économique en septembre 2005 ; que, déjà, au mois de novembre 2004 a été mis en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi au niveau de l'UES Kemos dans son ensemble et donc de toutes les sociétés la composant, plan qui avait été définitivement arrêté le 3 janvier 2005 et qui avait abouti à la suppression de 76 postes au sein des diverses sociétés de l'UES ; que la réalité de cette UES était telle que les représentants du personnel et l'employeur, conformément aux dispositions du plan de sauvegarde de l'emploi, ont choisi de faire une appréciation des critères d'ordre des licenciements au niveau de l'UES et non pas société par société, alors, en effet, qu'à l'origine, c'est l'activité de l'unique société Stéphane Kélian pour laquelle travaillaient antérieurement tous les salariés qui a été poursuivie par la société Kemos dans le cadre de dix sociétés distinctes à compter du mois de juin 2003 mais restées étroitement liées, y compris géographiquement puisque la société Stéphane Kélian ne disposait que de deux sites mitoyens, les salariés travaillant en un même lieu ; que se pose la question de savoir si les licenciements en février 2008 de onze salariés de la société L Commercial, constituant le reliquat du personnel de cette entreprise, ont été prononcés en fraude de l'obligation pour l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, alors que cette procédure a été engagée au mois de novembre 2007 après que, le 17 août 2007, sept salariés avaient été licenciés et que donc le nombre total de licenciements décidés a été supérieur à dix ; que le groupe Kélian rencontrant des difficultés économiques, un mandataire ad hoc lui a été désigné le 10 juillet 2006 et sa mission a été prorogée jusqu'au 10 février 2007 ; que le 13 novembre 2006, un nouveau projet de plan de sauvegarde de l'emploi prévoyant en tout 91 suppressions de postes sur un effectif total de 103 salariés, dont la totalité des 25 emplois de la SAS Kélian Commercial, a été présenté aux représentants du personnel, auxquels a été annoncé la cessation totale des activités de toutes les sociétés de l'UES Kélian en plusieurs phases à compter de décembre 2006, l'activité devant être définitivement arrêtée en juillet 2007 ; que ce plan de sauvegarde de l'emploi n'est pas resté à l'état de simple projet puisqu'il a été présenté à la consultation du comité de l'UES le 13 novembre 2006 et a donné lieu à une deuxième réunion le 26 décembre 2006 pour débattre du premier rapport de l'expert comptable mandaté par le comité ; que ce plan a été matérialisé par deux documents d'information détaillés sur le projet de cessation d'activité et le projet de licenciement collectif pour motif économique contenant toutes les rubriques obligatoires, notamment celle relative aux efforts de reclassement au sein du groupe auquel appartient l'UES ; que dans ces documents ont été exposés, chiffres à l'appui, les raisons de telles décisions qui, malgré de nombreuses mesures déjà prises, n'ont pas permis de redresser la situation, ces raisons étant notamment les suivantes : la décision des banques de ne plus soutenir Stéphane Kélian au mois de mai 2006, ayant nécessité la désignation d'un mandataire ad hoc pour négocier un échelonnement de la dette auprès des créanciers mais dont les résultats n'ont pas permis d'inverser la tendance, la baisse générale et constante du chiffre d'affaires et la dégradation critique des ventes avec un effet significatif sur la rentabilité du groupe, des difficultés comptables avec une incapacité de clôturer les comptes annuels de l'exercice 2005-2006, des difficultés financières avec des pertes très importantes et des charges près de deux fois supérieures aux ventes rendant tout espoir de rentabilité vain, ces difficultés rendant la situation « irrémédiable », 20 millions d'euros de pertes cumulées au cours des deux années 2005 et 2006, l'obtention tardive de financement qui a entraîné des retards dans la confirmation des commandes en vue d'approvisionner les boutiques pour la saison d'hiver alors qu'il est essentiel que les collections hiver soient livrées sur les lieux de vente fin août début septembre, ce retard ayant provoqué des retours importants et une désaffection des clients, l'impossibilité de passer les commandes pour la saison d'hiver suivante alors que toute la trésorerie encaissée ne sert qu'à rembourser les dettes existantes ; qu'en conclusion, il est indiqué que « la direction n'a pas d'autre solution que d'envisager l'arrêt total de l'activité Stéphane Kélian » mais avec la volonté, dit le second document, de préserver au maximum l'emploi, 38 postes de reclassement dans le groupe étant en effet proposés au titre des mesures de reclassement ; que la situation critique ainsi décrite est confirmée par l'expert comptable mandaté par le comité d'entreprise, J. P. Sennac du cabinet Apex, qui a rendu compte de sa mission lors de la réunion du 26 décembre 2006 et qui a fait état, quant à lui, d'un « effondrement » du chiffre d'affaires, divisé par trois en trois ans, tout en dénonçant des erreurs de stratégie (insuffisance des exportations, impact négatif sur l'image de la marque de la transformation de la moitié des boutiques Kélian en boutiques de soldes, dysfonctionnements consécutifs à la délocalisation de la production) ainsi que les carences de la direction dans la communication des informations nécessaires à l'exécution de sa mission ; qu'alors que la prochaine réunion du comité d'entreprise avait été fixée au 9 janvier 2007, la direction a abandonné sans explication son projet de plan de sauvegarde de l'emploi et son projet de reclassement élaboré en conséquence ; que ce n'est qu'à l'initiative de son secrétaire, qui a interrogé le directeur général le 21 mai 2007 sur l'avenir de l'UES, qu'une réunion extraordinaire du comité d'entreprise s'est tenue le 4 juin 2007, au cours de laquelle il a été appris par les représentants du personnel, sans qu'il soit justifié de leur information préalable, que des décisions importantes, à savoir, d'une part, la cession des titres de la société le 1er mai 2007 à la Financière Amon-Restart Capital, devenue ainsi l'actionnaire majoritaire et l'administrateur de la société et, d'autre part, la résiliation du contrat de licence de marque, avaient été prises à leur insu et surtout sans que des précisions suffisantes leurs soient communiquées sur la nature et les effets de ces décisions, alors qu'elles modifiaient l'organigramme et la composition de l'UES Stéphane Kélian, ex-Kemos ; que, spécialement interrogée sur le sort réservé à la société L Commercial, la direction a répondu : qu'il n'y avait plus d'UES, que la marque Kélian avait été retirée par son propriétaire qui l'avait cédée à un tiers et qu'en conséquence elle ne pouvait plus l'exploiter, qu'elle voulait proposer des plans de licenciements au personnel de Romans citant le chiffre de 17 ou 20, que les solutions recherchées pour la société L Commercial n'ont pas abouti, qu'il y a des salariés qui sont sans véritable activité, la société étant incapable de leur fournir un travail ; qu'au cours de cette même réunion, un membre de la direction a confirmé que « pour Kélian Commercial on constate aujourd'hui que nous n'avons pas de solution », un autre ajoutant « qu'il n'y a plus de travail et d'économie », le premier précisant alors qu'il y aurait des licenciements, laissant toutefois entendre qu'il n'y aurait pas forcément de plan social sans répondre aux questions pressantes faite à ce propos par les membres du personnel ; qu'en présence de ces incohérences, une nouvelle réunion du comité d'entreprise de l'UES a été demandée par son secrétaire le 25 juin 2007 à Laurent Bensimon, président du comité d'entreprise, notamment pour le motif suivant : « Vos explications quant à d'éventuels licenciements s'agissant de l'ensemble des salariés de la société L Commercial alors que ces derniers n'ont plus aucune activité depuis plusieurs mois nous inquiètent comme elles inquiètent tous les salariés de Romans qui seraient privés, semble-t-il, de l'ensemble des garanties contenues dans les dispositions légales et réglementaires » ; que, pour toute réponse, la direction a établi une brève note d'information remise lors d'une réunion du comité d'entreprise de l'UES du 9 juillet 2007 en vue de sa consultation sur un projet de licenciement économique de huit salariés de la société L Commercial ; que, malgré l'opposition du comité d'entreprise, sept des huit salariés concernés ont été licenciés pour motif économique par lettre du 17 août 2007, à savoir deux attachés commerciaux, deux responsables commercial et négoce (cadres) et des assistantes de collection ou responsable patronage (employés), le licenciement du huitième, salarié protégé, n'ayant pas été autorisé par l'inspection du travail ; que ces licenciements ont été prononcés en dépit de l'opposition également de la direction départementale du travail qui, par lettre du 13 juillet 2007, rappelant des contacts récents pris par des membres de la direction avec ses services qui ont « fait savoir que Stéphane Kélian Commercial ne pouvait plus exercer sous l'enseigne Kélian et se trouvait dans l'impossibilité de créer de nouvelles collections et de passer de nouvelles commandes ce qui devait conduire logiquement à une cessation pure et simple de son activité », a considéré que le fait de diviser artificiellement le nombre de licenciements dans une société dont la cessation d'activité est inéluctable n'avait d'autre objet que de frauder la loi en éludant les obligations spécifiques relatives aux licenciements d'au moins 10 salariés, le directeur départemental du travail ayant rappelé, à juste titre, que ce nombre s'appréciait en tenant compte de la totalité des licenciements « envisagés » par l'employeur, au sens de l'alinéa 5 de l'article L. 321-2 devenu L. 1233-28 du code du travail ; que, par lettre du 26 juillet 2007, la société L Commercial a répondu à l'inspection du travail qu'elle contestait cette analyse, que les 12 autres salariés restant n'étaient pas concernés par le projet de licenciements car leurs contrats de travail étaient nécessaires à l'activité de l'entreprise dans le cadre de missions d'animation et de coordination du réseau de distribution de la marque, que l'activité des stylistes se poursuivait dans le cadre d'un projet de développement de la maroquinerie et que les salariés administratifs continuaient d'avoir une activité normale dans le cadre de l'activité de suivi des opérations courantes d'autres sociétés du groupe, sans indiquer lesquelles, ou des travaux concernant les contrôles fiscaux en cours ; que, dans cette même correspondance, pour réfuter le reproche de fraude à la loi sur les procédures de licenciements économiques, la société a précisé que dans ce contexte seuls 8 emplois étaient menacés et « qu'il n'est pas envisagé d'autre suppression d'emploi dans les prochaines semaines ni même dans les prochains mois » ; que, pourtant, dès le 9 novembre 2007, soit moins de trois mois après les licenciements prononcés le 17 août 2007, une nouvelle réunion du comité de l'UES a été convoquée pour le 19 novembre 2007, reportée au 23 novembre 2007 pour consultation sur le projet de licenciement de l'ensemble du personnel restant de la société L Commercial ; que l'examen de la note d'information établie à cette occasion permet de constater qu'elle comporte, à l'identique, les mêmes chiffres et explications que celle rédigée pour justifier les licenciements du mois d'août à savoir, notamment les difficultés de trésorerie, l'arrêt du soutien des banques en mai 2006, la désignation d'un mandataire ad hoc, la cession de magasins au cours de l'été 2006, l'impossibilité de passer les commandes pour approvisionner les entrepôts, l'incapacité du groupe de faire face à ses échéances, l'impossibilité d'honorer les échéances fournisseurs et donc de passer commande des nouvelles collections, des cessions de sociétés en mai 2007, l'impossibilité de faire de nouveaux investissements susceptibles de garantir la viabilité des services ou encore la dénonciation du contrat de licence de la marque Kélian, interdisant à la société d'exercer sous cette marque ; qu'en conclusion, cette note de novembre 2007, comme celle de juillet 2007, indique que ces difficultés ont eu des conséquences sur le travail des salariés, que la collection été n'a pu voir le jour, que la collection hiver 2007 n'a pu être préparée et que les stylistes ont été confrontés à une chute de leur activité ; que si la première note indique que les commerciaux n'ont plus de produits à vendre et ont cessé leurs tournées, la seconde ajoute que « la chute de l'activité et l'impossibilité de créer de nouvelles collections et de passer de nouvelles commandes ont généré une absence de travail à fournir aux services administratifs et comptables » ; qu'une seconde réunion du comité de l'UES Stéphane Kélian était prévue le 6 décembre 2007, a été reportée au décembre 2007 (convocation du 17 décembre 2007) avec pour objet l'information sur le projet de licenciement économique du personnel de la société Kélian Commercial mais n'a pas été tenue, ni à cette date, ni en janvier 2008, malgré les demandes adressées le 29 janvier 2008 par la secrétaire du comité d'entreprise au représentant de la société, Laurent Bensimon sur les raisons de l'absence d'initiative prise pour le renouvellement du comité d'entreprise, sur les motifs de la cession de certaines boutiques et de la fermeture de la quasi-totalité des boutiques de Paris et de province sans information du comité d'entreprise, sur la reprise de la procédure de licenciement des salariés des sociétés L Commercial et Rue des Marques Paris, sur une information sur l'avenir de l'entreprise et des emplois dans l'UES, le signataire de cette lettre faisant état de délits d'entrave et d'irrégularités ; que l'employeur n'ayant pas justifié de l'existence de motifs nouveaux entre le 23 novembre 2007 et le 6 février 2008, ce sont les mêmes raisons, toutes déjà connues en juillet 2007, qui ont motivé la première série de licenciements puis la seconde à trois mois d'intervalle, en contradiction avec les affirmations de la société L Commercial dans sa lettre précitée du 26 juillet 2007 dans laquelle elle expliquait que l'activité des stylistes et des salariés des services administratifs se poursuivait sans risque de licenciement dans les mois à venir ; que l'on apprend à la lecture du compte rendu de la réunion du comité de l'UES du 23 novembre2007, consulté sur le projet de licenciement des 11 salariés restant de la société L Commercial que si cette dernière n'a pas mis en oeuvre à cette occasion un plan de sauvegarde de l'emploi, c'est parce qu'elle en était dispensée, l'effectif total de I'UES n'étant alors plus que de 46 personnes, soit en dessous du seuil de 50 au delà duquel un plan de sauvegarde de l'emploi est obligatoire, à supposer que le chiffre avancé soit exact ; que, saisi d'une demande de suppression du comité d'entreprise présentée le 25 mars 2008 par la société L Commercial, le directeur départemental du travail de Paris a, par une décision du 3 juin 2008 confirmée par décision du 18 décembre 2008 du ministre du travail, maintenu le comité d'entreprise de l'unité économique et sociale de l'entité Stéphane Kélian reconnu par le jugement du tribunal d'instance de Romans du 3 juillet 2003, considérant notamment que « nonobstant la baisse des effectifs en deçà du seuil de 50 salariés, que le maintien du comité d'entreprise était nécessaire dans la période de confusion juridique dans laquelle se trouve l'UES » ; que les affirmations de la société L Commercial selon lesquelles ses salariés des services comptables et administratifs continuaient à avoir un niveau d'activité faisant que leur poste n'était pas menacé en juillet 2007 et que, pour les autres emplois maintenus, elle cherchait une solution alternative consistant à la reprise de l'activité maroquinerie ne sont étayées par aucun commencement de preuve ; qu'elles sont, au demeurant, contraires à la note d'information de novembre 2007, qui non seulement ne fait pas état d'une quelconque recherche d'une solution alternative qui n'aurait pas abouti, mais justifie la deuxième série de licenciements par les mêmes motifs que ceux qui ont été invoqués à l'appui de la première ; que la société L Commercial ne justifie pas plus du maintien en activité suffisante des 11 salariés restant entre août et novembre 2007 alors que dès la lettre déjà citée du 25 juin 2007 était dénoncée par la secrétaire du comité d'entreprise l'absence d'activité des salariés, et que la direction elle-même, lors de la réunion du 4 juin 2007, déplorait aussi cette situation ; qu'il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments qu'en procédant à deux vagues de licenciements successives, la société L Commercial s'est soustraite à l'obligation qui était la sienne en juillet 2007 comme en novembre 2007 de mettre en oeuvre un plan social alors que la cessation de son activité et la suppression de tous ses postes de travail en résultant étaient inéluctables comme cela était déjà affirmé dans le projet de plan de sauvegarde de l'emploi abandonné sans explication en décembre 2006 mais qui comportait un plan concret de reclassement ; qu'en conséquence, les licenciements, intervenus alors que la procédure mise en oeuvre par l'employeur est nulle et de nul effet en raison de l'absence de plan de sauvegarde de l'emploi, sont eux-mêmes nuls ;

ET AUX MOTIFS QUE les licenciements étant intervenus alors que la procédure de licenciement est nulle et de nul effet, les salariées peuvent prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des douze derniers mois ; que l'ancienneté d'Hélène X..., 53 ans à la date de la rupture, responsable de trésorerie catégorie agent de maîtrise, remonte au 25 juin 1974 ; qu'elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel moyen de 2 386 euros ; que le conseil de prud'hommes a ainsi fait une juste appréciation de son préjudice en lui allouant à titre de dommages-intérêts la somme de 58. 000 euros ; que l'ancienneté d'Isabel Y..., 35 ans, assistant directeur maroquinerie, catégorie agent de maîtrise, remonte au 6 juin 2001, qu'elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel de 1. 607 euros ; que le conseil de prud'hommes a ainsi fait une juste appréciation de son préjudice en lui allouant à titre de dommages-intérêts la somme de 20. 000 euros ; que l'ancienneté de Liboria Z..., 49 ans, comptable catégorie agent de maîtrise, remonte au 30 octobre 1986, qu'elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel de 2. 053 euros ; que le conseil de prud'hommes a ainsi fait une juste appréciation de son préjudice en lui allouant à titre de dommages-intérêts la somme de euros 50. 000 ; que l'ancienneté de Martine A...-F..., 46 ans, comptable, catégorie agent de maîtrise, remonte au 18 septembre 1989, qu'elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel de 1. 859 euros ; que le conseil de Prud'hommes a ainsi fait une juste appréciation de son préjudice en lui allouant à titre de dommages-intérêts la somme de 40. 000 euros ; que l'ancienneté de Bernadette B..., 55 ans, comptable catégorie agent de maîtrise, remonte au 19 décembre 1988, qu'elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel de 2. 120 euros ; que le conseil de prud'hommes a ainsi fait une juste appréciation de son préjudice en lui allouant à titre de dommages-intérêts la somme de 50. 000 euros ; que l'ancienneté de Dominique D..., 47 ans, styliste chaussures catégorie cadre, remonte au 2 janvier 2000 ; qu'il percevait en dernier lieu un salaire mensuel de 3. 862 euros ; que le conseil de prud'hommes a ainsi fait une juste appréciation de son préjudice en lui allouant à titre de dommages-intérêts la somme de 50. 000 euros ; que l'ancienneté de Jean-Michel E..., 44 ans, chef de projet catégorie cadre, remonte au 3 avril 1989, ; qu'il percevait en dernier lieu un salaire mensuel de 3. 000 euros ; que le conseil de prud'hommes a ainsi fait une juste appréciation de son préjudice en lui allouant à titre de dommages-intérêts la somme de 65. 000 euros ; que l'ancienneté de Catherine Gonzales, 45 ans, chef comptable catégorie cadre, remonte au 19 juin 1989 ; qu'elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel de 3. 066 euros ; que le conseil de prud'hommes a ainsi fait une juste appréciation de son préjudice en lui allouant à titre de dommages-intérêts la somme de 70. 000 euros ;

ALORS, 1°), QUE seules les entreprises comptant au moins cinquante salariés sont tenues, lorsqu'elles envisagent le licenciement de dix salariés ou plus dans une même période de trente jours, d'établir et de mettre en oeuvre, sous peine de nullité des licenciements, un plan de sauvegarde de l'emploi ; que, pour apprécier l'existence de cette obligation, il n'y a lieu de ne tenir compte que des seuls effectifs de l'entreprise dans laquelle est revendiquée la mise en oeuvre du plan social ; qu'en prononçant la nullité des licenciements et en allouant aux salariés une indemnité au moins égale à leurs salaires des douze derniers mois, en considérant que la société L Commercial s'était soustraite à son obligation d'établir et de mettre en place un plan de sauvegarde de l'emploi cependant qu'il résultait de ses propres constations que la société L Commercial n'employait que 19 salariés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 1233-6, L. 1235-10 et L. 1235-11 du code du travail ;

ALORS, 2°), QU'en tout état de cause, à défaut de s'expliquer, comme pourtant elle y avait été invitée par la société L commercial, sur le nombre d'employés de la société et partant, sur les conditions préalables à l'obligation faite à l'employeur d'établir et de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1233-6, L. 1235-10 et L. 1235-11 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-72611
Date de la décision : 03/05/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 26 octobre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 03 mai. 2011, pourvoi n°09-72611


Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp (président)
Avocat(s) : Me Haas

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.72611
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