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28/04/2011 | FRANCE | N°10-17501

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 28 avril 2011, 10-17501


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 janvier 2010), que M. et Mme X... (les assurés), propriétaires d'un bien immobilier et assurés auprès de la société Axa assurances IARD actuellement dénommée Axa France IARD (l'assureur), ont été victimes d'un incendie que l'assureur a refusé de prendre en charge au motif que Mme X... avait mis le feu à la maison en allumant plusieurs foyers ; que les assurés, invoquant l'altération des facultés mentales de Mme X... au

moment des faits, ont assigné l'assureur devant un tribunal de grande insta...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 janvier 2010), que M. et Mme X... (les assurés), propriétaires d'un bien immobilier et assurés auprès de la société Axa assurances IARD actuellement dénommée Axa France IARD (l'assureur), ont été victimes d'un incendie que l'assureur a refusé de prendre en charge au motif que Mme X... avait mis le feu à la maison en allumant plusieurs foyers ; que les assurés, invoquant l'altération des facultés mentales de Mme X... au moment des faits, ont assigné l'assureur devant un tribunal de grande instance en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que les assurés font grief à l'arrêt de les débouter de leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la charge de la preuve de la volonté de l'assuré de causer le dommage incombe à l'assureur ; d'où il résulte qu'il incombait à l'assureur qui prétendait que Mme X... avait commis une faute intentionnelle d'établir qu'elle avait la parfaite conscience de son geste et de ses conséquences dommageables et donc qu'elle disposait, au moment de l'incendie, du discernement nécessaire pour créer le dommage ; qu'en jugeant au contraire que si l'hypothèse d'une bouffée délirante de Mme X... au moment des faits ne pouvait être écartée, mais que les éléments ne permettaient pas de la considérer comme démontrée par les époux X..., auxquels il incombait de rapporter la preuve de l'abolition du discernement de Mme X..., la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du code civil ;
2°/ que la faute intentionnelle implique la volonté de son auteur de créer le dommage tel qu'il est survenu et ses conséquences ; d'où il résulte qu'en se bornant à retenir que « demeure l'intervention volontaire de Mme X... dans la survenance du sinistre » pour en déduire l'exclusion de garantie de l'assureur, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 113-1 du code des assurances ;
Mais attendu que l'arrêt retient notamment qu'il résulte d'une expertise technique déposée dans le cadre de l'enquête pénale que Mme X... a allumé cinq foyers différents dans la maison ; que les premiers rapports médicaux la décrivent comme confuse et obnubilée, l'analyse de sang à partir d'échantillons prélevés lors de l'accident n'ayant cependant révélé que la présence d'une dose thérapeutique de bromazepam bien en-dessous du seuil de toxicité ; que dans ses premiers jours d'hospitalisation Mme X... a fait des déclarations quant à un conflit conjugal latent, accusant son mari de la dévaloriser, de se mettre en colère et même de lui avoir dit à plusieurs reprises que la maison était sale à y mettre le feu et que l'assurance paierait ; qu'avant de mettre le feu le jour des faits elle a gardé au domicile l'un de ses enfants au prétexte qu'il était fatigué et a demandé à une voisine d'aller chercher l'autre à l'école l'après-midi ; que ces circonstances, rapprochées de l'hostilité larvée à l'égard de son mari et de son désir de rentrer au Brésil, n'étaient pas sans évoquer une préparation, voire une préméditation que paraît confirmer le modus operandi ; que si l'hypothèse d'une bouffée délirante au moment des faits ne peut être écartée, les éléments d'appréciation récapitulés et ceux fondant la décision des premiers juges ne permettent pas de la considérer comme démontrée ;
Que par ces seuls motifs faisant ressortir la volonté de commettre le dommage tel qu'il s'était réalisé, la cour d‘appel, procédant à la recherche prétendument omise, a pu déduire que l'assurée avait commis une faute intentionnelle excluant la garantie de l'assureur au titre de la police incendie ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes respectives des parties ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat aux Conseils pour M. et Mme X....
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté les époux X... de leurs demandes tendant à voir condamner leur assureur, la compagnie Axa Assurances, au paiement d'une somme de 125.946,98 euros en réparation de leur préjudice matériel, d'une indemnité de 5 % de cette somme au titre des honoraires d'expert, de 100.000 euros à titre de dommages intérêts pour résistance abusive et de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles ;
Aux motifs que les époux X..., se fondant sur une enquête de gendarmerie, des attestations et les documents fournis par l'hôpital psychiatrique où Madame X... a été internée, font valoir que le discernement de cette dernière était altéré au moment des faits au sens de l'article 122-1 du code pénal ; que la compagnie Axa le conteste en se fondant pour l'essentiel sur un rapport de synthèse établi par son propre expert ;
qu'il résulte d'une expertise technique déposée dans le cadre de l'enquête pénale que Madame X... a allumé cinq foyers différents répartis dans toute la maison au moyen d'un combustible du genre pétrole lampant avant de prendre la fuite en voiture avec un de ses fils et de provoquer un accident en heurtant une glissière ; que les premiers rapports médicaux la décrivent comme confuse et obnubilée, l'analyse de sang à partir d'échantillons prélevés lors de l'accident n'ayant cependant révélé que la présence d'une dose thérapeutique de bromazepam bien en-dessous du seuil de toxicité ;
que dans les premiers jours de l'hospitalisation Madame X... a fait des déclarations figurant dans des comptes-rendus quant à un conflit conjugal latent, accusant son mari de la dévaloriser, de se mettre en colère et même de lui avoir dit à plusieurs reprises que la maison était sale à y mettre le feu et que l'assurance paierait ; qu'elle a révélé également qu'elle souhaitait rentrer au Brésil et se sentait épiée et mise à l'écart ; qu'elle a fait état d'une tentative de suicide par ingestion de médicaments qui a été rapportée comme avérée dans les comptes-rendus d'audition et évoquée par certains témoins, aucune preuve n'en étant cependant rapportée, notamment par une éventuelle intervention des services de secours ;
qu'avant de mettre le feu elle a gardé au domicile l'un de ses enfants au prétexte qu'il était fatigué et a demandé à une voisine d'aller chercher l'autre à l'école l'après-midi, ces circonstances, rapprochées de l'hostilité larvée à l'égard de son mari et de son désir de rentrer au Brésil, n'étant pas sans évoquer une préparation, voire une préméditation que paraît confirmer le modus operandi ;
que si l'hypothèse d'une bouffée délirante au moment des faits ne peut être écartée, les éléments d'appréciation récapitulés ci-dessus et ceux fondant la décision des premiers juges ne permettent pas de la considérer comme démontrée ; que, la preuve de l'abolition du discernement pesant sur les assurés, et une expertise psychiatrique n'étant plus envisageable même sur pièces eu égard à l'ancienneté des faits, demeure l'intervention volontaire de Madame X... dans la survenance du sinistre, exclusive de la garantie de l'assureur ; que la demande, sans qu'il faille examiner les autres points en litige, sera en conséquence rejetée ;
Alors que la charge de la preuve de la volonté de l'assuré de causer le dommage incombe à l'assureur ;
D'où il résulte qu'il incombait à l'assureur qui prétendait que Mme X... avait commis une faute intentionnelle d'établir qu'elle avait la parfaite conscience de son geste et de ses conséquences dommageables et donc qu'elle disposait, au moment de l'incendie, du discernement nécessaire pour créer le dommage ;
Qu'en jugeant au contraire que si l'hypothèse d'une bouffée délirante de Mme X... au moment des faits ne pouvait être écartée, mais que les éléments ne permettaient pas de la considérer comme démontrée par les époux X..., auxquels il incombait de rapporter la preuve de l'abolition du discernement de Mme X..., la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du Code civil ;
Alors en tout état que la faute intentionnelle implique la volonté de son auteur de créer le dommage tel qu'il est survenu et ses conséquences ;
D'où il résulte qu'en se bornant à retenir que « demeure l'intervention volontaire de Mme X... dans la survenance du sinistre » pour en déduire l'exclusion de garantie de l'assureur, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L 113-1 du code des assurances ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 10-17501
Date de la décision : 28/04/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 14 janvier 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 28 avr. 2011, pourvoi n°10-17501


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, SCP Odent et Poulet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17501
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