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28/04/2011 | FRANCE | N°09-70170

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 avril 2011, 09-70170


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé en qualité de caissier barman depuis le 1er juillet 1987 d'abord par la société Eyal puis à compter d'août 2005 en application de l'article L. 1224-1 du code du travail par la société Stef Bar, a été licencié le 2 février 2006 après mise à pied conservatoire pour faute grave pour agressivité, manque de respect à l'égard de la direction et alte

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., employé en qualité de caissier barman depuis le 1er juillet 1987 d'abord par la société Eyal puis à compter d'août 2005 en application de l'article L. 1224-1 du code du travail par la société Stef Bar, a été licencié le 2 février 2006 après mise à pied conservatoire pour faute grave pour agressivité, manque de respect à l'égard de la direction et altercation avec un client de l'établissement ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de paiement de diverses sommes au titre de la rupture ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes, l'arrêt énonce que le salarié qui, à l'occasion de son travail, a giflé un client de l'établissement au sein duquel il travaillait et s'est adressé à son employeur dans des termes particulièrement grossiers, s'est révélé agressif ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si, comme il était soutenu, le contexte dans lequel l'incident avec le client était intervenu et le caractère isolé des faits n'étaient pas, au regard de l'ancienneté du salarié dans l'entreprise et de l'absence de reproche antérieur, de nature à exclure la faute grave, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne la société Tabac du Marché aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Tabac du Marché à payer à M. X...la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit avril deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux conseils pour M. X...

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR décidé que le licenciement de Monsieur X...reposait sur une faute grave et d'AVOIR en conséquence rejeté les demandes du salarié ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement fixant les termes du litige est rédigée dans les termes suivants : « Nous faisons suite à l'entretien préalable à votre licenciement qui a eu lieu le 30 janvier 2006 en nos locaux. Au cours de cet entretien préalable, vous avez reconnu avoir giflé un client de notre établissement et ce à trois reprises, alors que vous étiez en train de travailler au sein de notre entreprise. Malgré votre reconnaissance des faits, vous n'avez pas cru devoir vous excuser des faits commis. Les explications que vous nous avez fournies nous paraissent insuffisantes et nous sommes donc au regret de vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave pour les motifs suivants :- Nous avons le regret de constater votre manque de respect, votre agressivité à l'égard de notre établissement et de la direction à des multiples reprises ces derniers temps.- En effet, en date du 20 janvier 2006 entre 15h et 16 h, alors que vous étiez en train de travailler au sein de notre établissement, vous avez giflé, sans aucune raison, un client de notre établissement et ce à 3 reprises.

- Cette scène a d'ailleurs été filmée par les caméras qui se trouvent à l'intérieur de notre établissement.- Bien que vous ayez reconnu les faits lors de l'entretien préalable, vous n'avez pas souhaité vous excuser des faits commis. Vous comprenez que jusqu'à présent, nous avons été patients mais aujourd'hui nous ne pouvons plus tolérer cette attitude négative persistante qui commence à avoir des répercussions directes sur la bonne marche de l'entreprise » ; que Monsieur X...ne conteste pas avoir donné une gifle à un client de l'établissement au sein duquel il travaillait et pendant ses heures de service ; que l'employeur produisait principalement l'attestation de la victime indiquant avoir reçu le 20 janvier 2006 suite à une altercation avec Monsieur X..., des coups au visage administrés à 3 reprises et la cassette vidéo enregistrée par la caméra de surveillance du magasin ; que cette cassette avait été visionnée par un huissier de justice, hors la présence de Monsieur X...qui disait ne pas connaître son contenu ; que l'huissier ne précisait pas connaître physiquement Monsieur X...et ne pouvait donc constater qu'il était l'auteur de la gifle constatée sur le film ; que toutefois, les constatations de l'huissier étaient à rapprocher des aveux de monsieur X...à l'audience qui avait reconnu « Je ne conteste pas qu'il y ait eu une agression » ; qu'il était donc établi que Monsieur X..., en service, avait, ainsi qu'il l'avait reconnu, administré au moins une gifle à un client de l'établissement au sein duquel il travaillait ; que l'employeur expliquait par ailleurs que Monsieur X...alors que des explications lui étaient demandées sur son comportement, lui avait, le 22 janvier 2006, manqué de respect et s'était montré agressif à son égard ; que Y...et Boubé Z...attestaient que Monsieur X...les avait traités de « faux culs » et aurait déclaré à Monsieur Stéphane Z..., gérant de l'établissement, « tu n'as pas les couilles de me virer … » ; que le fait que ces témoins étaient manifestement proches du gérant ne suffisaient pas à écarter leurs témoignages confortés par celui d'une cliente indiquant « venue boire un café au Grillon le 22 janvier 2006 vers 19h30, j'atteste par la présente que le salarié de l'établissement M. A...s'est adressé aux autres salariés ainsi qu'à Monsieur Stéphane Z...en les insultants de « faux culs » avec un ton assez violent puis en s'allant il a fini par dire « vous n'avez pas les couilles de me virer … » ; que Monsieur X...ne s'était pas expliqué sur les propos qui lui étaient attribués et ne les avait en aucune manière démentis ; qu'il était ainsi démontré que Monsieur X..., par la grossièreté de ses propos, avait manqué de respect à sa hiérarchie ; qu'en conséquence, le salarié qui avait, à l'occasion de son travail, giflé un client de l'établissement au sein duquel il travaillait, et s'était adressé à son employeur en des termes particulièrement grossiers, s'était révélé agressif ; que ces circonstances avaient rendu impossible le maintien du lien salarial même pendant la durée du préavis ;

ALORS 1°) QUE constitue un mode de preuve illicite le compte rendu de visionnage d'une cassette vidéo enregistrée par la caméra de surveillance du magasin, établi par un huissier de justice qui a pris connaissance de la cassette hors la présence du salarié, à plus forte raison lorsque les locaux surveillés étaient précisément ceux dans lesquels le salarié exécutait son contrat de travail et qu'il n'est pas constaté que le dispositif de surveillance avait été préalablement porté à sa connaissance ; qu'en s'étant fondée, pour retenir la faute grave, sur le compte-rendu de visionnage d'une cassette vidéo par un huissier de justice, effectué hors la présence du salarié, la caméra ayant enregistré l'activité du salarié sans qu'il soit constaté qu'il avait été informé de ce procédé de contrôle, la cour d'appel a violé les article 9 du code de procédure civile et L. 1235-1 du code du travail ;

ALORS 2°) QU'en se fondant sur l'aveu de monsieur X...à l'audience, qui avait reconnu « Je ne conteste pas qu'il y ait eu une agression », pour en déduire à tort que Monsieur X...aurait reconnu avoir administré au moins une gifle à un client de l'établissement, quand la déclaration de M. X...n'était porteuse d'aucun aveu sur le fait qu'il ait giflé un client, la cour d'appel a violé l'article 1356 du code civil ;

ALORS 3°) QUE la faute grave, privative du préavis, doit résulter d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations, d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en ayant infirmé le jugement qui avait écarté la faute grave au motif que le responsable de Monsieur X..., présent le jour où les faits s'étaient déroulés, n'avait pas cru bon d'intervenir pour calmer l'agressivité du client en état d'ébriété, qui avait agressé et injurié Monsieur X..., sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si les circonstances, d'une part, que le salarié s'était fait insulté par un client en état d'ébriété avancé sans qu'aucun responsable n'intervienne, et d'autre part qu'il avait une ancienneté de plus de 19 ans dans les mêmes fonctions au sein de l'établissement sans que ses compétences et qualités relationnelles ne soient mises en causes, n'étaient pas de nature à exclure la faute grave, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5, L. 1234-6, L. 1235-1 du code du travail ;

ALORS 4°) QUE la lettre de licenciement fixe les termes du litige ; que la cour d'appel a constaté que la lettre de licenciement reprochait au salarié « votre manque de respect, votre agressivité à l'égard de notre établissement et de la direction à des multiples reprises ces derniers temps.- En effet, en date du 20 janvier 2006 entre 15h et 16 h, alors que vous étiez en train de travailler au sein de notre établissement, vous avez giflé, sans aucune raison, un client de notre établissement et ce à 3 reprises » et lui rappelait « jusqu'à présent, nous avons été patients mais aujourd'hui nous ne pouvons plus tolérer cette attitude négative persistante » ; qu'il en résultait que la gifle censée avoir été commise le 20 janvier 2006 était le dernier comportement visé dans la lettre ; qu'en ayant néanmoins pris en considération, pour juger justifié le licenciement de Monsieur X..., des propos grossiers censés avoir été proférés le 22 janvier 2006, quand ces motifs n'étaient pas visés dans la lettre de licenciement, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

ALORS 5°) QUE le silence opposé à l'affirmation d'un fait ne vaut pas reconnaissance de ce fait ; qu'après avoir constaté que l'employeur expliquait que Monsieur X...lui avait, alors que des explications lui étaient demandées sur son comportement, manqué de respect et s'était montré agressif à son égard, que des témoins attestaient que Monsieur X...les avait traités de « faux culs » et avait déclaré à Monsieur Stéphane Z..., gérant de l'établissement, « tu n'as pas les couilles de me virer », la cour d'appel, qui a énoncé que Monsieur X...« ne s'est pas expliqué sur les propos qui lui ont été attribués. Il ne les a en aucune manière démentis » (p. 5, antépénultième alinéa), pour en déduire qu'il serait ainsi démontré que Monsieur X..., par la grossièreté de ses propos, avait manqué de respect à sa hiérarchie et avait commis une faute grave, a violé l'article 1315 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-70170
Date de la décision : 28/04/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 28 avril 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 avr. 2011, pourvoi n°09-70170


Composition du Tribunal
Président : M. Frouin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Coutard, Mayer et Munier-Apaire, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.70170
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