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30/03/2011 | FRANCE | N°09-70970

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 mars 2011, 09-70970


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er juin 1986 en qualité d'étalagiste par la société Dusaber, aux droits de laquelle vient la société Victor ; que celle-ci a conclu avec la salariée, le 10 juin 2002, un contrat de travail à durée indéterminée stipulant, outre la reprise d'ancienneté, une rémunération nette de "106,71 euros la vitrine plus congés payés versés en une seule fois par an" ; que la salariée, licenciée pour abandon de poste le 3 novembre 2005, a saisi la jur

idiction prud'homale d'une demande tendant à voir dire son licenciement sans c...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 1er juin 1986 en qualité d'étalagiste par la société Dusaber, aux droits de laquelle vient la société Victor ; que celle-ci a conclu avec la salariée, le 10 juin 2002, un contrat de travail à durée indéterminée stipulant, outre la reprise d'ancienneté, une rémunération nette de "106,71 euros la vitrine plus congés payés versés en une seule fois par an" ; que la salariée, licenciée pour abandon de poste le 3 novembre 2005, a saisi la juridiction prud'homale d'une demande tendant à voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et a présenté, devant la cour d'appel, une demande en requalification de son contrat de travail en contrat de travail à temps plein et en paiement, à ce titre, d'un rappel de salaire ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3123-14 du code du travail ;
Attendu que l'absence de mention de la durée du travail dans le contrat de travail fait présumer que l'emploi est à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve d'une part de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ;
Attendu que pour rejeter la demande de Mme X... en requalification de son contrat de travail en contrat de travail à temps plein, la cour d'appel, après avoir relevé que ledit contrat ne mentionnait ni la durée du travail, ni sa répartition sur les jours de la semaine ou les semaines du mois, retient que l'employeur s'obligeait à tenir compte de son planning, qu'il n'avait plus fait appel à ses services du mois d'août 2004 à la date de son licenciement, et que la salariée ne pouvait sérieusement prétendre, en l'absence de tout autre élément de preuve, s'être tenue constamment à la disposition de la société Victor ;
Qu'en statuant ainsi, par des motifs inopérants s'agissant du fait que l'employeur n'avait plus fait appel aux services de Mme X... dès lors qu'il n'était pas établi qu'il avait satisfait à son obligation de lui fournir du travail jusqu'à la rupture des relations contractuelles, et sans qu'il fasse la démonstration d'une part de la durée du travail convenue, et, d'autre part, de ce que la salariée n'avait pas été placée dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme elle devait travailler et n'avait pas eu à se tenir constamment à sa disposition, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la cassation à intervenir sur le premier moyen emporte la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif critiqué par le second moyen ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 1er septembre 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Victor aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Victor à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP de Chaisemartin et Courjon, avocat aux Conseils pour Mme X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mademoiselle Sophie X... de ses demandes en requalification de son contrat de travail en contrat de travail à temps plein et en paiement de rappel de salaire ;
ALORS QUE le contrat de travail à durée indéterminée conclu initialement avec la société DUSABER et régi par la convention collective du commerce de détail de l'habillement, stipulait notamment que Madame X... percevrait une rémunération de 700 F, soit 106,71 € par vitrine, et que l'employeur ferait appel à ses services en fonction de l'arrivage des nouveaux produits, des saisons et du planning de la salariée. Après la cession des fonds de commerce et s'il a été formalisé de manière plus succincte le 10 juin 2002, ce contrat de travail s'est poursuivi aux mêmes conditions entre la salariée et la société VITOR. Parallèlement, Madame X... exerçait d'autres emplois, étant observé que selon les explications fournies par la salariée à l'occasion de la communication de pièces ordonnée avant dire droit par les premiers juges, chaque emploi n'a pas fait l'objet d'un contrat écrit. Dès lors que l'employeur s'obligeait à tenir compte du planning de Madame X... et qu'en outre il na plus fait appel à ses services du mois d'août 2004 jusqu'à son licenciement notifié par lettre du 3 novembre 2005, la salariée ne peut sérieusement prétendre, en l'absence de tout autre élément de preuve, s'être tenue constamment à la disposition de la société VITOR. La demande de requalification du contrat en contrat de travail à temps complet n'est donc pas justifiée. Par ailleurs, la requalification de ce contrat en contrat de travail à temps partiel d'une durée mensuelle de 33 heures, correspondant à l'horaire annuel de 400 heures effectué au cours de l'année 2000, ne saurait résulter des dispositions de l'ancien article L. 212-4-3 du code du travail invoquées par l'appelante et qui sont applicables en cas de dépassement de l'horaire prévu au contrat. En effet, le contrat conclu entre les parties, s'analysant en un contrat de travail avec une rémunération à la tâche, ne prévoyait aucune durée de travail. Dans le cas où un tel contrat de travail ne fixe pas le temps relatif à chaque tâche, le salarié ainsi rémunéré peut prétendre au SMIC ou au salaire minimum conventionnel pour le nombre d'heures de travail qu'il a réellement effectuées. Or en l'espèce, l'appelante ne prétend pas avoir effectué un nombre d'heures supérieur à celui pour lequel elle a été rémunérée. Enfin, l'appelante se borne à observer que la convention collective applicable « ne prévoit strictement rien sur le travail à la tâche », sans précisément contester l'usage invoqué par la société intimée en ce qui concerne l'emploi d'étalagiste. Du reste, la salariée a produit un autre contrat de travail de ce type qu'elle a conclu avec la SARL LOUISE DIFFUSION le 20 mai 2005 et ne nie pas qu'elle avait coutume de travailler ainsi pour d'autres employeurs. En conséquence, le jugement qui a débouté la salariée de sa demande de rappel de salaires sera confirmée ;
1) ALORS QUE lorsque le contrat de travail ne précise pas la durée du travail et sa répartition sur les jours de la semaine et les semaines du mois, l'emploi est présumé à temps complet et il appartient à l'employeur qui conteste l'existence d'un contrat à temps plein de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte du travail convenu, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'était pas dans l'obligation de se tenir constamment à la disposition de son employeur ; qu'en l'espèce, le contrat de travail de Mademoiselle X... ne mentionnant ni la durée du travail, ni sa répartition sur les jours de la semaine ou les semaines du mois, il était présumé à temps complet ; qu'en considérant pourtant, pour débouter la salariée de sa demande de requalification de son contrat en contrat de travail à temps complet, que « dès lors que l'employeur s'obligeait à tenir compte du planning de Madame X... et qu'en outre il n'a plus fait appel à ses services du mois d'août 2004 jusqu'à son licenciement notifié par lettre du 3 novembre 2005, la salariée ne peut sérieusement prétendre, en l'absence de tout autre élément de preuve, s'être tenue constamment à la disposition de la société VITOR », la Cour d'appel a violé l'article 3123-147 du Code du travail, ensemble l'article 1315 du Code civil ;
2) ALORS QUE l'employeur a l'obligation de fournir du travail au salarié ; que dès lors, en l'espèce, en se fondant sur le fait que l'employeur n'avait plus fait appel aux services de Mademoiselle X... du mois d'août 2004 jusqu'à son licenciement notifié par lettre du 3 novembre 2005, pour considérer que la salariée ne pouvait sérieusement prétendre s'être tenue constamment à la disposition de la société VITOR et la débouter de sa demande de requalification, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil, ensemble l'article L. 3123-14 du Code du travail ;
3) ALORS QU'en tout état de cause, toute réduction de la durée du travail, dès lors qu'elle a pour conséquence une diminution de la rémunération, constitue une modification d'un élément essentiel du contrat de travail qui ne peut intervenir sans l'accord du salarié ; que dès lors en l'espèce, en se bornant à relever, pour débouter la salariée de ses demandes de rappel de salaire, que « le contrat conclu entre les parties, s'analysant en un contrat de travail avec une rémunération à la tâche, ne prévoyait aucune durée de travail », sans rechercher si la salariée n'était pas en réalité rémunérée en fonction du nombre d'heures effectuées et si le volume d'heures n'avait pas beaucoup diminué à compter de 2002, aucun travail n'ayant été confié à la salariée en 2005, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir fixé le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la seule somme de 1.000 € et le solde de l'indemnité compensatrice de préavis à la seule somme de 639,83 € et d'avoir débouté Melle Sophie X... de sa demande en paiement d'un solde d'indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE Sur le solde d'indemnité de préavis, l'article 15 de la convention collective nationale du commerce de détail de l'habillement du 25 novembre 1987, dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 2005, fixe le délai de préavis à deux mois pour les salariés ayant au moins 2 ans dans l'entreprise, sans diminution du salaire en cas de dispense par l'employeur de l'exécution du travail pendant le préavis. La salariée n'ayant fourni aucune prestation de travail et n'ayant donc pas été rémunérée au cours de l'année qui a précédé le licenciement, a produit une correspondance d'un cabinet d'expertise comptable antérieure au licenciement, datée du 5 août 2005, arrêtant au 31 mai 2005 le montant de son salaire mensuel moyen sur une année à la somme de 349,08 €. Ce montant, qui a été retenu par l'employeur pour le calcul de l'indemnité de licenciement, a été validé à juste titre par les premiers juges en l'absence de tout autre élément. L'indemnité de préavis due à Madame X... s'établit en conséquence à : 349,08 € x 2 mois = 698,16 €. Le bulletin de paie du mois de janvier 2006 ne mentionne que le versement d'une somme de 58,33 € à ce titre. En conséquence, il reste dû à la salariée au vu des pièces produites un solde de 698,16 €- 58,33 € = 639,83 €, outre 63,98 au titre des congés payés afférents. Le jugement qui a implicitement débouté la salariée de ce chef de demande sera réformé en ce sens. La condamnation sera prononcée en deniers ou quittance. Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement, selon l'article 17 de la convention collective, l'indemnité de licenciement est égale à 1/10ème du salaire mensuel de référence par année de présence pour les salariés comptant plus de 2 ans jusqu'à 5 ans d'ancienneté et à 1/5ème de ce salaire par année de présence au-delà de 5 ans. Pour toute année incomplète, l'indemnité est calculée au prorata du temps de présence. Sur la base d'une ancienneté remontant au 1er juin 1986 et d'un salaire mensuel de référence de 349,08 €, l'indemnité de licenciement a été très exactement évaluée à 1.192,94 €, somme figurant au bulletin de paie de janvier 2006 et versée à la salariée. Le jugement qui a débouté la salariée de sa demande de versement d'un solde d'indemnité de licenciement sera confirmé. Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, en l'état des éléments versés aux débats, les premiers juges, qui ont alloué à la salariée une somme de 1.000,00 € à titre de dommages-intérêts, ont fait une exacte appréciation du préjudice subi sur le fondement de l'article L. 122-14-5 14 devenu L. 1235-5 du Code du travail. Cette disposition du jugement sera confirmée ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE, Sur les dommages et intérêts pour rupture abusive : (…) Son contrat de travail ne fixe pas le temps relatif à chaque prestation ni le taux horaire sur la base duquel elle doit être rémunérée. Une attestation établie par le comptable de l'entreprise fait ressortir un salaire moyen sur une année, arrêté à la date du 31 mai 2005. En l'absence de tout autre document, c'est donc sur cette base de 349,08 € mensuels que le Conseil décide de s'appuyer. Il ordonne le règlement de trois mois de salaires, soit la somme de 1.000 € au titre des dommages et intérêts réclamés ;
ALORS QUE les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'indemnité compensatrice de préavis et l'indemnité conventionnelle de licenciement ayant été calculés sur la base du salaire perçu par Mademoiselle X..., la cassation à intervenir sur le premier moyen, qui reproche à la décision attaquée d'avoir débouté la salariée de ses demandes de rappel de salaire pour les années 2003 à 2006, emportera par voie de conséquence la cassation des chefs du dispositif visés par le second moyen, en application de l'article 624 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-70970
Date de la décision : 30/03/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 01 septembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 mar. 2011, pourvoi n°09-70970


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.70970
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