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30/03/2011 | FRANCE | N°09-69751

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 mars 2011, 09-69751


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la société Chane Hive suivant contrat à durée indéterminée du 1er novembre 1986 et exerçant, en dernier lieu, les fonctions de chef de dépôt, a été licencié pour faute lourde le 6 décembre 2007 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur les deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens, qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur

le premier moyen :

Vu les articles L. 3121-1 et L. 3121-2 du code du travail ;

Attendu ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé par la société Chane Hive suivant contrat à durée indéterminée du 1er novembre 1986 et exerçant, en dernier lieu, les fonctions de chef de dépôt, a été licencié pour faute lourde le 6 décembre 2007 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur les deuxième et troisième moyens :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens, qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le premier moyen :

Vu les articles L. 3121-1 et L. 3121-2 du code du travail ;

Attendu que pour condamner l'employeur à verser diverses sommes au salarié au titre des heures supplémentaires, la cour d'appel retient que celui-ci était présent dans l'entreprise pendant la pause déjeuner entre 12 heures 30 et 13 heures 30 et qu'il était en conséquence fondé à en demander le paiement ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher comme elle y était invitée, si, nonobstant sa présence dans l'entreprise, le salarié était, pendant le temps de pause, à la disposition de l'employeur et devait se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Saint-Denis de la Réunion condamnant la société Chane Hive à payer à M. X... diverses sommes au titre des heures supplémentaires, des congés payés sur heures supplémentaires, de l'indemnité compensatrice sur repos compensateur et des congés payés sur l'indemnité de repos compensateur, l'arrêt rendu le 9 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, autrement composée ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour la société Chane hive.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La société Chane Hive fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir condamnée à payer à M. X... diverses sommes à titre de rappel sur heures supplémentaires et de congés payés afférents ;

AUX MOTIFS QUE sur les heures supplémentaires, à l'appui de sa demande en paiement des heures qu'il affirme avoir effectuées au-delà de la durée légale du 3 décembre 2001 au 23 février 2007, M. X... produit :- des attestations de plusieurs de ses anciens collègues (Grondin, Palas, Minatchy) desquelles il ressort que, depuis février 2000, il ouvrait le dépôt a 6 heures, le refermait à 16 heures (voire plus tard) et était présent entre 12 heures 30 et 13 heures 30 ;- une édition des badgéages le concernant, qui font apparaître les heures d'entrée et de sortie, les retards éventuels et les pauses ; (…) que la société Chane Hive se borne à qualifier d'attestations de complaisance celles qui lui sont opposées, et à mettre en doute la crédibilité des relevés de la pointeuse au motif que les connaissances de M. X... en la matière lui permettaient de trafiquer cet appareil à sa guise ainsi qu'en ferait foi sa lettre du 26 septembre 2006 dans laquelle il reproche à un technicien de la société d'avoir " manipulé les données sur (sa) carte de pointage " et " supprimé le chemin d'accès au logiciel de pointage BT 50 de Biodet " mais indique avoir réussi à " réparer " ; qu'elle n'apporte toutefois aucun élément de nature à étayer l'accusation qu'elle porte, et 8 salariés (Z..., A..., B..., C..., Y... Roland, Y... Marc, D..., E...) attestent quitter le dépôt à 15 heures (heure a partir de laquelle plusieurs indiquent qu'il n'y avait plus d'activité) ;
(…) qu'en tout état de cause, l'article L 212-1-1, alinéa 2 (devenu L 3171-4) du code du travail aux termes duquel " si le décompte des heures de travail effectuées par chaque salarié est assuré par un système enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable " interdit à l'employeur d'invoquer la non fiabilité de la pointeuse ; qu'au demeurant, les relevés transmis quotidiennement au service du personnel n'ont jamais été pris en considération pour l'établissement de la paye de l'intimé, mais n'ont pas davantage été contestés avant la procédure judiciaire ; qu'il n'est enfin pas discuté que, depuis le mois de février 2000, M. X... exerçait seul la fonction de chef de dépôt qu'ils étaient auparavant deux à assurer, sans que les contraintes inhérentes à la fonction aient été atténuées en conséquence ; qu'il existait donc, au moins, un accord implicite à l'accomplissement d'heures supplémentaires ; (….) ; que c'est à juste titre, en fonction de ces éléments, que les premiers juges ont condamné la société Chane Hive au paiement des sommes précitées au titre des heures supplémentaires (compte tenu des majorations légales) et des congés payés correspondants ;

ALORS QUE le salarié ne peut revendiquer le paiement d'heures supplémentaires pour les temps de pause qu'il n'a pas pris ; qu'en se contentant, pour condamner la société Chane Hive au paiement des heures supplémentaires, de retenir qu'il ressortait des attestations de plusieurs de ses anciens collègues, que, depuis février 2000, M. X... ouvrait le dépôt à 6 heures du matin, le refermait à 16 heures et y était présent entre 12 heures 30 et 13 heures 30, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le salarié qui soutenait travailler sans interruption de l'ouverture à la fermeture du dépôt n'incluait pas dans sa demande de rappel d'heures supplémentaires l'heure de déjeuner qu'il ne prenait pas, ce qui revenait à compter ses temps de pause non pris comme des temps de travail effectif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 3121-1, L. 3121-2 alinéa 1 et L. 3171-4 du code du travail ;

ALORS QU'aux termes de l'article L. 3171-4, alinéa 3, du code du travail, si le décompte des heures de travail effectuées par le salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable ; qu'en énonçant, pour juger la société Chane Hive non fondée à contester la crédibilité des relevés de pointeuse produits par le salarié, que l'article L. 3171-4, alinéa 3, du code du travail interdit à l'employeur d'invoquer la non fiabilité de la pointeuse, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi, a violé par fausse application les dispositions de cet article ;

ALORS QU'en tout état de cause, le silence de l'employeur ne peut, à lui seul, valoir acceptation de l'accomplissement par le salarié d'heures supplémentaires ; que la cour d'appel qui, pour condamner la société Chane Hive au paiement d'heures supplémentaires, a déduit l'accord implicite donné par cette dernière à l'accomplissement d'heures supplémentaires de ce que, depuis février 2000, M. X... exerçait désormais seul la fonction de chef de dépôt, sans caractériser autrement, de la part de l'employeur, l'acceptation de la réalisation d'heures supplémentaires par ce salarié, la cour d'appel a violé ensemble l'article 1101 du code civil et l'article L. 3171-4 du code du travail.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Chane Hive fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir condamnée à verser à M. X... une somme à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information régulière sur les droits à repos compensateurs ;

AUX MOTIFS QUE la violation par l'employeur de son obligation d'indiquer au salarié concerné le nombre d'heures de repos auxquelles il a droit justifie l'allocation d'une somme de 500 euros à titre de dommages intérêts ;

ALORS QUE l'insuffisance de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en se bornant, pour condamner la société Chane Hive au paiement de dommages et intérêts pour défaut d'information sur les droits à repos compensateur, à dire que la violation par l'employeur de son obligation d'indiquer au salarié concerné le nombre d'heures de repos auxquelles il avait droit justifie l'allocation d'une somme de 500 euros à titre de dommages intérêts, sans préciser les éléments caractérisant, de la part de l'employeur, le manquement à son obligation d'information ni la nature du préjudice susceptible de résulter de celui-ci, la cour d'appel a statué par simple affirmation et ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

La société Chane Hive fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. X..., prononcé pour faute lourde, était dépourvu de cause réelle et sérieuse.

AUX MOTIFS QUE la lettre du 6 décembre 2007 fait état de la réaction qu'auraient eue " des personnels de l'entreprise après avoir eu connaissance de l'utilisation faite d'un courrier daté du premier mars 2007 " (ils se seraient plaints d'avoir été abusés par M. X...) et de l'attitude de l'intimé consistant " à prendre le personnel systématiquement à témoin afin de servir (ses) propres revendications, à porter des affirmations injustifiées graves de conséquences, propres à nuire à l'entreprise " ; que les attestations de certains signataires de la lettre du 1er mars 2007 affirmant n'avoir pas lu celle-ci avant de la signer ou s'être mépris sur sa portée (il s'agissait, pour la plupart, de protester contre la suppression des tickets restaurants) ne permettent pas d'affirmer qu'ils auraient été trompés sur les véritables raisons de ce courrier, encore moins qu'ils auraient été spontanément choqués par l'utilisation (?) qu'en aurait faite leur ancien chef de dépôt ; que le fait qu'il comporte des énonciations que le chef d'entreprise affirme inexactes ne saurait constituer, à l'évidence, une faute lourde, rien n'établissant que M. X... ait eu l'intention de nuire à l'entreprise ; que le fait de solliciter des subordonnés ne saurait davantage lui être imputé à faute, son licenciement est, dès lors, sans cause réelle et sérieuse ;

ALORS QUE dans la lettre de licenciement de M. X... pour faute lourde, la société Chane Hive reprochait à celui-ci son attitude qui consistait à prendre le personnel systématiquement à témoin pour servir ses revendications, à porter contre l'employeur des affirmations injustifiées, graves de conséquence, propres à nuire à l'entreprise ; qu'en retenant, pour dire que le licenciement de M. X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, que le fait pour le salarié d'avoir signé un courrier du 1er mars 2007 comportant des énonciations estimées inexactes par le chef d'entreprise et d'avoir sollicité ses subordonnés ne pouvait constituer, en l'absence d'intention de nuire, une faute lourde, ni même lui être imputé à faute, la cour d'appel n'a pas examiné les griefs tels qu'ils étaient énoncés dans la lettre de licenciement et a ainsi violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

ALORS QU'en tout état de cause le fait pour le salarié de prendre systématiquement à témoin le personnel de l'entreprise pour servir ses revendications personnelles et de dénigrer celle-ci par des propos injustifiés et graves de conséquence suppose en principe la volonté de nuire à l'employeur et caractérise dès lors la faute lourde ; qu'en considérant, pour écarter la faute lourde de M. X... et par suite, dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse, que le fait pour ce dernier de solliciter ses subordonnés ne saurait lui être imputé à faute, sans avoir constaté que le fait de prendre systématiquement à témoin le personnel de l'entreprise et de répandre des propos injustifiés sur cette dernière ne traduisait en l'espèce aucune intention de son auteur de nuire à son employeur, la cour d'appel a violé l'article L. 3141-26 du code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-69751
Date de la décision : 30/03/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 09 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 mar. 2011, pourvoi n°09-69751


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.69751
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