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29/03/2011 | FRANCE | N°10-84041

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 mars 2011, 10-84041


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- La caisse de retraite du personnel navigant professionnel de l'aéronautique civile, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 27 mai 2010, qui, dans l'information suivie, notamment, contre M. Hervé X... des chefs de complicité d'abus de confiance et de complicité d'escroquerie, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu les

mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- La caisse de retraite du personnel navigant professionnel de l'aéronautique civile, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 27 mai 2010, qui, dans l'information suivie, notamment, contre M. Hervé X... des chefs de complicité d'abus de confiance et de complicité d'escroquerie, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention, des articles 1134, 2048, 2049, 2052 du code civil, 514, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt a déclaré irrecevable l'appel formé par la demanderesse contre l'ordonnance de non-lieu à suivre à l'égard de M. X... ;

"aux motifs que M. X... fait valoir que la partie civile n'est pas recevable en son appel en ce qu'il a signé, le 17 juillet 2002, une transaction avec la caisse de retraite du personnel navigant professionnel de l'aéronautique civile ; que selon cet acte, il est mis "un terme définitif à tous les litiges susceptibles de naître entre les parties, ayant pour objet ou conséquence les griefs énoncés dans la lettre de licenciement de M. X..., à la date de signature du protocole" ; qu'en ce qui concerne l'instance pénale, il est seulement précisé qu'il "ne saurait toutefois faire obstacle aux actions pénales qui pourraient être engagées par le ministère public et aux actions en réparation qui pourraient s'ensuivre" ; qu'il ressort de l'examen de la lettre de licenciement du 29 mai 2002 que les faits objet du licenciement pour faute grave sont les mêmes que ceux à l'origine des poursuites pénales ; que cette identité de faits n'est pas contestée par la partie civile ; que compte tenu des termes de la transaction, la partie civile a expressément renoncé à agir à l'encontre de M. X..., y compris par la voie pénale, pour les faits visés à la lettre de licenciement ;

"1°/ alors que, la transaction intervenue dans le cadre de la procédure de licenciement portant exclusivement sur un défaut de contrôle reproché au salarié et réservant expressément l'action civile de l'employeur accessoire à une action publique, le motif d'irrecevabilité de l'appel de la partie civile pris de l'identité prétendue des faits objet de la transaction et des faits objet de l'action publique est en contradiction formelle avec les termes de la transaction ;

"2°/ alors que, sont distincts et comportent des conséquences juridiques différentes les faits pris en compte dans une transaction signée le 17 juillet 2002 entre les parties dans le cadre d'un licenciement fondé sur le manquement du directeur financier à son devoir de surveillance et les faits ultérieurement dénoncés par la commission des opérations de bourse au parquet pour lesquels l'ex-salarié sera mis en examen des chefs d'abus de confiance et de complicité d'escroquerie à raison en particulier d'agissements positifs consistant à avoir favorisé les sur-commissionnements litigieux en établissant lui-même des tableaux frauduleux à l'attention de ses employeurs de nature à donner une apparence de vraisemblance aux cours d'exécution des opérations ; que sont eux-mêmes distincts les champs des opérations concernées, le licenciement ne visant que les opérations réalisées sur les obligations américaines tandis que la dénonciation effectuée par la commission des opérations de bourse concerne au surplus les opérations sur les actions européennes ainsi que sur le fonds Socrate ; qu'en affirmant dès lors l'identité matérielle entre les faits objet de la transaction civile et ceux pénalement poursuivis, la chambre de l'instruction s'est mise en contradiction avec les termes de la transaction ainsi qu'avec les pièces de la procédure ayant délimité l'étendue de la saisine du juge pénal ;

"3°/ alors que, la renonciation à un droit prévue par une transaction ne peut avoir pour objet que les éléments dont les parties signataires ont eu connaissance au jour de la conclusion du contrat ; qu'en retenant une prétendue identité entre les faits objet de la transaction et ceux à l'origine des poursuites pénales sans rechercher si la conclusion de la transaction à la date du 17 juillet 2002, soit antérieurement à la clôture de l'enquête diligentée par la commission des opérations de bourse qui dénoncera au parquet par courrier du 30 juillet 2003 les malversations par elle découvertes, commises par MM. Z... et X... dans la gestion des actions européennes et du fonds Socrate et à l'ouverture d'une information judiciaire qui révélera en outre les actes positifs de complicité de M. X..., n'excluait pas que cette transaction ait pu concerner l'ensemble des faits visés par la procédure pénale en cours, la chambre de l'instruction a derechef privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;

"4/ alors que, la demanderesse se prévalait dans ses écritures devant la chambre de l'instruction de plusieurs éléments de fait apparus au cours de l'information, et d'ailleurs constatés par le juge d'instruction dans son ordonnance de règlement, démontrant que loin de s'être contenté de couvrir les agissements délictueux de M. Z... par ses omissions et abstentions volontaires dans l'exercice du contrôle qui lui était dévolu, M. X... avait également trompé la caisse par des actes positifs ; que le seul grief de licenciement autorisé ayant consisté en une faute de négligence, la partie civile, en se prévalant d'actes de complicité positifs, contestait implicitement mais nécessairement l'analyse de M. X... selon laquelle les faits objet du licenciement étaient les mêmes que ceux objet des poursuites pénales ; qu'en retenant néanmoins que l'identité des faits n'était pas contestée par la demanderesse, la chambre de l'instruction a dénaturé les écritures de cette dernière et a entaché sa décision d'une contradiction de motifs de nature à priver celle-ci des conditions essentielles de son existence légale" ;

Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'une information a été ouverte des chefs d'abus de confiance et d'escroquerie au tribunal de grande instance de Paris sur plainte de la caisse de retraite des personnels navigants de l'aéronautique civile à la suite d'opérations d'achats et de ventes de valeurs mobilières effectuées pour son compte par une société de courtage ; que M. X..., directeur du service financier de la caisse, a, après avoir été licencié, été mis en examen pour complicité d'abus de confiance et d'escroquerie puis a fait l'objet d'une ordonnance de non-lieu ; que la partie civile a interjeté appel ce cette ordonnance ;

Attendu que, pour déclarer irrecevable l'appel de la partie civile, l'arrêt énonce qu'il a été signé entre celle-ci et le mis en examen une transaction indiquant qu'il est mis un terme définitif à tous les litiges susceptibles de naître entre les parties ayant pour objet ou conséquence les griefs énoncés dans la lettre de licenciement de M. X... et précisant qu'en ce qui concerne l'instance pénale, l'accord ne saurait toutefois faire obstacle aux actions pénales qui pourraient être engagées par le ministère public et aux actions en réparation qui pourraient s'ensuivre ; que les juges en concluent que la partie civile a expressément renoncé à agir contre M. X..., y compris par la voie pénale, pour les faits visés dans la lettre de licenciement ;

Mai attendu qu'en prononçant ainsi, par des motifs contradictoires en ce qui concerne la portée de la transaction intervenue, et sans rechercher si tous les faits objet des poursuites étaient visés par la lettre de licenciement, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

Que, dès lors, la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 27 mai 2010, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Guérin conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-84041
Date de la décision : 29/03/2011
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 27 mai 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 mar. 2011, pourvoi n°10-84041


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : Me Bouthors, Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.84041
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