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29/03/2011 | FRANCE | N°10-17647

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 mars 2011, 10-17647


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 février 2010), que la société Micropole univers, spécialisée dans les services informatiques, a assigné en concurrence déloyale la société Elypsia qui exerce une activité similaire ; que parallèlement, elle a assigné en concurrence déloyale son ancien salarié, M. X..., devenu président-directeur général de la société Elypsia ; que les deux instances ont été jointes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Micropole univers fait gr

ief à l'arrêt de rejeter sa demande de communication de pièces, alors selon le moy...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 février 2010), que la société Micropole univers, spécialisée dans les services informatiques, a assigné en concurrence déloyale la société Elypsia qui exerce une activité similaire ; que parallèlement, elle a assigné en concurrence déloyale son ancien salarié, M. X..., devenu président-directeur général de la société Elypsia ; que les deux instances ont été jointes ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Micropole univers fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de communication de pièces, alors selon le moyen :
1°/ que la partie au procès, qui n'est pas tenue au secret par la loi, ne peut se prévaloir d'un empêchement légitime pour s'opposer à une demande de production de pièces ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société Micropole univers de sa demande de production de pièces dirigée contre son adversaire à l'instance, la société Elypsia, qu'il existait un empêchement légitime pour elle à produire des documents contenant des renseignements confidentiels, sans préciser si cette dernière était légalement tenue au secret, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 10 du code civil, 11, 138, 139 et 142 du code de procédure civile ;
2°/ que la demande de production de pièces formée par une partie n'est pas subordonnée à l'établissement d'indices précis ; que la cour d'appel qui, pour débouter la société Micropole univers de sa demande de production, s'est fondée sur la circonstance inopérante qu'elle n'articulait pas suffisamment d'indices précis concernant des agissements déloyaux déterminés dont la société Elypsia aurait été l'auteur, a violé l'article 138 du code de procédure civile ;
Mais attendu que c'est dans l'exercice du pouvoir laissé par la loi à sa discrétion d'ordonner ou non la production d'un élément de preuve détenu par une partie que la cour d'appel, sans être tenue de s'expliquer sur une telle demande, a statué comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société Micropole univers fait encore grief à l'arrêt de dire que les accusations de débauchage massif et de détournement de clientèle dans le cadre de pratiques de concurrence déloyale portées à l'encontre de la société Elypsia ne sont pas fondées et de la débouter ainsi de sa demande de dommages-intérêts, alors selon le moyen :
1°/ que le recrutement massif de salariés d'une entreprise concurrente, ayant pour effet, hors même toute manoeuvre déloyale, de désorganiser cette dernière, est constitutif d'un acte de concurrence déloyale ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société Micropole univers de sa demande indemnitaire au titre de la concurrence déloyale de la société Elypsia, qu'il n'était pas démontré que la migration de huit salariés de la première vers la seconde provienne d'un débauchage massif, aucun élément probant n'étant fourni sur des manoeuvres caractérisées dont cette dernière se serait rendue coupable, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'embauche, dans un laps de temps réduit, de neuf salariés de la société Micropole univers par la société Elypsia n'avait pas désorganisé la première, ce qui suffisait à caractériser un acte de concurrence déloyale de la seconde, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que le démarchage de la clientèle d'une entreprise par ses anciens salariés, au profit de la société concurrente qui les a embauchés, constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société Micropole univers de sa demande indemnitaire au titre de la concurrence déloyale de la société Elypsia, que les marchés conclus par la seconde avec trois des clients de la première l'avaient été après mise en concurrence ou appels d'offre, sans démonstration que les règles de la concurrence aient été faussées, et que, pour un quatrième client, il n'était pas établi que M. X..., ancien directeur d'agence de la société Micropole univers, ait établi un devis pour le compte de la société Elypsia lorsqu'il était encore au service de la première, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les salariés de la société Micropole univers embauchés par la société Elypsia n'avaient pas eu pour mission de démarcher les clients de leur ancien employeur, ce qui suffisait, nonobstant l'absence de détournement effectif des clients démarchés, à caractériser un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, qu'ayant relevé que le départ presque concomitant de huit salariés de la société Micropole univers comme celui de M. X... résultaient non de manoeuvres de débauchage de ces salariés par la société Elypsia mais du climat social dégradé régnant à l'époque des démissions au sein de la société Micropole univers, et retenu que cette dernière ne démontrait pas que le transfert d'une partie de sa clientèle à la société Elypsia résultait de manoeuvres déloyales commises par cette dernière, la cour d'appel, sans être tenue de procéder à des recherches inopérantes, a pu en déduire l'absence de caractère fautif des comportements dénoncés ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Micropole univers aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la société Elypsia et à M. X... la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Potier de La Varde et Buk-Lament, avocat aux Conseils pour la société Micropole univers
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

La société Micropole univers fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande de communication de pièces ;
AUX MOTIFS QU'il n'y a pas lieu d'enjoindre la S. A. ELYPSIA de produire à la S. A Micropole Univers des documents commerciaux (bons de commandes, factures, avoirs, courriers, …) concernant 7 prospects ou partenaires commerciaux et « l'ensemble des propositions de services » (offres commerciales détaillées) faites par la S. A. ELYPSIA au cours des années 2006/ 2007 à ces prospects précisément dénommés ; que d'une part, la S. A. ELYPSIA a communiqué au débat un certain nombre de pièces afférentes aux relations commerciales qu'elle a eues avec les sociétés désignées, que d'autre part, il existe un empêchement légitime pour la S. A. ELYPSIA à produire de tels documents contenant des renseignements confidentiels (« avancées techniques » et informations commerciales) qui ne peuvent être communiqués à une société concurrente ; que la S. A. Micropole univers n'articule pas suffisamment d'indices précis concernant des agissements déloyaux circonscrits, ce qui pourrait rendre admissible une demande « ciblée » de communication de pièces dans le cadre de l'administration de la preuve ;
1°) ALORS QUE la partie au procès, qui n'est pas tenue au secret par la loi, ne peut se prévaloir d'un empêchement légitime pour s'opposer à une demande de production de pièces ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société Micropole univers de sa demande de production de pièces dirigée contre son adversaire à l'instance, la société Elypsia, qu'il existait un empêchement légitime pour elle à produire des documents contenant des renseignements confidentiels, sans préciser si cette dernière était légalement tenue au secret, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 10 du code civil, 11, 138, 139 et 142 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE la demande de production de pièces formée par une partie n'est pas subordonnée à l'établissement d'indices précis ; que la cour d'appel qui, pour débouter la société Micropole univers de sa demande de production, s'est fondée sur la circonstance inopérante qu'elle n'articulait pas suffisamment d'indices précis concernant des agissements déloyaux déterminés dont la société Elypsia aurait été l'auteur, a violé l'article 138 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

La société Micropole univers fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que les accusations de débauchage massif et de détournement de clientèle dans le cadre de pratiques de concurrence déloyale portées à l'encontre de la société Elypsia n'étaient pas fondés et de l'avoir ainsi déboutée de sa demande de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE le mouvement de salariés d'une entreprise vers une autre, accompagné du transfert de clients constituent des agissements de concurrence déloyale lorsqu'ils sont le résultat de pratiques déloyales objectivement mises en oeuvre par l'entreprise qui en bénéficie ; qu'il appartient à la S. A. Micropole Univers de démontrer des agissements personnels de la S. A. ELYPSIA et de Monsieur Robert X... qui sont contraires à la loyauté devant présider à l'activité commerciale d'entreprises en situation concurrentielle ; qu'il n'est pas démontré que le migration de 8 salariés (plus Monsieur Robert X...) durant un laps de temps relativement court (l'année 2006) de la S. A. Micropole Univers au sein de la SA. ELYPSIA nouvellement créée, en février 2006 avec début d'activité le 12 janvier 2006, provient d'une pratique de « débauchage massive » conduite par la S. A. ELYPSIA ou/ et Monsieur Robert X... ; qu'aucun élément probant n'est fourni à cet égard sur des manoeuvres caractérisées dont ils se seraient rendus coupables ; que la S. A. Micropole Univers ne démontre pas que le transfert d'une partie de sa clientèle au profit de la S. A. ELYPSIA (au demeurant clientèle mobile dans le temps comme traitant ultérieurement de nouveau avec la S. A. Micropole Univers ou avec d'autres Sociétés de Services en Ingénierie Informatique) résulte de manoeuvres déloyales caractérisées ; que la S. A. Micropole Univers considère que son préjudice est constitué principalement par la perte de quatre clients destinataires d'offres de services à un prix anormalement bas (elle soutient que le détournement de ces quatre clients a permis le développement commercial très rapide de la S. A. ELYPSIA et le « décollage » de son chiffre d'affaires) ; que pour trois d'entre eux (le Ministère de l'Intérieur et de l'Aménagement du Territoire, bureau des pensions, la société Diffusion Tourisme Vacances Bleues et l'Office du Tourisme et des Congrès de Marseille) les marchés ont été conclus après mise en concurrence ou appels d'offre, sans démonstration que les règles de la concurrence ont été faussées ; qu'en ce qui concerne, le Comité Départemental du Tourisme des Bouches du Rhône, la S. A. Micropole Univers ne fait pas la preuve que Monsieur Robert X... a, début d'année 2006, alors qu'il était encore directeur de l'agence de la SA Micropole Univers à AIX en PROVENCE, fait une proposition commerciale audit Comité au nom de la S. A. ELYPSIA (proposition d'un montant de 10. 000 € ht alors qu'il en avait fait une au nom de son employeur à 14. 000 € ht) ; que cette preuve ne saurait résulter d'un bon de commande émis, le 8 février 2006, par le Comité Départemental du Tourisme des Bouches du Rhône et destiné à la SA ELYPSIA portant la mention « Devis ELYRB20060105001 », ELY pour la S. A. ELYPSIA, RB pour les initiales du rédacteur du devis Monsieur Robert X..., établi en 2006, 01 pour janvier, 05 pour le cinq du mois, 001 pour le numéro du devis (le premier de l'année et de l'activité débutante de la SA ELYPSIA) ; que ce document a été établi par le Comité Départemental du Tourisme des Bouches du Rhône et ne suffit pas à établir Monsieur Robert X... avait bien adressé auparavant un devis pour le compte de la S. A. ELYPSIA ; qu'il appartenait à la S. A. Micropole Univers de faire préciser au Comité Départemental du Tourisme des Bouches du Rhône dans quelles conditions il a été amené à faire figurer cette mention sur le bon de commande litigieux (au vu d'une proposition de service réellement adressée par Monsieur Robert X... au nom de la S. A. ELYPSIA ou par reproduction erronée de mentions figurant sur des bons de commandes adressés à la S. A. Micropole Univers pour des années antérieures …) ;
1°) ALORS QUE le recrutement massif de salariés d'une entreprise concurrente, ayant pour effet, hors même toute manoeuvre déloyale, de désorganiser cette dernière, est constitutif d'un acte de concurrence déloyale ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société Micropole univers de sa demande indemnitaire au titre de la concurrence déloyale de la société Elypsia, qu'il n'était pas démontré que la migration de huit salariés de la première vers la seconde provienne d'un débauchage massif, aucun élément probant n'étant fourni sur des manoeuvres caractérisées dont cette dernière se serait rendue coupable, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'embauche, dans un laps de temps réduit, de neuf salariés de la société Micropole univers par la société Elypsia n'avait pas désorganisé la première, ce qui suffisait à caractériser un acte de concurrence déloyale de la seconde, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°) ALORS QUE le démarchage de la clientèle d'une entreprise par ses anciens salariés, au profit de la société concurrente qui les a embauchés, constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en se bornant à relever, pour débouter la société Micropole univers de sa demande indemnitaire au titre de la concurrence déloyale de la société Elypsia, que les marchés conclus par la seconde avec trois des clients de la première l'avaient été après mise en concurrence ou appels d'offre, sans démonstration que les règles de la concurrence aient été faussées, et que, pour un quatrième client, il n'était pas établi que M. X..., ancien directeur d'agence de la société Micropole univers, ait établi un devis pour le compte de la société Elypsia lorsqu'il était encore au service de la première, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les salariés de la société Micropole univers embauchés par la société Elypsia n'avaient pas eu pour mission de démarcher les clients de leur ancien employeur, ce qui suffisait, nonobstant l'absence de détournement effectif des clients démarchés, à caractériser un acte de concurrence déloyale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-17647
Date de la décision : 29/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 février 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 mar. 2011, pourvoi n°10-17647


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.17647
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