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23/03/2011 | FRANCE | N°08-45424

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 mars 2011, 08-45424


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 4121-1 et R. 4624-21 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 23 décembre 1993 en qualité de conseillère téléphonique par la société Neckermann, aux droits de laquelle vient en dernier lieu la société Walz France ; qu'après un arrêt de travail pour maladie, la salariée a demandé le 27 février 2003 une mutation sur un autre poste en arguant de son état de santé ; qu'après avoir refusé le 12 mars un po

ste d'ouvrière emballeuse, l'employeur l'a licenciée le 25 mars 2003 pour refus d'exécute...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 4121-1 et R. 4624-21 du code du travail ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée le 23 décembre 1993 en qualité de conseillère téléphonique par la société Neckermann, aux droits de laquelle vient en dernier lieu la société Walz France ; qu'après un arrêt de travail pour maladie, la salariée a demandé le 27 février 2003 une mutation sur un autre poste en arguant de son état de santé ; qu'après avoir refusé le 12 mars un poste d'ouvrière emballeuse, l'employeur l'a licenciée le 25 mars 2003 pour refus d'exécuter son travail selon l'horaire en vigueur ;

Attendu que pour dire le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que les raisons médicales invoquées par la salariée au soutien de sa demande de mutation ou de modification de ses conditions de travail ne sont étayées d'aucune pièce justificative et qu'elle n'a pas demandé à être examinée par le médecin du travail ;

Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si la salariée, qui contestait la compatibilité de son poste avec son état de santé, n'était pas en droit de bénéficier d'une visite de reprise auprès du médecin du travail en cas d'absence de plus de vingt et un jours afin de s'assurer de sa capacité à reprendre son poste antérieur ou de réserver une suite favorable à la mutation qui lui était demandée, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté Mme X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 30 octobre 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne la société Walz France aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Walz France à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mars deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils pour Mme X...

Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR débouté Mme X... de la demande qu'elle avait formée afin d'obtenir le paiement de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du débat relatif aux motifs du licenciement ; que cette règle s'impose à l'employeur qui ne peut invoquer d'autres griefs que ceux énoncés dans la lettre de licenciement ; qu'elle s'impose également au salarié, qui s'il conteste son licenciement doit s'attacher à critiquer les motifs invoqués, même s'il est constant que les griefs doivent s'apprécier au regard de l'attitude de l'employeur ; que la lettre de licenciement du 25 mars 2003 est libellée comme suit : "Vous nous avez confirmé les termes de votre correspondance à savoir votre refus d'exécuter. votre travail dans les conditions prévues à l'heure actuelle par votre contrat au poste de conseillère téléphonique à temps plein, selon l'horaire planifié. D'aucune manière le service ne peut fonctionner selon un horaire fixe établi par conseillère téléphonique et selon une rotation prédéfinie ; vous connaissez parfaitement la gestion du temps qui est celle de l'entreprise, notamment en ce qui concerne l'accueil téléphonique de nos clients, d'autant plus que nous pratiquons au sein de l'entreprise l'annualisation du temps de travail. Votre refus de déférer à l'horaire de travail en vigueur exprimé à maintes reprises nous amène par conséquent à prononcer votre licenciement au terme d'un préavis de deux mois" ; qu'il résulte de l'échange de correspondance que par courrier du 12 mars 2003, Mme X... a indiqué qu'elle ne réintégrerait son poste qu'à la condition d'une modification de ses horaires de travail : horaires fixes de 8 heures à 12 heures et de 13 heures à 16 heures, deux samedis travaillés au maximum par mois, 35 heures hebdomadaires au maximum et plus de remplacement même occasionnel au standard ; que le salarié ne peut imposer à l'employeur aucun changement de ses conditions de travail, alors qu'il n'est pas titulaire du pouvoir de direction et se trouve sous la subordination juridique de son employeur ; qu'il en va autrement lorsque le salarié est reconnu inapte à son poste par le médecin du travail, hypothèse dans laquelle l'employeur est tenu de rechercher un reclassement au besoin par une modification des conditions de travail, ou lorsque le médecin du travail émet des réserves quant à l'aptitude physique du salarié à occuper son poste ou préconise un aménagement du poste occupé ; qu'en l'espèce, les raisons médicales invoquées par Mme X... au soutien de sa demande de mutation ou de modification de ses conditions de travail ne sont étayées d'aucune pièce justificative et qu'elle n'a pas davantage demandé à être examinée par le médecin du travail ; qu'il ne ressort pas de l'échange de correspondances que Mme X... ait transmis à son employeur le certificat médical du Dr Y..., médecin traitant de Mme X..., daté du 11 février 2003, indiquant que ''son état de santé nécessite un aménagement de ses horaires permettant au moins un jour de repos par semaine en plus du dimanche et excluant les horaires au-delà de 19 heures", de sorte qu'il ne peut être reproché à la société AMATAI SERVICES de n'avoir pas soumis la salariée à un examen médical auprès du médecin du travail ; que Mme X... ne justifie pas davantage de ce que l'horaire de travail en vigueur dans l'entreprise ne serait pas conforme aux exigences légales ou aux prévisions de l'accord d'entreprise sur l'aménagement et la réduction du temps de travail conclu avec les organisations syndicales le 23 juin 1999 ; que par ailleurs, Mme X... soutient avoir été victime d'une discrimination dans ses conditions de travail mais ne justifie pas d'une différence de traitement avec ses collègues de travail ; que plusieurs salariées (Mme Z..., Mme A..., Mme B..., Mme C...) ont décrit la mauvaise ambiance de travail régnant dans le service, ayant généré de nombreuses démissions, et ont fustigé le comportement de la responsable du service Mme D..., sans pour autant que soient caractérisés des agissements répétés de harcèlement moral ; que par ailleurs, les faits relatés de manière générique concernaient la collectivité des salariées du service sans viser particulièrement Mme X... ; qu'en toute hypothèse, une mauvaise ambiance de travail ou des horaires de travail jugés excessifs ne pouvaient autoriser Mme X... à s'affranchir de l'autorité et des directives de l'employeur et à refuser d'exécuter les horaires de travail impartis ; qu'ainsi le licenciement prononcé à raison du refus par Mme X... de respecter l'horaire de travail en vigueur au sein du service repose sur une cause réelle et sérieuse ; que le jugement déféré doit être infirmé en ce qu'il a dit le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a condamné l'employeur au paiement de dommages-intérêts ;

1. ALORS QUE l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise dont il doit assurer l'effectivité ; qu'il ne peut dès lors laisser un salarié reprendre son travail après un arrêt de travail pour maladie sans lui avoir fait passer une visite de reprise auprès du médecin du travail afin de s'assurer de son aptitude à l'emploi envisagé ; qu'en décidant que le refus de Mme X..., à l'issue de son arrêtmaladie, de reprendre son emploi aux conditions unilatéralement fixées par l'employeur justifiait son licenciement, dès lors qu'elle n'avait pas demandé à être examinée par le médecin du travail, à l'issue de son arrêt-maladie, lorsqu'elle avait demandé à son employeur de modifier ses conditions de travail dans une mesure compatible avec son état de santé, à l'issue de son arrêt-maladie, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que l'employeur avait connaissance de l'état de santé de la salariée, compte tenu de son arrêt de travail pour maladie et qu'il avait dès lors l'obligation de lui faire passer un examen médical de reprise afin de s'assurer de sa capacité à reprendre son poste antérieur ou à donner une suite favorable à sa demande de modification du contrat de travail, et qu'il ne pouvait, dans ces conditions, se prévaloir du refus de la salariée de reprendre son emploi ; qu'ainsi, elle a violé l'article L. 4121-1 du Code du travail, ensemble l'article R. 4624-21 du même code ;

2. ALORS QUE peuvent constituer un harcèlement moral des agissements ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'en se bornant à énoncer, pour exclure l'existence d'un harcèlement moral, que plusieurs salariées (Mme Z..., Mme A..., Mme B..., Mme C...) ont décrit la mauvaise ambiance de travail régnant dans le service, ayant généré de nombreuses démissions, et ont fustigé le comportement de la responsable du service Mme D... sans que Mme X... soit visée particulièrement, la Cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur le point de savoir si les faits établis n'étaient pas de nature à faire présumer un harcèlement moral au sens des articles L 1152- 1 et L 1154-1 du Code du travail ; qu'ainsi, elle a privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées ;

3. ALORS QUE l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, manque à cette obligation, lorsqu'un salarié est victime sur le lieu de travail d'agissements de harcèlement moral exercés par l'un ou l'autre de ses salariés ; qu'en décidant qu'une mauvaise ambiance de travail ou des horaires de travail jugés excessifs ne pouvaient autoriser Mme X... à s'affranchir de l'autorité et des directives de l'employeur et à refuser d'exécuter les horaires de travail impartis, la Cour d'appel a violé les articles L . 1152-1, L. 1152-4 et L. 4121 -1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-45424
Date de la décision : 23/03/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 30 octobre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 mar. 2011, pourvoi n°08-45424


Composition du Tribunal
Président : M. Trédez (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Copper-Royer, SCP Boullez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:08.45424
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