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22/03/2011 | FRANCE | N°10-85385

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 mars 2011, 10-85385


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
Mme Lucie X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 23 juin 2010, qui, pour abus de faiblesse, l'a condamnée à un an d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés

fondamentales, 34 et 66 de la Constitution, 223-15-2 du code pénal, 63, 63-1, 63-4, 459, 591 ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

-
Mme Lucie X...,

contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 5e chambre, en date du 23 juin 2010, qui, pour abus de faiblesse, l'a condamnée à un an d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 34 et 66 de la Constitution, 223-15-2 du code pénal, 63, 63-1, 63-4, 459, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Mme X... coupable du délit d'abus frauduleux de l'état de faiblesse de Mme Y..., et l'a condamnée à la peine d'un an d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans avec obligation d'indemniser la victime ;

" aux motifs propres que c'est par des motifs exacts et fondés en droit que la cour adopte expressément, que les premiers juges ont retenu la culpabilité du prévenu ; que la cour ajoutera qu'il ressort en effet de la procédure que M. Z..., médecin traitant de Mme Y..., a constaté que depuis 2002, date à laquelle il avait commencé à suivre cette dernière, celle-ci présentait une perte d'autonomie intellectuelle progressive caractérisée par des épisodes de confusion de plus en plus rapprochés avec troubles du jugement et manque de discernement et, parallèlement, un état anxio-dépressif sévère se manifestant par des états de grande panique à l'idée de se trouver seule ou isolée ; que, lors de son audition, il précisait qu'il avait été à l'origine de la mesure de protection en raison de cette perte d'autonomie et que Mme Y... avait été placée dans une maison de retraite le 21 juillet 2005 ; qu'il rapportait que parmi ses angoisses figurait la peur de ne plus avoir d'argent : « c'était sa grosse hantise » dira-t-il ; que la procédure de protection judiciaire a été ouverte sur requête des frères de Mme Y... du 7 septembre 2004, auprès audition de Mme Y..., le 3 septembre 2004, et en l'état d'un certificat médical délivré le 18 mai 2005 ; que le juge a retenu dans ses motifs « qu'il est établi par l'ensemble du dossier et plus spécialement par les éléments médicaux que Mme Y... a besoin d'être conseillée ou contrôlée dans les actes de la vie civile ; qu'en outre, elle n'apparaît pas apte à percevoir seule ses revenus et à les affecter à ses besoins » ; qu'il résulte donc de ces éléments que Mme Y... présentait dans les temps visés à la prévention de par son état médical, psychique et de sa solitude affective, un état de particulière vulnérabilité ; qu'il ressort du dossier que c'est le banquier de Mme Y..., constatant la baisse inquiétante des liquidités de sa cliente, qui a alerté la famille ; que, pour faire face à ses difficultés financières, Mme Y... a dû vendre peu à peu ses biens et notamment l'appartement dans lequel elle vivait dont la vente, conclue le 10 novembre 2004, l'amenait à vivre durant trois mois à l'hôtel ; qu'il résulte donc de l'ensemble de ces éléments que Mme X... a abusé de la situation de faiblesse de Mme Y..., en conduisant cette dernière à lui remettre, en sus de son salaire, d'importantes sommes d'argent retirées à la banque par la vieille dame, toujours accompagnée, conduisant celle-ci à se déposséder de ses biens pour faire face à ses obligations financières ; que la présence quotidienne de Mme X... aux cotés de Mme Y... lui donnait une parfaite connaissance de son état de faiblesse et de ses angoisses, telles que décrites par son médecin traitant, et notamment de la peur d'être privée d'argent ; que cette présence quotidienne lui permettait également d'exercer à son égard une emprise et un contrôle parfaitement décrits par l'ancien chauffeur de Mme Y..., M. B..., qui lui permettaient ainsi d'obtenir de Mme Y... les versements d'espèces en question et donc abuser de son état de faiblesse ; que la prévenue ne peut valablement opposer à cela sa bonne foi et des compensations de salaires après avoir reconnu au cours de l'enquête le principe de sa responsabilité pénale en des termes qui corroborent les éléments objectifs du dossier ;

" et aux motifs adoptés que la prévenue était liée par un contrat de travail avec la partie civile à hauteur de 2 182, 67 euros brut ; que cette dernière avait la qualité de gouvernante, étant précisé que la partie civile avait aussi à son service deux personnes employées à titre de chauffeur cuisinier et de femme de ménage ; qu'ainsi, ses fonctions consistaient à tenir compagnie à la partie civile que la prévenue a reconnue à l'audience avoir perçu un salaire pendant vingt et un mois à hauteur de six à sept mille euros ; qu'elle a indiqué qu'une partie de son salaire était versé, et ce de façon non déclarée, par la partie civile : (3 500 euros environ mensuels) ; qu'il s'agit uniquement des déclarations de la prévenue, laquelle ne justifie pas de l'accroissement de ses horaires et de ses tâches ; que cette dernière était rémunérée de façon démesurée par rapport à la réalité de son activité, laquelle était exempte de toute tâche ménagère, que, par ailleurs, Mme X... n'avait aucune qualification médicale particulière ; que, de surcroît, la prévenue a reconnu les faits durant l'enquête préliminaire même si à l'audience pénale, elle a modifié son système de défense ; qu'ainsi la prévenue a abusé de la prodigalité de son employeur, laquelle disposait sur ses comptes bancaires d'une fortune considérable (20 millions de dollars) ; que sa propriété mobilière a été largement obérée dans la mesure où à l'ouverture de l'enquête, les comptes bancaires de celle-ci étaient créditeurs de la somme de 1 200 euros ; qu'en conséquence elle devra être condamnée à un an d'emprisonnement, avec sursis et mise à l'épreuve pendant trois ans ;

" 1) alors que tout jugement doit contenir les motifs propres à justifier sa décision ; que la contradiction de motifs équivaut à leur absence ; qu'en l'espèce, pour retenir que dans les temps visés à la prévention, Mme Y... présentait un état de particulière vulnérabilité, la cour d'appel a affirmé qu'il ressortait du dossier de la procédure que M. Z..., médecin traitant de cette dernière, avait constaté que, depuis 2002, celle-ci présentait un celle-ci présentait une perte d'autonomie intellectuelle progressive caractérisée par des épisodes de confusion de plus en plus rapprochés avec troubles du jugement et manque de discernement, et parallèlement, un état anxio-dépressif sévère se manifestant par des états de grande panique à l'idée de se trouver seule ou isolée ; que, cependant, il ressort, au contraire, du procès-verbal d'audition du docteur Z... que la perte d'autonomie sévère de Mme Y... datait seulement du début de l'année 2005, ce qui avait conduit le médecin à demander le placement sous curatelle de sa patiente en juillet 2005, et que c'est à cette période que celle-ci avait manifesté une perte d'autonomie allant crescendo, des troubles psychologiques (crises d'angoisse, crises de paniques) et des épisodes confusionnels ; que dès lors, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;

" 2) alors qu'en se fondant sur les prétendus aveux passés par la prévenue au cours d'une mesure de garde à vue ne permettant pas, en l'état de l'article 63-4 du code de procédure pénale, à la personne interrogée, alors qu'elle est retenue contre sa volonté, de bénéficier de l'assistance effective d'un avocat, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 34 et 66 de la Constitution ;

" 3) alors que les arrêts sont nuls quand ils ne contiennent pas les motifs propres à justifier le dispositif ; qu'il en est de même lorsqu'il a été omis de répondre à un chef péremptoire de conclusions ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel, Mme X... soutenait que, du 1er novembre 2003 au 31 août 2005, elle avait travaillé au service de Mme Y... de jour comme de nuit, sans jamais bénéficier d'aucun jour de repos ni de congés payés, à raison de 98 heures par semaine de travail effectif et de 70 heures par semaine de présence responsable, ce qui justifiait amplement la rémunération qu'elle avait perçue au regard de la législation du travail ; qu'elle offrait en preuve cinq attestations venant corroborer ses allégations, lesquelles, établies postérieurement au jugement de première instance, n'avaient jamais été examinées ; que ces attestations étaient elles-mêmes corroborées par le procès-verbal d'audition du docteur Z... du 20 novembre 2007 affirmant que « Mme X... était tout le temps au service de Mme Y... », et par celui de Mme C..., désignée comme curatrice de Mme Y..., en date du 21 mars 2006, qualifiant la prévenue « d'auxiliaire de vie 24/ 24 » ; que, dès lors, en omettant de rechercher, comme l'y invitaient les conclusions de la prévenue, si les sommes perçues par Mme X... n'était pas la juste contrepartie, au regard de la législation du travail, de la prestation de travail accomplie par elle au service de Mme Y..., la cour d'appel a méconnu les exigences de motivation édictées par les articles 459 et 593 du code de procédure pénale " ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré la prévenue coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche et qui, pour le surplus, se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 3 000 euros la somme que Mme Lucie X... devra payer à Mme Claude C...en qualité de tutrice de Mme Renata D..., épouse Y..., au titre de l'article 618-1 du codede procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Roth conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Randouin ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 10-85385
Date de la décision : 22/03/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 23 juin 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 mar. 2011, pourvoi n°10-85385


Composition du Tribunal
Président : M. Louvel (président)
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP de Chaisemartin et Courjon

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.85385
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