LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article L. 132-8 du code de commerce ;
Attendu, selon le jugement attaqué, rendu en dernier ressort, que la société Distribution casino France (la société Distribution casino) a confié des livraisons de palettes à la société Libellule, qui a sous-traité ces transports à la société X Trans solution transport (la société Xtrans) ; que cette dernière, n'ayant pas été payée par la société Libellule mise en redressement judiciaire, a demandé le règlement de sa facture à la société Distribution casino contre laquelle elle a obtenu une injonction de payer ;
Attendu que pour rejeter l'opposition formée par la société Distribution casino, rejeter toutes ses demandes et la condamner à payer à la société Xtrans la somme de 1 599,84 euros, le jugement retient que sur la lettre de voiture est explicitement indiqué que le destinataire de la livraison est «Casino» et que la société Distribution casino ne peut sérieusement contester sa qualité de destinataire des marchandises livrées par la société Xtrans ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, dès lors qu'il était soutenu que la société Easydis, qui a apposé son timbre sur les lettres de voiture produites, était le destinataire, si celle-ci avait reçu et accepté la marchandise et si, dans ce cas, elle avait indiqué agir comme mandataire de la société Distribution casino, le tribunal n'a pas légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 5 mars 2010, entre les parties, par le tribunal de commerce de Saint-Etienne ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de commerce de Lyon ;
Condamne la société X Trans solution transport aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Distibution casino France ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour la société Distribution casino France
IL EST FAIT GRIEF au jugement attaqué, D'AVOIR rejeté l'opposition formée par la société DISTRIBUTION CASINO, débouté celle-ci de toutes ses demandes, et en conséquence, condamné la société DISTRIBUTION CASINO à payer à la société XTRANS la somme de 1.599,84 €, outre les intérêts au taux légal à compter du 27 septembre 2007 ;
AUX MOTIFS QUE la société LIBELLULE ayant été déclarée en règlement judiciaire, la société XTRANS n'a pu être payée des transports qu'elle a effectués ; que sur la lettre de voiture est explicitement indiqué que le destinataire de la livraison est « CASINO » ; que dès lors, la société DISTRIBUTION CASINO ne peut sérieusement contester sa qualité de destinataire des marchandises livrées par la société XTRANS ; que, vu la loi Gayssot et l'article L.132-8 du Code de commerce, l'action en paiement de la société XTRANS à l'encontre de la société DISTRIBUTION CASINO apparaît recevable et bien fondée ; que l'opposition formée par la société DISTRIBUTION CASINO sera donc rejetée et l'ordonnance d'injonction de payer confirmée en toutes ses dispositions ;
1°) ALORS QUE l'ordonnance n° 70543 a été rendue au vu de lettres de voiture qui indiquaient toutes que le chargement serait effectué par la société LIBELLULE, désignée comme expéditeur, et qui portaient toutes au bas, à l'emplacement réservé au destinataire, le cachet de la société EASYDIS, sise à REVENTIN VAUGRIS 3812, et non le nom de la société DISTRIBUTION CASINO ; que la lettre de voiture du 7 février 2007 précisait en outre que le lieu de déchargement était « EASYDIS VIENNE 38 » ; que la lettre de voiture du 16 février 2007 signée par la société EASYDIS le 19 février suivant portait également au premier emplacement «destinataire», la mention « CASINO 38 REVENTIN » ; que la lettre de voiture du 2 février 2007 mentionnait à la rubrique « déchargement » : « CASINO EASYDIS … Ville : REVENTIN – Dpt : 38 … VAUGRIS » ; qu'enfin, la lettre de voiture du 27 février 2007 précisait que le déchargement devait être effectué chez « EASYDIS … Reventin-Vaugris- 38 Vienne » ; que ces documents mentionnaient donc clairement les entrepôts de la société EASYDIS à la fois comme destinataire et lieu du déchargement, seule l'enseigne « CASINO » apparaissant tout au plus dans deux des lettres de voiture susvisées, encore qu'alors associée à l'adresse et/ou au nom de la société EASYDIS, par ailleurs signataire de toutes les lettres de voiture ; que dès lors, en déclarant, pour estimer fondée l'action en paiement de la société XTRANS à l'encontre de la société DISTRIBUTION CASINO, qu'il était, « sur la lettre de voiture … explicitement indiqué que le destinataire de la livraison était "CASINO" », de sorte que la société DISTRIBUTION CASINO ne pouvait sérieusement contester sa qualité de destinataire des marchandises livrées par la société XTRANS, le Tribunal a dénaturé les lettres de voitures versées aux débats, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2°) ALORS en toute hypothèse QUE , même s'il ne figure pas en qualité de destinataire sur la lettre de voiture, celui qui reçoit la marchandise et l'accepte sans indiquer agir pour le compte d'un mandant, est garant du paiement du prix du transport envers le voiturier ; qu'en l'espèce, toutes les lettres de voiture portaient au bas, à l'emplacement réservé au « destinataire », le cachet de la société EASYDIS, sise à REVENTIN VAUGRIS 3812 ; que dès lors, en condamnant au paiement du prix du transport la société DISTRIBUTION CASINO du fait qu'elle « ne pouvait sérieusement contester sa qualité de destinataire des marchandises livrées par la société XTRANS », et non la société dont le cachet figurait sur les lettres de voiture et qui avait reçu la marchandise, sans constater qu'en recevant et en acceptant la marchandise, celle-ci avait indiqué agir comme mandataire de la société DISTRIBUTION CASINO, le Tribunal a violé l'article L.132-8 du Code de commerce.