LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 3 novembre 2001, la société CMA-CGM a établi un connaissement à Hambourg (Allemagne) pour le transport de caisses de vitrages entre Jakarta (Indonésie) et Conakry (Guinée) ; que la marchandise a d'abord été prise en charge par la société Gold Star Line ltd (la société Gold Star) entre Jakarta et Abidjan (Côte-d'Ivoire) à bord du navire "Colombo Star" ; que, selon connaissement émis par la société Torm a/s Dampsklbskabet Torm (la société Torm), mentionnant comme chargeur la société Getma pour le compte de la société CMA-CGM, le transport a ensuite été effectué entre Abidjan et Conakry à bord du navire "Torm Aukse" ; que la marchandise ayant été débarquée à destination le 16 janvier 2002, des dégâts ont été constatés lors de sa prise en charge par la société ACC, destinataire, le 25 suivant ; qu'ayant réglé une certaine somme à la société ACC, la société Winterthur Swiss insurance company (la société Winterthur), aux droits de laquelle vient la société Axa assurances, a assigné en dommages-intérêts la société CMA-CGM, laquelle a appelé en garantie la société Gold Star par assignations des 12 septembre 2003 et 27 septembre 2004 et la société Torm, par assignation du 12 septembre 2003 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société CMA-CGM fait grief à l'arrêt d'avoir infirmé le jugement du 9 septembre 2005 pour avoir dit irrecevable l'action de la société Winterthur à l'encontre de la société CMA-CGM, constaté la recevabilité de cette action, et condamné la société CMA-CGM, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges du fond doivent rechercher si l'assureur a effectué un paiement correspondant réellement à l'exécution d'une obligation découlant du contrat d'assurance, ce qui implique la production de la police d'assurance en son entier ; que, dans ses écritures d'appel, la société CMA-CGM a fait valoir que les conditions écrites comportaient la mention « annexées et faisant parties du contrat d'assurance maritime n° 2.540.498 », ce dont elle déduisait que cette mention est bien la preuve que ce document n'est pas la police et soutenait que cette police n'a toujours pas été communiquée par la société Winterthur ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur le défaut de production par la société Winterthur de la police n° 2.540.498, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 172-29 du code des assurances ;
2°/ que les juges du fond doivent rechercher si l'assureur a effectué un paiement correspondant réellement à l'exécution d'une obligation découlant du contrat d'assurance ; que, dans ses écritures d'appel, la société CMA-CGM a fait valoir que la faute du chargeur est une cause d'exclusion de la police et invoquait les chefs de motivation du jugement par lesquels les premiers juges avaient jugé qu'« il est pour le moins surprenant que la compagnie Winterthur ait réglé le sinistre sans sourciller et sans ordonner un complément d'expertise alors que l'insuffisance est un motif d'exclusion des conditions générales de la police GCMI 1988 et que dès lors le paiement peut s'assimiler à un geste commercial plutôt qu'à une obligation contractuelle » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si ladite clause d'exclusion n'était pas de nature à exclure que l'indemnité d'assurance ait été payée en application du contrat d'assurance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 172-29 du code des assurances ;
3°/ que les juges du fond doivent rechercher si l'assureur a effectué un paiement correspondant réellement à l'exécution d'une obligation découlant du contrat d'assurance ; que, dans ses écritures d'appel, la société CMA-CGM a soutenu que l'assureur avait allégué devant le tribunal pour expliquer la différence entre le montant de la subrogation et celui réellement payé, que le courtier avait compensé avec des primes que l'assuré lui devait et que le tribunal a correctement souligné qu'il n'existe aucune preuve que la police était bien en vigueur et non résiliée au moment du sinistre justement pour défaut de paiement de primes et que rien ne prouve que l'assureur n'ait pas voulu faire un geste commercial en remettant en vigueur une police résiliée du fait du paiement de primes par compensation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur ce chef de conclusions de nature à établir que le paiement de l'indemnité d'assurance a procédé d'un geste commercial, sans que l'assureur ait été obligé à paiement du fait de la résiliation de la police, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 172-29 du code des assurances ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que la police n° 2.540.498 portait l'en-tête d'un courtier d'assurances mais mentionnait clairement qu'était assureur la société Winterthur, la cour d'appel, appréciant souverainement la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a considéré que la police n° 2.540.498 avait été produite ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt constate que le rapport d'expertise de la société Cetex précise "À notre avis, les avaries consistant en des caisses et des feuilles de vitres cassées, sont consécutives à des chocs ou manipulations brutales survenus au cours du transport maritime et/ou durant les nombreuses opérations de manutention et de transbordement" ; que l'arrêt relève encore que le rapport d'expertise de la société TTS mentionne comme "cause probable des dommages" des arrimage et calage défectueux, sans autre développement et que cette probabilité n'est pas une certitude d'une faute du chargeur ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations desquelles il résultait que la faute du chargeur n'était pas établie, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, enfin, que l'arrêt retient que la police, valable du 1er janvier au 31 décembre 1998, a été renouvelée chaque année jusqu'au sinistre et, que l'assureur a établi un certificat d'assurance au porteur six jours après l'émission du connaissement de la société CMA-CGM ; qu'ayant ainsi fait ressortir que la police n'était pas résiliée au moment du sinistre, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses trois premières branches :
Attendu que la société CMA-CGM fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la société Winterthur l'équivalent de 91.340 DTS en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2002, alors, selon le moyen :
1°/ que la clause de livraison sous-palan a pour effet que la livraison est accomplie dès la fin du déchargement et non pas lorsque le destinataire a appréhendé matériellement la marchandise ou l'a retirée du quai de déchargement ; qu'en retenant néanmoins que la responsabilité de ce transporteur cesse lors de la livraison sous palan, c'est-à-dire de l'appréhension matérielle des marchandises par le destinataire, laquelle est intervenue le 25 janvier 2002, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ qu'aux termes de l'article 3-6 de la Convention de Bruxelles du 24 août 1924, à moins qu'un avis des pertes ou dommages et de la nature générale de ces pertes ou dommages ne soit donné par écrit au transporteur ou à son agent au port de déchargement, avant ou au moment de l'enlèvement des marchandises, et de leur remise sous la garde de la personne ayant droit à la délivrance sous l'empire du contrat de transport, cet enlèvement constituera, jusqu'à preuve contraire, une présomption que les marchandises ont été délivrées par le transporteur telles qu'elles sont décrites au connaissement ; que, si les pertes ou dommages ne sont pas apparents, l'avis doit être donné dans les trois jours de la délivrance ; que, dans ses écritures d'appel, la société CMA-CGM rappelait que le connaissement litigieux stipule une clause de livraison sous palan en sorte que sa responsabilité s'arrêtait à la livraison sous palan au port de déchargement le 16 janvier 2002 et que, à défaut de réserves écrites qui lui auraient été adressées au moment de la livraison intervenue le 16 janvier 2002 ou dans les trois jours qui ont suivi, le transporteur maritime bénéficie d'une présomption de livraison conforme au connaissement ; que la cour d'appel a constaté que la marchandise a été débarquée à destination le 16 janvier 2002 ; qu'en retenant néanmoins que la responsabilité de ce transporteur cesse lors de la livraison sous palan, c'est-à-dire de l'appréhension matérielle des marchandises par le destinataire, laquelle est intervenue le 25 janvier 2002, et en se fondant sur une lettre de réserves du 25 janvier 2002, et donc émise plus de trois jours après la livraison sous palan, la cour d'appel a violé l'article 3-6 de la Convention internationale de Bruxelles du 25 août 1924 ;
3°/ que, dans son rapport, l'expert TTS a conclu : « We believe that the stowage of cargo inside the containers was not properly done », soit, suivant la traduction rapportée par la société CMA-CGM : « Nous pensons que l'arrimage de la cargaison à l'intérieur des conteneurs ne fut pas correctement effectué » ; qu'en retenant néanmoins, pour exclure la faute du chargeur, que le rapport d'expertise de TTS mentionne comme "cause probable des dommages" des arrimage et calage défectueux, mais sans autre développement, cette probabilité n'étant pas une certitude d'une faute du chargeur qui seule peut exonérer le transporteur de sa présomption de responsabilité, la cour d'appel, qui a dénaturé le rapport d'expertise, a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'absence des réserves écrites ou du constat contradictoire de l'état de la marchandise visés à l'article 3.6 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, a pour seul résultat d'inverser la charge de la preuve en obligeant l'ayant droit à la marchandise à établir l'existence des dommages au moment de la livraison ; que l'arrêt relève que le rapport d'expertise de la société Cetex précise que "A notre avis, les avaries consistant en des caisses et des feuilles de vitres cassées, sont consécutives à des chocs ou manipulations brutales survenues au cours du transport maritime et/ou durant les nombreuses opérations de manutention et de transbordement" ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, desquelles il résultait que les avaries étaient survenues avant la livraison sous palan, la cour d'appel, qui n'a pas dénaturé le rapport d'expertise TTS, a pu retenir que la preuve contraire à la présomption simple de délivrance conforme étant rapportée, la responsabilité du transporteur était engagée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Attendu que la société CMA-CGM fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action en garantie engagée par elle à l'encontre de la société Torm et de la société Gold Star, alors, selon le moyen, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que la clause paramount stipulée au connaissement émis par la société Torm vise la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 as amended et donc la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée par les protocoles du 23 février 1968 et du 21 décembre 1979 ; qu'en décidant cependant de faire application de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 originelle, pour se prononcer sur le délai d'exercice par la société CMA-CGM de son action récursoire à l'encontre de la société Torm, la cour d'appel, qui a dénaturé la clause paramount stipulée au connaissement, a violé l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que la société CMA-CGM ayant souligné, devant la cour d'appel, que la clause était ambiguë ou que la société Torm donnait une traduction imprécise de la clause litigieuse rédigée en anglais, le moyen qui invoque une dénaturation de celle-ci est irrecevable ;
Mais sur le deuxième moyen, pris en sa cinquième branche :
Vu le principe de réparation intégrale du préjudice ;
Attendu que pour condamner la société CMA-CGM à payer à la société Winterthur l'équivalent de 91 340 DTS en principal avec intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2002, l'arrêt, après avoir retenu que le dommage subi consiste en 3 762 vitres sur les 5 112 transportées, soit 73,59 % de la marchandise, retient une limitation de responsabilité de 91 340 DTS, soit 73,59 % des 62 060 kilogrammes de la marchandise multipliés par 2 DTS par kilogramme ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans vérifier si cette somme n'excédait pas le dommage subi par la société Winterthur, soit le montant de l'indemnité d'assurance équivalant à 40 925,70 dollars US, la cour d'appel a violé le principe susvisé ;
Sur le troisième moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 3.6 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 pour l'unification de certaines règles en matière de connaissement, dans sa version originelle applicable en la cause ;
Attendu que pour déclarer prescrite l'action en garantie engagée par la société CMA-CGM à l'encontre de la société Torm, l'arrêt retient que la Convention de Bruxelles originelle ne prévoit pas de délai supplémentaire pour l'exercice des actions récursoires et que la loi française n'est pas applicable s'agissant d'un transport international ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que dans le silence de la Convention de Bruxelles originelle, il lui appartenait de rechercher la loi applicable à la prescription de l'action récursoire, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le quatrième moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 114 du code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer prescrite l'action en garantie engagée par la société CMA-CGM à l'encontre de la société Gold Star, l'arrêt retient que l'assignation tentée à l'encontre de cette dernière société n'a pas pu produire d'effet car elle n'était pas régulière, puisqu'elle indiquait comme pays de destination "République de Chine" alors que sa véritable dénomination est "République Populaire de Chine" ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans constater que l'irrégularité retenue avait causé un grief à la société Gold Star, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a infirmé le jugement du 9 septembre 2005 pour avoir dit irrecevable l'action de la société Winterthur à l'encontre de la société CMA-CGM, et constaté la recevabilité de cette action, l'arrêt rendu le 28 mai 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Dit que les entiers dépens seront supportés par la société CMA-CGM ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par Mme le conseiller doyen faisant fonction de président en l'audience publique du huit mars deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Le Prado, avocat aux Conseils pour la société CMA-CGM.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR infirmé le jugement du 9 septembre 2005 pour avoir dit irrecevable l'action de la société WINTERTHUR à rencontre de la société CMA-CGM, constaté la recevabilité de cette action, et condamné la société CMA-CGM ;
AUX MOTIFS QUE « A.C.C. acheteur de la marchandise transportée a été indemnisé par la société WINTERTHUR, et l'indépendance du contrat de vente et de celui de transport dispense la Cour de rechercher si A.C.C. a payé cette marchandise ; que, surabondamment ce paiement est d'ailleurs acquis car dans l'hypothèse inverse aucune indemnité n'aurait été versée ; qu'à compter du 10 juillet 1998 la société COTA a souscrit auprès de la société WINTERTHUR et par l'intermédiaire du courtier EDMOND Y... ET FILS une police n° 2.540.498 qui couvre notamment les dommages causés aux articles en verre, valable, du 1er janvier au 31 décembre mais qui a été renouvelée chaque année jusqu'au sinistre puisque cet assureur a établi un certificat d'assurance au porteur 6 jours après l'émission du connaissement de la S.A. CMA-CGM ; que cette police a pour en-tête ce courtier, mais mentionne clairement qu'est assureur la société WINTERTHUR contrairement à ce que prétend la S.A. CMA-CGM ; que le 9 novembre 2001 la société COTA a demandé que soit garanti le transport litigieux à destination d'A.C.C, qui bénéficie donc de la police précitée ; que le courrier du courtier de la société WINTERTHUR du 5 août 2002, comme l'acte de subrogation signé le lendemain par A.C.C., mentionnent le numéro de police ci-dessus, les deux navires ayant transporté la marchandise, le numéro (KTJ/035057) du connaissement de la S.A. CMA-CGM et sa date (3 novembre 2001), les 3 conteneurs de vitrages et une indemnité de 40.925,70 USD ; que cette subrogation est parfaite puisque A.C.C. précise qu'en considération de son indemnisation ses droits sont cédés a la société WINTERTHUR ; que la somme a été versée par virement bancaire du 21 août 2002 a hauteur de 28.741,40 USD, et la différence est à juste titre expliquée par la société WINTERTHUR comme correspondant au montant des primes dues par A.C.C. et compensées ; que cet assureur a donc payé A.C.C. en exécution de la police n° 2 510 498 ce qui caractérise la subrogation légale et conduira la Cour a infirmer le jugement qui a dit irrecevable l'action de la société WINTERTHUR à l'encontre de la S.A. CMA-CGM » ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE les juges du fond doivent rechercher si l'assureur a effectué un paiement correspondant réellement à l'exécution d'une obligation découlant du contrat d'assurance, ce qui implique la production de la police d'assurance en son entier ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 3), la société CMA-CGM a fait valoir que les conditions écrites comportaient la mention « annexées et faisant parties du contrat d'assurance maritime n° 2.540.498 », ce dont elle déduisait que cette mention est bien la preuve que ce document n'est pas la police et soutenait que cette police n'a toujours pas été communiquée par WINTERTHUR ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur le défaut de production par la société WINTERTHUR de la police n° 2.540.498, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 172-29 du Code des assurances ;
2°/ ALORS, d'autre part, QUE les juges du fond doivent rechercher si l'assureur a effectué un paiement correspondant réellement à l'exécution d'une obligation découlant du contrat d'assurance ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 4) la société CMA-CGM a fait valoir que la faute du chargeur est une cause d'exclusion de la police et invoquait les chefs de motivation du jugement par lesquels les premiers juges avaient jugé qu'« il est pour le moins surprenant que la compagnie WINTERTHUR ait réglé le sinistre sans sourciller et sans ordonner un complément d'expertise alors que l'insuffisance est un motif d'exclusion des conditions générales de la police GCMI 1988 et que dès lors le paiement peut s'assimiler à un geste commercial plutôt qu'à une obligation contractuelle » ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher si ladite clause d'exclusion n'était pas de nature à exclure que l'indemnité d'assurance ait été payée en application du contrat d'assurance, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 172-29 du Code des assurances ;
3°/ ALORS, de troisième part, QUE les juges du fond doivent rechercher si l'assureur a effectué un paiement correspondant réellement à l'exécution d'une obligation découlant du contrat d'assurance ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 5), la société CMA-CGM a soutenu que l'assureur avait allégué devant le Tribunal pour expliquer la différence entre le montant de la subrogation et celui réellement payé, que le courtier avait compensé avec des primes que l'assuré lui devait et que le Tribunal a correctement souligné qu'il n'existe aucune preuve que la police était bien en vigueur et non résiliée au moment du sinistre justement pour défaut de paiement de primes et que rien ne prouve que l'assureur n'ait pas voulu faire un geste commercial en remettant en vigueur une police résiliée du fait du paiement de primes par compensation ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur ce chef de conclusions de nature à établir que le paiement de l'indemnité d'assurance a procédé d'un geste commercial, sans que l'assureur ait été obligé à paiement du fait de la résiliation de la police, la Cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 172-29 du Code des assurances.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR condamné la société CMA-CGM à payer à la société WINTERTHUR l'équivalent de 91.340 DTS en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 30 décembre 2002 ;
AUX MOTIFS QUE « la SA CMA-CGM, parce qu'elle a émis le connaissement concrétisant le transport litigieux, a vis-à-vis de la société WINTERTHUR la qualité de transporteur maritime même si elle n'a effectué aucun transport effectif, quitte à se retourner ensuite contre les deux transporteurs réels successifs qu'elle a choisis ; que la responsabilité de ce transporteur cesse lors de la livraison sous palan c'est-à-dire de l'appréhension matérielle des marchandises par le destinataire, laquelle est intervenue le 25 janvier 2002 ; que le même jour A.C.C. a écrit une lettre à la société GETMA pour compte de la SA CMA-CGM, en se plaignant de vitres cassées, document qui est équivalent à une lettre de réserves ; qu'il est exact que ce transporteur n'a pas été convoqué aux 2 expertises, mais ces dernières font partie des pièces communiquées et soumises à la discussion des parties, ce qui permet à la Cour de les retenir ; que le rapport d'expertise de CETEX précise "À notre avis, les avaries consistant en des caisses et dès feuilles de vitres cassées, sont consécutives à des chocs ou manipulations brutales survenues au cours du transport maritime et/ou durant les nombreuses opérations de manutention et de transbordement" ; que de son côté le rapport d'expertise de TTS mentionne comme « cause probable des dommages » des arrimage et calage défectueux, mais sans autre développement, cette probabilité n'est pas une certitude d'une faute du chargeur qui seule peut exonérer le transporteur de sa présomption de responsabilité ; que la S.A. CMA-CGM sera en conséquence condamnée à indemniser le dommage subi par la marchandise c'est-à-dire 3762 vitres sur les 5112 transportées soit 73,59 %, la limitation de responsabilité est de 2 DTS par kilo, soit pour 73,59 % des 62060 kg c'est-à-dire 45670 kg un montant de 91.340 DTS ; que le point de départ des intérêts au taux légal sera non le jour de la subrogation, mais celui de la réclamation soit le 30 décembre 2002 » ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE , la clause de livraison sous-palan a pour effet que la livraison est accomplie dès la fin du déchargement et non pas lorsque le destinataire a appréhendé matériellement la marchandise ou l'a retirée du quai de déchargement ; qu'en retenant néanmoins que la responsabilité de ce transporteur cesse lors de la livraison sous palan, c'est-à-dire de l'appréhension matérielle des marchandises par le destinataire, laquelle est intervenue le 25 janvier 2002, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
2°/ ALORS, d'autre part, QU'aux termes de l'article 3-6 de la convention de Bruxelles du 24 août 1924, à moins qu'un avis des pertes ou dommages et de la nature générale de ces pertes ou dommages ne soit donné par écrit au transporteur ou à son agent au port de déchargement, avant ou au moment de l'enlèvement des marchandises, et de leur remise sous la garde de la personne ayant droit à la délivrance sous l'empire du contrat de transport, cet enlèvement constituera, jusqu'à preuve contraire, une présomption que les marchandises ont été délivrées par le transporteur telles qu'elles sont décrites au connaissement ; que, si les pertes ou dommages ne sont pas apparents, l'avis doit être donné dans les trois jours de la délivrance ; que, dans ses écritures d'appel (concl., p. 7-8), la société CMA-CGM rappelait que le connaissement litigieux stipule une clause de livraison sous palan en sorte que sa responsabilité s'arrêtait à la livraison sous palan au port de déchargement le 16 janvier 2002 et que, à défaut de réserves écrites qui lui auraient été adressées au moment de la livraison intervenue le 16 janvier 2002 ou dans les trois jours qui ont suivi, le transporteur maritime bénéficie d'une présomption de livraison conforme au connaissement ; que la Cour d'appel a constaté que la marchandise a été débarquée à destination le 16 janvier 2002 (arrêt, p. 3) ; qu'en retenant néanmoins que la responsabilité de ce transporteur cesse lors de la livraison sous palan, c'est-à-dire de l'appréhension matérielle des marchandises par le destinataire, laquelle est intervenue le 25 janvier 2002, et en se fondant sur une lettre de réserves du 25 janvier 2002, et donc émise plus de trois jours après la livraison sous palan, la Cour d'appel a violé l'article 3-6 de la Convention internationale de Bruxelles du 25 août 1924 ;
3°/ ALORS, encore, QUE (subsidiaire) dans son rapport, l'expert TTS a conclu : « We believe that the stowage of cargo inside the containers was not properly done », soit, suivant la traduction rapportée par la société CMA-CGM : « nous pensons que l'arrimage de la cargaison à l'intérieur des conteneurs ne fut pas correctement effectué » (concl., p. 9) ; qu'en retenant néanmoins, pour exclure la faute du chargeur, que le rapport d'expertise de TTS mentionne comme "cause probable des dommages" des arrimage et calage défectueux, mais sans autre développement, cette probabilité n'étant pas une certitude d'une faute du chargeur qui seule peut exonérer le transporteur de sa présomption de responsabilité, la Cour d'appel, qui a dénaturé le rapport d'expertise, a violé l'article 1134 du Code civil ;
4°/ ALORS, aussi, QUE (subsidiaire), dans ses écritures d'appel (concl., p. 11), la société CMA-CGM avait invoqué l'application de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 dans sa version originelle, en vue du calcul de sa limitation de responsabilité, sur la base de 27 caisses endommagées, multiplié par 823,96 DTS, équivalant à 100 livres sterling-or ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur l'application de la Convention de Bruxelles originelle revendiquée par la société CMA-CGM, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
5°/ ALORS, enfin, QUE (très subsidiaire), le transporteur maritime ne saurait être condamné au-delà du dommage réellement subi par l'ayant droit aux marchandises ; qu'en condamnant cependant la société CMA-CGM au paiement de l'équivalent de 91.340 DTS, sans vérifier si cette somme ne dépassait pas le dommage subi par la société WINTERTHUR, soit le montant de l'indemnité d'assurance de 40.925,70 USD, la Cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR déclarée prescrite de l'action en garantie engagée par la société CMA-CGM à l'encontre de la société TORM ;
AUX MOTIFS QUE « la Côte d'Ivoire a ratifié la convention de Bruxelles originelle signée le 25 août 1924 qui dans son article 3.6 fixe le délai pour agir contre le transporteur maritime à 1 an à compter de la livraison, mais pas le protocole modificatif signé le 23 février 1968 qui prévoit un délai supplémentaire pour l'action en garantie ; que la clause paramount du connaissement de la société TORM est lisible bien qu'en petits caractères comme toutes les autres clauses de ce document ; qu'elle est applicable, comme indiqué ci-dessus, au chargeur qu'est la S.A. CMA-CGM représentée par la société GETMA et qui est un usager du commerce maritime international ; que, dans la mesure où la Côte d'Ivoire pays du chargement de la marchandise par la société TORM n'a pas ratifié les modifications à la convention de Bruxelles, cette clause doit être interprétée en ce sens qu'est seule applicable la convention originelle, laquelle ne prévoit pas de délai supplémentaire pour l'exercice des actions récursoires ; quant à la loi française elle n'est pas applicable s'agissant d'un transport international ; que le dernier report de prescription accordé par la société TORM allait jusqu'au 16 juillet 2003, alors que la S.A. CMA-CGM a attendu le 12 septembre suivant pour l'assigner ; qu'il en résulte que l'action de la S.A. CMA-CGM contre la société TORM est prescrite » ;
1°/ ALORS, d'une part, QUE , les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; que la clause paramount stipulée au connaissement émis par la société TORM vise la convention de Bruxelles du 25 août 1924 as amended et donc la convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée par les protocoles du 23 février 1968 et du 21 décembre 1979 ; qu'en décidant cependant de faire application de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 originelle, pour se prononcer sur le délai d'exercice par la société CMA-CGM de son action récursoire à l'encontre de la société TORM, la Cour d'appel, qui a dénaturé la clause paramount stipulée au connaissement, a violé l'article 1134 du Code civil ;
2°/ ALORS, d'autre part, QUE (subsidiaire), dans le silence de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 originelle sur l'action en garantie du transporteur, doivent trouver à s'appliquer les dispositions de la loi du for relatives à une telle action en garantie, et donc l'article 32 de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966 ; qu'en décidant du contraire, la Cour d'appel a violé l'article 3-6 de la convention de Bruxelles du 25 août 1924 originelle par fausse application, ensemble l'article 32 de la loi n° 66-420 du 18 juin 1966 par refus d'application.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)LE MOYEN reproche à l'arrêt attaqué :
D'AVOIR déclaré prescrite de l'action en garantie engagée par la société CMA-CGM à l'encontre de la société GOLD STAR LINE LTD ;
AUX MOTIFS QUE « les marchandises ont été livrées à Conakry le 25 janvier 2002, et le délai de prescription d'un an à compter de cette date a été prolongé le 11 avril 2003 par la société GOLD STAR jusqu'au 16 juillet suivant ; que la société GOLD STAR n'a été touchée par l'assignation de la S.A. CMA-CGM que le 13 septembre 2004 soit largement après l'expiration du délai de prescription, l'assignation tentée le 12 septembre 2003, c'est-à-dire dans le délai récursoire de 3 mois si l'on retient la possibilité de celui-ci, n'a pas pu produire d'effet car elle n'était pas régulière, puisqu'elle indiquait comme pays de destination République de Chine alors que le vrai nom de celui-ci est République Populaire de Chine ; et cette irrégularité est imputable uniquement à la S.A. CMA-CGM qui par suite ne peut critiquer le rejet de cette tentative par les autorités chinoises ; que c'est donc à juste titre que la société GOLD STAR invoque la prescription de l'action engagée contre elle le 13 septembre 2004 par la S.A. CMA-CGM » ;
1°/ ALORS, d'une part, QU'aux termes de l'article 114 du Code de procédure civile, la nullité d'un acte de procédure pour vice de forme ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité ; qu'il ressort des propres constatations que l'assignation délivrée à la société GOLD STAR le 12 septembre 2003 n'était pas régulière puisqu'elle indiquait comme pays de destination « République de Chine » alors que le vrai nom de celui-ci est « République Populaire de Chine », ce dont se déduisait que l'acte de procédure était seulement atteint d'un vice de forme ; que, dans ses écritures d'appel, la société CMA-CGM a fait valoir que l'assignation du 12 septembre 2003 était seulement entachée d'une nullité relative ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans constater le grief qu'aurait éprouvé la société GOLD STAR à raison du vice de forme affectant l'assignation du 12 septembre 2003, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;
2°/ ALORS, d'autre part, QUE, dans ses écritures d'appel, la société CMA-CGM a soutenu que son assignation du 13 septembre 2004 valait réitération et régularisation de sa précédente assignation, en ce qu'elle précisait qu'elle « tenait et réitérait la dénonce et assignation du 12 septembre 2003 » (concl., p. 13) ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans se prononcer sur ces chefs de conclusions, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.