LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Met, sur sa demande, M.
X...
hors de cause ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Ben SA (la société Ben) a absorbé le 28 juin 1991, les sociétés Dolphin, Marintech et Guerpillon ; qu'elle a été mise en redressement judiciaire par une procédure qui a été étendue le 21 mai 1992 à sa filiale, la société Ben Marine technologies (la société Ben Marine) ; qu'un plan de cession a été adopté le 29 juin 1992, M. Y..., aux droits duquel se trouve la SCP Y...et F... (le commissaire à l'exécution du plan), a été désigné commissaire à l'exécution du plan ; que par jugement du 10 janvier 1994, la date de cessation des paiements a été reportée au jour des opérations de fusion absorption ; que, le 19 juin 1992, la SCP Y...a assigné les dirigeants des sociétés Ben et Ben marine, dont la société Finno, venant aux droits de la société Innolion et aux droits de laquelle se trouve la société Candel et partners, en paiement des dettes sociales ; que le 21 novembre 2002, la société Candel et partners a été mise en redressement judiciaire ; que par jugement du 27 février 2006, les sociétés Skipper Marine, Ucia Priceps ainsi que MM.
X...
, Z..., A..., B..., C...et E...ont été condamnés solidairement au paiement de la somme de 6 097 960 euros ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que le commissaire à l'exécution du plan fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande formée à l'encontre de MM.
C...
, X..., et E...et contre MM. A...et B..., alors, selon le moyen :
1°/ qu'en sollicitant la confirmation du jugement en ce qu'il avait condamné MM.
C...
, X..., E..., A...et B..., la SCP Y...et AvazeriI était réputée s'en approprier les motifs par lesquels il était constaté, et justifié de manière très complète, par des références précises au rapport d'expertise de M. D..., que le commissaire aux apports avait effectué un travail d'évaluation avec beaucoup de légèreté, qu'aucun arrêté de compte au 30 juin 2001 n'avait pu être communiqué, qu'aucune explication n'était fournie dans le projet de traité d'apport sur les modalités d'évaluation des éléments corporels ni sur les méthodes utilisées et retenues, qu'aucun justificatif n'était donné sur la détermination du rapport d'échange des titres des sociétés concernées par la fusion, que les valeurs des différentes sociétés participant à la fusion étaient très manifestement fantaisistes, qu'il n'avait été mis en place aucune procédure d'organisation et de contrôle, permettant de gérer la nouvelle entité économique et que les dirigeants avaient de surcroît négligé le facteur humain dans le rapprochement des différents sites des sociétés absorbées ; qu'en affirmant, en l'état de cette argumentation complète et circonstanciée démontrant la légèreté et l'absence totale d'organisation et de prudence des dirigeants dans l'évaluation et la réalisation de l'opération de fusion, que la SCP Y...et F... aurait formulé ses griefs en des termes généraux non assortis d'éléments circonstanciés, sans aucune démonstration de la faute alléguée, et qu'aucun reproche précis n'aurait été articulé quant aux modalités d'organisation de la société, quant aux mesures qui auraient dû être prises et quant à celles qui sont susceptibles de l'avoir été de façon inappropriée, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la SCP Y...et F... et violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile ;
2°/ que, comparant les montants des créances, disponibilités et dettes de cette société au moment de la fusion, la SCP Y...et F... indiquait que la situation de la société Ben était déjà critique avant la fusion, et que l'opération de fusion ayant abouti à un apport de dettes à court terme plus important que l'apport d'actif circulant, pour en déduire que la société s'était ainsi retrouvée face à une situation non pas améliorée, mais aggravée par l'opération de fusion-absorption ; qu'en se bornant à affirmer que les griefs de la SCP Y...et F... étaient formulés en des termes généraux non assortis d'éléments circonstanciés, et qu'aucun reproche précis n'était articulé quant aux mesures qui étaient susceptibles d'avoir été prises de façon inappropriée, sans rechercher, ainsi qu'elle y était ainsi pourtant expressément invitée, si la fusion intervenue ne relevait pas d'une initiative totalement inappropriée et, corrélativement, d'une erreur de gestion imputable aux dirigeants de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'ancien article L. 624-3 du code de commerce (recodifié à l'article L. 651-2 du code de commerce) ;
Mais attendu que l'arrêt relève que les griefs formulés par le commissaire à l'exécution du plan, le sont en termes généraux, non assortis d'éléments circonstanciés et sans aucune démonstration de la faute alléguée ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel a, sans dénaturation des conclusions du commissaire à l'exécution du plan, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 165 du décret du 27 décembre 1985 ;
Attendu que pour constater l'extinction de la créance de la SCP Y...et F... contre la société Candel et Partners et rejeter les demandes formées contre cette société l'arrêt retient que l'article 165 du décret du 27 décembre 1985 n'est pas applicable lorsque le dirigeant est mis en redressement judiciaire postérieurement à l'introduction de la demande en paiement des dettes sociales, que la société Candel et Partners a été déclarée en redressement judiciaire le 21 novembre 2002, postérieurement à l'introduction de la demande en comblement d'actif social et que M. Y...n'a pas déclaré sa créance au passif de la procédure collective de la société Candel et Partners ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il a constaté l'extinction de la créance de la SCP Y...et F..., ès qualités, à l'encontre de la société Candel et Partners, l'arrêt rendu le 16 avril 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne la société Candel et Partners aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par Mme le conseiller doyen faisant fonction de président en son audience publique du huit mars deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils pour la société Y...et F....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR constaté l'extinction de la créance de Maître Y...(devenu la SCP Y...et F...) ès qualités à l'encontre de la société CANDEL et PARTNERS, et D'AVOIR rejeté les demandes présentées par Maître Y...(devenu la SCP Y...et F...) ès qualités à l'encontre de la société CANDEL et PARTNERS ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la société CANDEL et PARTNERS a été déclarée en redressement judiciaire le 21 novembre 2002, un plan de continuation a été arrêté le 3 août 2004 et aucune déclaration de créances n'a été faite par Maître Emmanuel Y...ès qualités auprès du représentant des créanciers de la société CANDEL et PARTNERS ; qu'il échet de constater l'extinction de la créance du fait de l'absence de déclaration, et ce par application des dispositions des articles L. 621-40, L. 621-41, L. 621-43 et L. 621-46 du code de commerce » (jugement pp. 6 et 7) ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société CANDEL et PARTNERS a été déclarée en redressement judiciaire le 21 novembre 2002, postérieurement à l'introduction de la demande en comblement de l'insuffisance d'actif social ; que Monsieur Y...ès qualités n'a pas déclaré une créance au passif de la procédure collective ; qu'il prétend qu'il en était dispensé en vertu de l'article 165 du décret du 27 décembre 1985 selon lequel lorsqu'un dirigeant d'une personne morale est déjà soumis à une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, le montant du passif mis à la charge de ce dirigeant est déterminé par le tribunal qui a prononcé le redressement ou la liquidation judiciaire de la personne morale après mise en cause du représentant des créanciers ou du liquidateur désigné dans la procédure ouverte contre le dirigeant, la décision étant ensuite portée à la demande du mandataire de justice qui a exercé l'action sur l'état des créances de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire du dirigeant ; que ce texte n'est pas applicable lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, le dirigeant est mis en redressement judiciaire postérieurement à l'introduction de la demande en comblement de passif social » (arrêt p. 5) ;
ALORS QUE l'article 165 du décret du 27 décembre 1985, selon lequel « lorsqu'un dirigeant d'une personne morale est déjà soumis à une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, le montant du passif mis à la charge de ce dirigeant est déterminé par le tribunal qui a prononcé le redressement ou la liquidation judiciaire de la personne morale après mise en cause du représentant des créanciers ou du liquidateur désigné dans la procédure ouverte contre le dirigeant », ne distingue pas selon que le dirigeant a été soumis à une procédure de redressement judiciaire, antérieurement ou postérieurement à l'introduction de l'action en comblement du passif ; qu'en décidant que ce texte n'était pas applicable lorsque, comme c'était le cas en l'espèce, le dirigeant était mis en redressement judiciaire postérieurement à l'introduction de la demande en comblement de passif social, la cour d'appel a ajouté au texte une condition qu'il ne prévoit pas et ainsi violé l'ancien article 165 du décret du 27 décembre 1985 (recod. à l'article R. 651-6 du code de commerce).
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR constaté l'extinction de la créance de Maître Y...(devenu la SCP Y...et F...) ès qualités à l'encontre de la société CANDEL et PARTNERS, et D'AVOIR rejeté les demandes présentées par Maître Y...(devenu la SCP Y...et F...) ès qualités à l'encontre de la société CANDEL et PARTNERS ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la société CANDEL et PARTNERS a été déclarée en redressement judiciaire le 21 novembre 2002, un plan de continuation a été arrêté le 3 août 2004 et aucune déclaration de créances n'a été faite par Maître Emmanuel Y...ès qualités auprès du représentant des créanciers de la société CANDEL et PARTNERS ; qu'il échet de constater l'extinction de la créance du fait de l'absence de déclaration, et ce par application des dispositions des articles L. 621-40, L. 621-41, L. 621-43 et L. 621-46 du code de commerce » (jugement pp. 6 et 7) ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « la société CANDEL et PARTNERS a été déclarée en redressement judiciaire le 21 novembre 2002, postérieurement à l'introduction de la demande en comblement de l'insuffisance d'actif social ; que Monsieur Y...ès qualités n'a pas déclaré une créance au passif de la procédure collective ; qu'il prétend qu'il en était dispensé en vertu de l'article 165 du décret du 27 décembre 1985 selon lequel lorsqu'un dirigeant d'une personne morale est déjà soumis à une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, le montant du passif mis à la charge de ce dirigeant est déterminé par le tribunal qui a prononcé le redressement ou la liquidation judiciaire de la personne morale après mise en cause du représentant des créanciers ou du liquidateur désigné dans la procédure ouverte contre le dirigeant, la décision étant ensuite portée à la demande du mandataire de justice qui a exercé l'action sur l'état des créances de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire du dirigeant ; que ce texte n'est pas applicable lorsque, comme c'est le cas en l'espèce, le dirigeant est mis en redressement judiciaire postérieurement à l'introduction de la demande en comblement de passif social » (arrêt p. 5) ;
ALORS QUE la SCP Y...et F... soutenait que, sa créance au titre du comblement de passif ayant son origine non seulement postérieurement au jugement d'ouverture, mais également postérieurement à l'adoption du plan de continuation de la société CANDEL et PARTNERS, dès lors que seul l'arrêt statuant sur sa demande pouvait donner naissance à ladite créance, il n'y avait pas lieu à déclaration de créance, ni à mise en cause du représentant des créanciers dont la mission avait pris fin (conclusions, pp. 10 et 11) ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions opérantes, pour néanmoins constater l'extinction de la créance de Maître Y...(devenu la SCP Y...et F...) ès qualités à l'encontre de la société CANDEL et PARTNERS, et rejeter ses demandes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué D'AVOIR rejeté la demande formée par la SCP Y...et F... ès qualités à l'encontre de Messieurs
C...
,
X...
,
E...
, et D'AVOIR rejeté la demande formée par la SCP Y...et F... ès qualités à l'encontre de A...et B...;
AUX MOTIFS QUE « selon l'expert judiciaire D..., auquel Monsieur Y...se réfère, les difficultés de la société BEN ont pour origine une insuffisance du chiffre d'affaires réalisé au cours des 8 mois qui séparent la fusion de l'ouverture de la procédure collective ; que cette situation s'explique par le regard pris dans le développement des produits DOLPHIN et de nouvelles activités de traitement d'eau et de débimétrie/ niveaumétrie, l'activité insuffisante de la branche GUERPILLON, un « décalage » de 3. 000. 000 F dans la réalisation d'un contrat d'ingénierie ; l'expert en infère que la fusion a été mal maîtrisée, ce qui caractérise, selon Monsieur Y..., « une mauvaise gestion manifeste, voire une incapacité de gestion » ; mais ce grief est formulé en des termes généraux non assortis d'éléments circonstanciés, sans aucune démonstration de faute alléguée ; c'est ainsi qu'aucun reproche précis n'est articulé quant aux modalités d'organisation de la société, quant aux mesures qui auraient dû être prises et quant à celles qui sont susceptibles de l'avoir été de façon inappropriée ; la cour estime, dès lors, que les faits reprochés ne justifient pas, au regard des circonstances de l'espèce, l'application des dispositions de l'article L. 624-3 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises, à l'encontre de Monsieur Etienne
C...
, Monsieur Bernard B..., Monsieur Paul
X...
, Monsieur Fernand A...et Monsieur Jean-Louis
E...
» (arrêt pp. 5 et 6) ;
1° ALORS QU'en sollicitant la confirmation du jugement en ce qu'il avait condamné Messieurs
C...
,
X...
,
E...
, A...et B..., la SCP Y...et F... était réputée s'en approprier les motifs par lesquels il était constaté, et justifié de manière très complète, par des références précises au rapport d'expertise de Monsieur D..., que le commissaire aux apports avait effectué un travail d'évaluation avec beaucoup de légèreté, qu'aucun arrêté de compte au 30 juin 2001 n'avait pu être communiqué, qu'aucune explication n'était fournie dans le projet de traité d'apport sur les modalités d'évaluation des éléments corporels ni sur les méthodes utilisées et retenues, qu'aucun justificatif n'était donné sur la détermination du rapport d'échange des titres des sociétés concernées par la fusion, que les valeurs des différentes sociétés participant à la fusion étaient très manifestement fantaisistes, qu'il n'avait été mis en place aucune procédure d'organisation et de contrôle, permettant de gérer la nouvelle entité économique et que les dirigeants avaient de surcroît négligé le facteur humain dans le rapprochement des différents sites des sociétés absorbées (jugement pp. 8 à 10) ; qu'en affirmant, en l'état de cette argumentation complète et circonstanciée démontrant la légèreté et l'absence totale d'organisation et de prudence des dirigeants dans l'évaluation et la réalisation de l'opération de fusion, que la SCP Y...et F... aurait formulé ses griefs en des termes généraux non assortis d'éléments circonstanciés, sans aucune démonstration de la faute alléguée, et qu'aucun reproche précis n'aurait été articulé quant aux modalités d'organisation de la société, quant aux mesures qui auraient dû être prises et quant à celles qui sont susceptibles de l'avoir été de façon inappropriée, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la SCP Y...et F... et violé les articles 4 et 954 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE, comparant les montants des créances, disponibilités et dettes de cette société au moment de la fusion, la SCP Y...et F... indiquait que la situation de la société BEN SA était déjà critique avant la fusion, et que l'opération de fusion ayant abouti à un apport de dettes à court terme plus important que l'apport d'actif circulant, pour en déduire que la société s'était ainsi retrouvée face à une situation non pas améliorée, mais aggravée par l'opération de fusion-absorption (conclusions du 24 août 2007, p. 14) ; qu'en se bornant à affirmer que les griefs de la SCP Y...et F... étaient formulés en des termes généraux non assortis d'éléments circonstanciés, et qu'aucun reproche précis n'était articulé quant aux mesures qui étaient susceptibles d'avoir été prises de façon inappropriée, sans rechercher, ainsi qu'elle y était ainsi pourtant expressément invitée, si la fusion intervenue ne relevait pas d'une initiative totalement inappropriée et, corrélativement, d'une erreur de gestion imputable aux dirigeants de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'ancien article L. 624-3 du code de commerce (recod. Article L. 651-2 du code de commerce).