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08/02/2011 | FRANCE | N°10-11270

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 08 février 2011, 10-11270


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 25 novembre 2009), que par ordonnance du 17 novembre 2008, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice a autorisé des agents de l'administration des impôts à procéder, en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, à des opérations de visite et saisie dans des locaux situés avenue ... à

Nice, et susceptibles d'être occupés par M. X..., Mme Y...ou la socié...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Aix-en-Provence, 25 novembre 2009), que par ordonnance du 17 novembre 2008, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice a autorisé des agents de l'administration des impôts à procéder, en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, à des opérations de visite et saisie dans des locaux situés avenue ... à Nice, et susceptibles d'être occupés par M. X..., Mme Y...ou la société Mundial Nautica, en vue de rechercher la preuve de la fraude de cette société ; que par ordonnance rendue le même jour, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Draguignan a autorisé la visite de locaux situés au Cannet-des Maures et au Puget-sur-Argens ; que la société Mundial Nautica, M. X...et Mme Y...ont interjeté appel de ces ordonnances ;
Attendu que la société Mundial Nautica, M. X...et Mme Y...font grief à l'ordonnance d'avoir rejeté leur demande d'annulation des ordonnances des juges des libertés et de la détention, alors, selon le moyen, que le décret n° 2008-310 du 3 avril 2008, qui a créé au sein du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique une direction générale des finances publiques, par la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique, et a abrogé le décret n° 98-978 du 2 novembre 1988 relatif à la direction générale des impôts a privé de fondement juridique les habilitations auparavant délivrées par le directeur général des impôts ou par son délégué aux agents de l'administration des impôts pour effectuer les visites et procéder aux saisies prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; qu'en retenant que les autorisations de visites et saisies litigieuses avaient pu être requises et obtenues sur la seule base des habilitations données par le directeur général des impôts avant l'entrée en vigueur du décret du 3 avril 2008, le premier président a violé les articles 1er, 2, 5 et 6 de ce texte ensemble les articles L. 16 B et R. 16 B-1 du livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que selon l'article 5 du décret n° 2008-310 du 3 avril 2008, le directeur général des finances publiques exerce les attributions dévolues au directeur général des impôts par les dispositions législatives et réglementaires applicables à sa date d'entrée en vigueur, dans les conditions qu'elles prévoient ; que les habilitations délivrées, avant cette date, par le directeur général des impôts, en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, à des agents de l'administration des impôts, restent valables, dès lors qu'il n'y a pas été mis fin par le directeur général des finances publiques ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les autres griefs ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Mundial Nautica SL, M. X...et Mme Y...aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer au directeur général des finances publiques représenté par le chef des services fiscaux chargé de la Direction nationale d'enquêtes fiscales la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Monod et Colin, avocat aux Conseils pour la société Mundial Nautica SL, M. X...et Mme Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'avoir été prononcée et signée par « Monsieur Jean-Paul LACROIX-ANDRIVET, Président » après que l'affaire a été débattue en audience publique devant « Monsieur Jean-Paul LACROIXANDRIVET, Président, délégué par ordonnance du Premier Président » (p. 2) ;
ALORS QUE ces mentions qui ne précisent ni la qualité et les fonctions occupées par M. Lacroix-Andrivet, ni la date et l'objet exact de l'ordonnance de délégation prise par le premier président de la cour d'appel, ne mettent pas la Cour de cassation en mesure de contrôler la régularité de la désignation du magistrat l'ayant rendue ; que l'ordonnance attaquée manque ainsi de base légale au regard des articles L. 16 B du livre des procédures fiscales et R. 312-2 du code de l'organisation judiciaire.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'avoir dit n'y avoir lieu à annulation des ordonnances du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice et du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Draguignan ayant autorisé, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, la visite et saisie de locaux situés à Nice, Le Cannet-des-Maures et Puget-sur-Argens ;
AUX MOTIFS QUE les appelants reprochent aux décisions susvisées d'avoir été pré-rédigées par l'administration, étant rédigées simultanément et en termes identiques par les deux magistrats signataires ; mais que ce seul fait ne permet pas de présumer que les juges ont rendu leur décision sans examiner les pièces produites par l'administration et sans adopter les motifs qui étaient soumis à leur appréciation ;
ALORS QUE méconnaît les exigences d'un procès équitable le juge qui statue par une apparence de motivation pouvant faire peser un doute légitime sur son impartialité ; que si les motifs et le dispositif d'une décision sont réputés établis par le juge qui l'a rendue et signée, de sorte qu'en matière d'autorisation de visite et saisie, il n'est pas interdit au juge des libertés et de la détention de fonder sur son appréciation sur la décision pré-rédigée par l'administration requérante, encore faut-il que la motivation de son ordonnance ne laisse subsister aucun doute sur l'exercice effectif de son contrôle de la pertinence de la requête de l'administration et de la proportionnalité de la mesure sollicitée, notamment au regard de l'atteinte portée par une mesure de visite et saisie aux libertés individuelles dont il est le gardien ; qu'ainsi, en l'espèce, le premier président de la cour d'appel ne pouvait valider les ordonnances déférées, rédigées en termes identiques et rendues le même jour par les juge des libertés et de la détention de deux tribunaux de grande instance différents ; qu'il a, dès lors, violé les articles 6 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ensemble les articles 455 et 458 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'avoir dit n'y avoir lieu à annulation des ordonnances du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice et du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Draguignan ayant autorisé, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, la visite et saisie de locaux situés à Nice, Le Cannet-des-Maures et Puget-sur-Argens ;
AUX MOTIFS QUE les appelants soutiennent que les habilitations présentées aux juges des libertés et de la détention sont irrégulières en ce qu'elles ont été signées du directeur de la direction nationale des enquêtes fiscales et du directeur général des impôts ou du directeur général des finances publiques ; que depuis la fusion des deux administrations, seul ce dernier a qualité pour habiliter les agents à effectuer des visites et procéder à des saisies ; mais que c'est à bon droit que l'administration rappelle que la régularité des habilitations doit s'apprécier au moment de leur délivrance et que cette régularité n'est pas discutée en l'espèce ; que les agents étant habilités personnellement, leur habilitation n'a pas à être renouvelée à chaque opération et reste valable tant que durent leurs fonctions et qu'elle n'a pas été abrogée ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le décret n° 2008-310 du 3 avril 2008, qui a créé au sein du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique une direction générale des finances publiques, par la fusion de la direction générale des impôts et de la direction générale de la comptabilité publique, et a abrogé le décret n° 98-978 du 2 novembre 1988 relat if à la direction générale des impôts a privé de fondement juridique les habilitations auparavant délivrées par le directeur général des impôts ou par son délégué aux agents de l'administration des impôts pour effectuer les visites et procéder aux saisies prévues à l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; qu'en retenant que les autorisations de visites et saisies litigieuses avaient pu être requises et obtenues sur la seule base des habilitations données par le directeur général des impôts avant l'entrée en vigueur du décret du 3 avril 2008, le premier président a violé les articles 1er, 2, 5 et 6 de ce texte ensemble les articles L. 16 B et R. 16 B-1 du livre des procédures fiscales ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE les exposants faisaient valoir que les habilitations des agents ayant requis et obtenu les autorisations de visite et saisies, qui, contrairement à ce que relevaient les ordonnances frappées d'appel, avaient été délivrées au nom du directeur général des impôts et non du directeur général des finances publiques litigieuses, avaient perdu leur fondement juridique (concl. du 3 avril 2009, p. 4 et 8) ; qu'en affirmant que les appelants soutenaient que les habilitations présentées aux juges des libertés et de la détention étaient irrégulières en ce qu'elles avaient été signées du directeur de la direction nationale d'enquêtes fiscales et du directeur général des impôts « ou du directeur général des finances publiques », le premier président a dénaturé leurs conclusions, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS, ENFIN, QUE la société Mundial Náutica, M. X...et Mlle Y...faisaient valoir que les habilitations déposées au greffe des juges des libertés et de la détention ne correspondaient pas à celles décrites dans les ordonnances rendues par ces magistrats et censées leur avoir été présentées par les agents de l'administration (concl. du 3 avril 2009, p. 4 ; concl. du 27 octobre 2009, p. 2) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, le premier président a violé l'article 455 du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'avoir dit n'y avoir lieu à annulation des ordonnances du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice et du juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Draguignan ayant autorisé, sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, la visite et saisie de locaux situés à Nice, Le Cannet-des-Maures et Puget-sur-Argens ;
AUX MOTIFS QUE les appelants soutiennent que le recours à l'article L. 16 B à l'encontre de la société Mundial Náutica est abusif en ce qu'il tend à laisser croire à tort qu'elle a en France une activité occulte, alors qu'elle a indiqué son activité à l'administration fiscale, désigné un représentant fiscal en France et qu'elle y dispose d'un numéro Siret ; mais que la déclaration d'un chiffre d'affaires nul au titre de l'année 2006 alors qu'elle a, au cours de la période considéré, établi des factures de livraison en France permet de présumer d'une activité occulte, de même que l'utilisation courant 2007, d'un ligne de fax en France, bien qu'ayant annulé sa représentation fiscale du 1er janvier 2007 au 4 septembre 2008 ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en affirmant, pour justifier les autorisations de visites et saisies, que le fait pour la société Mundial Náutica, qui n'a pas déclaré de chiffre d'affaires en 2006, d'avoir établi des factures pendant la période considérée et utilisé une ligne de fax en 2007 permettait de présumer l'existence d'une activité occulte cependant que l'administration fiscale soutenait elle-même, dans ses conclusions (p. 6 in fine), qu'« il n'a jamais été prétendu que Mundial Náutica SL exerçait une activité occulte », le premier président a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le premier président statuant sur l'appel d'une ordonnance d'autorisation de visite et saisie doit s'assurer de ce que l'ingérence dans le droit au respect de la vie privée et du domicile est, en l'espèce, proportionnée au but légitimement poursuivi, ce qui implique de vérifier si, à défaut des visites et saisies requises sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale aurait été en mesure de rechercher l'existence de la fraude suspectée ; qu'en n'examinant pas si, comme le soutenaient les exposants (concl. du 3 avril 2009, p. 3), les documents dont disposait déjà le fisc (déclaration d'établissement en France précisant l'existence d'une activité d'achat-revente de produits pétroliers, désignation d'un représentant fiscal, numéro de Siret, déclarations de TVA) ne rendaient pas inapproprié le recours à la procédure prévue par l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, le premier président a privé sa décision de base légale au regard de ce texte et de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
ALORS, ENFIN, QUE la société Mundial Náutica, M. X...et Mlle Y...faisaient valoir que l'administration fiscale avait à tort utilisé la procédure de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales à l'égard des sociétés STG et EPPA, fournisseurs de la société Mundial Náutica, dès lors qu'elle aurait pu obtenir des informations en exerçant son droit de communication en vertu de l'article L. 85 du même code (concl. du 27 octobre 2009, p. 2, 7 et 8) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, le premier président a violé l'article 455 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 10-11270
Date de la décision : 08/02/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Redressement et vérifications (règles communes) - Visites domiciliaires (article L. 16 B) - Autorisation judiciaire - Conditions - Demande de l'administration - Habilitation des agents - Délivrance par le directeur général des impôts - Limite de validité

Selon l'article 5 du décret n° 2008-310 du 3 avril 2008, le directeur général des finances publiques exerce les attributions dévolues au directeur général des impôts par les dispositions législatives et réglementaires applicables à sa date d'entrée en vigueur, dans les conditions qu'elles prévoient. Il s'ensuit que les habilitations délivrées, avant cette date, par le directeur général des impôts, en application de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, à des agents de l'administration des impôts, restent valables, dès lors qu'il n'y a pas été mis fin par le directeur général des finances publiques


Références :

article L. 16 B du livre des procédures fiscales

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 25 novembre 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 08 fév. 2011, pourvoi n°10-11270, Bull. civ. 2011, IV, n° 18
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2011, IV, n° 18

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Rapporteur ?: Mme Farthouat-Danon
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:10.11270
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