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01/02/2011 | FRANCE | N°09-40121

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 01 février 2011, 09-40121


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 21 novembre 2008), que M. X..., engagé le 1er septembre 2005 par la société Groupe Casino en qualité de chargé de mission à l'international, a, suivant avenant au contrat de travail du 24 octobre 2005, été mis à la disposition de la société de droit uruguayen Devoto pour une durée prévue de deux ans ; que ledit avenant stipulait en outre, à l'article 11.3 "Fin anticipée de l'expatriation par la société d'accueil" : "Pendant la durée de sa mission à l'étranger,

la société Devoto se réserve la possibilité de faire cesser la mission de M....

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 21 novembre 2008), que M. X..., engagé le 1er septembre 2005 par la société Groupe Casino en qualité de chargé de mission à l'international, a, suivant avenant au contrat de travail du 24 octobre 2005, été mis à la disposition de la société de droit uruguayen Devoto pour une durée prévue de deux ans ; que ledit avenant stipulait en outre, à l'article 11.3 "Fin anticipée de l'expatriation par la société d'accueil" : "Pendant la durée de sa mission à l'étranger, la société Devoto se réserve la possibilité de faire cesser la mission de M. X... à tout moment sous réserve d'un délai de prévenance de trois mois et sauf dispositions d'ordre public locales plus favorables, en cas notamment : - de maladie ou d'accident grave (sur avis médical) ; - d'impératifs résultant de la situation locale, - de contraintes d'immigration, - de suspension de l'activité en Uruguay, - de difficultés économiques, - de résultats insuffisants, - de réorganisation des services, - de force majeure…. Dans l'hypothèse d'une faute disciplinaire (simple, grave ou lourde), ce délai de prévenance sera ramené à un mois" ; que le contrat de travail avec la société Devoto ayant été rompu de manière anticipée, le salarié a, le 1er août 2006, été réintégré dans les effectifs de la société Groupe Casino, celle-ci lui proposant, le 5 septembre 2006, le poste de directeur commercial de l'hypermarché de Dôle (Jura) à compter du 2 octobre 2006 ; qu'à la suite du refus de cette affectation, M. X... a été licencié le 25 octobre 2006 pour cause réelle et sérieuse ; que, contestant ce licenciement, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le moyen unique du pourvoi principal du salarié :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à faire juger qu'il avait droit à une garantie d'emploi pour une durée d'au moins deux ans, alors, selon le moyen :

1°/ qu'en ayant énoncé qu'Olivier X... se prévalait à tort à l'encontre de son employeur la société Distribution Casino France d'une prétendue garantie d'emploi "prévue selon lui par le contrat signé avec la société Devoto", la cour d'appel a dénaturé ses conclusions du 13 octobre 2008 maintenues à l'audience invoquant le bénéfice "d'une garantie d'emploi d'au moins deux années. Il était contractuellement prévu que l'expatriation durerait au moins jusqu'au 31 janvier 2008. Cela résulte indiscutablement… de l'avenant du 24 octobre 2005" qui avait été signé avec la société Distribution Casino France, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile ;

2°/ que constitue une garantie d'emploi, dont la violation oblige l'employeur à indemniser le salarié du solde des salaires restant dû jusqu'à l'expiration de la garantie, la clause affectant le salarié à une mission d'une durée déterminée ; qu'en s'étant bornée, de manière inopérante, à énoncer que le différend portant sur la rupture du contrat entre Olivier X... et la société Devoto était étranger au litige relatif à son licenciement par la société Casino, qu'il ne pouvait se prévaloir à son encontre d'une garantie d'emploi ou du délai de préavis prévus par le contrat signé avec la société Devoto et que le préjudice résultant de son licenciement ne se confondait pas avec celui résultant de la rupture du contrat conclu avec la société Devoto, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si l'avenant du 24 octobre 2005, signé avec la société Casino, suspendant l'exécution du contrat de travail initial pendant une mission en Uruguay "fixée d'un commun accord entre les parties à deux ans, soit du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008", ne permettait à M. X... d'exiger, lors de son licenciement, jugé abusif, par son employeur la société Casino, le paiement de la rémunération et des avantages stipulés au moins jusqu'au 31 décembre 2008 par l'avenant précité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 1221-1 du code du travail et du principe de la réparation intégrale du préjudice ;

Mais, attendu que la clause stipulée à l'avenant au contrat de travail, qui prévoyait une durée prévisible de l'affectation du salarié en Uruguay sans exclure la possibilité d'une rupture du contrat pendant la période de deux ans pour des motifs autres que ceux liés à l'existence d'une faute grave, ne constitue pas une garantie d'emploi ; que le moyen est inopérant ;

Sur le moyen unique du pourvoi incident de l'employeur :

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que les juges ne peuvent méconnaître les dispositions d'un contrat qui fait la loi des parties ; qu'en l'espèce, l'avenant au contrat de travail en date du 24 octobre 2005 réglait notamment, en son article 11.3 in fine, les modalités de retour du salarié expatrié dans une filiale située à l'étranger dans les termes suivants : "En cas de rupture anticipée (de la mission d'expatriation), Olivier X... sera réintégré au sein de la société d'origine en France ou de toute autre société du groupe et affecté à un poste correspondant au niveau, à la qualification, à l'importance de ses précédentes fonctions au sein de la société d'origine, avec une rémunération au moins égale au salaire de référence mentionné à l'article 6-1" ; qu'il résultait donc des stipulations claires et précises dudit avenant que le poste proposé au salarié lors de son retour en France devait correspondre à un poste "équivalent" à celui qu'il occupait, avant son départ, au sein de la société d'origine, i.e. au sein de la société Casino en France, qui l'avait recruté avant qu'il ne conclut un contrat avec la filiale étrangère ; qu'en comparant le poste de reclassement proposé à M. X... à son poste en Uruguay et non au poste qu'il occupait avant de s'expatrier, la cour d'appel a méconnu la loi des parties et a violé les dispositions de l'article 1134 du code civil ;

2°/ que l'atteinte qui est susceptible d'être portée au droit à la vie personnelle et familiale du salarié par la mise en oeuvre d'une clause de mobilité est licite lorsqu'elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir par le salarié et proportionnée au but recherché ; qu'en se bornant à relever, pour affirmer que l'employeur n'avait pas exécuté de bonne foi son obligation de reclassement, qu'il avait proposé à M. X..., après la rentrée des classes, une affectation de 900 km du lieu de résidence fixée à défaut d'affectation antérieure, sans expliquer en quoi l'atteinte ainsi portée à la vie familiale de l'intéressé était excessive notamment au regard des possibilités de scolariser ses enfants en cours d'année dans un établissement de Dôle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 1134 et L. 122-14-3 du code du travail ;

3°/ qu'une mutation décidée en application d'une clause de mobilité ne constitue qu'un changement dans les conditions de travail qui s'impose au salarié, sauf à caractériser l'existence d'un abus de l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction ; qu'en se bornant, pour retenir l'existence d'un abus, à relever que la société avait persisté dans son attitude en engageant une procédure de licenciement sans prendre en considération les arguments exposés par Olivier X... à l'appui de son refus et sans envisager une autre proposition, qui était sollicitée par Olivier X... et qu'elle n'avait pourtant pas exclue dans sa lettre de proposition du 5 septembre 2006 où elle annonçait une proposition soumise à accord, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'un abus par l'employeur dans la mise en oeuvre de la clause de mobilité et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-3, L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail ;

4°/ que les juges doivent préciser l'origine des renseignements de fait qui ont servi à motiver leur décision, dès lors en affirmant péremptoirement que la société Casino n'avait pas pris en compte les arguments de M. X..., sans préciser d'où elle avait tiré cette information controuvée par les documents produits par la société Casino, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais, attendu que la cour d'appel a relevé que la société Groupe Casino avait proposé au salarié, après la rentrée des classes, alors que celui-ci était père d'enfants dont le cycle de scolarité, décalé dans l'hémisphère sud, n'avait déjà pu être achevé, une affectation distante de 900 kilomètres de son domicile sans respecter la charte pour la mobilité du personnel d'encadrement qui prévoit une politique d'accompagnement afin notamment d'apporter une plus grande sérénité à la famille face aux changements et aux difficultés matérielles et psychologiques que provoque la mobilité ; qu'elle a ainsi, abstraction faite des motifs surabondants visés par les première et quatrième branches du moyen, légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principal et incident ;

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille onze, et signé par M. Richard, greffier de chambre, présent lors du prononcé.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit par de Me Blanc, avocat aux Conseils pour M. X..., demandeur au pourvoi principal

Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité à 50.000 € l'indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse de Monsieur X... et rejeté ses demandes tendant à l'allocation de la somme de 612.000 € à ce titre ;

Aux motifs qu'Olivier X... et la SAS Distribution Casino France étaient liés par un contrat de travail signé le 29 août 2005 et suspendu par avenant du 24 octobre 2005 pour la durée de la mission en Uruguay effectuée pour le compte de la société Devoto avec laquelle un contrat de travail soumis au droit local avait été conclu le 20 janvier 2006 ; que le différend portant sur les causes et modalités de rupture du contrat de travail entre Olivier X... et la société Devoto était étranger au litige concernant la légitimité de la rupture du contrat entre Olivier X... et la SAS Distribution Casino France par cette dernière ; qu'Olivier X... ne pouvait se prévaloir à l'encontre de la SAS Distribution Casino France d'une prétendue garantie d'emploi prévue selon lui par le contrat signé avec la société Devoto ou reprocher à la SAS Distribution Casino France le non respect du délai de préavis prévu par ce contrat ; que le refus d'Olivier X... d'accepter le poste qui lui était proposé ne constituait pas une cause réelle et sérieuse ; qu'Olivier X... qui avait moins de deux ans d'ancienneté avait droit à une indemnité en fonction du préjudice subi du fait du licenciement ; que ce préjudice ne pouvait se confondre avec celui résultant de la rupture anticipée du contrat de travail signé avec la société Devoto, résiliation que n'avait pas contesté Olivier X... et qui avait donné lieu au paiement des indemnités prévues par ce contrat ;

Alors 1°) qu'en ayant énoncé qu'Olivier X... se prévalait à tort à l'encontre de son employeur la SAS Distribution Casino France d'une prétendue garantie d'emploi «prévue selon lui par le contrat signé avec la société Devoto», la cour d'appel a dénaturé ses conclusions du 13 octobre 2008 maintenues à l'audience invoquant le bénéfice «d'une garantie d'emploi d'au moins deux années. Il était contractuellement prévu que l'expatriation durerait au moins jusqu'au 31 janvier 2008. Cela résulte indiscutablement…de l'avenant du 24 octobre 2005» qui avait été signé avec la SAS Distribution Casino France, violant ainsi l'article 4 du Code de procédure civile ;

Alors 2°) que constitue une garantie d'emploi, dont la violation oblige l'employeur à indemniser le salarié du solde des salaires restant dû jusqu'à l'expiration de la garantie, la clause affectant le salarié à une mission d'une durée déterminée ; qu'en s'étant bornée, de manière inopérante, à énoncer que le différend portant sur la rupture du contrat entre Olivier X... et la société Devoto était étranger au litige relatif à son licenciement par la société Casino, qu'il ne pouvait se prévaloir à son encontre d'une garantie d'emploi ou du délai de préavis prévus par le contrat signé avec la société Devoto et que le préjudice résultant de son licenciement ne se confondait pas avec celui résultant de la rupture du contrat conclu avec la société Devoto, sans avoir recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si l'avenant du 24 octobre 2005, signé avec la société Casino, suspendant l'exécution du contrat de travail initial pendant une mission en Uruguay «fixée d'un commun accord entre les parties à deux ans, soit du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008», ne permettait à Monsieur X... d'exiger, lors de son licenciement, jugé abusif, par son employeur la société Casino, le paiement de la rémunération et des avantages stipulés au moins jusqu'au 31 décembre 2008 par l'avenant précité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du Code civil et L. 1221-1 du Code du travail et du principe de la réparation intégrale du préjudice.
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Groupe Casino, demanderesse au pourvoi incident

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir affirme que le refus d'Olivier X... d'accepter le poste qui lui était proposé ne constituait pas une cause réelle et sérieuse de licenciement et d'avoir, en conséquence, condamné la SAS DISTRIBUTION CASINO France à verser à Olivier X... la somme de 50.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

AUX MOTIFS QUE « La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée : « Suite à la décision de notre filiale uruguayenne (société DEVOTO) de mettre fin à votre mission d'expatriation pour des raisons tenant notamment à votre insuffisance professionnelle, et au caractère insuffisant de vos résultats, nous vous avons fait savoir, par courriel du 4 septembre 2006 et par lettre recommandée reçue le 7 septembre 2006 notre intention de vous voir muter, à compter du 18 septembre 2006, sur un poste de directeur commercial basé en France à Dole, et ce, après avoir en vain recherché un poste disponible à l'international. afin de respecter un délai de prévenance suffisamment important et de tenir compte exceptionnellement de vos contraintes liées à votre organisation familiale, nous vous avons accordé un délai supplémentaire en repoussant votre affectation au 2 octobre 2006. Cette proposition de poste de directeur commercial correspondait bien à vos qualifications et à la dénomination de votre précédente fonction (« chargé de mission ») au sein de notre société. Cette fonction correspondait de plus aux fonctions que vous aviez occupé chez votre précédent employeur au moment où nous vous avions recruté, et vous permettait de vous familiariser progressivement au contexte de management d'un hypermarché français dans le contexte GEANT CASINO. Or, alors même qu'il ne s'agissait que d'une simple modification de vos conditions de travail liée à la mise en ..uvre légitime de notre part de la clause de mobilité géographique à laquelle vous avez expressément consenti (cf. avenant de votre contrat de travail en date du 29 août 2005, signé en date du 24 octobre 2005), vous avez clairement exprimé votre refus de rejoindre votre nouvelle affectation à compter du 2 octobre 2006. Ce refus d'exécuter vos obligations contractuelles et conventionnelles constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement ». L'avenant au contrat de travail signé le 24 octobre 2005 afin de régler les principales modalités de départ et de retour d'Olivier X... stipule : « En cas de rupture anticipée (de la mission d'expatriation), Olivier X... sera réintégré au sein de la société d'origine en France ou de toute autre société du groupe et affecté à un poste correspondant au niveau, à la qualification, à l'importance de ses précédentes fonctions au sein de la société d'origine, et avec une rémunération au moins égale au salaire de référence mentionné à l'article 6-1 » ; La SA Distribution Casino France, société d'origine, a réintégré Olivier X... au sein de ses équipes à compter du 1er août 2006, soit dans les jours suivants le rapatriement d'Olivier X... qui a eu lieu dans les derniers jours du mois de juillet. Elle a proposé à Olivier X... une affectation au poste de directeur commercial de l'hypermarché GEANT CASINO de Dole par lettre du 5 septembre 2006, à compter du septembre 2006. La proposition mentionne que la bonne tenue du poste est susceptible de conduire à un poste de directeur d'hypermarché en France, que le salaire de référence mentionné à l'article 6-1 de l'avenant est maintenu, et que compte - tenu des exigences de scolarité des enfants du salarié, une prompte réponse est attendue. Olivier X... soutient, en premier lieu, que cette affectation entraînait une baisse de la rémunération ainsi qu'une rétrogradation, et donc, une modification du contrat de travail. En second lieu, il prétend que l'employeur n'a pas proposé l'affectation litigieuse, de bonne foi. S'agissant de la rémunération, la proposition de la SAS DISTRIBUTION CASINO France est conforme à la stipulation de l'avenant signé le 24 octobre 2005. Olivier X... ne peut donc soutenir une modification de la rémunération en se référant à celle qui était prévue le 29 août 2005 ou à celle qui avait été convenue avec la société DEVOTO. S'agissant des fonctions, Olivier X... a été recruté comme chargé de mission à l'international pour être affecté dans une des filiales d'Amérique. L'avenant du 24 octobre 2005 prévoit une réintégration au sein de la société d'origine en France ou dans une autre société du groupe mais ne prévoit pas l'obligation d'une affectation à l'étranger. Reste donc à vérifier si le poste propos correspondait au niveau, à la qualification et à l'importance des précédentes fonctions au sein de la SAS DISTRIBUTION CASINO France. En tant que chargé de mission à l'international, Olivier X... a occupé le poste de directeur des opérations de la filiale uruguayenne DEVOTO. L'employeur ne conteste pas qu'à ce titre, il a dirigé un centre de profit de l'ordre de 110 millions d'euros avec un effectif de 2000 personnes sur 22 magasins dont 3 petits hypermarchés. L'affectation proposée concernait le poste de directeur commercial d'un hypermarché dont le chiffre d'affaires était de l'ordre de 37 millions d'euros et dont l'effectif était d'environ 170 personnes. D'autre part, l'hypermarché est dirigé par un directeur et nonobstant l'importante délégation de pouvoir consentie par ce dernier au directeur commercial mise en avant par la SAS DISTRIBUTION CASINO France, le poste de directeur commercial est un poste de second d'un magasin, comme le soutient à juste titre Olivier X.... Au vu de ces éléments, les responsabilités de la fonction proposée étaient beaucoup moins importantes que les responsabilités du poste occupé avant l'expatriation. La SAS DISTRIBUTION CASINO France ne peut utilement invoquer les fonctions occupées par Olivier X... avant son embauche, son obligation d'affectation au retour de son expatriation n'étant pas définie contractuellement par les responsabilités d'Olivier X... avant son recrutement. L'affectation, dès leur retour de missions à l'étranger, à des postes de directeurs commerciaux, du directeur d'un hypermarché en Argentine et du directeur régional des supermarchés au Venezuela ne démontre pas le respect par la SAS DISTRIBUTION CASINO France de l'obligation contractuelle d'affecter Olivier X... à un poste ayant des responsabilités au moins aussi importantes que celles qui étaient les siennes dans le poste précédent dès lors, en premier lieu, qu'Olivier X... était directeur d'exploitation d'une filiale étrangère et non directeur d'un hypermarché à l'étranger ou directeur régional des supermarchés et, en second lieu, que l'obligation d'affectation de la SAS DISTRIBUTION CASINO France est définie contractuellement par l'avenant du 24 octobre 2005 et qu'elle ne peut par conséquent être appréciée au regard d'une prétendue politique du groupe. L'affectation d'Olivier X... au poste de directeur commercial de l'hypermarché GEANT CASINO de Dole n'était pas une affectation dans un poste correspondant à l'importance des précédentes fonctions au sein de la société d'origine. De plus, cette affectation a été proposée plus de deux mois après la résiliation du contrat avec la société DEVOTO et plus d'un mois après le retour d'Olivier X... et de sa famille en France alors qu'il s'était installé à Saint Jean de Luz et qu'il y avait scolarisé ses enfants, dont le cycle de scolarité, décalé dans l'hémisphère Sud jusqu'au 15 décembre, n'avait pu être achevé. Cette résidence avait été choisie par défaut, Olivier X... ayant indiqué à l'employeur, dès avant son départ d'Uruguay, qu'il n'avait pas d'adresse en France et qu'il proposait de se fixer à Saint-Etienne, ce à quoi la société SAS DISTRIBUTION CASINO France n'a pas donné suite. En proposant après la rentrée des classes, une affectation distance de 900 km du lieu de résidence fixée à défaut d'affectation antérieure, la SAS DISTRIBUTION CASINO France n'a pas exécuté de bonne foi son obligation et n'a pas respecté la charte pour la mobilité du personnel d'encadrement qui prévoit une politique d'accompagnement afin notamment d'apporter une plus grande sérénité à la famille face au changements et aux difficultés matérielles et psychologiques que provoque la mobilité. Elle a persisté dans cette attitude en engageant une procédure de licenciement sans prendre en considération les arguments exposés par Olivier X... à l'appui de son refus et sans envisager une autre proposition, qui était sollicitée par Olivier X... et qu'elle n'avait pourtant pas exclue dans sa lettre du 5 septembre 2006 où elle annonçait une proposition soumise à accord. Dans ces conditions, le refus d' Olivier X... d'accepter le poste qui lui était proposé ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement,

1) ALORS QUE les juges ne peuvent méconnaître les dispositions d'un contrat qui fait la loi des parties ; qu'en l'espèce, l'avenant au contrat de travail en date du 24 octobre 2005 réglait notamment, en son article 11.3 in fine, les modalités de retour du salarié expatrié dans une filiale située à l'étranger dans les termes suivants : « En cas de rupture anticipée (de la mission d'expatriation), Olivier X... sera réintégré au sein de la société d'origine en France ou de toute autre société du groupe et affecté à un poste correspondant au niveau, à la qualification, à l'importance de ses précédentes fonctions au sein de la société d'origine, avec une rémunération au moins égale au salaire de référence mentionné à l'article 6-1 » ; qu'il résultait donc des stipulations claires et précises dudit avenant que le poste proposé au salarié lors de son retour en France devait correspondre à un poste « équivalent » à celui qu'il occupait, avant son départ, au sein de la société d'origine, i.e. au sein de la société CASINO en France, qui l'avait recruté avant qu'il ne conclut un contrat avec la filiale étrangère ; qu'en comparant le poste de reclassement proposé à Monsieur X... à son poste en Uruguay et non au poste qu'il occupait avant de s'expatrier, la Cour d'appel a méconnu la loi des parties et a violé les dispositions de l'article 1134 du Code civil ;

2) ALORS QUE l'atteinte qui est susceptible d'être portée au droit à la vie personnelle et familiale du salarié par la mise en ..uvre d'une clause de mobilité est licite lorsqu'elle est justifiée par la nature de la tâche à accomplir par le salarié et proportionnée au but recherché ; qu'en se bornant à relever, pour affirmer que l'employeur n'avait pas exécuté de bonne foi son obligation de reclassement, qu'il avait proposé à Monsieur X..., après la rentrée des classes, une affectation de 900 km du lieu de résidence fixée à défaut d'affectation antérieure, sans expliquer en quoi l'atteinte ainsi portée à la vie familiale de l'intéressé était excessive notamment au regard des possibilités de scolariser ses enfants en cours d'année dans un établissement de Dôle, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles 1134 et L.122-14-3 du Code du travail ;

3) ALORS QU'une mutation décidée en application d'une clause de mobilité ne constitue qu'un changement dans les conditions de travail qui s'impose au salarié, sauf à caractériser l'existence d'un abus de l'employeur dans l'exercice de son pouvoir de direction ; qu'en se bornant, pour retenir l'existence d'un abus, à relever que la société avait persisté dans son attitude en engageant une procédure de licenciement sans prendre en considération les arguments exposés par Olivier X... à l'appui de son refus et sans envisager une autre proposition, qui était sollicitée par Olivier X... et qu'elle n'avait pourtant pas exclue dans sa lettre de proposition du 5 septembre 2006 où elle annonçait une proposition soumise à accord, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'existence d'un abus par l'employeur dans la mise en ..uvre de la clause de mobilité et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-14-3, L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du Code du travail ;

4) ALORS QUE les juges doivent préciser l'origine des renseignements de fait qui ont servi à motiver leur décision, dès lors en affirmant péremptoirement que la société CASINO n'avait pas pris en compte les arguments de Monsieur X..., sans préciser d'où elle avait tiré cette information controuvée par les documents produits par la société CASINO, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile,


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-40121
Date de la décision : 01/02/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 21 novembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 01 fév. 2011, pourvoi n°09-40121


Composition du Tribunal
Président : M. Linden (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blanc, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.40121
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