LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 janvier 2010) statuant en référé, que M.
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a été engagé le 1er décembre 1990 par la societé Diac, que son contrat de travail a été repris par la societé Axa assistance France à compter du 1er janvier 2009, qu'il a été convoqué par cette societé le 11 février 2009 à un entretien préalable à éventuel licenciement fixé au 25 février, et licencié le 9 mars 2009, date à laquelle il a été inscrit sur la liste des conseillers des salariés par arrêté du préfet des Hauts-de-Seine, ce dont l'employeur a été informé par la direction départementale du travail et de l'emploi par lettre du 25 mars ; qu'il a saisi la formation de référé du conseil de prud'hommes pour demander sa réintégration sous astreinte ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le second moyen :
Attendu que M.
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fait grief à l'arrêt infirmatif de dire qu'il n'y a pas lieu à référé sur sa demande de réintégration dans l'entreprise sous astreinte, alors, selon le moyen :
1°/ que le salarié dont la candidature à l'inscription sur la liste des conseillers du salarié a été transmise à la DDTE et portée à la connaissance de l'employeur, lors de l'entretien préalable, bénéficie du statut protecteur accordé au conseiller du salarié ; qu'en décidant que la connaissance par l'employeur de l'imminence de la désignation de M.
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en qualité de conseiller du salarié, effectivement désigné par arrêté du 9 mars 2009, était sans effet sur la solution du litige, car une telle proposition faite à la DDTE ne signifiait pas que sa candidature serait retenue, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-21 du code du travail ;
2°/ que la connaissance par l'employeur de l'imminence de la désignation d'un salarié en qualité de conseiller du salarié, acquise lors de l'entretien préalable, donc avant l'envoi de la lettre de licenciement, l'oblige à solliciter l'autorisation de l'inspecteur du travail avant de pouvoir procéder à son licenciement ; qu'en décidant qu'était sans effet, l'information portée à la connaissance de l'employeur, lors de l'entretien préalable, de la candidature antérieure de M.
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à l'inscription sur la liste de conseillers du salarié, car elle était postérieure à la convocation à l'entretien préalable, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-21 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que l'information donnée à l'employeur de l'imminence de l'inscription de M.
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sur la liste des conseillers du salarié était intervenue postérieurement à l'envoi de la convocation à l'entretien préalable, de sorte que son licenciement qui n'était pas soumis à l'autorisation de l'inspecteur du travail ne constituait pas un trouble manifestement illicite, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M.
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aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par M. Béraud, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du dix-neuf janvier deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat aux Conseils pour M.
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PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de M.
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tendant à voir constater que son licenciement était constitutif d'un trouble manifestement illicite, par conséquent ordonner sa réintégration, sous astreinte ;
AUX MOTIFS QU'en application des articles R. 1455-5 et R. 1455-6 du code du travail, dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence du conseil de prud'hommes, ordonner toute mesure qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ; même en présence d'une contestation sérieuse, elle peut prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; en outre, selon l'article R. 1455-7 du même code, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Le fait qu'une partie qualifie sa contestation de sérieuse ne suffit pas à priver la formation de référé de ses pouvoirs ; aucune démonstration d'urgence n'est nécessaire si l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
En l'espèce, le salarié s'est placé exclusivement sur le terrain du trouble illicite, demandant sa réintégration, sans demander de paiement de sommes ; le trouble illicite doit découler de la violation alléguée comme évidente ; il appartient à celui qui se prévaut de trouble de démontrer la réunion de ces éléments.
Monsieur
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prétend en résumé que le trouble serait constitué du fait de la cause du licenciement (violation alléguée de son droit de libre expression dans l'entreprise), du fait d'un non-respect de la procédure de licenciement (insuffisance d'un délai) et du fait de la violation de son statut protecteur de conseiller du salarié.
Sur la cause du licenciement
Il n'appartient en aucun cas à la juridiction des référés d'analyser la pertinence des motifs du licenciement, et de retenir que les motifs invoqués dans la lettre seraient fallacieux, de sorte qu'un autre motif réel et non conforme serait à retenir.
En tout état de cause, les premiers juges ont retenu que l'atteinte alléguée n'est pas établie, le salarié n'apportant aucun élément pouvant être constitutif d'une preuve d'atteinte et reconnaissant au contraire s'être sur tous les points qu'il souhaitait lors de la réunion collective du 2 février 2009, avec réponse apportée par les représentants de l'employeur ;
ALORS QUE le licenciement fondé en réalité sur l'exercice du droit d'expression d'un salarié est constitutif d'un trouble manifestement illicite que le juge des référés peut faire cesser, en prescrivant les mesures de remise en état qui s'imposent ; qu'en jugeant qu'il n'appartenait pas à la juridiction des référés d'analyser la pertinence des motifs du licenciement, la cour d'appel a méconnu l'étendue des pouvoirs qu'elle tient de l'article R. 1455-6 du code de travail et a violé cet article.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à référé sur la demande de M.
X...
tendant à voir constater que son licenciement était constitutif d'un trouble manifestement illicite, par conséquent ordonner sa réintégration, sous astreinte ;
AUX MOTIFS QU'en application des articles R. 1455-5 et R. 1455-6 du code du travail, dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence du conseil de prud'hommes, ordonner toute mesure qui ne se heurte à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend ; même en présence d'une contestation sérieuse, elle peut prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; en outre, selon l'article R. 1455-7 du même code, dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Le fait qu'une partie qualifie sa contestation de sérieuse ne suffit pas à priver la formation de référé de ses pouvoirs ; aucune démonstration d'urgence n'est nécessaire si l'obligation n'est pas sérieusement contestable.
En l'espèce, le salarié s'est placé exclusivement sur le terrain du trouble illicite, demandant sa réintégration, sans demander de paiement de sommes ; le trouble illicite doit découler de la violation alléguée comme évidente ; il appartient à celui qui se prévaut de trouble de démontrer la réunion de ces éléments.
Monsieur
X...
prétend en résumé que le trouble serait constitué du fait de la cause du licenciement (violation alléguée de son droit de libre expression dans l'entreprise), du fait d'un non-respect de la procédure de licenciement (insuffisance d'un délai) et du fait de la violation de son statut protecteur de conseiller du salarié.
(…)
Sur le statut de conseiller du salarié
L'éviction d'un salarié protégé, qui ne peut intervenir, en application des articles 1232-14, L. 2411-1 et L. 2411-21 du code du travail, qu'après autorisation de l'inspecteur du travail est, si elle est irrégulière de ce chef, et donc nulle, constitutive de trouble manifestement illicite ; la réintégration est prononcée quand elle est demandée.
Il n'est pas contesté que la société Axa Assistance n'a sollicité aucune autorisation de l'inspection du travail pour décider de licencier Monsieur X... le 9 mars 2009.
La qualité de salarié protégé du fait de l'exercice de fonctions de conseiller du salarié résulte exclusivement d'une décision préfectorale, prise par voie d'arrêté, au visa des dispositions des articles L. 1231-1 et D1232-5 du code du travail et des propositions du Directeur départemental du travail et de l'emploi.
En l'espèce, l'arrêté de nomination de Monsieur
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date du 9 mars 2009, jour même du licenciement, mais son existence ne résulte pas pour les tiers, dont l'employeur, de ses seule formalisation et signature par le Préfet des Hauts de Seine ; il doit faire l'objet d'une publication au recueil des actes administratifs pour devenir opposable.
La publication du 15 mars 2009, assortie d'une diffusion concomitante de la liste dans les préfecture, sous-préfecture, sections d'inspections du travail et mairies du département, est nettement postérieure au licenciement.
Aucune information antérieure à l'intention de la société Axa Assistance n'a été faite par la direction départementale du travail, qui a seulement avisé de la nomination par courrier daté du 25 mars 2009 et réceptionné après cette date.
A l'instar des conseillers prud'homaux, le conseiller du salarié exerce son mandat hors de l'entreprise de son employeur ; la protection particulière n'est pas le fait d'une situation personnelle connue de lui seul, mais résulte de l'investiture par l'autorité administrative départementale d'une fonction publique d'intérêt général ; mais le mode de publication rendant opposable aux tiers concernés les actes administratifs généraux du département est la publication du recueil des actes administratifs de ce département ; s'agissant d'un mandat nouveau et non exercé antérieurement, l'employeur ne peut avoir eu raisonnablement et de bonne foi connaissance avant la publication de l'arrêté au recueil précité.
L'information reçue d'une présentation de candidature par une organisation syndicale, d'ailleurs en l'espèce postérieure à la lettre de convocation à entretien préalable, est sans effet sur la solution du litige, dès lors qu'une proposition faite à la Direction du travail ne signifie en rien que la candidature sera retenue.
Il résulte de l'ensemble de ces éléments que Monsieur
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ne peut se prévaloir d'une qualité de conseiller du salarié opposable à la société Axa Assistance, ni au jour de l'engagement de la procédure de licenciement, ni au jour de celui-ci.
Il n'y a donc pas eu violation manifeste d'un statut de salarié protégé et il n'y a eu aucun trouble manifestement illicite subi par l'intimé.
ALORS D'UNE PART QUE le salarié dont la candidature à l'inscription sur la liste des conseillers du salarié a été transmise à la DDTE et portée à la connaissance de l'employeur, lors de l'entretien préalable, bénéficie du statut protecteur accordé au conseiller du salarié ; qu'en décidant que la connaissance par l'employeur de l'imminence de la désignation de M.
X...
en qualité de conseiller du salarié, effectivement désigné par arrêté du 9 mars 2009, était sans effet sur la solution du litige, car une telle proposition faite à la DDTE ne signifiait pas que sa candidature serait retenue, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-21 du code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART QUE la connaissance par l'employeur de l'imminence de la désignation d'un salarié en qualité de conseiller du salarié, acquise lors de l'entretien préalable, donc avant l'envoi de la lettre de licenciement, l'oblige à solliciter l'autorisation de l'inspecteur du travail avant de pouvoir procéder à son licenciement ; qu'en décidant qu'était sans effet, l'information portée à la connaissance de l'employeur, lors de l'entretien préalable, de la candidature antérieure de M.
X...
à l'inscription sur la liste de conseillers du salarié, car elle était postérieure à la convocation à l'entretien préalable, la cour d'appel a violé l'article L. 2411-21 du code du travail.