LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte aux consorts X... du désistement de leur pourvoi incident ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 février 2009), que le 9 juin 1998, Mme Y... a assigné les époux X...-A... et leur neveu M. Stéphane A... devant le tribunal d'instance aux fins de bornage de leurs propriétés ; qu'après dépôt du rapport de l'expert judiciaire, ce tribunal, constatant que le litige nécessitait que soit tranchée la question de la propriété de la parcelle D 19, s'est déclaré incompétent et a renvoyé les parties devant le tribunal de grande instance ; que M. X... et son épouse Mme A... étant décédés, leurs enfants, Mme Michèle X... divorcée B..., M. Gérard X... et M. Robert X..., venant aux droits de leurs parents (les consorts X...-A...) sont intervenus volontairement à l'instance ; que le 30 janvier 2006, Mme Y... a assigné en intervention forcée MM. Gilbert et Claude A..., bénéficiaires d'un acte de donation en nue-propriété de la part de leur père, M. Stéphane A... (les consorts A...) ; que devant cette juridiction, chacune des parties a revendiqué l'entière propriété de la parcelle D 19, mentionnée au cadastre comme une " impasse ", les consorts X...-A... acceptant de consentir à Mme Y... une servitude de passage ; que cette dernière a régularisé des inscriptions de faux incident visant deux documents : un plan dressé par un géomètre-expert et un acte authentique ; que par arrêt avant dire droit du 7 novembre 2008, la cour d'appel a ordonné la communication du dossier de procédure au ministère public ;
Sur le premier moyen, après avis de la deuxième chambre, les avocats ayant été informés de cette demande d'avis :
Attendu que Mme Y... fait grief à l'arrêt attaqué d'être été rendu au vu de l'avis écrit du ministère public, alors, selon le moyen, que l'avis écrit du ministère public n'ayant pas été mis à la disposition de Mme C..., la cour d'appel a violé l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 16 et 431 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'avis écrit du ministère public, par lequel celui-ci déclare s'en rapporter, étant sans influence sur la solution du litige, ne peut être assimilé à des conclusions écrites au sens de l'article 431 du code de procédure civile et n'a pas à être communiqué aux parties ; qu'il résulte des pièces de procédure que le ministère public a visé le dossier et y a porté la mention " s'en rapporte " ; que dès lors, cet avis n'avait pas à être communiqué aux parties ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que Mme Y... et les consorts X...-A... revendiquaient l'utilisation de la parcelle D 19 depuis longtemps, retenu souverainement que Mme Y... ne pouvait se prévaloir d'une possession trentenaire continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée, a, tirant les conséquences légales de ses propres constatations, légalement justifié sa décision ;
Sur le troisième moyen, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant relevé, se référant aux pièces soumises à son examen qu'elles a analysées, que l'impasse cadastrée D 19, utilisée depuis de très nombreuses années par les propriétaires riverains, servait exclusivement à la communication entre les fonds situés auparavant dans une zone agricole ou à leur exploitation, la cour d'appel, qui a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que cette impasse dont l'usage était commun à ses riverains, était un chemin d'exploitation, au sens de l'article L. 162-1 du code rural, retenant exactement que l'urbanisation totale des lieux ne faisait pas disparaître la qualité du chemin lequel, en l'absence de titres, était présumé appartenir aux propriétaires riverains avec l'usage commun à tous les intéressés, a, sans modifier les termes du litige, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du dix-neuf janvier deux mille onze par Mme Bellamy, conformément à l'article 452 du code de procédure civile.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Laugier et Caston, avocat aux Conseils, pour Mme Y..., demanderesse au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR été rendu au vu de l'avis écrit du Ministère public ;
ALORS QUE l'avis écrit du Ministère public n'ayant pas été mis à la disposition de l'exposante, la Cour d'appel a violé l'article 6. 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les articles 16 et 431 du Code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame C... de son action en revendication de la parcelle D19, et d'AVOIR confirmé le jugement de première instance qui a dit que la parcelle en nature d'impasse d'une surface de 60 m ² environ, située à MARSEILLE 13015, quartier Borel, cadastrée section D numéro 19, qui donne sur le chemin de la Malette est un chemin d'exploitation au sens de l'article L. 162-1 du Code rural ;
AUX MOTIFS QUE comme l'a constaté à bon droit le premier juge, Mme C... ne peut pas se prévaloir d'une possession trentenaire continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire, puisque notamment plusieurs actions en référé ont été intentées par ses adversaires afin d'obtenir la liberté de passage ; que par ordonnance de référé du 13 février 1998 elle a été condamnée à enlever un portail et que par ordonnance du 19 novembre 1999, elle a été condamnée à laisser en permanence l'assiette du chemin libre de toute entrave à une libre circulation des riverains ; que l'absence de possession paisible s'oppose effectivement à la prescription acquisitive ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'alors que ne sont pas produites les fiches d'immeubles de toutes les parcelles concernées, les documents qui permettraient de connaître la correspondance entre anciens (1536 à 1539) et nouveaux numéros de parcelle, que l'acte de Me D... du 25. 7. 1947, premier titre produit fondant la propriété des défendeurs ne comporte ni référence cadastrale, ni désignation d'un chemin ou d'une impasse, que la référence à la parcelle D19 n'est faite que dans l'exposé des motifs des actes des 1. 7. 1970 et 25. 4. 1985, partie de ces actes qui n'opèrent pas translation de propriété, ce qui a pu induire en erreur les défendeurs, Alice C... épouse Y... n'est pas en mesure de produire un acte notarié révélant sa qualité de propriétaire de ladite parcelle, qu'elle ne peut, en raison des actes de violence, stigmatisés à plusieurs reprises par le juge des référés, invoquer la prescription acquisitive ; que les parties ne sont pas fondées à revendiquer la propriété de la parcelle litigieuse ; qu'en effet, pour pouvoir prescrire utilement il faut prouver l'existence d'une possession trentenaire continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire (article 2229 du Code civil) ; que les actes de pure faculté, de simple tolérance ou de violence ne peuvent fonder une possession capable d'opérer la prescription, la possession utile ne commençant que lorsque la violence a cessé (articles 2232, 2233 et 2235 du Code civil) ; qu'il n'y a donc pas lieu de faire droit à l'action en revendication formée par Alice C... épouse Y... et par les défendeurs ;
1°) ALORS QUE les causes qui empêchent la prescription de courir, ou qui en interrompent le cours, n'ont d'effet que si la prescription n'est pas encore acquise ; que, dès lors que Madame C... faisait valoir que « les consorts C... jouissent depuis 1952 de leur propriété, fonds sur lequel est implantée l'assiette du chemin incriminé » pour soutenir qu'elle avait acquis ce chemin par prescription trentenaire, les juges du fond n'ont pas donné de base légale à leur décision, au regard de l'article 2229 (ancien) du Code civil en se référant à des décisions de justice rendues entre les parties à partir de 1998 pour dire que Madame C... « ne peut pas se prévaloir d'une possession trentenaire continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque et à titre de propriétaire », sans constater qu'à cette date la prescription invoquée par Madame C... n'était pas acquise ;
2°) ALORS QUE seule une assignation délivrée par une personne qui revendique la propriété d'un bien, délivrée au possesseur de ce bien, interrompt la prescription acquisitive ; que tel n'est pas le cas d'une assignation faisant valoir un droit de passage sur la propriété d'un tiers ; qu'en énonçant, pour dire que Madame C... ne pouvait pas se prévaloir de la prescription acquisitive et se dire propriétaire du chemin cadastré D19, que « plusieurs actions en référé ont été intentées par ses adversaires afin d'obtenir la liberté de passage », ce qui n'implique pas une revendication de la propriété du chemin, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 2229 et 2244 (anciens) du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Madame C... de son action en revendication de la parcelle D19, d'AVOIR confirmé le jugement de première instance qui a dit que la parcelle en nature d'impasse d'une surface de 60 m ² environ, située à MARSEILLE 13015, quartier Borel, cadastrée section D numéro 19, qui donne sur le chemin de la Malette est un chemin d'exploitation au sens de l'article L. 162-1 du Code rural, et d'AVOIR ordonné la publication de son arrêt à la Conservation des hypothèques ;
AUX MOTIFS QUE le premier juge a retenu à juste titre que les explications des parties et les documents versés par elles confirmaient que l'impasse cadastrée D19 était utilisée depuis de très nombreuses années par les propriétaires riverains et qu'elle servait à la communication entre les fonds situés auparavant dans une zone agricole ; qu'il en résulte donc que cette impasse, prolongée par un trait en pointillé sur le plan annexé au rapport de l'expert Jérôme F..., constitue un chemin servant exclusivement à la communication entre divers fonds ou à leur exploitation ; que l'urbanisation totale des lieux ne fait pas disparaître la qualité du chemin rural lequel, en l'absence de titres, est présumé appartenir aux propriétaires riverains avec l'usage commun à tous les intéressés ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement entrepris ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il n'y a pas lieu de faire droit à l'action en revendication formée par Alice C... épouse Y... et par les défendeurs ; que néanmoins il résulte des explications des parties et des documents versés par elles que comme leurs auteurs, elles utilisent depuis de très nombreuses années l'impasse cadastrée D19, qui sert à la communication entre les fonds situés auparavant dans une zone agricole, comme le montrent les anciens actes notariés ; qu'alors qu'il n'y a pas de titre définissant le statut de cette impasse dont l'usage est commun à ses riverains, celle-ci doit être qualifiée de chemin d'exploitation, au sens de l'article L. 162-1 du Code rural ;
1°) ALORS QUE le juge, lié par les conclusions des parties, doit se prononcer seulement sur la demande ; que tant Madame C... que les consorts X... – A... revendiquaient, chacun, la propriété exclusive de la parcelle D19, de sorte qu'il incombait à la Cour d'appel de dire seulement si l'une ou l'autre de ces parties rapportait la preuve du droit qu'elle revendiquait ; qu'en décidant cependant que la parcelle ainsi revendiquée constituait un chemin d'exploitation, ce que les parties excluaient expressément, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige et a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE, subsidiairement, qu'en se bornant à faire état des « explications des parties » et des « documents versés par elles » pour dire que « l'impasse cadastrée D19 était utilisée depuis de très nombreuses années par les propriétaires riverains et qu'elle servait à la communication entre les fonds situés auparavant dans une zone agricole », et en tirer que la parcelle D19 était un chemin d'exploitation, sans préciser autrement les « explications des parties », ni indiquer sur quels documents elle se fondait, la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 162-1 du Code rural ;
3°) ALORS QUE, subsidiairement, pour constituer un chemin d'exploitation, un chemin doit présenter un avantage pour les fonds qu'il borde ; qu'en décidant que la parcelle D19 bordée par les fonds de Madame C... et des consorts X... – A... constituait un tel chemin au seul motif que cette parcelle « était utilisée depuis de très nombreuses années par les propriétaires riverains et qu'elle servait à la communication entre les fonds situés auparavant dans une zone agricole », sans rechercher si elle présentait un avantage pour les consorts X... – A..., ce que contestait Madame C..., la Cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 162-1 du Code rural