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19/01/2011 | FRANCE | N°09-43547

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 janvier 2011, 09-43547


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., mis à disposition de la société Logiss à compter du 15 février 2002 dans le cadre de contrats de travail temporaire, puis engagé par cette société par contrats à durée déterminée, dont le dernier venait à échéance le 15 mai 2003, a saisi le conseil de prud'hommes pour demander la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée, pour qu'il soit jugé que son licenciement intervenu alors qu'il participait à un mouvement de grèv

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., mis à disposition de la société Logiss à compter du 15 février 2002 dans le cadre de contrats de travail temporaire, puis engagé par cette société par contrats à durée déterminée, dont le dernier venait à échéance le 15 mai 2003, a saisi le conseil de prud'hommes pour demander la requalification de la relation contractuelle en contrat à durée indéterminée, pour qu'il soit jugé que son licenciement intervenu alors qu'il participait à un mouvement de grève est nul, obtenir sa réintégration et le paiement de diverses sommes ;
Sur le second moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le premier moyen du pourvoi principal :
Vu les articles L. 2511-1, L. 1132-1 et L. 1134-1 du code du travail ;
Attendu que lorsqu'un salarié allègue que la rupture du contrat de travail est intervenue en raison de sa participation à un mouvement de grève, il appartient à l'employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à l'exercice normal du droit de grève ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande en nullité du licenciement, l'arrêt retient qu'il résulte des attestations produites par celui-ci qu'une partie du personnel de la société se trouvait en grève depuis le 12 mai 2003 et que lui-même figurait au nombre des grévistes jusqu'à la rupture de son contrat de travail, mais qu'il ressort de l'ensemble des explications des parties que cette rupture n'avait aucun lien avec le mouvement de grève auquel il a participé, mais résultait uniquement de la survenance du terme du contrat de travail prétendument conclu pour une durée déterminée, alors que les parties se trouvaient, par l'effet de la requalification, liées par un contrat de travail à durée indéterminée depuis le 15 février 2002, que le licenciement de M. X... n'était donc pas nul, mais seulement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la relation de travail avait été irrégulièrement rompue au cours d'un mouvement de grève auquel le salarié participait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande au titre de la nullité de son licenciement, et a condamné la société au paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité de préavis, l'arrêt rendu le 29 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne la société Logiss aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la société Logiss à payer à la SCP Didier et Pinet la somme de 2 500 euros, à charge pour cette dernière de renoncer à percevoir l'indemnité prévue par l'Etat ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de l'union locale CGT ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour M. X..., demandeur au pourvoi principal
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande tendant à voir dire que la rupture des relations contractuelles intervenue le 15 mai 2003 s'analyse en un licenciement nul par application de l'article L. 2511-1 du code du travail ;
AUX MOTIFS QUE les parties conviennent à l'audience que la relation de travail a pris fin le 15 mai 2003 comme le prévoyait l'avenant de renouvellement du 14 novembre 2002 ; que la survenance du terme d'un contrat de travail à durée déterminée ultérieurement requalifié en contrat à durée indéterminée ne constituant pas un motif licite de rupture, celle-ci s'analyse en un licenciement ; qu'il résulte des attestations produites par monsieur X... qu'une partie du personnel de la société Logiss se trouvait en grève depuis le 12 mai 2003 et que lui-même figurait bien au nombre des grévistes jusqu'à la rupture de son contrat de travail ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 2511-1 (anciennement L. 521-1) du code du travail que l'employeur ne peut, à peine de nullité, licencier un salarié en raison de sa participation à un mouvement de grève ou de la commission, au cours de celle-ci, d'une faute qui ne peut être qualifiée de faute lourde ; que tel n'est pas le cas en l'espèce ; qu'il ressort en effet de l'ensemble des explications des parties que la rupture du contrat de travail de monsieur X... n'a aucun lien avec le mouvement de grève auquel il a participé et résulte uniquement de la survenance du terme du contrat de travail prétendument conclu pour une durée déterminée alors que les parties se trouvaient, par l'effet de la requalification, liées par un contrat à durée indéterminée depuis le 15 février 2002 ; que le licenciement de monsieur X... n'est pas nul, ainsi qu'il le prétend, mais seulement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que l'article 19 de la convention collective nationale du personnel des prestataires de services dans le domaine du secteur tertiaire fixe à un mois la durée du préavis pour les employés dont l'ancienneté est inférieure à deux années ; que monsieur X..., qui avait été engagé le 15 février 2002, est donc en droit de prétendre au paiement d'une indemnité compensatrice de préavis représentant un mois de salaire ; que la moyenne mensuelle brute des trois derniers mois complets d'activité était de 1.620,73 euros ; qu'il convient, en conséquence, de condamner la société Logiss à payer à monsieur X... la somme brute de 1.620,73 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et la somme brute de 162,07 euros au titre des congés payés sur préavis, avec intérêts au taux légal à compter du 4 décembre 2008, date de l'audience au cours de laquelle les demandes d'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis ont été présentées pour la première fois ; que les dispositions de l'article L. 1235-5 (anciennement L. 122-14-5) du code du travail sont applicables et monsieur X... peut prétendre au paiement d'une indemnité réparant le préjudice né de la perte de son emploi ; qu'il justifie avoir été pris en charge par l'Assedic jusqu'au 1er décembre 2005 puis, à nouveau, du 11 mai 2006 au 30 septembre 2007 ; qu'il ne produit cependant aucune pièce relative aux circonstances ayant donné lieu à la seconde période de chômage ; qu'au vu de l'ensemble des documents soumis à son appréciation, la cour est en mesure d'évaluer le préjudice qu'il a subi à la somme de 4.800 euros au paiement de laquelle la société Logiss sera condamnée, à titre de dommages-intérêts ;
1°) ALORS QUE l'exercice du droit de grève ne peut justifier la rupture du contrat de travail, sauf faute lourde imputable au salarié ; que tout licenciement prononcé en l'absence de faute lourde est nul de plein droit ; que pour débouter monsieur X... de ses demandes, la cour d'appel a retenu que la rupture de son contrat de travail n'a aucun lien avec le mouvement de grève auquel il a participé et résulte uniquement du terme de son contrat de travail à durée déterminée ; qu'en statuant ainsi après avoir constaté que l'employeur avait irrégulièrement mis fin à la relation de travail le 15 mai 2003, au cours d'une grève qui s'est poursuivie jusqu'au 23 mai 2003, sous le prétexte de la survenance du terme d'un contrat de travail à durée déterminée qu'elle a requalifié en contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article L. 2511-1 du code du travail ;
2°) ALORS QU 'il appartient à l'employeur, lorsque la rupture du contrat de travail intervient irrégulièrement au cours d'une grève, d'apporter la preuve que celle-ci est sans rapport avec le fait de grève ; qu'en retenant qu'il ressort de l'ensemble des explications des parties que la rupture du contrat de travail de monsieur X... n'a aucun lien avec le mouvement de grève auquel il a participé après avoir constaté que le salarié figurait bien au nombre des grévistes jusqu'à la rupture de son contrat de travail et que la rupture du contrat de travail le 15 mai 2003 pour survenance du terme du contrat à durée indéterminée, était irrégulière, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1315 du code civil, ensemble les articles L. 2511-1, L. 1132-1 et L. 1132-2 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué infirmatif de ce chef d'AVOIR débouté monsieur X... de ses demandes relatives à la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée.
AUX MOTIFS QUE la relation de travail requalifiée en contrat à durée indéterminée, s'est poursuivie dans ce cadre après le 20 mai 2002 peu important que les parties aient conclu un contrat à durée déterminée prenant effet le 21 mai 2002 ; que monsieur X... n'est donc pas fondé à soutenir, en invoquant la fausseté du recours visé par ce contrat, que celui-ci doit être également requalifié ;
1°) ALORS QUE le juge ne peut refuser de statuer sur la demande dont il est saisi ; que la requalification par le juge de contrats de travail temporaire en un contrat à durée indéterminée ne le dispense pas de statuer sur la demande en requalification en contrat à durée indéterminée d'un contrat à durée déterminée conclu avec l'entreprise utilisatrice ; qu'en refusant d'examiner les motifs du recours au contrat à durée déterminée prenant effet au 27 mai 2002, la cour d'appel a méconnu son office en violation de l'article 4 du code civil ;
2°) ALORS QU 'un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire et seulement dans les cas prévus par l'article L. 1242-2 du code du travail ; qu'en s'abstenant de rechercher si le motif du contrat à durée déterminée du 27 mai 2002, pris du surcroit d'activité temporaire résultant de la saison haute était justifié, quand il était soutenu que la saison haute durait en fait presque toute l'année et que le graphique versé aux débats ne faisait ressortir, à l'exception du mois d'août de chaque année, que des variantes mesurées d'activité et une activité régulière au fil de l'année, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1242-2 du code civil ;
3°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, monsieur X... faisait valoir que le motif d'accroissement temporaire d'activité lié à la saison haute ne pouvait être retenu pour justifier la conclusion d'un contrat à durée déterminée le 21 mai 2002, successivement aux contrats de travail temporaire, puis son renouvellement immédiat le 14 novembre 2002 un jour avant son terme ; que la succession de ces contrats pour le même motif montre en effet que la saison haute invoquée aurait une durée d'environ neuf mois ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Logiss, demanderesse au pourvoi incident
Il est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR requalifié la mission d'intérim ayant débuté le 15 février 2002 en contrat de travail à durée indéterminée, D'AVOIR en conséquence condamné la société LOGISS à payer au salarié la somme de 1.800 euros à titre d'indemnité de requalification, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt, la somme de 162,07 euros au titre du congés payés sur préavis, la somme de 4.800 euros au titre des dommages-intérêts pour rupture abusive, et la somme de 800 euros à titre d'indemnités pour non respect de la procédure de licenciement. et D'AVOIR condamné la société LOGIS à payer à l'UNION LOCALE une somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts, l'ensemble de ces condamnations donnant lieu à capitalisation dans les conditions prévues par l'article 1154 du Code civil
AUX MOTIFS QUE sur la requalification des contrats de travail temporaire: Sont produits aux débats: - Un contrat de mission conclue entre la société Manpower et M. X..., non signé par ce dernier, engageant le salarié, en qualité de préparateur de commande et cariste, en vue d'une mise à disposition de la société Logiss du 15 au 22 février 2002, le terme pouvant être avancé au 20 février 2002 ou reporté au 26 février 2002, en raison «d'un accroissement temporaire d'activité» à savoir «préparations urgentes GME justifiant un renfort d'équipe»; - Un avenant de renouvellement d'un contrat de mission conclu entre la société Manpower et M. X..., initialement mis à la disposition de la société Logiss du 18 au 22 mars 2002, en raison «d'une commande GME nécessitant un renfort de personnel», portant sur la période du 23 au 29 mars 2002, le terme pouvant être avancé au 27 mars 2002 ou reporté au 3 avril 2002; - Divers bulletins de paie remis par la société Manpower à M. X..., préparateur de commandes et cariste, portant sur les périodes suivantes : 15 février 2002 ; 18 au 22 février 2002 ; 25 février au 1er mars 2002 ; 4 au 15 mars 2002 ; 11 au 15 mars 2002 ;18 au 29 mars 2002 ; 1er au 30 avril 2002 ; 1er au 20 mai 2002. La société Logiss reconnaît que M. X... a bien été mis à sa disposition par la société Manpower du 15 février au 20 mai 2002. Alors que la preuve de l'accroissement temporaire d'activité ayant motivé le recours à ces missions d'intérim lui incombe, elle produit uniquement une courbe retraçant l'évolution de son activité au cours des années 2002 à 2004. Cette courbe fait apparaître des pics durant l'été mais des creux aux mois de février à mai qui correspondent précisément à la période concernée par les missions d'intérim. Aucune pièce n'établit la réalité d'un surcroît d'activité au mois de février 2002. La société Logiss ne justifie donc pas du motif de recours au travail temporaire visé par le premier contrat de mission et n'établit pas, de ce fait, que le recours au travail temporaire était justifié par l'une des causes énumérées par l'article L. 1251-6 et L. 1251-7 (anciennement L. 124-2-1 et L. 124-2- l-1) du Code du travail. M. X... est dès lors en droit de faire valoir, à l'égard de l'entreprise utilisatrice, les droits afférents à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de cette mission, soit le 15 février 2002, par application de l'article L.125 l-40 (anciennement L.124-7, alinéa 2) du même code. Aux termes de l'article L. 1251-41 (anciennement L. 124-7-1) du Code du travail le juge qui fait droit à une demande en requalification d'une mission d'intérim en contrat à durée indéterminée doit accorder au salarié, à la charge de l'utilisateur, une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire. La société Logiss sera à ce titre condamnée à payer à M. X... la somme de 1800 €, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.- Sur la requalification du contrat de travail à durée déterminée: La relation de travail, requalifiée en contrat à durée indéterminée, s'est poursuivie dans ce cadre après le 20 mai 2002 peu important que les parties aient conclu un contrat à durée déterminée prenant effet le 21 mai 2002. M. X... n'est donc pas fondé à soutenir, en invoquant la fausseté du motif de recours visé par ce contrat, que celui-ci doit être également requalifié.
ALORS QUE la méconnaissance des dispositions encadrant le recours au contrat de travail temporaire faute pour l'employeur de pouvoir justifier le surcroît d'activité visé dans le contrat, si elle porte atteinte aux intérêts du salarié demandeur, ne porte pas d'atteinte aux intérêts collectifs de la profession ; qu'en jugeant du contraire, pour accorder une indemnité de 500 euros à l'union locale CGT à raison de la prétendue méconnaissance par l'employeur des cas de recours au contrat de travail temporaire, la Cour d'appel a violé l'article L. 2132-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-43547
Date de la décision : 19/01/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 29 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 jan. 2011, pourvoi n°09-43547


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.43547
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