LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé à compter du 20 novembre 2003 par M. Y... en qualité de chef d'équipe, a été licencié pour faute grave le 22 septembre 2006 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail en jugeant que le licenciement repose sur une faute grave, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en application des dispositions des articles 455 et 458 du code de procédure civile, il est de jurisprudence constante que tout jugement doit être motivé à peine de nullité et que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; en concluant dans ses motifs que le licenciement litigieux reposait sur une cause réelle et sérieuse puis en déclarant ensuite dans son dispositif que le licenciement de M. X... était fondé sur une faute grave, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre ses motifs et son dispositif et partant, violé les dispositions des articles précités ;
2°/ qu'en application de l'article L. 1232-6 du code du travail, la lettre de licenciement fixe les termes du litige de sorte que seuls les griefs qui y sont énoncés peuvent être examinés par le juge ; qu'en stigmatisant le "comportement persistant" de M. X... afin de conclure à l'existence d'une faute grave alors que le seul grief énoncé dans la lettre de licenciement du 22 septembre 2006 fixant les limites du litige concerne le chantier Bez de Maison Bourgeois et la perte des contrats de sous-traitance avec Maison Bourgeois et que les faits prescrits découlant des lettres du 10 mars et 20 juin 2006 ainsi que ceux non prescrits découlant de la lettre du 4 août 2006 sont distincts et ne sont absolument pas évoqués dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
3°/ qu'au regard de la règle énoncée dans l'article L. 1332-4 du code du travail prévoyant un délai de prescription de deux mois attaché à l'acte fautif, la jurisprudence apporte un tempérament en admettant que la réitération du fait fautif permet à l'employeur de se prévaloir de faits similaires antérieurs prescrits à la condition qu'il s'agisse de faits procédant d'un comportement identique du salarié ; qu'en se contentant d'indiquer, pour retenir le comportement persistant du salarié, que si la lettre du 4 août 2006 n'est pas visée dans la lettre de licenciement, "elle est à tout le moins de nature à caractériser la gravité du grief formulé à l'encontre de M. X... par son employeur" et que si les lettres du 10 mars et du 20 juin 2006 font état de faits antérieurs de plus de deux mois à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement litigieuse, "rien n'interdit pour autant à l'employeur de les évoquer pour renseigner la cour sur le contexte de ce dossier" sans caractériser le caractère similaire et identique au seul grief énoncé dans la lettre de licenciement tant des faits antérieurs prescrits visés par les lettres des 10 mars et 20 juin 2006 que des faits non prescrits évoqués par la lettre du 4 août 2006, ainsi que l'y invitaient pourtant les conclusions d'appel de M. X..., la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et privé ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du code du travail ;
4°/ qu'en omettant totalement de répondre au chef des conclusions d'appel de M. X... par lequel il contestait formellement être la personne désignée par M. Z... en qualité de chef d'équipe dans les lettres des 10 mars 2006, 20 juin 2006 et 4 août 2006 et soulignait que son nom ne figurait à aucun moment dans le cadre des lettres de M. Z... alors qu'elle stigmatisait le comportement persistant de M. X... qui l'avait conduit à faillir gravement dans l'exécution de sa mission de chef d'équipe, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que les faits énoncés dans la lettre de licenciement étaient établis et qui a fait ressortir que les manquements antérieurs du salarié étaient de même nature, a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, que la persistance de l'intéressé, seul chef d'équipe de l'entreprise, dans le même comportement fautif rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires l'arrêt retient que les décomptes manuscrits ont été constitués a posteriori et que le témoignage produit n'est pas probant ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'il résulte du texte susvisé que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que le juge ne peut, pour rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié et doit examiner les éléments produits et auxquels l'employeur est en mesure de répondre ;
Qu'il s'ensuit qu'en se déterminant au vu des seuls éléments fournis par le salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes relatives aux heures supplémentaires, l'arrêt rendu le 6 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf janvier deux mille onze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Luc-Thaler, avocat aux Conseils pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir dit que le licenciement de Monsieur X... repose sur une faute grave et de l'avoir débouté en conséquence de toutes ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail,
AUX MOTIFS QUE ; « «Attendu qu'il convient préalablement d'observer qu'une erreur de date affectant le contenu d'une lettre de licenciement constitue une simple erreur matérielle dès lors que la réalité et l'imputabilité au salarié licencié des faits sont s'agit sont établis par les pièces du dossier ; qu'elle ne peut à elle seule avoir pour effet de rendre le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;Attendu qu'il y a également lieu de souligner que M. Y..., aux termes de ses conclusions récapitulatives déposées devant le Conseil de Prud'hommes, a expressément évoqué l'existence d'une « erreur de plume » affectant la date des faits décrits dans la lettre de licenciement ; qu'il n'a en aucun cas passé aveu judiciaire de ce que la date du grief figurant dans ce document était bien la dernière semaine d'août, ainsi que tente de le soutenir M. X... ;Et attendu au fond que M. Y... justifie avoir reçu le 29 août 2006 de la société BAT. IMM un courrier l'informant que les travaux effectués sur le chantier BEZ à Corcelle Mieslot ne correspondaient pas à la commande (baguettes d'angle en PVC non posées, tableaux réalisés en écrasé au lieu du granité habituel, défaut d'aplomb de quelques tableaux), lui rappelant ses réclamations pour divers problèmes sur des chantiers précédents, non pris en compte par son chef d'équipe, et l'informant de sa décision de ne plus lui confier l'exécution de travaux de ravalement pour les sept chantiers restants, ni même de travaux pour l'avenir ;Et attendu qu'il est parfaitement établi à l'examen des pièces du dossier que le chantier BEZ dont s'agit n'a pas été réalisé comme indiqué par erreur dans la lettre de licenciement la dernière semaine d'août mais bien les deux dernières semaines de juillet 2006, période au cours de laquelle l'intimé n'était pas en congé ; qu'il résulte par ailleurs de l'examen du registre du personnel que M. X... était le seul chef d'équipe de l'entreprise de sorte que les griefs formulés par ce client important de M. Y... ne pouvaient que concerner ce salarié ; qu'ils n'étaient en outre aucunement prescrits ;Attendu que M. X..., en qualité de chef d'équipe, avait l'obligation d'organiser et de contrôler le travail effectué sur les chantiers ; qu'il a manifestement failli dans l'exécution de sa mission sur le chantier BEZ et que sa défaillance, venant s'ajouter à de précédentes réclamations de la société BAT. IMM,, s'est avérée grandement préjudiciable au plan financier pour son employeur ;Attendu que M. Y... justifie par ailleurs avoir reçu le 4 août 2006 une lettre de M. Z..., économiste coordinateur d'autres chantiers, évoquant des difficultés sur le chantier DELACROIS à Gonsans, protestant de la qualité du chef d'équipe qu'il qualifie «d'inadmissible » et lui demandant de prendre une décision énergique dans le remaniement de son personnel, faute de quoi il ne lui confierait plus l'exécution des façades de ses clients ; que ce document qui n'est pas visé dans la lettre de licenciement est à tout le moins de nature à caractériser la gravité du grief à l'encontre de M. X... par son employeur ;Attendu qu'il convient enfin de relever que ce même Monsieur Z... avait déjà protesté les 10 mars et 20 juin 2006 à l'occasion de deux autres chantiers ; que si ces faits sont antérieurs de plus de deux mois à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement litigieuse, rien n'interdit pour autant à l'employeur de les évoquer pour renseigner la cour sur le contexte de ce dossier ;Attendu qu'il résulte de l'ensemble de ces observations que M. X... a gravement failli dans l'exécution de sa mission de chef d'équipe, qu'il a causé un préjudice important à M. Y... et que son comportement persistant rendait impossible le maintien de son contrat de travail y compris pendant la période du préavis ; que ni les attestations qu'il produit en réplique, trop peu circonstanciées, ni le fait que son employeur lui a versé une prime qualité en juillet 2006, soit avant réception des lettres précitées du mois d'août 2006, ne sont de nature à atténuer le degré de gravité de ses agissements, visés dans la lettre de licenciement ;Attendu qu'il convient en conséquence d'infirmer la décision rendue sur ce point par les premiers juges et de dire que le licenciement pour faute grave de M. X... repose bien sur une cause réelle et sérieuse. »,
ALORS PREMIEREMENT QU'en application des dispositions des articles 455 et 458 du Code de procédure civile, il est de jurisprudence constante que tout jugement doit être motivé à peine de nullité et que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à un défaut de motifs ; en concluant dans ses motifs que le licenciement litigieux reposait sur une cause réelle et sérieuse puis en déclarant ensuite dans son dispositif que le licenciement de Monsieur X... était fondé sur une faute grave, la Cour entaché sa décision d'une contradiction flagrante entre ses motifs et son dispositif et partant, violé les dispositions des articles précités.
ALORS DEUXIEMEMENT QU'en application de l'article L.1232-6 du Code du travail, la lettre de licenciement fixe les termes du litige de sorte que seuls les griefs qui y sont énoncés peuvent être examinés par le juge ; qu'en stigmatisant le « comportement persistant » de Monsieur X... afin conclure à l'existence d'une faute grave alors que le seul grief énoncé dans la lettre de licenciement du 22 septembre 2006 fixant les limites du litige concerne le chantier BEZ de Maison Bourgeois et la perte des contrats de sous-traitance avec Maison Bourgeois et que les faits prescrits découlant des lettres du 10 mars et 20 juin 2006 ainsi que ceux non prescrits découlant de la lettre du 4 août 2006 sont distincts et ne sont absolument pas évoqués dans la lettre de licenciement, la Cour a violé de façon flagrante l'article L. 1232-6 du Code du travail.
ALORS TROISIEMEMENT QU'au regard de la règle énoncée dans l'article L. 1332-4 du Code du travail prévoyant un délai de prescription de deux mois attaché à l'acte fautif, la jurisprudence apporte un tempérament en admettant que la réitération du fait fautif permet à l'employeur de se prévaloir de faits similaires antérieurs prescrits à la condition qu'il s'agisse de faits procédant d'un comportement identique du salarié ; qu'en se contentant d'indiquer, pour retenir le comportement persistant du salarié, que si la lettre du 4 août 2006 n'est pas visée dans la lettre de licenciement, « elle est à tout le moins de nature à caractériser la gravité du grief formulé à l'encontre de Monsieur X... par son employeur » et que si les lettres du 10 mars et du 20 juin 2006 font état de faits antérieurs de plus de deux mois à la mise en oeuvre de la procédure de licenciement litigieuse, « rien n'interdit pour autant à l'employeur de les évoquer pour renseigner la Cour sur le contexte de ce dossier » sans caractériser le caractère similaire et identique au seul grief énoncé dans la lettre de licenciement tant des faits antérieurs prescrits visés par les lettres des 10 mars et 20 juin 2006 que des faits non prescrits évoqués par la lettre du 4 août 2006, ainsi que l'y invitaient pourtant les conclusions d'appel de Monsieur X... , la Cour a manifestement statué par des motifs totalement inopérants et privé ainsi sa décision de base légale au regard de l'article L. 1332-4 du Code du travail.
ALORS QUATRIEMEMENT QU'en omettant totalement de répondre au chef des conclusions d'appel de Monsieur X... par lequel il contestait formellement être la personne désignée par Monsieur Z... en qualité de chef d'équipe dans les lettres des 10 mars 2006, 20 juin 2006 et 4 août 2006 et soulignait que son nom ne figurait à aucun moment dans le cadre des lettres de Monsieur Z... alors qu'elle stigmatisait le comportement persistant de Monsieur X... qui l'avait conduit à faillir gravement dans l'exécution de sa mission de chef d'équipe, la Cour a violé de façon flagrante l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur X... de sa demande en paiement d'heures supplémentaires,
AUX MOTIFS QUE : « « Attendu en droit selon les dispositions de l'article L. 3171-4 du Code du travail, que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties ; qu'il appartient au salarié qui demande le paiement d'heures supplémentaires de fournir préalablement les éléments de nature à étayer sa demande et que le juge peut former sa conviction en fonction de ces éléments et de ceux fournis par l'employeur pour justifier des horaires effectivement réalisés selon lui par son salarié ;Et attendu que les décomptes manuscrits produits par M. X... n'ont manifestement pas été établis au fur et à mesure mais ont été au contraire constitués a posteriori pour les besoins de la procédure ; que le témoignage de M. C..., venant confirmer l'exactitude des revendications de M. X... n'est pas probant, ce salarié ayant été fréquemment absent en 2005 et 2006 ;Attendu que force est en conséquence de constater que M. X... n'apporte aucun élément sérieux de nature à étayer sa demande dont il doit être en conséquence débouté ; »,
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE : « Les documents produits au Conseil par Monsieur X... à l'appui de sa demande d'heures supplémentaires font apparaître des calculs où n'apparaissent pas la durée des temps de pause et la durée des temps de trajet, ce qui ne peut suffire à prouver les heures effectuées. Monsieur X... sera débouté de sa demande d'heures supplémentaires et de congés payés afférents. »
ALORS D'UNE PART QUE s'il résulte de l'article L. 3171-4 du Code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que toutefois le juge ne peut rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires au motif que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien fondé de sa demande ;qu'en rejetant la demande en paiement d'heures supplémentaires formée par Monsieur X... au motif que Monsieur X... n'apporte aucun élément sérieux de nature à étayer sa demande alors que ce dernier produisait aux débats un décompte manuscrit et une attestation, la Cour a donc violé de façon flagrante l'article L. 3171-4 du Code du travail.
ALORS D'AUTRE PART QU'en application de l'article L. 3171-4 du Code du travail, il est de jurisprudence constante que si la prétention du salarié est étayée par divers éléments et que l'employeur ne fournit aucun élément contraire, les juges du fond font peser la charge de la preuve sur le seul salarié en le déboutant de sa demande d'heures supplémentaires ; qu'en rejetant la demande en paiement d'heures supplémentaires formée par Monsieur X... au motif que ce dernier n'apporte aucun élément sérieux de nature à étayer sa demande alors qu'il résulte des propres constatations de la Cour que la prétention du salarié est étayée par un décompte manuscrit et un témoignage et que l'employeur ne fournit aucun élément contraire, la Cour a fait peser la charge de la preuve sur le salarié en violation manifeste de l'article L. 3171-4 du Code du travail.