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18/01/2011 | FRANCE | N°09-43088

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 janvier 2011, 09-43088


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 30 juin 2009), que M. X..., engagé le 1er août 1994 par la société Kaysersberg Packaging, devenue la société DS Smith Kaysersberg, en qualité d'ingénieur papetier, a été promu directeur de production le 15 septembre 2003 ; qu'après avoir été convoqué par lettre remise en main propre le 6 mars 2006 à un entretien fixé au 10 mars, il a été licencié le 15 mars 2006 pour insuffisance professionnelle ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à

l'arrêt de dire le licenciement de M. X...sans cause réelle et sérieuse, alors...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 30 juin 2009), que M. X..., engagé le 1er août 1994 par la société Kaysersberg Packaging, devenue la société DS Smith Kaysersberg, en qualité d'ingénieur papetier, a été promu directeur de production le 15 septembre 2003 ; qu'après avoir été convoqué par lettre remise en main propre le 6 mars 2006 à un entretien fixé au 10 mars, il a été licencié le 15 mars 2006 pour insuffisance professionnelle ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement de M. X...sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que l'insuffisance professionnelle alléguée par l'employeur constitue un motif de licenciement matériellement vérifiable qui peut être précisé et discuté devant les juges du fond ; qu'en se refusant à envisager la non réalisation par M. X...d'actions dans les délais impartis dont la société DS Smith Kaysersberg faisait état dans ses conclusions à l'appui du grief d'insuffisance professionnelle, à raison de ce que ce " motif " n'était pas mentionné dans la lettre de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
Mais attendu qu'analysant et appréciant tous les faits énoncés dans la lettre de licenciement à l'appui des griefs d'insuffisance professionnelle, la cour d'appel, dans l'exercice du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, a décidé que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société DS Smith Kaysersberg aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société DS Smith Kaysersberg à payer à M. X...la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit janvier deux mille onze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour la société DS Smith Kaysersberg
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit et jugé que le licenciement de Monsieur X...était dépourvu de cause réelle et sérieuse, d'avoir condamné la Société DS SMITH KAYSERSBERG à lui payer 40. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier en la forme et sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'une indemnité en application de l'article 700 du Code de procédure civile, et d'avoir ordonné le remboursement par la société DS SMITH KAYSERSBERG aux organismes concernés des indemnités de chômage payées au salarié licencié, dans la limite de six mois d'indemnités ;
AUX MOTIFS QUE pour caractériser l'insuffisance professionnelle reprochée, à Monsieur X..., la lettre de licenciement énonce plusieurs griefs qu'il convient d'examiner successivement ; que l'employeur fait état de " l'absence d'actions de nature à améliorer la production, la satisfaction des clients et le climat social, cette carence se traduisant par une dégradation constante des plans annuels d'industrialisation. : chutes des cadences,'baisse importantes des TRS des principales machines, augmentation importante du taux de déchets " ; que les tableaux et bilans régulièrement tenus au sein de l'entreprise démontrent pour l'essentiel une dégradation de la productivité et des paramètres de qualité ; que l'entretien annuel d'évolution du 25 juin 2004 notait " une bonne prise de responsabilité dans ses nouvelles : fonctions. (...) mais une productivité en net retrait ", et que des objectifs lui étaient assignés en termes d'amélioration de la productivité de l'usine et des machines, de réduction du taux de déchets et de respect des délais de livraison ; que l'entretien annuel du 22 juin 2005 notait que les délais de livraison avaient été tenus mais que les autres objectifs n'étaient pas atteints (productivité en retrait, taux d'arrêts et de pannes de machines en augmentation. ; auto contrôles qualité défaillants et réclamations de clients, taux de déchets, trop élevé) ; que Monsieur X...ne contestait pas ce bilan globalement négatif mais exprimait des réserves quant aux objectifs impartis pour l'exercice suivant " objectifs ambitieux avec des besoins en encadrement à couvrir (en cours de transformation) " ; que les mêmes constats assortaient du " Bilan du plan d'action industrielle " pour les années 2003/ 2004, 2004/ 2005 et 2005/ 2006,. le dernier bilan relevant les résultats, suivants : " maintenance des machines dans le cadre du budget : non atteint, formation du personnel en cours, fiabilité de l'auto contrôle : non atteint, taux de respect des délais ciblés à 95 % : non atteint (92, 49 %) ; productivité des machines : objectif d'augmentation de 5 % : pas atteint ; productivité du secteur découpe : non atteint ; productivité secteur onduleuses : partiellement atteint ; taux de déchets en augmentation " ; qu'au-delà du défaut d'atteinte des objectifs assignés, il était en réalité reproché à Monsieur X...une dégradation des principaux indicateurs de la production entre les années 2003 et 2006 ; qu'ainsi le tableau traduisant le taux de rendement des principaux équipements montrait un taux d'utilisation des différentes machines très inférieur à leur capacité, et que le tableau du taux de déchets rendait compte d'une augmentation régulière du taux de déchets de 2002/ 2003 (13, 62 %) à 2005/ 2006 (14, 30 %), laquelle n'était pas le résultat d'exigences accrues de la clientèle (taux quasi constant de 4, 5 %) mais d'erreurs de fabrication, de panes et de mauvais réglages des machines ; que la productivité générale de l'usine était en retrait, même s'il est admis que la productivité par salarié présent avait été augmentée sur l'exercice 2005/ 2006 ;
QU'il est fait grief à Monsieur X...d'une " dégradation des indicateurs qualité en matière de réclamations clients, essentiellement dues à des défaillance des auto contrôles (...) et le taux de commandes à trier s'est accru considérablement " ; que l'employeur verse aux débats de nombreux échanges de mails concernant ces réclamations, et en. particulier des mises en garde et des rappels de Monsieur
Z...
ou du Directeur commercial à Monsieur X...; que pour exemple, le 9 novembre 2005, Monsieur
Z...
adressait le mail suivant à Monsieur X...suite à la réclamation du client PIPER HEIDSIËCK " Encore un dossier, où nous subissons actuellement une réclamation pour chaque commande : décalage impression/ découpe sur deux livraisons et la troisième avec centrage rédhibitoire nécessitant l'intervention d'une personne de chez nous. Cette situation ne peut plus durer :... " : qu'à l'inverse, Monsieur X...verse aux débats de nombreux mails rendant compte de la satisfaction de clients et pour exemple le mail de Monsieur Z... du 25 juillet 2005 dans les termes suivants " Félicitations à l'équipe de fabrication qui a permis la réussite de ces premiers essais chez le client (PERNOD RICARD) dans un contexte pas facile... " ; qu'en réalité, il résulte du tableau " Surveillance de l'efficacité des processus " que si le taux des déchets augmentait et que les auto contrôles étaient insuffisants, en revanche le taux de réclamations des clients était en nette diminution (33/ 1000 en 2003/ 2004, 28/ 1000 en 2004/ 2005 et 24/ 1000 en 2005/ 2006) et satisfaisait à l'objectif annuel imparti par la direction générale ; que ce grief n'est pas établi ;
QU'il est reproché à Monsieur X...son " manque d'initiative dans la mise en oeuvre des investissements autorisés pour votre unité au point de compromettre l'autorisation de financement alors que l'équipement concerné visait à augmenter la qualité du traitement du papier et réduire le taux de déchets. Ce n'est, que sur l'intervention de la Direction de l'établissement que l'équipement sera finalement livré et installé au mieux à la fin de l'exercice " qu'il résulte du document " demande d'approbation de crédit " que le plan d'investissement pour financer le " Gabcoater " a été voté par le groupe sur le budget 2005/ 2006, et que les principaux intervenants (le directeur de site, le directeur financier, le responsable maintenance) ont contresigné ce document dans la deuxième quinzaine du mois d'octobre 2005 à l'exception de Monsieur X...dont la signature n'y figure pas ; que pour autant, l'échange de mails entre Monsieur X...et le directeur de site témoigne de ce qu'il en était informé fin octobre 2005, a procédé aux essais techniques, et le 26 décembre 2005, a rendu compte au directeur du site du résultat des négociations avec le fournisseur en indiquant que la commande serait passée début janvier 2006 ; que de fait, le détail de l'offre a été transmis par le fournisseur le 30 janvier 2006, que le bon de commande a été émis par Monsieur X...dès le 1er février 2006 et le même jour transmis pour signature à Monsieur
Z...
; que s'il résulte de l'échange de mails que Monsieur
Z...
a pressé Monsieur X...pour qu'il procède aux essais (mail du 24 octobre 2005), qu'il en fasse connaître les résultats (mail du 16 novembre 2005) puis qu'il émette au plus vite la commande (mail du 5 décembre 2005), pour autant, il n'est pas établi que Monsieur X...ait exagérément tardé dans sa démarche ;
QU'il est reproché à Monsieur X...de n'avoir pas su " gérer correctement des projets majeurs tels que le 1628, 2 installé et mis en service en début 2005. Cet investissement de 2. 745 K € devait permettre au site d'augmenter sa capacité de découpe tout en soulageant la charge du parc machines BOPST, de modifier leur cycle, de travail et de travailler sur celles-ci en 2X8 au lieu de 3X8 " ; qu'il résulte des pièces produites qu'au cours des quatre premiers mois de sa mise en service, cette, machine s'est révélée très performante et citée, en exemple pour l'ensemble des sites du groupe ; que le " Commentaire Quarter 2 2005/ 2006 " émis le 15 novembre 2005 par le directeur du site, traduisait lui aussi un bilan encourageant " il faut noter une amélioration sensible sur le 1628/ 2 qui après résolution de problèmes techniques a dépassé les 5. 000 m2/ HO... " mais que l'exercice 2005/ 2006 s'est globalement soldé par un résultat décevant (4. 372 m2/ HO par rapport à l'objectif de 6, 000 m2/ HO) ; que si selon le bilan, du plan d'action industrielle 2005/ 2006, ce résultat n'a pas permis de transférer l'activité des BOBST ni d'envisager le passage en 2X8 des BOBST, il résulte de l'audit réalisé en juin 2005 que le passage d'un temps de travail ; de 3X8 en 2X8 ne pouvait être envisagé dans le secteur découpe que sous diverses conditions dont l'une était l'allégement des machines BOBST alors saturées ;
QU'il est encore, fait état " d'un audit comportant une partie dédiée au climat social et à la motivation du personnel le diagnostic confirmant le manque de réactivité et de suivi la non réponse fréquente aux sollicitations et questions de vos collaborateurs... et. La perte de confiance du personnel envers la direction de production... " ; que cependant cet audit n'est pas produit, ni aucun élément justifiant d'une perte de confiance du personnel à l'égard de Monsieur X...;
QUE l'employeur fait état dans ses conclusions et ses pièces d'actions devant être réalisées par le salarié et qui ne l'ont pas été dans les délais impartis, mais que ce motif n'est pas mentionné dans la lettre de licenciement et ne peut donc justifier le licenciement ;
QU'en définitive, il apparaît que le licenciement repose pour l'essentiel sur la dégradation des indicateurs de la production, que ce motif. est réel et que Monsieur X...en était informé sans qu'il soit utile de lui notifier un avertissement sur ce point ; que sans remettre en cause ce constat, le salarié réplique que son employeur rie lui a pas fourni les moyens nécessaires à son action, de sorte que ces résultats ne lui sont pas imputables ;
QUE Monsieur X..., doté d'une solide formation (ingénieur papetier) avait acquis au sein de l'entreprise une expérience au travers des différents postes occupés : adjoint au directeur de production (1997), responsable méthode (1998) puis chef de fabrication (depuis 2001) ; que s'il est certain que sa nomination au poste de directeur de production a été très rapidement : décidée suite à la démission de son prédécesseur, pour autant son expérience et sa nomination en interne lui permettaient d'occuper ce poste, et que la formation qu'il a suivie (" Management exemplarité et impact ") était conforme à sa demande et devait être suivie d'une formation complémentaire trois ans plus tard ;
QU'il est certain que les objectifs ambitieux impartis à Monsieur X...nécessitaient le maintien des effectifs d'encadrement, condition qu'il avait mentionnée dans son entretien d'évolution du mois de juin 2005 ; que la. comparaison des organigrammes des 18 août 2004 et 17 octobre 2005 montre que l'employeur a supprimé l'un des six postes de cadres sous sa subordination (le poste de responsable logistique amont), deux des vingt et un postes de chefs de secteurs,. responsable atelier. et responsable méthodes et produits, ainsi que les postes de " technicien automatisme " et " responsable stock bobines " même si globalement les effectifs du personnel de production sont restés stables ; qu'au demeurant le document d'information " Commentaires quarter 2005/ 2006 " paru le 15 novembre 2005 sous la plume du directeur du site note la " poursuite des efforts de réduction des coûts sur l'emploi des matières. et les effectifs des services périphériques, à la production " ; qu'il est certain que la perte de postes d'encadrement et de chefs de services a accru les charges pesant sur Monsieur X..., et diminué d'autant les contrôles sur la qualité, de la production ;
QUE surtout, les pièces produites par les parties et notamment l'échange de mails témoignent d'un interventionnisme constant du directeur du site Monsieur
Z...
qui définissait les options, les budgets et donnait toutes directives à Monsieur X...; qu'au vu du déficit du personnel d'encadrement et des interventions constantes du directeur du site dans la gestion de la production, il n'est pas établi que les mauvais résultats obtenus au regard des différents indicateurs de production soient la conséquence d'une carence de Monsieur X...;
ALORS QUE l'insuffisance professionnelle alléguée par l'employeur constitue un motif de licenciement matériellement vérifiable qui peut être précisé et discuté devant les juges du fond ; qu'en se refusant à envisager la non réalisation par Monsieur X...d'actions dans les délais impartis dont la Société DS SMITH KAYSERSBERG faisait état dans ses conclusions à l'appui du grief d'insuffisance professionnelle, à raison de ce que ce « motif » n'était pas mentionné dans la lettre de licenciement, la Cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du Code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la SAS DS SMITH KAYSERSBERG à payer à Monsieur X...la somme de 40. 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement irrégulier en la forme et sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'il est établi que la convocation à l'entretien préalable du 10 mars 2006 remise en main propre à Monsieur X...le 6 mars 2006 ne respectait pas le délai légal de cinq jours francs permettant au salarié de préparer sa défense et de contacter un conseiller susceptible de l'assister ; que, s'il est constant que le salarié ait été effectivement assisté, ce délai trop restreint a nécessairement entravé la défense de ses intérêts ; qu'en considération du préjudice né de l'irrégularité de la procédure de licenciement, des circonstances de la rupture, de l'obligation faite à Monsieur X...de quitter l'entreprise sur le champ avant même de réceptionner sa lettre de licenciement, de son ancienneté (12 ans), du préjudice inhérent à la perte de son emploi, mais aussi de l'absence de toutes pièces justifiant sa situation dans les suites de son licenciement et du montant de son salaire mensuel (4. 022 €), il convient de chiffrer à 40. 000 € le montant des dommages et intérêts dus à raison du licenciement irrégulier en la forme et dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
ALORS QUE l'indemnité pour inobservation de la procédure de licenciement ne se cumule pas avec l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en allouant au salarié une somme constituant à la fois une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité pour non-respect de la procédure, la Cour d'appel a violé l'article L. 1235-2 du Code du travail ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-43088
Date de la décision : 18/01/2011
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 30 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 jan. 2011, pourvoi n°09-43088


Composition du Tribunal
Président : Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.43088
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