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05/01/2011 | FRANCE | N°09-67069

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 janvier 2011, 09-67069


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 2 novembre 1996 par l'association Office du tourisme de Marie-Galante en qualité d'agent d'accueil et de renseignement et exerçant en dernier lieu les fonctions d'agent de maîtrise, a été licenciée le 30 juin 2006 pour faute grave ;
Sur le moyen unique, pris en sa sixième branche :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de l'ensemble de ses demandes, alors qu'en tout état de cause que la circonstance que le licenciement soit

doté d'une cause réelle et sérieuse n'exclut pas la condamnation de l'em...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée le 2 novembre 1996 par l'association Office du tourisme de Marie-Galante en qualité d'agent d'accueil et de renseignement et exerçant en dernier lieu les fonctions d'agent de maîtrise, a été licenciée le 30 juin 2006 pour faute grave ;
Sur le moyen unique, pris en sa sixième branche :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de l'ensemble de ses demandes, alors qu'en tout état de cause que la circonstance que le licenciement soit doté d'une cause réelle et sérieuse n'exclut pas la condamnation de l'employeur à raison des circonstances vexatoires dans lesquelles la rupture du contrat de travail est intervenue ; qu'en déboutant la salariée de sa demande au titre de l'abus dans les conditions de la rupture, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'employeur n'avait pas commis un tel abus en interdisant à la salariée tout accès aux locaux de l'association lors de son retour le lendemain du lundi de Pentecôte à 9 heures, en allant jusqu'à en barricader l'accès devant l'ensemble du personnel, ce que la salariée offrait de prouver par la production de témoignages, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que le moyen critique une omission de statuer sur un chef de demande, qui, selon l'article 463 du code de procédure civile, ne peut donner lieu qu'à un recours devant la juridiction qui s'est prononcée ; que le moyen n'est pas recevable ;
Mais sur le moyen, pris en sa première branche :
Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
Attendu que pour dire que le licenciement de la salariée est fondé sur une faute grave, l'arrêt retient notamment que sa fiche de poste est rédigée comme suit : " tâches complexes faisant appel à des savoirs multiples ou de la polyvalence, en tant que secrétaire de direction, ayant des missions de base dans le domaine administratif et complémentaires dans le domaine de l'accueil " ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la fiche de poste produite était rédigée ainsi : " qualification du poste : agent de maîtrise 2. 1, indice plancher 1550 points, exécution d'une mission limitée faisant appel à des compétences multiples ", la cour d'appel a dénaturé ce document clair et précis ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les quatre autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute la salariée de ses demandes indemnitaires liées au licenciement, l'arrêt rendu le 19 janvier 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Basse-Terre ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France ;
Condamne l'Office de tourisme de Marie-Galante aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille onze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour Mme X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Madame Y... épouse X... de ses demandes formulées au titre de son licenciement par l'association OFFICE DU TOURISME DE MARIE-GALANTE et de l'AVOIR en conséquence condamnée à payer la somme de 500 euros à ce dernier sur le fondement de l'article 700 du « nouveau » Code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « la lettre de licenciement en date du 30 juin 2006 énonce les griefs suivants à l'encontre de la salariée : " Déloyauté en raison de votre collaboration avec une entité concurrente les samedi 3 et dimanche 4 juin 2006 à l'organisation du 7ème festival CRÉOLE BLUES de la Guadeloupe qui s'est tenu au MOULE, alors que vous ne pouviez pas ignorer le litige existant entre l'office qui vous emploie et ce concurrent. Participation à des actes de concurrence déloyale en acceptant d'être débauchée par ce concurrent. Perte de confiance en résultant ". L'employeur fonde la faute grave de sa salariée sur le fait, qu'en travaillant depuis plusieurs années à l'OFFICE DU TOURISME DE MARIE GALANTE, notamment en qualité d'agent de maîtrise, elle ne pouvait ignorer " le contentieux de notoriété publique " qui opposait son employeur, à l'office à l'association KOLIMEL, organisatrice d'un festival concurrent au MOULE à la même période de l'année. Il soutient notamment que Madame X...- Y... savait que l'association KOLIMEL avait, le 17 mai 2006, fait assigner en justice l'OFFICE DU TOURISME DE MARIE GALANTE lequel avait fait délivrer le 29 mai 2006 une sommation interpellative. De son côté, Madame X...- Y... soutient sur ce point, que l'OFFICE DU TOURISME DE MARIE GALANTE ayant signé un contrat de partenariat avec la société " CRÉOLE BLUES ORGANISATION " pour co-organiser une manifestation musicale à Marie Galante, dénommé " FESTIVAL CRÉOLE BLUES " ; qu'à cette occasion, Madame X...- Y... bénéficiait d'un statut d'intermittent du spectacle distinct du contrat de travail au sein de l'office ; que l'association KOLIMEL lui a fait signer un contrat d'attachée de production pour la durée du festival ; que cette relation contractuelle pour la période du festival est sans rapport avec la fonction d'agent de maîtrise de l'intéressée au sein de l'office. Le conflit qui a opposé les deux entités organisatrices au eu pour effet un déplacement aux mêmes périodes d'un festival au MOULE, ce qui a pu entraîner une vive polémique. Sur ce point Madame X...- Y..., qui n'a rien ignoré de ce litige, ne s'est pas sentie personnellement concernée. Elle soutient que les motifs de son licenciement sont liés au refus de paiement de son employeur, lequel, à la date du 17 octobre 2005, n'avait pas réglé son salaire depuis deux mois. Elle indique avoir écrit ce jour là à sa direction qui ne lui a pas répondu. Le 27 octobre, elle était convoquée avec Madame B..., sa collègue, pour un entretien préalable. Elle ajoute que lors d'une réunion en date du 1er avril 2006, soit deux mois avant le festival, Monsieur C..., le directeur de l'OFFICE DU TOURISME DE MARIE GALANTE, se faisant le porte-parole de Monsieur D..., président, informait les deux salariées que leur présence n'était pas souhaitée au festival de mai 2006. Elle apprenait également que l'on avait recruté d'autres personnes pour assumer leur charge au sein de l'office. Comme Madame B..., Madame X...- Y... indique qu'elle est revenue à MARIE GALANTE le lundi de Pentecôte à 9 heures. L'accès lui aurait alors été refusé. Madame X...- Y... soutient qu'elle n'a pas commis de faute grave et qu'aucun acte de déloyauté ou de concurrence déloyale ne peut lui être reproché. Elle ajoute que, contrairement à ce que soutient son employeur, elle ne bénéficiait pas d'un " savoir faire " dont elle aurait faire bénéficier les organisateurs du festival du MOULE, n'ayant en aucun cas travaillé avec eux en amont. Elle faisait valoir qu'elle avait travaillé bénévolement pour le festival du MOULE. Enfin, elle soutient que la " perte de confiance " évoquée par l'employeur alors que ne lui étaient confié que des tâches d'exécution. Le juge départiteur a dit et jugé :- que contrairement aux éditions précédentes, aucun contrat d'intermittent du spectacle n'a été proposé à Madame X...- Y... ;- que Madame X...- Y... qui connaissait la polémique entre les deux entités, n'était tenue à s'impliquer et à prendre parti ;- qu'en participant, en qualité d'assistance de réalisation pendant les 4 jours du week-end de Pentecôte au festival du MOULE dans le cadre d'une convention de bénévolat avec l'association KOLIMEL, Madame X...- Y... n'a pas commis d'acte de déloyauté, n'étant pas, en travaillant en dehors de ses heures de travail pendant le week-end, sous l'autorité de l'OFFICE DU TOURISME DE MARIE GALANTE ; que son contrat ne comportait pas de clause de non-concurrence ;- qu'en étant qu'agent de maîtrise dans l'office, il ne peut lui être reproché, dans le cadre d'une activité temporaire et sans collaboration à la préparation de la manifestation du MOULE, d'avoir transmis à un concurrent un " savoir faire ",- que si la perte de confiance est patente, elle ne peut, à elle seule, entraîner la rupture du contrat de travail ; que cette perte de confiance concerne habituellement des emplois supérieurs, qui impliquent la direction technique et stratégique de l'entreprise. Cependant, il doit être rappelé que la relation de travail entre l'employeur et son salarié est avant tout fondée sur une nécessité de confiance. Il appartient donc à la cour de vérifier quelle était la véritable nature du lien professionnel dont dépendait la salariée vis-à-vis de l'OFFICE DU TOURISME DE MARIE GALANTE. Il est constaté que la fiche de poste annexée à son contrat de travail décrivait avec précision les tâches confiées à cette salariée qui occupait une fonction d'agent chargé de l'accueil et de l'organisation du festival. Cette fiche est rédigée comme suit : " tâches complexes faisant appel à des savoirs multiples ou de la polyvalence, en tant que secrétaire de direction, ayant des missions de base dans le domaine administratif et complémentaires dans le domaine de l'accueil ". Avec de telles responsabilités, Madame X...- Y... avait un devoir de loyauté vis-à-vis de son employeur. Au niveau professionnel, où elle se trouvait, elle ne pouvait ignorer le conflit qui opposait les deux entités, les organisateurs du festival du MOULE pouvant être considérés dans le cadre du litige connu de tous à cette époque, comme des " dissidents ", désirant créer leur propre festival en concurrence directe avec le Festival de MARIE GALANTE qui lui était antérieur, ce que la salariée n'ignorait pas. Il convient à ce sujet de souligner que dès le 1er avril soit deux mois avant le festival, Madame X...- Y... ainsi que sa collègue Madame B... avaient été informées par Monsieur C... directeur de l'OFFICE que leur présence n'était pas souhaitée au festival. La déloyauté dont a fait preuve la salariée est d'autant plus importante qu'elle a mis au service de l'entité du MOULE tout le savoir faire qu'elle avait acquis auprès de l'OFFICE DU TOURISME DE MARIE GALANTE. Par son action, même ponctuelle et bénévole, elle a porté gravement atteinte à la relation de confiance avec son employeur. Il s'agit d'une faute grave. Le licenciement repose donc sur une faute telle que la relation de travail ne pouvait se poursuivre même pendant le préavis. La décision du premier juge sera réformée et Madame X...- Y... sera déboutée de l'ensemble de ses demandes » ;
1. ALORS QU'il est interdit au juge de dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; que la fiche de poste annexée à l'avenant au contrat de travail de la salariée qualifiait son poste d'" agent de maîtrise " ayant pour tâche l'" exécution d'une mission limitée faisant appel à des compétences multiples " ; qu'en affirmant que cette fiche indiquait que la salariée était chargée de " tâches complexes faisant appel à des savoirs multiples ou de la polyvalence, en tant que secrétaire de direction, ayant des missions de base dans le domaine administratif et complémentaires dans le domaine de l'accueil ", pour en déduire qu'avec de telles responsabilités, la salariée avait un devoir de loyauté accru envers son employeur et avait donc commis une faute grave en participant, quoique de façon ponctuelle et bénévole, à un festival concurrent de celui organisé par son employeur et en y transmettant un certain savoir-faire, la Cour a dénaturé les termes clairs et précis de ladite fiche de poste, en violation du principe susvisé ;
2. ALORS QUE ne constitue pas une faute grave, la participation amicale d'un salarié, en dehors des horaires de travail, et le temps d'un seul week-end, à l'organisation d'un festival de musique concurrent de celui organisé par l'employeur, dès lors que cette participation était bénévole, ponctuelle, que le salarié avait une ancienneté de plus de neuf ans au service de l'employeur, et qu'il ne s'était jamais vu adresser le moindre reproche par celui-ci, peu important que le salarié ait transmis à cette occasion un certain savoir-faire ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a relevé que la salariée, qui avait plus de neuf ans d'ancienneté, et dont il n'était pas contesté qu'elle ne s'était jamais vu adresser de reproche, avait participé, de manière ponctuelle et bénévole, quoiqu'en y apportant un certain savoir-faire, au déroulement d'un festival concurrent de celui organisé par l'employeur, le tout en dehors de ses horaires de travail et au cours d'un seul week-end ; qu'en retenant la faute grave, la Cour d'appel a violé les articles L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail ;
3. ALORS QUE le juge ne saurait dénaturer les termes du litige qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, la salariée soutenait, dans ses écritures d'appel visées par l'arrêt attaqué, qu'à la suite de la protestation qu'elle avait émise suite au non-paiement de ses salaires par son employeur, celui-ci lui avait fait savoir, le 1er avril 2006, que sa présence n'était pas souhaitée au festival de MARIE-GALANTE organisé par lui ; que l'employeur, dans ses conclusions d'appel (p. 5, § B 2), prétendait que c'était la salariée elle-même qui aurait refusé de participer à ce festival ; qu'il en résultait qu'aucune des parties ne soutenait que l'employeur aurait informé la salariée que sa présence n'était pas souhaitée au festival organisé au MOULE par l'association Kolimel ; qu'à supposer que la Cour d'appel ait fait référence à ce dernier festival en énonçant que la salariée avait informée que sa présence n'était pas souhaitée au festival, l'arrêt attaqué aurait dénaturé les termes du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
4. ALORS QUE la perte de confiance alléguée par l'employeur ne constitue pas en soi un motif de licenciement ; qu'en affirmant que, par son action, même ponctuelle et bénévole, la salariée avait porté gravement atteinte à la relation de confiance avec son employeur, de sorte que son licenciement reposait sur une faute grave, la Cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail ;
5. ALORS QUE le juge est tenu de rechercher, au delà des énonciations de la lettre de licenciement, la véritable cause du licenciement ; qu'il résultait des propres énonciations de l'arrêt attaqué que la salariée soutenait que le véritable motif de son licenciement résidait dans la protestation qu'elle avait élevée à la suite de retards de plusieurs mois du paiement de son salaire en octobre 2005 et en mars 2006 ; que la Cour d'appel, à qui il incombait de rechercher, au-delà des énonciations de la lettre de licenciement, la cause exacte de celui-ci, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et a violé les articles L. 1232-1, 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail ;
6. ALORS en tout état de cause QUE la circonstance que le licenciement soit doté d'une cause réelle et sérieuse n'exclut pas la condamnation de l'employeur à raison des circonstances vexatoires dans lesquelles la rupture du contrat de travail est intervenue ; qu'en déboutant la salariée de sa demande au titre de l'abus dans les conditions de la rupture, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'employeur n'avait pas commis un tel abus en interdisant à la salariée tout accès aux locaux de l'association lors de son retour le lendemain du lundi de Pentecôte à 9 heures, en allant jusqu'à en barricader l'accès devant l'ensemble du personnel, ce que la salariée offrait de prouver par la production de témoignages, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-67069
Date de la décision : 05/01/2011
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Basse-Terre, 19 janvier 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 jan. 2011, pourvoi n°09-67069


Composition du Tribunal
Président : Mme Perony (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2011:09.67069
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