LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 30 octobre 2009) qu'en 1990, M. X... a souscrit, par l'intermédiaire de la caisse de crédit mutuel Mulhouse Europe (la caisse) un certain nombre de parts d'une société civile de placement immobilier (la SCPI) pour un prix total de 200 000 francs (304 898,03 euros), financé par un prêt de même montant consenti par la caisse, au taux révisable de 11 %, remboursable in fine et garanti par un nantissement des parts ; qu'en 2005, invoquant la perte de valeur des parts souscrites, M. X... a assigné la caisse en responsabilité, lui reprochant notamment un manquement à son obligation d'information, de conseil et de mise en garde ;
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que le prestataire de services d'investissement a le devoir d'informer son client sur les risques encourus dans les opérations spéculatives qu'il réalise ; que l'acquisition de parts de la SCPI constitue une opération spéculative par nature ; qu'en estimant que l'acquisition par M. X... de parts de la SCPI ne présentait pas de caractère spéculatif, de sorte que la caisse n'était tenue d'aucun devoir de mise en garde spécifique, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
2°/ que le client incité par une banque à investir sur un marché spéculatif doit avoir eu connaissance des risques encourus ; qu'en estimant que la caisse avait suffisamment assumé ses obligations envers M. X... dans la mesure où avait été soumis à la signature de ce dernier un bulletin indiquant que la société ne garantissait pas la revente des parts et que, par ailleurs, les statuts de la SCPI précisaient que les pertes seraient supportées par les associés, sans répondre aux conclusions d'appel de M. X... faisant valoir, d'une part, que toutes les simulations qui lui avaient été présentées par la banque ne faisaient état que d'une valorisation du capital et, d'autre part, que la clause des statuts de la SCPI relative à la participation aux pertes se trouvait noyée dans un ensemble de dispositions techniques insusceptibles de le renseigner, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'en l'absence d'opérations spéculatives, la banque qui propose à son client la souscription de parts d'une SCPI n'est pas tenue d'une obligation spéciale de mise en garde envers le souscripteur ;
Et attendu, d'autre part, qu'ayant retenu par motifs adoptés que M. X... avait reçu et pris connaissance, préalablement à la signature du bulletin de souscription, des statuts de la société et d'une note d'information visée par la Commission des opérations de bourse mentionnant l'éventualité de pertes, et par motifs propres, que le bulletin de souscription indiquait expressément que M. X... reconnaissait avoir été informé du fait que la société ne garantissait pas la revente des parts, et qu'en outre les statuts de la SCPI dont il a eu communication, précisaient que les pertes, s'il en existe, seront supportées par les associés proportionnellement au nombre de parts possédées par chacun d'eux, ce dont il résultait que la caisse, qui avait informé son client sur les caractéristiques du produit proposé, et sur les risques de perte, n'avait pas commis de faute, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument omises ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, le condamne à payer à la caisse de crédit mutuel Mulhouse Europe la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils pour M. X....
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes dirigées contre la Caisse de Crédit Mutuel Mulhouse Europe ;
AUX MOTIFS QUE si M. X... a sans doute été incité par la documentation publicitaire et les simulations chiffrées de la banque à investir dans la souscription de parts de la SCPI Crédit Mutuel Habitat 2 en décembre 1990, il a lui-même reconnu (cf. ses courriers du 15 janvier 2001 et 5 avril 2001) que ces documents et simulations n'avaient pas de caractère contractuel ; qu'un tel investissement offrait à l'époque des possibilités de croissance à long terme, outre la perception de loyers et le bénéfice d'avantages fiscaux ; que les perspectives de rentabilité décrites par la banque étaient alors exactes et nullement mensongères, même si le rapport annuel 1990 du Crédit Mutuel Habitat, nécessairement rédigé ultérieurement, faisait état d'un « ralentissement de la hausse du prix de l'immobilier », ce qui signifie que les prix continuaient à augmenter ; que la crise du marché immobilier, dont les premiers signées annonciateurs sont apparus en 1992 et qui s'est développée à partir de 1994 n'était pas prévisible en 1990, même pour la banque ; que la bonne rentabilité prévisionnelle, certes mise en exergue dans les documents publicitaires à l'époque de la souscription, n'était cependant pas garantie par Caisse de Crédit Mutuel Mulhouse Europe ; que le bulletin de souscription du 17 décembre 1990 indique expressément que M. X... reconnaît avoir été informé du fait que la société ne garantissait pas la revente des parts, ce qui aurait dû éveiller son attention ; qu'en outre, les statuts de la SCPI dont il a eu connaissance précisaient que les pertes, s'il en existe, seront supportés par les associés proportionnellement au nombre de parts possédés par chacun d'eux ; que s'agissant d'un placement qui ne présentait pas un caractère spéculatif tel que des opérations de bourses sur les marchés à terme, la banque n'était pas tenue, au-delà des informations ainsi données, d'un devoir de mise en garde quant aux aléas inévitables du marché immobilier ;
ALORS, D'UNE PART, QUE le prestataire de services d'investissement a le devoir d'informer son client sur les risques encourus dans les opérations spéculatives qu'il réalise ; que l'acquisition de parts de la SCPI constitue une opération spéculative par nature ; qu'en estimant que l'acquisition par M. X... de parts de la SCPI Crédit Mutuel Habitat 2 ne présentait pas de caractère spéculatif, de sorte que la banque n'était tenue d'aucun devoir de mise en garde spécifique (arrêt attaqué, p. 3 § 11), la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE le client incité par une banque à investir sur un marché spéculatif doit avoir eu connaissance des risques encourus ; qu'en estimant que le Crédit Mutuel avait suffisamment assumé ses obligations envers M. X... dans la mesure où avait été soumis à la signature de ce dernier un bulletin indiquant que la société ne garantissait pas la revente des parts et que, par ailleurs, les statuts de la SCPI précisaient que les pertes seraient supportés par les associés (arrêt attaqué, p. 3 § 8 et 9), sans répondre aux conclusions d'appel de M. X... faisant valoir, d'une part, que toutes les simulations qui lui avaient été présentées par la banque ne faisaient état que d'une valorisation du capital et, d'autre part, que la clauses des statuts de la SCPI relative à la participation aux pertes se trouvait noyée dans un ensemble de dispositions techniques insusceptibles de le renseigner (conclusions d'appel déposées le 4 décembre 2008, p. 4 § 6, p. 6 in fine et p. 7 § 1), la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.