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14/12/2010 | FRANCE | N°09-70166

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 décembre 2010, 09-70166


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été, dans le cadre de 42 contrats, mis à disposition de l'Association des parents et adultes handicapés de Marignane (APEAHM) par la société Ergos du 30 septembre 2002 au 1er mai 2006, pour cause de remplacement, puis d'accroissement d'activité ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes de requalification des contrats de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet et de paiement de diverses sommes ;
Sur

le second moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le déb...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été, dans le cadre de 42 contrats, mis à disposition de l'Association des parents et adultes handicapés de Marignane (APEAHM) par la société Ergos du 30 septembre 2002 au 1er mai 2006, pour cause de remplacement, puis d'accroissement d'activité ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes de requalification des contrats de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée à temps complet et de paiement de diverses sommes ;
Sur le second moyen :
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande de dommages-intérêts pour défaut de prise de congés, alors, selon le moyen :
1°/ que conformément aux dispositions de l'article L. 3141-3 du code du travail, tout salarié qui justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail effectif a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail ; qu'en déboutant M. X... de sa demande de dommages et intérêts au seul motif qu'il avait pu bénéficier de phases d'inactivité pendant les périodes interruption de la relation de travail temporaire, sans rechercher si le salarié avait effectivement pu bénéficier des jours de repos auxquels il pouvait prétendre au titre de ses droits à congés payés légaux et conventionnels, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé, ensemble l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'il résulte de la combinaison des articles 7 de la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 et L. 3141-3 du code du travail que les quatre premières semaines de congés payés ne peuvent être rémunérées au moyen de versements partiels étalés sur la période annuelle de travail correspondante et payés ensemble avec la rémunération au titre du travail effectué, mais doivent faire l'objet d'un versement au titre d'une période déterminée au cours de laquelle le travailleur prend effectivement ses congés ; que le salarié dont les congés payés sont rémunérés au moyen du versement d'une indemnité compensatrice, versée mois après mois, et qui ne perçoit aucun salaire lors des périodes des périodes d'inactivité qui lui sont imposées du fait d'une interruption de la relation de travail, subit nécessairement un préjudice qu'il appartient aux juges du fond de réparer par l'allocation de dommages et intérêts ; qu'en déboutant dès lors M. X... de sa demande au motif qu'il percevait chaque mois une indemnité compensatrice équivalente à 10 % de son salaire brut et qu'il avait bénéficié de phases d'inactivité pendant les périodes d'interruption de la relation de travail, alors qu'il était constant que M. X..., lié à son employeur par un contrat de travail à durée indéterminée, ne percevait aucune rémunération au cours de ces périodes, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, d'abord, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que le salarié avait invoqué l'absence de perception de rémunération au cours des périodes d'interruption de la relation de travail au soutien de sa demande de dommages-intérêts ; que le moyen, pris en sa seconde branche, est donc nouveau et, mélangé de fait et droit, irrecevable ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel qui a constaté, par motifs adoptés, que les salarié avait perçu l'indemnité de congés payés et avait été mis en mesure de prendre ses congés pendant les interruptions de la relation de travail du 1er août 2004 au 29 août 2004, du 23 décembre 2004 au 5 janvier 2005 et du 29 juillet 2005 au 28 août 2005, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais, sur le premier moyen :
Vu l'article L.3123-14 du code du travail ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, l'arrêt retient que l'APEAHM, qui avait la qualité d'entreprise utilisatrice, ne peut pas se voir opposer les prescriptions de l'article L. 3123-14 du code du travail et la présomption de contrat de travail à temps complet résultant d'un défaut de mention dans le contrat de travail de la répartition de la durée de travail précise entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; que le salarié ne rapporte pas la preuve qu'il avait travaillé à temps complet depuis son embauche ou qu'il n'avait pas eu préalablement connaissance de ses horaires de travail et qu'il devait ainsi se tenir en permanence à disposition de l'employeur ;
Attendu, cependant ,que selon l'article L. 3123-14 du code du travail, le contrat écrit du salarié doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ;qu'il en résulte que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'elle avait requalifié la relation de travail en contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes de requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet et de ses demandes de rappel de salaire et en ce qu'il a limité aux sommes de 720, 1350, 1440, 144 et 4320 euros le montant des condamnations mises à la charge de l'APEAHM à titre, respectivement, d'indemnité spéciale de requalification, d'indemnité compensatrice de licenciement, d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 24 juin 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne l'APEAHM aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux conseils pour M. X...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein, de l'AVOIR en conséquence débouté de ses demandes de rappel de salaire et de congés payé afférents et d'AVOIR limité aux sommes de 720 €, 1.350 €, 1.440 €, 144 € et de 4.320 € le montant des condamnations mises à la charge de l'A.P.E.A.H.M. à titre, respectivement, d'indemnité spéciale de requalification, d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis et d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L.1251-5 du Code du travail, le contrat de travail temporaire ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice ; que selon l'article L.1251-6, un utilisateur ne peut faire appel à des salariés intérimaires que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée "mission", et seulement dans les cas énumérés à cet article et notamment en cas de remplacement ou d'accroissement temporaire d'activité ; qu'il en résulte d'une part, que l'entreprise utilisatrice ne peut employer des salariés intérimaires pour faire face à un besoin structurel de main-d'oeuvre, d'autre part que le recours à des salariés intérimaires ne peut être autorisé que pour les besoins d'une ou plusieurs tâches résultant du seul accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise, notamment en cas de variations cycliques de production, sans qu'il soit nécessaire ni que cet accroissement présente un caractère exceptionnel, ni que le salarié recruté soit affecté à la réalisation même de ces tâches ; qu'il résulte de l'article L.1251-40 du même Code que lorsqu'une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L.1251-5 à L.1251-7, L.1251-10 à L.1251-12, L.1251-30 et L.1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission ; qu'au cas présent, Fayçal X... a pendant plus de trois ans et demi occupé le même emploi de chauffeur au sein de l'APEAHM ; que nonobstant le retour au mois d'avril 2003 du salarié prétendument remplacé, l'APEAHM a continué à l'employer sur le même poste et ce jusqu'au 1er mai 2006, ce dont il s'évince nécessairement que les contrats de travail temporaire n'étaient pas justifiés par le remplacement ou l'accroissement temporaire d'activité mais s'inscrivaient dans le cadre d'un besoin durable de main d'oeuvre lié à l'activité normale et permanente de l'association, consistant notamment à véhiculer des personnes handicapées ; les contrats de travail temporaire seront en conséquence requalifiés en contrat detravail à durée indéterminée à compter du 30 septembre 2002 ; que l'APEAHM, qui avait la qualité d'entreprise utilisatrice, ne peut pas se voir opposer les prescriptions de l'article L.3123-4 du Code du travail et la présomption de contrat de travail à temps complet résultant du défaut de mention dans le contrat de travail de la répartition de la durée de travail précise entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; que Fayçal X... ne rapporte pas la preuve qu'il avait travaillé à temps complet depuis son embauche ou qu'il n'avait pas eu préalablement connaissance de ses horaires de travail et qu'il devait ainsi se tenir en permanence à disposition de l'employeur ; Qu'il est mal fondé à prétendre à un rappel de salaire sur la base d'un contrat de travail à temps complet ;
et AUX MOTIFS, éventuellement adoptés des premiers juges, QU'il ressort des contrats de mission versés aux débats, des bulletins de salaires et des relevés d'heures effectuées, que Monsieur Fayçal X... exerçait bien ses fonctions dans le cadre d'un contrat à temps partiel ; que lesdits contrats de mission mentionnaient les horaires de travail de 6 heures 30 à 8 heures 30 et de 17 heures à 19 heures ; que Monsieur Fayçal X... n'apporte pas la preuve d'être resté à disposition de l'entreprise pour un travail à temps complet ;
ALORS QUE conformément aux dispositions de l'article L.3123-14 du Code du travail, le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire, ou le cas échéant mensuelle, prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; qu'à défaut, l'emploi occupé est présumé à temps complet et qu'il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte hebdomadaire ou mensuelle convenue, d'autre part, que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en énonçant, après avoir décidé que l'A.P.E.A.H.M. était liée à Monsieur X... par un contrat de travail à durée indéterminée et constaté que les prescriptions de l'article L.3123-14 du Code du travail n'avaient pas été respectées, que l'employeur ne pouvait cependant se voir opposer la présomption de contrat de travail à temps complet au seul motif qu'il avait initialement la qualité d'entreprise utilisatrice, de sorte qu'il appartenait au salarié de démontrer qu'il avait travaillé à temps complet ou qu'il devait se tenir en permanence à la disposition de son employeur, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve, violant ainsi le texte susvisé, ensemble l'article 1315 du Code civil ;
QU'en se fondant sur la qualité d'entreprise utilisatrice de l'A.P.E.A.H.M. pour écarter la présomption de contrat de travail à temps complet, alors que cette qualité ne pouvait plus être attachée à l'association employeur, du fait de la requalification du contrat de travail temporaire en contrat de travail à durée indéterminée, la Cour d'appel s'est abstenue de tirer toutes les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations, au regard des articles L.3123-14 du Code du travail et 1315 du Code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
:
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de prise des congés payés.
AUX MOTIFS QU'il est constant que Fayçal X... n'a pas été employé par l'APEAHM de manière ininterrompue du 30 septembre 2002 au 1er mai 2006, de sorte que c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a débouté l'intéressé de sa demande de dommages et intérêts pour congés payés non pris ;
et AUX MOTIFS, éventuellement adoptés, QUE Monsieur Fayçal X... n'apporte aucun élément prouvant qu'il n'aurait pas pu bénéficier de ses congés payés, ou d'un préjudice spécifique ; qu'il n'y a pas eu de contrat de travail pour les périodes du 1er août 2004 au 29 août 2004, du 23 décembre 2004 au 05 janvier 2005 et du 29 juillet 2005 au 28 août 2005 ;que ces interruptions du contrat de travail lui permettaient de prendre ses congés ; que l'indemnité de congés payés a été payée mensuellement, le Conseil déboute le demandeur de sa demande ;
ALORS, d'une part, QUE conformément aux dispositions de l'article L.3141-3 du Code du travail, tout salarié qui justifie avoir travaillé chez le même employeur pendant un temps équivalent à un minimum de dix jours de travail effectif a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail ; qu'en déboutant Monsieur X... de sa demande de dommages et intérêts au seul motif qu'il avait pu bénéficier de phases d'inactivité pendant les périodes interruption de la relation de travail temporaire, sans rechercher si le salarié avait effectivement pu bénéficier des jours de repos auxquels il pouvait prétendre au titre de ses droits à congés payés légaux et conventionnels, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte susvisé, ensemble l'article 1382 du Code civil ;
ALORS, d'autre part, QU'il résulte de la combinaison des articles 7 de la directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 et L.3141-3 du Code du travail que les quatre premières semaines de congés payés ne peuvent être rémunérées au moyen de versements partiels étalés sur la période annuelle de travail correspondante et payés ensemble avec la rémunération au titre du travail effectué, mais doivent faire l'objet d'un versement au titre d'une période déterminée au cours de laquelle le travailleur prend effectivement ses congés ; que le salarié dont les congés payés sont rémunérés au moyen du versement d'une indemnité compensatrice, versée mois après mois, et qui ne perçoit aucun salaire lors des périodes des périodes d'inactivité qui lui sont imposées du fait d'une interruption de la relation de travail, subit nécessairement un préjudice qu'il appartient aux juges du fond de réparer par l'allocation de dommages et intérêts ; qu'en déboutant dès lors Monsieur X... de sa demande au motif qu'il percevait chaque mois une indemnité compensatrice équivalente à 10 % de son salaire brut et qu'il avait bénéficié de phases d'inactivité pendant les périodes d'interruption de la relation de travail, alors qu'il était constant que Monsieur X..., lié à son employeur par un contrat de travail à durée indéterminée, ne percevait aucune rémunération au cours de ces périodes, la Cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble l'article 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-70166
Date de la décision : 14/12/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 24 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 déc. 2010, pourvoi n°09-70166


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gadiou et Chevallier, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.70166
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