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14/12/2010 | FRANCE | N°09-68837;09-68838;09-68839;09-68840;09-68841;09-68842;09-68843;09-68844;09-68845;09-68846;09-68847

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 14 décembre 2010, 09-68837 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu l'ordonnance du 12 novembre 2009 prononçant la jonction des pourvois n° K 09-68838, M 09-68. 839, N 09-68. 840, P 09-68. 841, Q 09-68. 842, R 09-68. 843, S 09-68. 844, T 09-68. 845, U 09-68. 846 et V 09-68. 847 ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Riom, 9 juin 2009), que dans le cadre d'une fusion-absorption intervenue le 1er octobre 2006, la société Toupargel a repris les contrats de travail de M. X... et dix autres salariés, tous voyageurs représentants placiers-VRP-, de la sociét

é Agrigel ; que voulant faire évoluer son système de vente, la soc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu l'ordonnance du 12 novembre 2009 prononçant la jonction des pourvois n° K 09-68838, M 09-68. 839, N 09-68. 840, P 09-68. 841, Q 09-68. 842, R 09-68. 843, S 09-68. 844, T 09-68. 845, U 09-68. 846 et V 09-68. 847 ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Riom, 9 juin 2009), que dans le cadre d'une fusion-absorption intervenue le 1er octobre 2006, la société Toupargel a repris les contrats de travail de M. X... et dix autres salariés, tous voyageurs représentants placiers-VRP-, de la société Agrigel ; que voulant faire évoluer son système de vente, la société Toupargel leur a proposé, en 2007, la signature d'un avenant à leur contrat de travail ;
Que refusant la modification de leurs contrats de travail, les salariés ont saisi le conseil de prud'hommes d'une demande de résiliation de leur contrat aux torts de l'employeur ;
Attendu que la société Toupargel fait grief aux arrêts d'accueillir leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que ne relève pas par nature du statut du VRP l'activité qui consiste à se déplacer sur un secteur délimité par le contrat de travail pour proposer à des particuliers les produits transportés dans un camion-magasin et remis au client contre encaissement immédiat du prix des marchandises vendues ; qu'en affirmant en l'espèce que l'activité des salariés défendeurs au pourvoi, consistant à vendre eux-mêmes à des particuliers, qu'ils démarchaient sur un secteur donné, des produits qu'ils transportaient « répond aux conditions légales d'application du statut de VRP », la cour d'appel a violé les articles L. 7311-1 et suivant du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
2°/ que ne constitue pas une modification du contrat de travail, la simple réorganisation des modalités d'exécution des tâches confiées à un salarié ; qu'en l'espèce, il était constant que les salariés n'avaient pas vu modifiées leurs fonctions consistant à vendre sur un secteur donné des produits surgelés à des particuliers qu'ils devaient démarcher ; qu'il leur avait seulement été demandé de procéder désormais en deux temps : d'abord à une prospection téléphonique depuis les locaux de l'entreprise, ensuite à la vente et la livraison proprement dite ; qu'en affirmant néanmoins que cette évolution caractérisait une modification de leurs contrats de travail au prétexte que le démarchage, partagé avec des télévendeurs, devait se faire par téléphone depuis les locaux de l'entreprise à ses heures d'ouverture et non plus directement « sur le terrain » selon un planning organisé par les salariés eux-mêmes, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé une modification des contrats de travail litigieux, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que l'aveu ne peut porter que sur un point de fait, et non de droit ; qu'en opposant à l'employeur d'avoir reconnu, dans le compte rendu d'une réunion du 10 mars 2005, que " compte tenu des nouvelles taches dues au changement de métiers (télévente et télélivraison), le contrat actuel ne correspond plus au statut de VRP ", la cour d'appel a violé l'article 1354 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant relevé que les contrats de travail de M. X... et des dix autres salariés leur accordaient le statut de VRP, a constaté, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que des télévendeurs prospectaient la clientèle du secteur de ces onze VRP, que leur activité de prospection était réduite à une activité téléphonique sédentaire et que du fait de la nouvelle organisation des livraisons ils n'avaient plus la possibilité de développer leur clientèle ;
Qu'en l'état de ces constatations, elle a exactement décidé, sans encourir les autres griefs du moyen, qu'une telle modification des contrats de VRP non acceptée par les onze salariés justifiait la résiliation judiciaire de leur contrat de travail au torts de l'employeurs ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Toupargel aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme globale de 2 500 euros à MM. X..., Y..., Z..., A..., B..., C..., D..., E..., F..., G... et H... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze décembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit, aux pourvois n° s J 09-68. 837, K 09-68. 838, M 09-68. 839, N 09-68. 840, P 09-68. 841, Q 09-68. 842, R 09-68. 843, S 09-68. 844, T 09-68. 845, U 09-68. 846 et V 09-68. 847, par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Toupargel ;
Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail des salariés défendeurs au pourvoi et d'avoir en conséquence condamné la société TOUPARGEL à leur payer diverses sommes et d'AVOIR condamné l'employeur à rembourser au pôle emploi les indemnités chômages versées aux salariés dans la limite de six mois de salaire ;
AUX MOTIFS QUE lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, le juge doit d'abord rechercher si la demande en résiliation du contrat de travail était justifiée par des fautes commises par l'employeur et suffisamment graves pour emporter la rupture du contrat de travail ; la modification du contrat de travail par l'employeur, pour quelque cause que ce soit, nécessite l'accord express du salarié, lequel est en droit de la refuser et l'acceptation de la modification du contrat ne résulte pas de la simple poursuite du travail ; que par contre, l'employeur, dans l'exercice de son pouvoir de direction, peut apporter des changements dans les conditions de travail de l'intéressé ; qu'il appartient aux juges de vérifier si, du fait de cette modification de la fonction, la tâche nouvellement confiée, bien que différente de celle accomplie antérieurement, répond à la qualification de l'intéressé, si sa position hiérarchique et sa rémunération sont maintenues et si ses attributions ne sont ni restreintes ni supprimées ; que la transformation des attributions d'un salarié, même pour des fonctions plus valorisantes, constitue également une modification du contrat de travail et doit recevoir son accord ; qu'aux termes du contrat de travail signé entre les parties, le salarié est engagé en qualité de''vendeur en laisser-sur-place à domicile " ; que dans le cadre de ses fonctions, il est chargé de visiter et servir les clients de la Société et de vendre, contre paiement au nom et pour le compte de ladite Société, les produits distribués par celle-ci ; qu'il doit prospecter tous les clients susceptibles d'être intéressés par ces produits dans la limite du territoire qui lui est attribué ;
que par l'avenant du 1er janvier 1999, dans lequel il lui est rappelé qu'il exerce sa profession de prospection et de vente de façon exclusive et constante, le statut de VRP exclusif lui est attribué ; que selon la note diffusée par l'employeur suite à une réunion tenue le 10 mars 2005, il est indiqué, sous l'intitulé " nouveaux métiers ", qu'à la suite de la reprise d'AGRIGEL par TOUPARGEL, il est prévu " d'uniformiser " les deux sociétés, et, plus particulièrement, d'avoir un système commun, la " télévente " ; que dans cette note, il est expliqué que la télélivraison est la première étape de la transformation et qu'elle consiste à prendre des commandes par téléphone puis à livrer au client, le tout étant réalisé par la même personne ; qu'il est ajouté que la seconde étape, à intervenir en 2006, doit consister dans la séparation totale des deux métiers de télévendeur et de livreur ; que les conditions tenant à l'exercice de l'activité professionnelle de représentation, portent sur l'exercice exclusif et constant de la profession et sur l'interdiction d'opérations commerciales personnelles ; que la prospection, qui est une condition déterminante, consiste dans la visite d'une clientèle, à l'extérieur de l'entreprise, dans le but de prendre ou de provoquer des ordres ; que cette activité suppose une activité de démarchage auprès de la clientèle organisée librement et, par conséquent, des déplacements et des visites ; qu'en l'espèce, contrairement à ce que soutient l'employeur, l'activité des anciens salariés d'AGRIGEL qui assuraient des activités de prospection et de vente en laisser-surplace sur un secteur géographique déterminé, répond aux conditions légales d'application du statut de VRP ; qu'or, le nouveau système de vente a, de manière certaine, profondément modifié l'activité professionnelle des intéressés ; qu'en effet, les fonctions de télévendeur ainsi attribuées au salarié impliquent que celui-ci assure un travail de démarchage téléphonique ('télévente ") pendant plusieurs jours, chaque semaine, avant de se consacrer à la livraison des produits ainsi vendus ; que la télévente doit se dérouler au centre d'appel d'AUBIERE et non en dehors de l'entreprise et cette activité est soumise aux horaires de l'entreprise ainsi qu'il résulte de la note précitée, rédigée en ces termes : " En ce qui concerne les prises de commandes, vous serez soumis aux horaires du centre de télévente. Les horaires de livraisons devront être respectés afin de ne pas dépasser la durée légale de travail " ; que l'activité du salarié se trouve donc scindée en deux parties distinctes, d'une part, une activité de démarchage par téléphone, exercée de manière sédentaire, pour la moitié du temps, et une activité consacrée exclusivement à la livraison des produits commandés ; qu'il ressort en outre des éléments versés aux débats que des télévendeurs de la société se livrent à un travail de prospection téléphonique auprès de la clientèle du secteur des VRP de sorte que des commandes sont ainsi prises, ce qui n'est pas contesté par la société ; que des représentants se sont d'ailleurs plaints auprès d'elle au sujet de ces pratiques qui engendrent, selon eux, le mécontentement des clients appelés plusieurs fois pour la même chose et les discréditent à leurs yeux ; que l'employeur n'est donc pas fondé à soutenir que les fonctions du salarié n'auraient pas été modifiées au motif qu'il a continué à vendre des produits alimentaires surgelés aux clients dans le cadre de tournées similaires et à livrer les produits commandés ;
qu'en effet, dans la mesure où il admet lui-même que la nouvelle organisation oblige le salarié à organiser ses prises de commande sur une période de trois jours avant de livrer les commandes précédemment prises par téléphone, il reconnaît que l'activité de prospection a été réduite à une activité téléphonique exercée dans les locaux de l'entreprise, ce qui constitue une modification de l'essence même du contrat de représentant ; qu'il est également établi que l'activité de livraison du VRP se fait avec la nouvelle organisation, non plus à l'aide d'un camion-magasin, mais d'une simple camionnette de livraison de sorte que l'intéressé n'a plus que la possibilité d'offrir à la vente les produits préalablement commandés et ne peut développer une nouvelle clientèle sur place ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de la modification de la rémunération, le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu l'existence d'une modification unilatérale du contrat de travail par la S. A. S TOUPARGEL et accueilli la demande en résiliation judiciaire compte tenu de la gravité de ce comportement ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'un VRP est un salarié qui prospecte une clientèle existante ou éventuelle, à l'extérieur de l'entreprise, dans le but de prendre ou de provoquer des commandes et de rechercher de nouveaux clients ; que dans le passé, le VRP, en visitant ses clients pouvait facilement prospecter des voisins et développer ainsi son activité ; que pendant les périodes de vacances il lui était facile, dans certains secteurs, de toucher une clientèle de vacanciers qui avalent connaissance de l'horaire de ses passages ; qu'aujourd'hui le contact est uniquement par téléphone, il devient beaucoup plus impersonnel, certains clients refusent de communiquer leur numéro téléphonique, le prospect de nouveaux clients devient difficile ; que les ventes découlant du contact avec le client, de la marchandise disponible au moment de ce contact disparaissent ; que l'activité de VRP qui consiste essentiellement à prospecter des clients n'existe plus vraiment, le salarié n'a plus la même possibilité de bénéficier de ses qualités de « vendeur », il devient un « téléphoniste » et un « livreur » ; qu'il convient de préciser que le contrat initial prévoyait : « le vendeur devra prospecter tous les clients susceptibles d'être intéressés par nos produits dans la limite du territoire qui lui est attribué » ; que cette fonction caractéristique de celle d'un VRP disparaît dans la nouvelle organisation ; que la société TOUPARGEL était consciente de ce changement ; que dans un compte rendu de la réunion du 10 mars 2005, il est écrit ; « Compte tenu de ces nouvelles tâches dues au changement de métiers (télévente et télélivraison) votre contrat actuel ne correspond plus à votre statut de VRP » ; qu'en conséquence notre Conseil considère que le contrat de travail de Monsieur X... a été profondément modifié d'une manière unilatérale par l'employeur ;
1) ALORS QUE ne relève pas par nature du statut du VRP l'activité qui consiste à se déplacer sur un secteur délimité par le contrat de travail pour proposer à des particuliers les produits transportés dans un camion-magasin et remis au client contre encaissement immédiat du prix des marchandises vendues ; qu'en affirmant en l'espèce que l'activité des salariés défendeurs au pourvoi, consistant à vendre eux-mêmes à des particuliers, qu'ils démarchaient sur un secteur donné, des produits qu'ils transportaient, « répond aux conditions légales d'application du statut de VRP », la Cour d'Appel a violé les articles L. 7311-1 et suivant du Code du travail, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
2) ALORS QUE ne constitue pas une modification du contrat de travail, la simple réorganisation des modalités d'exécution des tâches confiées à un salarié ; qu'en l'espèce, il était constant que les salariés n'avaient pas vu modifiées leurs fonctions consistant à vendre sur un secteur donné des produits surgelés à des particuliers qu'ils devaient démarcher ; qu'il leur avait seulement été demandé de procéder désormais en deux temps : d'abord à une prospection téléphonique depuis les locaux de l'entreprise, ensuite à la vente et la livraison proprement dite ; qu'en affirmant néanmoins que cette évolution caractérisait une modification de leurs contrats de travail au prétexte que le démarchage, partagé avec des télévendeurs, devait se faire par téléphone depuis les locaux de l'entreprise à ses heures d'ouverture et non plus directement « sur le terrain » selon un planning organisé par les salariés eux-mêmes, la Cour d'Appel, qui n'a pas caractérisé une modification des contrats de travail litigieux, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil.
3) ALORS QUE l'aveu ne peut porter que sur un point de fait, et non de droit ; qu'en opposant à l'employeur d'avoir reconnu, dans le compte rendu d'une réunion du 10 mars 2005, que " compte tenu des nouvelles taches dues au changement de métiers (télévente et télélivraison), le contrat actuel ne correspond plus au statut de VRP ", la Cour d'appel a violé l'article 1354 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-68837;09-68838;09-68839;09-68840;09-68841;09-68842;09-68843;09-68844;09-68845;09-68846;09-68847
Date de la décision : 14/12/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 09 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 14 déc. 2010, pourvoi n°09-68837;09-68838;09-68839;09-68840;09-68841;09-68842;09-68843;09-68844;09-68845;09-68846;09-68847


Composition du Tribunal
Président : M. Gosselin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.68837
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