La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/12/2010 | FRANCE | N°09-16862

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 09 décembre 2010, 09-16862


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Dom 10 du désistement de son pourvoi en tant qu'il est dirigé contre la Caisse d'assurance mutuelle du bâtiment et des travaux publics, M. X..., pris en qualité de mandataire-liquidateur de la société Acteba, et les sociétés Socotec, XL insurance et Sade ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 11 juin 2009), que la société civile immobilière (SCI) Wega a entrepris d'importants travaux de transformation dans son immeuble ; que des désordres aff

ectant l'immeuble voisin, propriété de la SCI Dom 10 dénommée Théâtre de l'ate...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à la société Dom 10 du désistement de son pourvoi en tant qu'il est dirigé contre la Caisse d'assurance mutuelle du bâtiment et des travaux publics, M. X..., pris en qualité de mandataire-liquidateur de la société Acteba, et les sociétés Socotec, XL insurance et Sade ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nancy, 11 juin 2009), que la société civile immobilière (SCI) Wega a entrepris d'importants travaux de transformation dans son immeuble ; que des désordres affectant l'immeuble voisin, propriété de la SCI Dom 10 dénommée Théâtre de l'atelier, ont été constatés en 1998 ; que la SCI Wega ayant obtenu en référé d'un tribunal de grande instance une mesure d'instruction, les experts ont déterminé les désordres et leurs causes et ont estimé le coût des travaux de remise en état, en tenant compte notamment des travaux de démolition et de reconstruction ; que le maire de la commune a interdit l'accès des locaux par arrêté du 20 mai 1998, aux motifs qu'ils présentaient un danger immédiat pour la sécurité des personnes fréquentant le théâtre ; que la SCI Dom 10 a fait assigner la SCI Wega devant un tribunal de grande instance en indemnisation de son préjudice ; que celle-ci a appelé divers intervenants en garantie ;
Attendu que la SCI Dom 10 fait grief à l'arrêt de condamner la SCI Wega à lui payer seulement une somme de 50 000 euros au titre de la valeur vénale du bâtiment sinistré, et une somme de 37 197,56 euros au titre des frais de démolition et d'évacuation des gravats, et de rejeter partiellement sa demande d'indemnisation, alors, selon le moyen :
1°/ que tout jugement doit, à peine de nullité, être motivé ; que la cour d'appel, pour limiter l'indemnisation de la SCI Dom 10 à la valeur vénale et au coût de démolition du bâtiment, a retenu que la nouvelle destination théâtrale de l'immeuble en mauvais état était compromise, et qu'il était avéré que la bailleresse n'avait jamais eu l'intention réelle de pérenniser dans les lieux des activités culturelles ; qu'en se fondant sur de tels motifs, après avoir pourtant constaté l'utilisation effective des locaux comme théâtre depuis de nombreuses années avant le sinistre et la proposition de location par la ville de Nancy, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que la réparation intégrale d'un dommage causé à une chose n'est assurée que par le remboursement des frais de remise en état de la chose ou par le paiement d'une somme représentant la valeur de son remplacement ; que la cour d'appel, qui, pour limiter l'indemnisation de la SCI Dom 10 à la valeur vénale et au coût de démolition du bâtiment, a retenu que la nouvelle destination théâtrale de l'immeuble en mauvais état était compromise et qu'il était avéré que la bailleresse n'avait jamais eu l'intention réelle de pérenniser dans les lieux des activités culturelles, et, tout en constatant l'utilisation effective des locaux comme théâtre depuis de nombreuses années avant le sinistre et la proposition de location par la ville de Nancy, a violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que ce bâtiment ancien avait été édifié initialement pour servir d'atelier ; qu'il était certes avéré que depuis de nombreuses années avant la survenance du sinistre, les locaux avaient reçu une destination nouvelle, sous forme d'activités théâtrales, l'intérieur du bâtiment ayant été aménagé à cet effet, notamment par la création d'une scène, mais que les experts avaient constaté que le bâtiment n'avait jamais répondu aux normes applicables à un théâtre et se trouvait en mauvais état depuis des années par manque d'entretien, intérieur et extérieur ; que la commission de sécurité avait subordonné l'autorisation d'ouverture et la délivrance du certificat de conformité à la production d'un acte notarié, instituant un droit de passage sur un fonds voisin pour créer une issue de secours, qui n'avait jamais été dressé, l'autorisation précaire accordée par lettre par l'un des copropriétaires concernés n'étant pas de nature à répondre à la condition exigée ;
Que de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a pu déduire, sans se prononcer par des motifs hypothétiques ou contradictoires, que la nouvelle destination de l'ouvrage étant compromise indépendamment de la survenance du sinistre, dès lors que le propriétaire du bien n'avait jamais eu l'intention de rendre les lieux compatibles avec une activité théâtrale comportant l'accueil d'un public, l'indemnisation ne pouvait être opérée qu'en valeur vénale, et non en référence à la valeur de reconstruction d'un atelier ne correspondant à aucun usage que pourrait recevoir un tel ouvrage de façon effective dans l'intérêt de la SCI Dom 10 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Dom 10 aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette toutes les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Vincent et Ohl, avocat aux Conseils pour la société Dom 10.
En ce que l'arrêt infirmatif attaqué condamne la SCI WEGA à payer à la SCI DOM 10 une somme de 50 000 € au titre de la valeur vénale du bâtiment sinistré, et une somme de 37 197,56 € au titre des frais de démolition et d'évacuation des gravats, et rejette partiellement la demande d'indemnisation de la SCI DOM 10 ;
Aux motifs qu'il ressort sans équivoque et de façon concordante du rapport d'expertise du 28 avril 2000 et de celui du 16 décembre 2003 que les dommages dénoncés par la SCI DOM 10 sont le résultat des mouvements de terrain provoqués par les travaux qu'a fait entreprendre la SCI WEGA sur le fonds voisin de celui sur lequel est implanté le bâtiment sinistré ; qu'ainsi que l'avait déjà retenu le collège d'expertise, dans son rapport du 28 avril 2000, M. Y..., dans le rapport complémentaire, indique que les mouvements qui ont affecté le bâtiment en cause ont irrémédiablement compromis sa solidité, la fragilité et la déformation de ses éléments de structure, susceptibles de provoquer des effondrements, se manifestant par des chutes répétées de plaques du faux-plafond et par l'éclatement de certaines tuiles vitrées ainsi que par l'apparition d'importantes fissures , qu'il sera donc retenu, comme l'affirment les experts de manière concordante, que le bâtiment actuel, non réparable, devra être démoli ; mais que les rapports d'expertise font également ressortir que ce bâtiment ancien a été édifié initialement pour servir d'atelier à l'arrière du magasin sur rue, au n° 10 de la rue des Dominicains ; que les techniques constructives qui ont été mises en oeuvre correspondent à la destination initiale de l'ouvrage ; qu'il est certes avéré que depuis de nombreuses années avant la survenance du sinistre, les locaux ont reçu une destination nouvelle, sous forme d'activités théâtrales ; qu'à cet effet, l'intérieur du bâtiment avait été aménagé, notamment par la création d'une scène ; que cependant, ainsi que l'a relevé M. Y... dans son rapport du 16 décembre 2003, tout comme le sapiteur chargé de se prononcer sur la valeur vénale du bâtiment, la nouvelle destination de l'ouvrage était compromise, indépendamment de la survenance du sinistre, dès lors que suite à une réunion du 15 janvier 1997, la commission de sécurité avait subordonné l'autorisation d'ouverture et la délivrance du certificat de conformité à la production d'un acte notarié instituant un droit de passage sur un fonds voisin pour créer une issue de secours par le couloir du n° 12 de la rue des Dominicains ; qu'un tel acte n'a jamais été dressé, les copropriétaires concernés n'ayant d'ailleurs jamais été appelés à se prononcer en assemblée générale sur la perspective de constitution d'une servitude sur le couloir commun ; que l'autorisation précaire accordée par lettre par l'un des copropriétaires concernés n'était à l'évidence pas de nature à répondre à la condition exigée pour la condition exigée par la commission de sécurité ; que de plus, les experts ont constaté que le bâtiment n'avait jamais répondu aux normes applicables à un théâtre, et se trouvait en mauvais état depuis des années par manque d'entretien, intérieur et extérieur ; que dans ces conditions, et en dépit de la proposition de renouvellement de bail faite par la Ville de Nancy le 22 mai 1998, deux jours après la notification d'un arrêté d'interdiction d'occupation des locaux en cause, la poursuite à moyen et à long terme d'une activité théâtrale dans les locaux, fût-ce dans le cadre de simples répétitions sans accueil de public, n'est que purement hypothétique ; qu'étant devenue propriétaire des locaux le 13 juillet 1995, la SCI DOM 10 n'a jamais rien entrepris pour remédier à l'aspect d'abandon que présentaient les abords des locaux et leurs accès ; qu'il est avéré qu'elle n'avait jamais eu l'intention de pérenniser dans les lieux des activités culturelles ; que si la réparation du préjudice doit être intégrale, ce principe n'impose pas, dans le cas d'espèce de mettre à la charge de la SCI WEGA le coût de reconstruction du bâtiment à l'identique, dès lors qu'en définitive, la reconstruction d'un atelier ne correspondait à aucun usage que pourrait recevoir un tel ouvrage de façon effective, dans l'intérêt de la SCI DOM 10 ; que le préjudice de cette dernière sera donc réparé en premier lieu par référence à la valeur vénale du bâtiment sinistré ; qu'en considération des caractéristiques et de la situation de l'ouvrage en cause, les critiques articulées à l'encontre du travail du sapiteur, en la personne de M. Z..., critiques auxquelles M. Y... a d'ailleurs personnellement répondu, après avoir annexé les observations des parties à son rapport, sont infondées ; que la valeur vénale sera donc fixée à 50 000 euros ; que par contre, dès lors que la démolition est inévitable, la réparation intégrale du dommage impose de faire supporter à la SCI WEGA le coût de la démolition et de l'évacuation des gravats ; que l'évaluation qui a été faite de ces travaux par le collège d'experts le 28 avril 2000, s'élève à 244 000 F (37 197,56 €) ; que le montant en sera réactualisé à la date du présent arrêt. Par contre, la SCI DOM 10, qui n'établit pas qu'elle ne serait pas en droit de récupérer la taxe sur la valeur ajoutée, ne saurait prétendre à une indemnisation toutes taxes comprises ; qu'il est avéré qu'en dépit du mauvais état d'entretien des locaux, la Ville de Nancy, par lettre du 22 mai 1998, a proposé de les prendre à bail, à compter du 1er juin 1998, sous réserve de levée de l'arrêté d'interdiction d'occupation ; que la Ville de Nancy proposait un loyer de 4 000 F jusqu'au 31 décembre 1998, de 5 000 F du 1er janvier au 31 décembre 1999 et éventuellement de 6 000 F à compter du 1er janvier 2000 ; que la perte de chance, du fait du sinistre, de conclure le bail et de percevoir les loyers escomptés n'est certaine que jusqu'au 31 décembre 1999, car aucun élément ne démontre que la SCI DOM 10 ait eu le projet d'engager les travaux indispensables à la poursuite de l'affectation des lieux à des activités culturelles pour une période ultérieure à des conditions encore plus avantageuses pour la bailleresse ; que les loyers perdus s'élèvent à une somme de 88 000 F, soit 13 415,51 € ; que la chance perdue devant être estimée à 50 %, le préjudice s'élève à 6 797,75 €, si bien que le jugement sera confirmé de ce chef, dans les limites de la demande ;
1°/ Alors que tout jugement doit, à peine de nullité, être motivé ; que la Cour d'appel, pour limiter l'indemnisation de la SCI DOM 10 à la valeur vénale et au coût de démolition du bâtiment, a retenu que la nouvelle destination théâtrale de l'immeuble en mauvais état était compromise, et qu'il était avéré que la bailleresse n'avait jamais eu l'intention réelle de pérenniser dans les lieux des activités culturelles ; qu'en se fondant sur de tels motifs, après avoir pourtant constaté l'utilisation effective des locaux comme théâtre depuis de nombreuses années avant le sinistre, et la proposition de location par la Ville de Nancy, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ Alors que la réparation intégrale d'un dommage causé à une chose n'est assurée que par le remboursement des frais de remise en état de la chose ou par le paiement d'une somme représentant la valeur de son remplacement ; que la Cour d'appel qui, pour limiter l'indemnisation de la SCI DOM 10 à la valeur vénale et au coût de démolition du bâtiment, a retenu que la nouvelle destination théâtrale de l'immeuble en mauvais état était compromise, et qu'il était avéré que la bailleresse n'avait jamais eu l'intention réelle de pérenniser dans les lieux des activités culturelles, et tout en constatant l'utilisation effective des locaux comme théâtre depuis de nombreuses années avant le sinistre, et la proposition de location par la Ville de Nancy, a violé l'article 1382 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 09-16862
Date de la décision : 09/12/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nancy, 11 juin 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 09 déc. 2010, pourvoi n°09-16862


Composition du Tribunal
Président : M. Loriferne (président)
Avocat(s) : SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Vincent et Ohl

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.16862
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award