La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2010 | FRANCE | N°08-70273

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 08 décembre 2010, 08-70273


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par une note d'instruction générale 119 (NIG 119) du 7 septembre 1973, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) a institué un régime de cessation anticipée d'activité permettant à chaque agent ayant travaillé dans le cadre des services continus ou effectué des travaux pénibles de cesser leur activité professionnelle à partir de l'âge de cinquante ans tout en conservant la qualité de salarié et de percevoir jusqu'à l'âge de soixante

cinq ans ou du décès s'il est antérieur des émoluments au titre desquels il ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par une note d'instruction générale 119 (NIG 119) du 7 septembre 1973, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) a institué un régime de cessation anticipée d'activité permettant à chaque agent ayant travaillé dans le cadre des services continus ou effectué des travaux pénibles de cesser leur activité professionnelle à partir de l'âge de cinquante ans tout en conservant la qualité de salarié et de percevoir jusqu'à l'âge de soixante cinq ans ou du décès s'il est antérieur des émoluments au titre desquels il était cotisé tant au régime d'assurance vieillesse de la sécurité sociale qu'aux régimes de retraite complémentaire ; que la NIG 119 a été intégrée à l'accord collectif d'entreprise dénommé Convention de travail, dont elle constitue l'article 157 ; qu'à la suite de l'abaissement de l'âge de la retraite à soixante ans, le CEA a conclu le 18 avril 1988 un accord sur la mise à la retraite des agents âgés d'au moins soixante ans remplissant les conditions requises pour faire liquider leur pension de vieillesse à taux plein ; que cet accord a été étendu aux salariés relevant du régime de la NIG 119 par un accord du 19 décembre 1991 ; que M. X..., qui était employé par le CEA, a été admis le 1er avril 1990, à l'âge de cinquante sept ans, au régime de cessation anticipée d'activité et mis à la retraite le 1er août 1993, à l'âge de soixante ans ; qu'estimant que l'accord collectif du 19 décembre 1991 ne lui était pas applicable et que sa mise à la retraite n'aurait pas dû intervenir avant qu'il eût atteint l'âge de soixante cinq ans, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement des sommes qui auraient dû lui être versées jusqu'à cet âge et d'une indemnité au titre de la perte de droits à pensions de retraite ;

Sur le premier moyen :

Vu l'article 2277 ancien du code civil, alors applicable ;

Attendu que pour déclarer irrecevable comme prescrite la demande du salarié en paiement de dommages-intérêts au titre de la période comprise entre soixante et soixante cinq ans, l'arrêt retient que le montant des appointements de préretraite dépendait non d'une déclaration à faire par le débiteur mais d'informations à communiquer par les tiers que sont les organismes de retraite auxquels il est affilié ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la prescription prévue pour tout ce qui est payable par année ou à des termes périodiques plus courts ne s'applique pas lorsque la créance dépend d'éléments qui ne sont pas connus du créancier, la cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences de ses constatations, a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen :

Vu l'article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en indemnisation du préjudice subi en raison de la perte de droits à pensions de retraite à compter de son soixante cinquième anniversaire, l'arrêt retient qu'il résulte de la comparaison des sommes que celui-ci a perçues avec celles qu'il aurait perçues si ses droits avaient été liquidés à soixante cinq ans et non à soixante, que le total des majorations de la pension servie par l'UPS et de l'indemnité de mise à la retraite résultant de l'accord de 1991 excède la diminution des droits à pension du régime d'assurance vieillesse de la sécurité sociale et du régime de retraite complémentaire IRRAPRI ;

Qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à établir l'absence de préjudice de retraite du salarié, laquelle ne pouvait résulter de la comparaison sur une période réduite des sommes perçues en application de l'accord du 19 décembre 1991 et de celles qu'il aurait dû percevoir en exécution de la NIG 119, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 septembre 2008, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives à payer à M. X... la somme de 900~euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Spinosi, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable comme prescrite la demande en paiement de dommages et intérêts au titre de la période comprise entre soixante et soixante-cinq ans et des sommes qui n'auraient pas dû être déduites de la rémunération de préretraite ;

Aux motifs que « M. X... soutient que la prescription quinquennale n'est pas applicable s'agissant du calcul de l'indemnisation d'un préjudice non assimilable à un rappel de salaires ;

Il ajoute qu'en raison d'éléments nouveaux apparus au cours de l'expertise ordonnée par cette Cour dans des affaires concernant d'autres retraités, la prescription n'a pu courir qu'à partir du moment où ces éléments ont été portés à la connaissance des intéressés et qu'ainsi les rappels qui n'étaient avant ni certains ni déterminables ne peuvent être écartés par une prescription ;

Un tel argument ne saurait être retenu alors qu'il ressort des documents versés aux débats que les éléments dont il est fait état, à savoir fascicule sur les retraites anticipées portant en-tête du Commissariat à l'Energie Atomique en date de janvier 1986, contenu du document relatif à l'UPS et augmentation du taux de cotisation versé par le Commissariat à l'Energie Atomique à UPS, avaient été soumis à la Cour et discutés par les parties ;

Par ailleurs, les sommes versées aux intéressés en application de la note NIG susvisée étaient réglées mensuellement, soumises aux cotisations sociales ainsi qu'à l'impôt sur le revenu dans les mêmes conditions qu'un salaire ;

Durant la période concernée, les intéressés ont conservés leur qualité de salarié, leur retraite n'étant pas liquidée ;

Le fait qu'une dispense d'emploi sous forme de préretraite a été prévue pour compenser la pénibilité du travail ne saurait caractériser le caractère prétendu indemnitaire des sommes versées alors que ce critère de la pénibilité constituait uniquement une condition d'accessibilité au droit à la préretraite au bénéfice de certains salariés ;

Enfin, les modalités de calcul de la préretraite étaient connues par notification individuelle du créancier et le montant de celle-ci ne dépend pas d'une déclaration à faire par le débiteur mais d'informations fournies par un tiers, en l'occurrence les organismes de retraite auxquels le créancier était affilié ;

Dès lors, les sommes en cause s'analysent comme un revenu de remplacement ou substitut de salaire versé pendant la période dite de préretraite ;

En conséquence, l'action en paiement desdites sommes est soumise à la prescription quinquennale et M. X... est déclaré irrecevable en sa demande relative à la période antérieure au 10 mai 2000 ;

De même, sont prescrites les demandes en paiement de sommes qui, selon l'intéressé, n'auraient pas dû être déduites de la rémunération de préretraite, notamment la CSG, comme constituant des actions en paiement d'un rappel de salaire soumise à la prescription quinquennale » ;

Alors que si les salaires se prescrivent par cinq ans, cette prescription n'est pas opposable au créancier lorsque la créance, même périodique, dépend d'éléments qui ne sont pas connus de lui et qui, en particulier, doivent résulter de déclarations que le débiteur est tenu de faire ;

qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les modalités de calcul de la préretraite étaient connues par notification individuelle du créancier et que le montant de sa créance dépendait des informations fournies par un tiers, à savoir les organismes de retraite auxquels il était affilié, ce dont il résultait que la créance dépendait d'éléments non connus par le créancier ; qu'en décidant cependant que la prescription quinquennale était opposable à ce dernier, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 2277 du code civil et L.3245-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté l'exposant de sa demande en indemnisation du préjudice subi en raison de perte de points de retraite l'ayant privé d'une possibilité de prétendre à une pension plus importante et, en raison de l'absence de versement jusqu'à la fin de la préretraite, de l'indemnité pour perte de droit IRRAPRI ;

Aux motifs que « Selon M. X..., si le Commissariat à l'Energie Atomique avait respecté ses engagements, les salariés mis en retraite anticipée auraient acquis à l'âge de soixante cinq ans un plus grand nombre de points de retraite leur permettant de prétendre à une pension plus importante ;

Toutefois, la comparaison des sommes perçues par M. X... avec celles que celui-ci aurait perçues si sa retraite avait été liquidée à soixante cinq révèle que le total des excédants sur pensions de retraite UPS et d'indemnité de mise à la retraite dont il a bénéficié du fait de l'accord de 1991 est supérieur à celui de ses pertes sur pensions de retraite IRRAPRI et sécurité sociale, soit une somme de 26.481,68 euros au bénéfice de l'intéressé, étant précisé que :

- en application des dispositions des articles 155 et 157 de la convention du travail alors en vigueur la mise à la retraite intervient le premier jour du mois suivant le soixante cinquième anniversaire ;

- la société COPHOTRI, cabinet d'expertise comptable, qui a évalué le préjudice allégué de l'intéressé indique elle-même avoir calculé le nouveau salaire annuel moyen de base (SAMB) sur la base des coefficients de revalorisation de la sécurité sociale, méthode similaire à celle employée par le Commissariat à l'Energie Atomique ;

- s'agissant de la pension de retraite UPS, l'accord de 1991 a porté de 4 à 6 % le taux de majoration des cotisations ; toutefois M. X... ne peut se prévaloir de ce dernier taux alors que ledit accord ne lui était pas applicable ;

- les prélèvements CSG ne constituent pas une cotisation sociale mais une imposition et il ne résulte ni de la NIG 119 ni du document de janvier 1986 une obligation pour le Commissariat à l'Energie Atomique de prendre, de manière automatique, à sa charge les sommes en cause ;

Doit en découler le débouté de M. X... ;

Compte tenu de ce qui précède, M. X... est également débouté en sa demande de dommages et intérêts pour préjudice financier » ;

Alors que le CEA s'était engagé, aux termes de la note d'intérêt général 119 du 7 septembre 1973, intégrée à l'article à l'article 157 de la convention de travail du CEA, à verser au salarié mis en retraite anticipée des appointements de retraite anticipée jusqu'à l'âge de 65 ans ; que l'accord collectif du 19 décembre 1991, ayant abaissé l'âge de la retraite à 60 ans, n'est pas applicable aux salariés mis en préretraite avant cette date ; que la cour d'appel, qui n'a pas recherché si le CEA n'avait pas manqué à son obligation de verser des appointements de retraite anticipée au salarié mis en retraite anticipée avant le 19 décembre 1991 jusqu'à ses 65 ans, privant ainsi l'intéressé d'acquérir à l'âge de 65 ans un plus grand nombre de points de retraite lui permettant de prétendre à une pension plus importante, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles 1134 et 1147 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-70273
Date de la décision : 08/12/2010
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 08 déc. 2010, pourvoi n°08-70273


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:08.70273
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award