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30/11/2010 | FRANCE | N°09-67533

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 novembre 2010, 09-67533


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 mai 2009) que M. X..., engagé à compter du 1er octobre 1996 par la société Omnium de gestion et de financement (OGF), y occupait en dernier lieu les fonctions de directeur d'établissement ; qu'il a été convoqué le 21 juillet 2005 pour le 8 août 2005 en vue d'un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire ; qu'ayant refusé le 17 septembre 2005 la rétrogradation disciplinaire au poste de chef d'agence qui lui avait Ã

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 5 mai 2009) que M. X..., engagé à compter du 1er octobre 1996 par la société Omnium de gestion et de financement (OGF), y occupait en dernier lieu les fonctions de directeur d'établissement ; qu'il a été convoqué le 21 juillet 2005 pour le 8 août 2005 en vue d'un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire ; qu'ayant refusé le 17 septembre 2005 la rétrogradation disciplinaire au poste de chef d'agence qui lui avait été proposée le 31 août, il a été convoqué par courrier du 5 octobre 2005 à un nouvel entretien préalable, puis été licencié le 20 octobre 2005 pour faute grave ; que les parties ont ensuite signé le 10 novembre 2005 un protocole transactionnel en vertu duquel la société OGF renonçait à exercer des poursuites judiciaires, notamment pénales à l'encontre de M. X... et, tout en ne remettant pas en cause la qualification de faute grave donnée aux faits reprochés au salarié, acceptait de lui verser une indemnité transactionnelle, forfaitaire, globale et définitive d'un montant net de 16 183,44 euros, en contrepartie de quoi le salarié renonçait définitivement à toute instance et/ou action née ou à naître ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale le 2 octobre 2006 pour obtenir l'annulation de la transaction et le paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'annuler la transaction du 10 novembre 2005 et condamner l'employeur à verser au salarié diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, ainsi que d'indemnité conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce la cour d'appel a relevé d'office le moyen tiré de la prescription des faits sanctionnés par le licenciement ; qu'en statuant ainsi pour annuler la transaction conclue par les parties, sans les inviter à faire valoir leurs observations sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ que lorsque le salarié refuse une mesure de rétrogradation disciplinaire notifiée après un premier entretien préalable, l'employeur qui envisage de prononcer un licenciement au lieu et place de la sanction refusée doit convoquer l'intéressé à un nouvel entretien ; que dans ce cas, le délai de deux mois prévu par l'article L. 1332-4 du code du travail pour engager des poursuites disciplinaires s'est trouvé interrompu par le premier entretien préalable ayant précédé la proposition de la rétrogradation ; qu'il était constant en l'espèce que le salarié avait été convoqué, par courrier du 21 juillet 2005, à un premier entretien préalable devant se tenir le 8 août 2005, à la suite duquel lui avait été proposée une sanction de rétrogradation ; qu'en jugeant néanmoins prescrits les faits dont l'employeur avait eu connaissance le 1er juillet 2005, soit moins de deux mois avant l'engagement de la procédure disciplinaire, au motif inopérant que suite à son refus de la rétrogradation, le salarié n'avait été convoqué que le 5 octobre 2005, à un second entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement devant se tenir le 17 octobre suivant, la cour d'appel a violé l'article L. 1332-4 du code du travail ;
3°/ que constitue une concession suffisante l'allocation à un salarié licencié pour faute grave d'une somme correspondant à trois mois de salaires qui s'accompagne de la renonciation de l'employeur à engager des poursuites pénales à son encontre, lorsque la qualification de faute grave retenue par l'employeur pour des faits de détournement d'un chèque dont la matérialité a été reconnue par le salarié, le privait de toute indemnité ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil ;
Mais attendu que pour déterminer le caractère réel ou non des concessions contenues dans la transaction, le juge peut, sans heurter l'autorité de la chose jugée attachée à la transaction, restituer aux faits énoncés dans la lettre de licenciement leur véritable qualification ;
Et attendu qu'ayant relevé que l'interruption de la prescription de l'action disciplinaire par la première convocation du salarié à un entretien préalable avait fait courir un nouveau délai de prescription de deux mois, lequel était déjà expiré lorsque l'employeur avait convoqué l'intéressé à un nouvel entretien préalable, la cour d'appel qui, s'étant ainsi bornée à expliciter le moyen de prescription contenu dans les conclusions du salarié, n'était pas tenue de solliciter les observations des parties sur ce point, a pu déduire de ses constatations et énonciations qu'en l'absence de faute grave, l'employeur n'avait pas consenti de concession suffisante, de sorte que la transaction était nulle ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Omnium de gestion et de financement (OGF) aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la déboute de sa demande et la condamne à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille dix.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux conseils pour la société Omnium de gestion et de financement.
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé la transaction du 10 novembre 2005 et condamné la société OGF à verser à Monsieur X... 17370 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1737 euros à titre de congés payés afférents, 60216 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 80000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile
AUX MOTIFS QUE «A la suite de la découverte d'un détournement d'un chèque destiné au règlement de fournisseur de l'entreprise, la société OGF convoquait Monsieur X... à un entretien préalable fixé au 8 août 2005 ; par courrier en date du 31 août 2005 l'employeur proposait une rétrogradation disciplinaire à compter du 5 septembre 2005, rétrogradation du poste de directeur au poste de chef d'agence ; Monsieur X... refusant la rétrogradation, l'employeur après l'avoir convoqué à un nouvel entretien préalable fixé au 17 octobre 2005 le licenciait pour faute grave par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 20 octobre 2005»
ET QUE «- Sur la transaction Attendu que le salarié soutient à l'appui de sa demande en nullité que celle-ci est fondée d'un part par l'absence de concessions réciproques, d'autre part sur l'absence de motifs justifiant la faute grave et enfin en raison de son incapacité ;Attendu que selon l'article 2044 du code civil la transaction est un contrat par lequel les parties terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître ; qu'il est en outre admis que la validité de la transaction est soumise à l'existence de concessions réciproques ; que la transaction a entre les parties, par application de l'article 2052 du code civil l'autorité de la chose jugée en dernier ressort ;Attendu que l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte; qu'il en résulte que le juge ne peut, pour se prononcer sur la validité d'une transaction, rechercher, en se livrant à l'examen des preuves, si ces prétentions étaient justifiées, il peut néanmoins se fonder sur les faits invoqués lors de la signature de l'acte, indépendamment de la qualification juridique qui leur a été donnée ;Attendu en premier lieu qu'un simple certificat médical d'un médecin généraliste faisant état d'un état dépressif depuis des années n'est pas de nature à établir que le consentement du salarié a été vicié rendant la transaction nulle ;Attendu que le protocole fait état des concessions réciproques consenties par les parties comme suit : pour le salarié ne pas remettre en cause la qualification de faute grave donnée aux faits reprochés, ainsi qu'il en avait manifesté l'intention, et la société OGF de ne pas engager de poursuites judiciaires et notamment pénales par rapport aux faits ayant conduit au licenciement et le versement par cette dernière d'une indemnité d'un montant net de 16183.44 au salarié ;Attendu par ailleurs qu'il est établi et non contesté que ce n'est que le 5 octobre 2005 que l'employeur a initié la procédure de licenciement pour faute grave alors qu'il résulte de ses propres écrits qu'il a eu connaissance des faits reprochés au salarié dès le 1er juillet 2005 ; que si effectivement l'employeur qui se heurte au refus d'une rétrogradation peut prononcer une autre sanction y compris un licenciement pour faute grave aux lieu et place de la sanction refusée, encore faut-il que la procédure soit initiée dans le respect des délais du droit disciplinaire ce qui n'a pas été respecté dans le cas présent; que dès lors en octroyant au salarié une indemnité représentant seulement trois mois de salaire la transaction conclue doit être annulée pour absence de concessions réciproques ; que la décision déférée doit donc être confirmée sur ce point ;- Sur les conséquences :Attendu que la décision déférée doit être réformée en ce qu'elle a dit le licenciement du salarié fondé sur une cause réelle et sérieuse alors que les faits reprochés au salarié étaient prescrits lors de l'initialisation de la procédure de licenciement ;Attendu qu'en revanche il convient de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a alloué au salarié les sommes suivantes : • 17370 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, • 1737 € à titre de congés payés y afférents, • 60216 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, Attendu qu'eu égard à l'effectif du personnel de l'entreprise et compte tenu de l'âge (53) et de l'ancienneté du salarié (32) et des conséquences du licenciement à son égard telles qu'elles résultent des pièces produites et des débats, la cour est en mesure de lui allouer, la somme de 80.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que toutefois il échet de le condamner à rembourser à la société OGF la somme de 16183.44 € versée au titre de la transaction annulée dont au surplus aucune raison ne vient s'opposer à cette restitution ; que les intérêts sur cette somme ne sont dues qu'à compter du jugement déféré - Sur l'article 700 du code de procédure civile Attendu qu'il est équitable d'allouer à M. Gérard X... la somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ; qu'en revanche la société sera déboutée de sa demande présentée sur ce même fondement»
1. ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe du contradictoire; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations; qu'en l'espèce la Cour d'appel a relevé d'office le moyen tiré de la prescription des faits sanctionnés par le licenciement ; qu'en statuant ainsi pour annuler la transaction conclue par les parties, sans les inviter à faire valoir leurs observations sur ce moyen, la Cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile;
2. ALORS QUE lorsque le salarié refuse une mesure de rétrogradation disciplinaire notifiée après un premier entretien préalable, l'employeur qui envisage de prononcer un licenciement au lieu et place de la sanction refusée doit convoquer l'intéressé à un nouvel entretien ; que dans ce cas, le délai de deux mois prévu par l'article L1332-4 du code du travail pour engager des poursuites disciplinaires s'est trouvé interrompu par le premier entretien préalable ayant précédé la proposition de la rétrogradation ; qu'il était constant en l'espèce que le salarié avait été convoqué, par courrier du 21 juillet 2005, à un premier entretien préalable devant se tenir le 8 août 2005, à la suite duquel lui avait été proposée une sanction de rétrogradation ; qu'en jugeant néanmoins prescrits les faits dont l'employeur avait eu connaissance le 1er juillet 2005, soit moins de deux mois avant l'engagement de la procédure disciplinaire, au motif inopérant que suite à son refus de la rétrogradation, le salarié n'avait été convoqué que le 5 octobre 2005, à un second entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement devant se tenir le 17 octobre suivant, la Cour d'appel a violé l'article L1332-4 du code du travail.
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE «la demande de nullité de la transaction du 10 novembre 2005 instruite par Monsieur X... Gérard est parfaitement recevable ; Attendu que la condition de concessions réciproques est un principe primordial dans une transaction ; Attendu qu'en l'espèce, en allouant au salarié une somme représentant seulement trois mois de salaire, la condition de concessions réciproques n'est pas remplie»
ALORS QUE constitue une concession suffisante l'allocation à un salarié licencié pour faute grave d'une somme correspondant à trois mois de salaires qui s'accompagne de la renonciation de l'employeur à engager des poursuites pénales à son encontre, lorsque la qualification de faute grave retenue par l'employeur pour des faits de détournement d'un chèque dont la matérialité a été reconnue par le salarié, le privait de toute indemnité; qu'en affirmant le contraire, la Cour d'appel a violé l'article 2044 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-67533
Date de la décision : 30/11/2010
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 05 mai 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 nov. 2010, pourvoi n°09-67533


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.67533
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