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30/11/2010 | FRANCE | N°09-43080

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 30 novembre 2010, 09-43080


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X...a été engagée en avril 1994 par la société I et Co en qualité de secrétaire commerciale et a été licenciée pour motif économique le 18 janvier 2006 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu que s'il résulte de ce texte que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à

justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cep...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X...a été engagée en avril 1994 par la société I et Co en qualité de secrétaire commerciale et a été licenciée pour motif économique le 18 janvier 2006 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 3171-4 du code du travail ;
Attendu que s'il résulte de ce texte que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que toutefois celui-ci ne peut rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires au motif que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de sa demande ;
Attendu que pour rejeter la demande de Mme X...en rappel de salaire pour heures supplémentaires, l'arrêt retient que les attestations fournies par la salariée ne peuvent être sérieusement retenues, que l'envoi de télécopies en dehors des heures de travail ne prouve pas qu'elle ait agi sur instructions de l'employeur, qu'elle ne justifie d'aucune réclamation avant un courrier du 31 juillet 2004 où le sujet est abordé de façon lapidaire, qu'elle ne conteste pas que les bulletins de salaire étaient établis par un cabinet comptable extérieur sur ses indications, qu'une régularisation est intervenue à la suite d'une intervention de l'inspection du travail pour la période de mai à décembre 2004 alors qu'elle était seule au magasin 42 heures 50 par semaine ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la preuve des heures supplémentaires effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties, la cour d'appel, qui s'est fondée exclusivement sur l'insuffisance des preuves apportées par la salariée, a violé le texte susvisé ;
Sur les deuxième et troisième moyens :
Attendu que la cassation intervenue sur le premier moyen entraîne par voie de conséquence la cassation du chef de l'arrêt déboutant la salariée de sa demande au titre du travail dissimulé, fondée sur des heures supplémentaires non déclarées ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté les demandes en paiement d'heures supplémentaires et d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, l'arrêt rendu le 1er juillet 2009, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne la société I et Co aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société I et Co à payer à Mme X...la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente novembre deux mille dix.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par Me Blondel, avocat aux Conseils pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Colette Y... épouse X...de sa demande en paiement d'heures supplémentaires à l'encontre de la société SARL I et CO ;
AUX MOTIFS QUE la preuve des heures supplémentaires n'incombent spécialement à aucune des parties ; que Madame X...produit à l'appui de sa demande plusieurs attestations de personnes travaillant dans la galerie commerciale et d'employés ayant travaillé avec elle et des télécopies envoyées par elle dans le cadre de son activité avant l'heure d'embauché, pendant la pause déjeuner ou après l'heure de sa cessation d'activité ; qu'en ce qui concerne les attestations, elles indiquent toutes que Madame X...travaillait du lundi au samedi de 9 heures à 19 heures ainsi qu'à l'heure du déjeuner ; qu'aucun des témoins ne précise de façon circonstanciée les conditions dans lesquels il a pu constater cette amplitude horaire ni à quelle période et sur quelle période ; que la constatation par les témoins de la présence sans interruption de Madame X...du lundi au samedi sur une amplitude horaire de 9 heures à 19 heures laissent supposer que les témoins étaient eux-mêmes présents dans les mêmes conditions, ce qui ne saurait être sérieusement retenu ; que si Madame X...a pu occasionnellement envoyer des télécopies en dehors de ses heures de travail, elle ne justifie pas qu'elle ait agi sur instruction de l'employeur ; qu'enfin il est constant que prétendant avoir fait de nombreuses heures supplémentaires (690 heures en 2001, 562, 30 heures en 2002, 516, 30 heures en 2003 et 324, 25 heures en 2004) la salariée ne justifie d'aucune réclamation à ce titre avant le courrier qu'elle adressait à l'employeur le 31 juillet 2004 en réponse à celui d'avril 2004 aux termes duquel il lui était demandé de ne plus passer de commande d'affiches, période où le litige apparaît ; que le sujet y est abordé de façon pour le moins lapidaire, Madame X...se contentant d'écrire : " Enfin, vous me faites effectuer depuis de nombreuses années des heures supplémentaires qui ne sont jamais ni mentionnées dans les bulletins de salaire, ni payées. " ; que Madame X...ne conteste pas que les bulletins de salaire étaient établis par un cabinet comptable extérieur sur ses propres indications ; que suite à l'intervention de l'inspection du travail, il a été procédé à la régularisation des salaires pour la période de mai à décembre 2004, au regard de la nouvelle situation de Madame X..., seule au magasin sur une période de 42 heures 50 hebdomadaire ; qu'au vu de ces éléments et confirmant le jugement, il y a lieu de débouter Madame X...de sa demande de ce chef ;
ALORS QUE, D'UNE PART, s'il résulte de l'article L. 3171-4 du code du travail que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que toutefois celui-ci ne peut rejeter une demande en paiement d'heures supplémentaires aux motifs que les éléments produits par le salarié ne prouvent pas le bien-fondé de sa demande ; qu'en l'espèce », pour débouter Madame X...de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, la Cour considère en substance que les attestations et les télécopies produites par la salarié ne permettent pas d'établir l'accomplissement d'heures supplémentaires ; qu'en statuant ainsi, bien qu'il résulte de ses propres constatations que la salariée produisait des éléments de nature à étayer sa demande, la Cour fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié et partant viole le texte susvisé ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, en tout état de cause, pour débouter Madame X...de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, la Cour considère en substance que les attestations et les télécopies produites par la salarié ne permettent pas d'établir l'accomplissement d'heures supplémentaires ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher si l'employeur a fourni des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par la salariée, la Cour d'appel ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article L. 3171-4 du Code du travail, de plus fort violé ;
ET ALORS ENFIN QUE, et en toute hypothèse et pour les mêmes motifs ; pour débouter Madame X...de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, la Cour considère en substance que la salariée a attendu le mois de juillet 2004 pour formuler par écrit ses demandes de rappels de salaires et que ses bulletins de paie étaient établis sur la base des informations qu'elle fournissait au comptable ; qu'en se déterminant ainsi, par des motifs inopérants, la Cour ne justifie pas légalement sa décision au regard de l'article L. 3171-4 du Code du travail, derechef violé.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Colette Y... épouse X...de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé à l'encontre de la SARL 1 CO ;
AUX MOTIFS QUE cette demande est fondée d'une part sur la démonstration des heures supplémentaires effectuées et non payées et d'autre part sur la dissimulation volontaire de ces heures supplémentaires compensées par le biais d'une indemnité kilométrique versée mensuellement ; que la première branche du moyen ne saurait être retenue, faute par l'appelante d'avoir apporté la démonstration des heures supplémentaires prétendument effectuées ; que l'indemnisation de frais kilométriques fictifs n'est pas contestée et a donné lieu à une régularisation après contrôle de l'URSSAF ; Madame X...soutient que le paiement de ses frais avaient vocation à couvrir les heures supplémentaires effectuées, alors qu'en toute contradiction, elle prétend n'avoir jamais été rémunérée ; que l'employeur soutient que cette " pratique " a été utilisée à la demande de la salariée pour conserver le montant de son salaire malgré le déficit comptable patent du fonds de commerce ; qu'aucune des deux parties ne rapporte la preuve de ses allégations, mais qu'en tout état de cause il résulte de ce qui précède que la preuve des heures supplémentaires n'est pas rapportée et des pièces produites que la salariée, chaque mois établissait elle-même les fiches destinées au règlement de ces frais de manière tout à fait détaillée (nombre de kilomètres prétendument parcourus) ; que Madame X...d'une part n'a subi aucun préjudice, la situation ayant été régularisée et qu'elle a contribué intentionnellement à la pratique qu'elle dénonce ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ce chef de demande ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le premier moyen relatif aux heures supplémentaires entraînera par voie de conséquence du chef du dispositif qui rejette l'annulation de la demande au titre du travail dissimulé et ce, en application de l'article 624 du Code de Procédure Civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire au deuxième)
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Madame Colette Y... épouse X...de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé à l'encontre de la SARL I et CO ;
AUX MOTIFS QUE cette demande est fondée d'une part sur la démonstration des heures supplémentaires effectuées et non payées et d'autre part sur la dissimulation volontaire de ces heures supplémentaires compensées par le biais d'une indemnité kilométrique versée mensuellement ; que la première branche du moyen ne saurait être retenue, faute par l'appelante d'avoir apporté la démonstration des heures supplémentaires prétendument effectuées ; que l'indemnisation de frais kilométriques fictifs n'est pas contestée et a donné lieu à une régularisation après contrôle de l'URSSAF ; Madame X...soutient que le paiement de ses frais avaient vocation à couvrir les heures supplémentaires effectuées, alors qu'en toute contradiction, elle prétend n'avoir jamais été rémunérée ; que l'employeur soutient que cette " pratique " a été utilisée à la demande de la salariée pour conserver le montant de son salaire malgré le déficit comptable patent du fonds de commerce ; qu'aucune des deux parties ne rapporte la preuve de ses allégations, mais qu'en tout état de cause il résulte de ce qui précède que la preuve des heures supplémentaires n'est pas rapportée et des pièces produites que la salariée, chaque mois établissait elle-même les fiches destinées au règlement de ces frais de manière tout à fait détaillée (nombre de kilomètres prétendument parcourus) ; que Madame X...d'une part n'a subi aucun préjudice, la situation ayant été régularisée et qu'elle a contribué intentionnellement à la pratique qu'elle dénonce ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de ce chef de demande ;
ALORS QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, pour débouter la salariée de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, la Cour considère en substance que sa demande est fondée sur la dissimulation d'heures de travail sous forme d'indemnités kilométriques fictives et que la salariée, outre le fait qu'elle ferait preuve de contradiction, serait mal venue à dénoncer une pratique qu'elle aurait contribué à mettre en oeuvre ; qu'en statuant ainsi, cependant que Madame X...n'a jamais prétendu que ces heures supplémentaires lui avaient été payées sous forme d'indemnités kilométriques mais se bornait (concl. d'appel pages 12 et 13) à soutenir que le caractère intentionnel de la dissimulation des heures de travail pouvait être déduit des pratiques antérieures de son employeur consistant à payer une partie du salaire sous forme d'indemnités kilométriques, la Cour méconnaît les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 09-43080
Date de la décision : 30/11/2010
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 01 juillet 2009


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 30 nov. 2010, pourvoi n°09-43080


Composition du Tribunal
Président : M. Blatman (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2010:09.43080
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